13 février 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-20.361

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2019:C100258

Titres et sommaires

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE - Droit des étrangers - Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile - Article L. 611-1-1 - Interprétation jurisprudentielle constante - Droits de la défense - Principe de liberté individuelle - Déclaration préalable partielle de constitutionnalité - Caractère sérieux - Défaut - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Texte de la décision

CIV. 1



COUR DE CASSATION







JL





______________________



QUESTION PRIORITAIRE

de

CONSTITUTIONNALITÉ

______________________











Audience publique du 13 février 2019









NON-LIEU A RENVOI





Mme BATUT, président







Arrêt n° 258 F-P+B



Affaire n° D 18-20.361



Aide juridictionnelle totale en demande

au profit de M. L....

Admission du bureau d'aide juridictionnelle

près la Cour de cassation

en date du 15 mai 2018.











R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E



_________________________



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________





LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Statuant sur les questions prioritaires de constitutionnalité formulées par mémoire spécial reçu le 27 novembre 2018 et présenté par M. M... L..., domicilié chez M. X... B...[...],



à l'occasion du pourvoi formé par lui, contre l'ordonnance rendue le 2 décembre 2017 par le premier président de la cour d'appel de Paris, dans le litige l'opposant :





1°/ au préfet de police, domicilié [...] ,



2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, [...],



défendeurs à la cassation ;



Vu la communication faite au procureur général ;



LA COUR, en l'audience publique du 12 février 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, Mme Gargoullaud, conseiller référendaire rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, M. Sassoust, avocat général, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;



Sur le rapport de Mme Gargoullaud, conseiller référendaire, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. L..., l'avis de M. Sassoust, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Attendu que M. L..., dont l'identité et les titres de circulation et de séjour ont été vérifiés à l'occasion d'un contrôle ordonné sur le fondement de l'article 78-2 du code de procédure pénale, a été invité à suivre les fonctionnaires de police jusqu'au service où son placement en rétention lui a été notifié ; que le préfet a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la mesure ; qu'à l'occasion du pourvoi en cassation qu'il a formé, M. L... a, par mémoire distinct et motivé, présenté deux questions prioritaires de constitutionnalité :

"Les dispositions de l'article L. 611-1-1 du CESEDA résultant de la loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012, telles qu'interprétées par la jurisprudence, en ce qu'elles ne prévoient pas que l'étranger, invité par les services de police à les suivre pour recevoir la notification de ses droits, dans le cadre d'une procédure dite de « mise à disposition », hors de toute retenue administrative, doit être informé qu'il est libre de quitter à tout moment les locaux de la police, portent-elles atteinte aux droits de la défense, tels que garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ?

Les dispositions de l'article L. 611-1-1 du CESEDA résultant de la loi n° 2012-1560 du 31 décembre 2012, telles qu'interprétées par la jurisprudence, en ce qu'elles ne prévoient pas que l'étranger, invité par les services de police à les suivre pour recevoir la notification de ses droits, dans le cadre d'une procédure dite de « mise à disposition », hors de toute retenue administrative, doit être informé qu'il est libre de quitter à tout moment les locaux de la police, portent-elles atteinte à la liberté individuelle telle que garantie par l'article 66 de la Constitution ?" ;

Attendu que la disposition contestée est applicable au litige ;

Attendu que, si une partie de cette disposition a déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de la décision n° 2016-606/607 QPC rendue le 24 janvier 2017 par le Conseil constitutionnel, elle n'a pas été examinée par celui-ci au regard de la portée effective que lui conférerait l'interprétation jurisprudentielle invoquée par les questions, de sorte qu'à cet égard elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu, d'une part, que les questions, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, ne sont pas nouvelles ;

Et attendu, d'autre part, que les questions ne présentent pas un caractère sérieux en ce que, si l'article L. 551-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit qu'une personne peut être placée en rétention après son interpellation, ce qui suppose qu'aucune vérification de sa situation au regard de son droit de circuler ou de séjourner en France, au sens de l'article L. 611-1-1 du même code, ni aucune vérification d'identité, au sens de l'article 78-3 du code de procédure pénale, n'était nécessaire, le temps de mise à disposition pendant lequel elle se rend dans les locaux de la police n'est pas contraint lorsque le procès-verbal, qui fait foi jusqu'à preuve contraire, indique qu'elle accepte de suivre les fonctionnaires de police pour un examen de situation administrative préalable à la notification de la mesure de rétention ; que, dès lors, l'absence d'obligation d'informer l'étranger de son droit de quitter les locaux de la police, dans le second de ces textes, lequel ne s'applique pas à la situation de l'étranger mis à disposition pendant un laps de temps qui précède immédiatement la notification de la rétention, ne porte pas atteinte aux droits et libertés qu'il invoque ;

D'où il suit qu'il n'y a pas lieu de les renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille dix-neuf.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.