28 novembre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-23.769

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2019:C300990

Titres et sommaires

URBANISME - Logements - Changement d'affectation - Article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation - Local à usage d'habitation - Caractérisation - Conditions - Détermination

La caractérisation de la destination à l'habitation d'un local au sens de l'article L. 631-7, alinéa 3, du code de la construction et de l'habitation, ne peut résulter, à défaut de preuve de son affectation au 1er janvier 1970, de la preuve d'un tel usage au 23 janvier 2017

URBANISME - Affectation des immeubles - Local à usage d'habitation - Caractérisation - Conditions - Détermination

BAIL D'HABITATION - Bail soumis à la loi du 6 juillet 1989 - Changement d'affectation des locaux - Conditions - Détermination

Texte de la décision

CIV.3

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 novembre 2019




Rejet


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 990 FS-P+B+I

Pourvoi n° G 18-23.769





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la Ville de Paris, dont le siège est [...], représentée son maire en exercice,

contre l'arrêt rendu le 4 octobre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 2), dans le litige l'opposant à M. W... G..., domicilié [...],

défendeur à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R.431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 22 octobre 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Collomp, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, M. Parneix, Mmes Andrich, Dagneaux, Provost-Lopin, MM. Barbieri, Jessel, conseillers, Mme Corbel, M. Béghin, Mme Schmitt, conseillers référendaires, Mme Guilguet-Pauthe, avocat général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Collomp, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la Ville de Paris, de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de M. G..., l'avis de Mme Guilguet-Pauthe, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le second moyen, pris en sa première branche, qui est recevable comme étant de pur droit :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 octobre 2018), que la Ville de Paris a assigné en la forme des référés M. G..., propriétaire jusqu'au 23 janvier 2017 d'un appartement situé à Paris, en paiement d'une amende civile sur le fondement de l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation, pour avoir loué ce local de manière répétée sur de courtes durées à une clientèle de passage, en contravention avec les dispositions de l'article L. 631-7 du même code ;

Attendu que la Ville de Paris fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen, que le local doit être considéré comme étant à usage d'habitation, non seulement dans l'hypothèse où il était affecté à l'habitation le 1er janvier 1970, mais également dans l'hypothèse où, postérieurement à cette date, il a été affecté à l'usage d'habitation, sachant que dans cette hypothèse, il est considéré comme étant à usage d'habitation dès qu'il reçoit cette affectation ; qu'en décidant qu'une affection éventuelle à l'habitation postérieurement au 1er janvier 1970 était indifférente, les juges du fond ont violé l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation ;

Mais attendu que sont réputés à usage d'habitation les locaux affectés à cet usage au 1er janvier 1970 ; qu'ayant, par une appréciation de la portée des éléments de preuve soumis à son examen, retenu, souverainement, que l'affectation de ce bien à l'usage d'habitation au 1er janvier 1970, contestée par M. G..., n'était pas établie par la Ville de Paris et, à bon droit, que la preuve d'un usage d'habitation à la date du 23 janvier 2017 était inopérante, la cour d'appel en a exactement déduit que la Ville de Paris ne pouvait se prévaloir d'un changement d'usage illicite au sens du texte précité ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Ville de Paris aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Ville de Paris et la condamne à payer à M. G... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la Ville de Paris

PREMIER MOYEN DE CASSATION

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté la demande de la VILLE DE PARIS visant à faire constater l'existence d'une infraction tendant à l'application d'une peine d'amende, outre une injonction adressée au propriétaire d'avoir à réaffecter les lieux à l'habitation ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « au soutien de sa demande de sanction de M. G... au visa des textes précités, la Ville de Paris soutient que son bien en examen était affecté à l'usage d'habitation le 1er janvier 1970 et produit pour en justifier copies de fiches de révisions foncières soit une déclaration R (pièce 4), et une déclaration H2, ainsi qu'un document intitulé « appartement » au nom de M. G... et d'un relevé de propriété (pièce 7) ; que toutefois, la Ville de Paris ne s'explique pas sur ce qui permet de rattacher cette déclaration R au bien de M. G... en cause, se bornant à exposer, sans plus d'explication, qu'un seul des appartements du quatrième étage de l'immeuble « n'apparaît pas être affecté à un usage d'habitation et rien ne prouve qu'il s'agisse de celui en cause » alors même qu'elle supporte la charge de la preuve, même libre ; qu'en outre, les rubriques de la déclaration H2 relative à l'identification des bâtiment, étage, porte de l'immeuble litigieux et la date de la déclaration, ne sont pas renseignées ; qu'enfin cette déclaration H2 porte la mention, à la rubrique réservée à l'administration d'un lot n°8 tandis que figurent sur le relevé de propriété les numéros de lot 39 et 41 ; qu'enfin, la preuve d'un usage d'habitation postérieur au 1er janvier 1970, telle que celle qui résulte de l'attestation de vente de l'appartement de M. G... du 23 janvier 2017, est inopérante ; qu'en conséquence et à supposer même que la similitude des numéros d'identification de la déclaration H2 et du document intitulé « appartement », soit 0100401001, suffisent à établir qu'elle concerne bien celui en examen, l'affectation de ce bien à l'usage d'habitation au 1er janvier 1970, contestée, n'est pas établie par la Ville de Paris, qui n'est donc pas fondée à invoquer un changement d'usage illicite au sens des textes précités » ;

ALORS QUE, PREMIEREMENT, l'affectation d'un local à un usage d'habitation peut être établie par tout mode de preuve ; qu'au cas d'espèce, la déclaration H2, faite auprès de l'administration fiscale pour l'établissement des impôts fonciers, mentionnait sous une rubrique intitulée « consistance du logement », dans une sous-rubrique intitulée « pièces et annexes affectées exclusivement à l'habitation », qu'une salle à manger, deux chambres, une cuisine, une salle d'eau étaient affectés à un usage d'habitation et dans une sous rubrique intitulée « pièces et annexes à usage professionnel » qu'aucune pièce n'était affectée à un usage professionnel ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces éléments à l'effet de rechercher s'ils ne révélaient pas une affectation à usage d'habitation, à la date du 1er janvier 1970, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 631-7 du Code de la construction et de l'habitation ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, en annexe de cette même déclaration H2 figurait un document intitulé « relevé de propriété » établi par l'administration fiscale, visant les lots [...], appartenant à Monsieur G... et mentionnait sous une sous-rubrique Af (affectation) la lettre H (habitation) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces éléments, éventuellement rapprochés de ceux mentionnés à la première branche, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 631-7 du Code de la construction et de l'habitation.

SECOND MOYEN DE CASSATION

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a rejeté la demande de la VILLE DE PARIS visant à faire constater l'existence d'une infraction tendant à l'application d'une peine d'amende, outre une injonction adressée au propriétaire d'avoir à réaffecter les lieux à l'habitation ;

AUX MOTIFS PROPRES QU' « au soutien de sa demande de sanction de M. G... au visa des textes précités, la Ville de Paris soutient que son bien en examen était affecté à l'usage d'habitation le 1er janvier 1970 et produit pour en justifier copies de fiches de révisions foncières soit une déclaration R (pièce 4), et une déclaration H2, ainsi qu'un document intitulé « appartement » au nom de M. G... et d'un relevé de propriété (pièce 7) ; que toutefois, la Ville de Paris ne s'explique pas sur ce qui permet de rattacher cette déclaration R au bien de M. G... en cause, se bornant à exposer, sans plus d'explication, qu'un seul des appartements du quatrième étage de l'immeuble « n'apparaît pas être affecté à un usage d'habitation et rien ne prouve qu'il s'agisse de celui en cause » alors même qu'elle supporte la charge de la preuve, même libre ; qu'en outre, les rubriques de la déclaration H2 relative à l'identification des bâtiment, étage, porte de l'immeuble litigieux et la date de la déclaration, ne sont pas renseignées ; qu'enfin cette déclaration H2 porte la mention, à la rubrique réservée à l'administration d'un lot n°8 tandis que figurent sur le relevé de propriété les numéros de lot 39 et 41 ; qu'enfin, la preuve d'un usage d'habitation postérieur au 1er janvier 1970, telle que celle qui résulte de l'attestation de vente de l'appartement de M. G... du 23 janvier 2017, est inopérante ; qu'en conséquence et à supposer même que la similitude des numéros d'identification de la déclaration H2 et du document intitulé « appartement », soit 0100401001, suffisent à établir qu'elle concerne bien celui en examen, l'affectation de ce bien à l'usage d'habitation au 1er janvier 1970, contestée, n'est pas établie par la Ville de Paris, qui n'est donc pas fondée à invoquer un changement d'usage illicite au sens des textes précités » ;

ALORS QUE, PREMIÈREMENT, le local doit être considéré comme étant à usage d'habitation, non seulement dans l'hypothèse où il était affecté à l'habitation le 1er janvier 1970, mais également dans l'hypothèse où, postérieurement à cette date, il a été affecté à l'usage d'habitation, sachant que dans cette hypothèse, il est considéré comme étant à usage d'habitation dès qu'il reçoit cette affectation ; qu'en décidant qu'une affection éventuelle à l'habitation postérieurement au 1er janvier 1970 était indifférente, les juges du fond ont violé l'article L. 631-7 du Code de la construction et de l'habitation ;

ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, l'affectation d'un local à un usage d'habitation peut être établie par tout mode de preuve ; qu'au cas d'espèce, la déclaration H2, faite auprès de l'administration fiscale pour l'établissement des impôts fonciers, mentionnait sous une rubrique intitulée « consistance du logement », dans une sous-rubrique intitulée « pièces et annexes affectées exclusivement à l'habitation », qu'une salle à manger, deux chambres, une cuisine, une salle d'eau étaient affectés à un usage d'habitation et dans une sous rubrique intitulée « pièces et annexes à usage professionnel » qu'aucune pièce n'était affectée à un usage professionnel ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces éléments à l'effet de rechercher s'ils ne révélaient pas une affectation à usage d'habitation, à la date du 1er janvier 1970, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 631-7 du Code de la construction et de l'habitation ;

ALORS QUE, TROISIEMEMENT, en annexe de cette même déclaration H2 figurait un document intitulé « relevé de propriété » établi par l'administration fiscale, visant les lots [...], appartenant à Monsieur G... et mentionnait sous une sous-rubrique Af (affectation) la lettre H (habitation) ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces éléments, éventuellement rapprochés de ceux mentionnés à la première branche, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 631-7 du Code de la construction et de l'habitation.

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