26 février 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-23.977

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:SO00242

Texte de la décision

SOC.

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 février 2020




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 242 F-D

Pourvoi n° J 18-23.977


Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. G....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 18 octobre 2018.



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 FÉVRIER 2020

M. E... G..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° J 18-23.977 contre l'arrêt rendu le 13 octobre 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (9e chambre A), dans le litige l'opposant à l'Union Locale des syndicats CGT de Nice, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. G..., de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de l'Union Locale des syndicats CGT de Nice, après débats en l'audience publique du 22 janvier 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 octobre 2017), que M. G... a été engagé à compter du 15 mars 2007 par l'Union Locale CGT Nice en qualité d'agent d'accueil-défenseur syndical ; qu'en décembre 2008, il a été élu conseiller prud'homme ; qu'il a été licencié pour faute grave par courrier du 4 mars 2013, après autorisation de licenciement par l'inspecteur du travail du 20 février 2013 ; que suite au recours hiérarchique formé par le salarié à l'encontre de la décision de l'inspecteur du travail, le ministre du travail a, le 4 juillet 2013, annulé la décision d'autorisation ; que le tribunal administratif, par jugement du 19 juin 2015, a rejeté la requête en annulation de la décision du ministre et que ce jugement a été confirmé par la cour administrative d'appel par un arrêt du 6 octobre 2016 ; que le 10 février 2015 le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins notamment de paiement de primes et d'indemnités au titre de la violation de son statut protecteur et de la rupture de son contrat de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le second moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande d'indemnité consécutive à l'annulation de l'autorisation de licenciement alors, selon le moyen :

1°/ que l'annulation d'une décision d'autorisation de licenciement caractérise nécessairement le préjudice subi par le salarié au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois prévu par l'article L. 2422-4 du code du travail ; que, dès lors, en relevant que l'étendue du préjudice subi par l'exposant ne pouvait être déterminée avec exactitude, pour en déduire qu'il convient de débouter purement et simplement l'intéressé de sa demande indemnitaire à ce titre, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

2°/ que l'indemnité prévue par l'article L. 2422-4 du code du travail doit correspondre à la totalité du préjudice, tant matériel que moral, subi par le salarié pendant la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration ou l'expiration du délai de deux mois prévu par ce texte ; qu'en se bornant à énoncer que le salarié ne produit pas les éléments permettant d'évaluer les sommes perçues par l'intéressé pendant la période litigieuse, pour en déduire que l'intéressé n'établit pas la réalité de son préjudice, sans rechercher si, indépendamment du préjudice matériel constitué par une perte de revenu, le salarié n'avait pas subi, pendant la période litigieuse, un préjudice moral qu'il convenait d'indemniser, alors que l'exposant soutenait avoir été victime d'un licenciement brutal et vexatoire lui ayant causé un préjudice moral, de sorte qu'il appartenait notamment aux juges du fond, sur le fondement du texte susvisé, d'indemniser ce préjudice, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 2422-4 du code du travail ;

Mais attendu, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée quant à l'existence d'un préjudice moral, a constaté, d'une part, qu'entre le licenciement notifié le 4 mars 2013 et l'expiration du délai de deux mois suivant la notification le 8 juillet 2013 de la décision du ministre du travail, il ressort du propre décompte du salarié que celui-ci a perçu la somme correspondant à six mois et quatre jours de salaires et que, lors d'une précédente instance, le salarié avait produit un avis du Pôle emploi certifiant que par notification du 27 mars 2013, il avait été admis au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et qu'il avait bénéficié, au 31 mai 2015, de 771 allocations journalières, sans que le montant desdites allocations ne soit précisé, d'autre part, qu'en dépit de la demande qui lui avait été faite par l'employeur au cours de la première instance au fond et de l'injonction contenue dans les écritures d'appel de ce dernier, le salarié s'était abstenu de produire les éléments justificatifs des sommes par lui perçues au cours de la période couverte par l'indemnisation, en a exactement déduit qu'il appartenait au salarié de fournir à la juridiction les éléments propres à caractériser et à chiffrer son préjudice ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. G... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. G... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. G....

Premier moyen de cassation

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. G... de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;

Aux motifs que [le salarié] se prévaut en outre de l'irrégularité de la convocation à l'entretien préalable en ce qu'elle ne comportait pas l'adresse exacte des services de la mairie de Nice où la liste des conseillers du salarié est tenue à la disposition des salariés ; qu'il sollicite l'allocation de la somme de 1 867,92 € à ce titre ; mais attendu que l'allocation d'une indemnité suppose la démonstration tout à la fois d'une faute ou d'un manquement, d'un préjudice et d'un lien de causalité ; qu'en l'espèce, non seulement M. G... ne justifie pas du préjudice qui serait résulté pour lui de cette omission mais il est constant que ce dernier a néanmoins pu être assisté d'un conseiller du salarié au cours de l'entretien préalable, de sorte qu'il sera débouté de ce chef de demande, par information du jugement entrepris (arrêt, page 8) ;

Alors qu'il résulte de l'article L 1232-4 du code du travail que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner la faculté pour le salarié, lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, de se faire assister par un conseiller de son choix, inscrit sur une liste dressée par le représentant de l'Etat dans le département, et préciser l'adresse de l'inspection du travail et de la mairie où cette liste est tenue à la disposition des salariés ; que l'omission d'une de ces adresses constitue une irrégularité de procédure, cause nécessairement un préjudice au salarié, peu important que l'intéressé ait pu finalement pu être assisté d'un conseiller lors de l'entretien préalable et, en application de l'article L 1235-2 du même code, justifie l'allocation au salarié d'une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire ;
Qu'en énonçant, pour débouter l'exposant de sa demande indemnitaire à ce titre, que celui-ci ne justifie pas d'un préjudice et qu'il a pu être assisté d'un conseiller au cours de l'entretien préalable, tout en admettant implicitement que la convocation était irrégulière au regard des prescriptions de l'article L 1232-4 du code du travail, ce dont il résulte qu'un préjudice avait été causé au salarié et, partant, qu'une indemnité devait nécessairement lui être allouée de ce chef, la cour d'appel a violé l'article L 1232-4 du code du travail par fausse application, et l'article L 1235-2 du même code par refus d'application.

Second moyen de cassation

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. G... de sa demande d'indemnité consécutive à l'annulation de l'autorisation de licenciement ;

Aux motifs qu'il résulte de l'article L 2422-4 du code du travail que lorsque l'annulation ou le retrait de la décision d'autorisation de licenciement est devenue définitive, le salarié qui n'a pas demandé sa réintégration dans le délai prévu a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de la décision d'annulation du Ministre du travail sur recours hiérarchique ; que contrairement à ce que soutient le salarié, cette indemnité dès lors qu'elle répare les conséquences d'un licenciement qui fait suite à une autorisation ultérieurement annulée et non pas à un défaut d'autorisation, doit être appréciée compte tenu des sommes que l'intéressé a perçues au cours de la période litigieuse ; qu'en effet, il ne s'agit pas d'une indemnité forfaitaire équivalente aux salaires qui auraient été perçus mais d'une indemnité différentielle correspondant au seul préjudice réellement subi ; qu'en conséquence, les indemnités de chômage, les sommes perçues au titre d'une activité professionnelle ou d'une pension de retraite entre le jour du licenciement et le jour de la réintégration doivent être déduits ; qu'entre le licenciement notifié le 4 mars 2013 et l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de la décision du Ministre du travail du 8 juillet 2013, il ressort du propre décompte de M. G... que celui-ci aurait perçu la somme de 10 846,62 € au titre de salaire (1 768,47 € X 6 mois + 1 768,47 / 30 X 4 jours) ; qu'il ressort d'un arrêt de cette cour du 10 septembre 2015, rendu sur appel d'une ordonnance de référé du conseil de prud'hommes de Digne les Bains que M. G... a produit un avis du Pôle Emploi du 1er juin 2015 certifiant que par notification du 27 mars 2013, il avait été admis au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi et qu'il avait bénéficié, au 31 mai 2015, de 771 allocations journalières, sans que le montant desdites allocations ne soit précisé ; que la CGT prétend également que l'intéressé aurait fait liquider ses droits à la retraite et aurait bénéficié d'une pension à ce titre ; que pour autant, M. G... ne produit plus ce document dans le cadre de la présente instance mais persiste, en dépit de la demande qui lui a été faite par l'employeur au cours de la première instance au fond et de l'injonction contenue dans les écritures d'appel de ce dernier, à s'abstenir de produire tous éléments justificatifs des sommes par lui perçues au cours de la période couverte par l'indemnisation ; qu'il sera rappelé qu'il appartient aux parties de produire leurs moyens de preuve et plus particulièrement à celui qui prétend avoir subi un préjudice de fournir à la juridiction les éléments propres à le caractériser et le chiffrer, que celui qui s'abstient de produire un document ne peut reprocher au juge de ne pas lui avoir enjoint de le faire, ladite injonction étant aux termes de l'article 11 du code de procédure civile une simple faculté qui ne lui est ici pas demandée par l'employeur ; qu'en conséquence, faute pour lui d'établir son préjudice, M. G... sera débouté de sa demande d'indemnisation à ce titre (arrêt, pages 5 et 6) ;

1°/ Alors que l'annulation d'une décision d'autorisation de licenciement caractérise nécessairement le préjudice subi par le salarié au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois prévu par l'article L 2422-4 du code du travail ;
Que, dès lors, en relevant que l'étendue du préjudice subi par l'exposant ne pouvait être déterminée avec exactitude, pour en déduire qu'il convient de débouter purement et simplement l'intéressé de sa demande indemnitaire à ce titre, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

2°/ Alors que l'indemnité prévue par l'article L 2422-4 du code du travail doit correspondre à la totalité du préjudice, tant matériel que moral, subi par le salarié pendant la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration ou l'expiration du délai de deux mois prévu par ce texte ;
Qu'en se bornant à énoncer que le salarié ne produit pas les éléments permettant d'évaluer les sommes perçues par l'intéressé pendant la période litigieuse, pour en déduire que l'intéressé n'établit pas la réalité de son préjudice, sans rechercher si, indépendamment du préjudice matériel constitué par une perte de revenu, le salarié n'avait pas subi, pendant la période litigieuse, un préjudice moral qu'il convenait d'indemniser, alors que l'exposant soutenait avoir été victime d'un licenciement brutal et vexatoire lui ayant causé un préjudice moral, de sorte qu'il appartenait notamment aux juges du fond, sur le fondement du texte susvisé, d'indemniser ce préjudice, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 2422-4 du code du travail.

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