11 mars 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-23.642

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:SO00337

Texte de la décision

SOC.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 mars 2020




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 337 F-D


Pourvois n°
V 18-23.642
W 18-23.643
Y 18-23.645
Z 18-23.646
à B 18-23.648 JONCTION






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 MARS 2020

La société Les rapides du Littoral, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé les pourvois n° V 18-23.642, W 18-23.643, Y 18-23.645 et Z 18-23.646 à B 18-23.648 contre les arrêts rendus le 27 septembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (17e chambre B), dans les litiges l'opposant respectivement :

1°/ à M. Q... M..., domicilié [...] ,

2°/ à M. U... K..., domicilié [...] ,

3°/ à M. J... L..., domicilié [...] ,

4°/ à M. D... C..., domicilié [...] ,

5°/ à M. T... B..., domicilié [...] ,

6°/ à Mme V... N... S..., domiciliée [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse aux pourvois n° V 18-23.642, W 18-23.643, Z 18-23.646 à B 18-23.648, invoque, à l'appui de ses recours, les deux moyens communs de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi n° Y 18-23.645 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Les rapides du Littoral, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de MM. M..., K..., C..., B..., L... et de Mme S..., après débats en l'audience publique du 5 février 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de sa connexité, le pourvoi n° Y 18-23.645 est joint aux pourvois n° V 18-23.642, W 18-23.643 et Z 18-23.646 à B 18-23.648.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 27 septembre 2018), Mme S... et MM. M..., K..., L..., C... et B... ont été engagés par la société anonyme de droit monégasque Les rapides du Littoral, en qualité de conducteurs-receveurs, respectivement, les 3 janvier 2005, 21 et 28 août 2006, 20 juin 2006, 28 novembre 2006 et 25 septembre 2000. M. B... a été licencié par lettre du 8 octobre 2015. Revendiquant l'application de la loi française et de la convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes de nature salariale et indemnitaire.

Examen des moyens

Sur le premier moyen commun à l'ensemble des pourvois

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer aux salariés diverses sommes à titre de rappels d'heures supplémentaires, d'indemnités de repos compensateur, de primes d'ancienneté et de treizième mois, ainsi que de droits à congés payés afférents, alors :

« 1°/ qu'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, en estimant que, les parties ayant choisi la loi monégasque, les dispositions impératives de la loi française devaient néanmoins s'appliquer au contrat de travail liant les parties, quand le choix par les parties d'une loi autre que la loi française ne rend pas nécessairement applicables au contrat les dispositions impératives de la loi française, la cour d'appel a violé les articles 3 et 6 de la Convention de Rome ;

2°/ qu'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que la loi choisie par les parties était la loi monégasque et rappelé que ce choix ne pouvait toutefois pas priver le salarié de la protection que lui assuraient les dispositions auxquelles il ne pouvait être dérogé par accord en vertu de la loi applicable à défaut de choix, la cour d'appel a affirmé péremptoirement que les dispositions impératives de la loi française devaient donc s'appliquer au contrat de travail liant les parties ; qu'en faisant ainsi application des dispositions impératives de la loi française, sans chercher à caractériser en quoi ces dispositions auraient dû s'appliquer, à défaut de choix, au regard des critères posés par le paragraphe 2 de l'article 6 de la Convention de Rome, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3 et 6 de cette convention ;

3°/ qu'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection qui lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié, qui exerçait ses fonctions en dehors de tout établissement ou entreprise, travaillait tant en France qu'à Monaco, que la prise et la fin de service pouvaient s'effectuer au dépôt de Monaco, que le contrat de travail, qui avait été signé à Monaco, fixait le lieu de travail à l'adresse de la société à Monaco et à son dépôt de Menton, que la durée du travail effectif était égale à 169 heures par mois, que la caisse de retraite était l'AMRR, caisse monégasque, et que les clauses attributives de juridiction désignaient la juridiction monégasque ; qu'en faisant néanmoins application des dispositions impératives de la loi française, quand il ressortait de ses propres constatations que le salarié n'accomplissait pas habituellement son travail dans un même pays, que le contrat de travail présentait les liens les plus étroits avec la principauté de Monaco et qu'en tout état de cause, l'établissement qui avait embauché le salarié se trouvait à Monaco, de sorte qu'à défaut de choix des parties c'était tout de même la loi monégasque qui aurait été applicable, ce dont il s'évinçait que les dispositions impératives de la loi française ne pouvaient en tout état de cause être applicables, la cour d'appel a violé les articles 3 et 6 de la Convention de Rome. »




Réponse de la Cour

Vu les articles 3 et 6 de la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles ouverte à la signature à Rome le 19 juin 1980 :

4. En vertu du premier de ces textes, le contrat est régi par la loi choisie par les parties.

5. Selon le second, le choix de la loi applicable par les parties à un contrat de travail ne peut avoir pour effet de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui lui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 du même texte. Selon ce paragraphe, le contrat est régi, à défaut de choix des parties : a) par la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, ou b) si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, par la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable.

6. Pour condamner la société à payer aux salariés diverses sommes à titre de rappels d'heures supplémentaires, de repos compensateurs, de primes d'ancienneté et de treizième mois, ainsi que de droits à congés payés afférents, l'arrêt retient que la loi monégasque désignée par les parties ne peut priver les salariés de la protection que leur assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi applicable à défaut de choix et que les dispositions impératives plus favorables de la loi française doivent donc s'appliquer aux contrats de travail liant les parties.

7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si la France était le pays où ou à partir duquel les travailleurs accomplissaient habituellement leur travail et s'il ressortait de l'ensemble des circonstances qu'il existait un lien plus étroit entre leurs contrats de travail et un autre pays que celui d'accomplissement habituel du travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à ses décisions au regard des textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils condamnent la société anonyme Les rapides du Littoral à payer à Mme S... et MM. M..., K..., L..., C... et B... diverses sommes à titre de rappels d'heures supplémentaires, d'indemnités de repos compensateur, de primes d'ancienneté, de primes de treizième mois, ainsi que de droits à congés payés afférents, l'arrêt rendu le 27 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne Mme S... et MM. M..., K..., L..., C... et B... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens communs produits aux pourvois n° V 18-23.642, W 18-23.643, Z 18-23.646 à B 18-23.648, par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Les rapides du Littoral.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ces chefs, d'AVOIR condamné la société Les rapides du littoral à payer au salarié diverses sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents, de rappel d'indemnités de repos compensateur et congés payés y afférents, de rappel de prime d'ancienneté et congés payés y afférents, de rappel de prime de 13ème mois et congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, applicable au contrat de travail signé entre les parties, précise en son article 3 intitulé « Liberté de choix » que « 1 – Le contrat est régi par la loi choisie par les parties. Ce choix doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause. Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat
» ; que le contrat de travail signé à Monaco entre les parties le 28 novembre 2006 prévoit que le lieu de travail du salarié est fixé à l'adresse de la société, domiciliée allée des Boulingrins à Monaco, que le salaire de base mensuel s'élève à 7.745,38 F pour une durée de travail effectif égale à 169 heures par mois, que la Caisse de retraite est l'AMRR, qui est une caisse monégasque ; qu'il dispose que « les parties conviennent que tout litige relatif à l'interprétation, l'exécution ou la rupture du présent contrat sera portée devant le Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco » ; qu'il est constant que les lignes de bus exploitées par la SA Les rapides du littoral desservent des villes côtières entre Nice et Menton, via des arrêts sur Monaco ; que les plans de ligne n° 100, 101, 102, 110, 112 montrent que la société a en charge de relier les communes de Nice à Mention via Monaco, Nice à Beausoleil via Monaco, Roquebrune à Eze via Monaco ainsi que de relier l'aéroport de Nice à Menton via Monaco, avec plusieurs arrêts à Monaco (pièces 4-1 à 9) ; qu'au surplus, il ressort du planning produit en pièce 24 que la prise de service et la fin de service pouvaient s'effectuer au dépôt de Monaco ; qu'il est donc démontré que le salarié accomplissait son travail tant sur Monaco que sur le territoire français ; que les éléments produits au soutien de l'argumentation du salarié ne sont pas déterminants face à l'accomplissement de la prestation de travail au moins pour partie sur le territoire de la Principauté ; qu'il résulte ainsi, de façon certaine, tant des dispositions du contrat de travail que des circonstances de son application que les parties ont tacitement entendu se soumettre à la loi monégasque, peu important que la société anonyme monégasque Les rapides du littoral ait décidé de faire une application de la convention collective française des transports routiers et des activités auxiliaires du transport à défaut de toute autre convention collective applicable sur le territoire monégasque ; qu'il convient donc de juger que le contrat de travail liant le salarié à la société anonyme monégasque Les rapides du littoral était régi par la loi monégasque choisie par les parties ; que cependant, aux termes de l'article 6.1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, « dans le contrat de travail, le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 du présent article » ; qu'il en résulte que la loi monégasque désignée par les parties, ne peut priver le salarié de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi applicable à défaut de choix et que les dispositions impératives de la loi française doivent donc s'appliquer au contrat de travail liant les parties ;

1°) ALORS QU'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, en estimant que, les parties ayant choisi la loi monégasque, les dispositions impératives de la loi française devaient néanmoins s'appliquer au contrat de travail liant les parties, quand le choix par les parties d'une loi autre que la loi française ne rend pas nécessairement applicables au contrat les dispositions impératives de la loi française, la cour d'appel a violé les articles 3 et 6 de la Convention de Rome ;

2°) ALORS, en toute hypothèse, QU'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que la loi choisie par les parties était la loi monégasque et rappelé que ce choix ne pouvait toutefois pas priver le salarié de la protection que lui assuraient les dispositions auxquelles il ne pouvait être dérogé par accord en vertu de la loi applicable à défaut de choix, la cour d'appel a affirmé péremptoirement que les dispositions impératives de la loi française devaient donc s'appliquer au contrat de travail liant les parties ; qu'en faisant ainsi application des dispositions impératives de la loi française, sans chercher à caractériser en quoi ces dispositions auraient dû s'appliquer, à défaut de choix, au regard des critères posés par le paragraphe 2 de l'article 6 de la Convention de Rome, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3 et 6 de cette convention ;

3°) ALORS QU'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection qui lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié, qui exerçait ses fonctions en dehors de tout établissement ou entreprise, travaillait tant en France qu'à Monaco, que la prise et la fin de service pouvaient s'effectuer au dépôt de Monaco, que le contrat de travail, qui avait été signé à Monaco, fixait le lieu de travail à l'adresse de la société à Monaco et à son dépôt de Menton, que la durée du travail effectif était égale à 169 heures par mois, que la caisse de retraite était l'AMRR, caisse monégasque, et que les clauses attributives de juridiction désignaient la juridiction monégasque ; qu'en faisant néanmoins application des dispositions impératives de la loi française, quand il ressortait de ses propres constatations que le salarié n'accomplissait pas habituellement son travail dans un même pays, que le contrat de travail présentait les liens les plus étroits avec la principauté de Monaco et qu'en tout état de cause, l'établissement qui avait embauché le salarié se trouvait à Monaco, de sorte qu'à défaut de choix des parties c'était tout de même la loi monégasque qui aurait été applicable, ce dont il s'évinçait que les dispositions impératives de la loi française ne pouvaient en tout état de cause être applicables, la cour d'appel a violé les articles 3 et 6 de la Convention de Rome.



SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR condamné la société Les rapides du littoral à verser au salarié un rappel de prime d'ancienneté avec les congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE le salarié qui percevait une prime d'ancienneté correspondant à 12% de son salaire de base brut, réclame le paiement d'un rappel de sa prime d'ancienneté calculé sur le rappel de salaire alloué au titre de la majoration sur heures supplémentaires ; que cette demande est subséquente à la demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ; qu'en conséquence, il sera fait droit à la réclamation du salarié ;

ALORS QUE les indemnités de congés payés n'entrent pas dans l'assiette de la prime d'ancienneté lorsque cette dernière est calculée selon un pourcentage du salaire de base brut ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que le salarié avait droit à une prime d'ancienneté correspondant à « 12 % de son salaire de base brut », la cour d'appel a condamné l'employeur à verser un rappel de prime d'ancienneté équivalent à 12% du montant de la somme à laquelle elle avait condamné l'employeur « à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents » ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen de l'employeur qui faisait valoir que ne devait pas être intégrée dans l'assiette de la prime d'ancienneté l'indemnité de congés payés afférente au rappel de salaire dû au titre des heures supplémentaires, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Moyens produits au pourvoi n° Y 18-23.645 par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Les rapides du Littoral.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ces chefs, d'AVOIR condamné la société Les rapides du littoral à payer à M. L... diverses sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents, de rappel d'indemnités de repos compensateur et congés payés y afférents, de rappel de prime d'ancienneté et congés payés y afférents, de rappel de prime de 13ème mois et congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, applicable au contrat de travail signé entre les parties, précise en son article 3 intitulé « Liberté de choix » que « 1 – Le contrat est régi par la loi choisie par les parties. Ce choix doit être exprès ou résulter de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause. Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat
» ; que le contrat de travail signé à Monaco entre les parties le 20 septembre 2006 prévoit que le lieu de travail de M. L... est fixé à l'adresse de la société, à Monaco et à son dépôt de Nice, que la durée de travail effectif est égale à 169 heures par mois, que la Caisse de retraite est l'AMRR, qui est une caisse monégasque ; qu'il dispose que « les parties conviennent que tout litige relatif à l'interprétation, l'exécution ou la rupture du présent contrat sera portée devant le Tribunal du Travail de la Principauté de Monaco » ; qu'il est constant que les lignes de bus exploitées par la SA Les rapides du littoral desservent des villes côtières entre Nice et Menton, via des arrêts sur Monaco ; que les plans de ligne n° 100, 101, 102, 110, 112 montrent que la société a en charge de relier les communes de Nice à Mention via Monaco, Nice à Beausoleil via Monaco, Roquebrune à Eze via Monaco ainsi que de relier l'aéroport de Nice à Menton via Monaco, avec plusieurs arrêts à Monaco (pièces 4-1 à 9) ; qu'au surplus, il ressort du planning produit en pièce 24 que la prise de service et la fin de service pouvaient s'effectuer au dépôt de Monaco ; qu'il est donc démontré que le salarié accomplissait son travail tant sur Monaco que sur le territoire français ; que les éléments produits au soutien de l'argumentation du salarié ne sont pas déterminants face à l'accomplissement de la prestation de travail au moins pour partie sur le territoire de la Principauté ; qu'il résulte ainsi, de façon certaine, tant des dispositions du contrat de travail que des circonstances de son application que les parties ont tacitement entendu se soumettre à la loi monégasque, peu important que la société anonyme monégasque Les rapides du littoral ait décidé de faire une application de la convention collective française des transports routiers et des activités auxiliaires du transport à défaut de toute autre convention collective applicable sur le territoire monégasque ; qu'il convient donc de juger que le contrat de travail liant M. L... à la société anonyme monégasque Les rapides du littoral était régi par la loi monégasque choisie par les parties ; que cependant, aux termes de l'article 6.1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980, « dans le contrat de travail, le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 du présent article » ; qu'il en résulte que la loi monégasque désignée par les parties, ne peut priver le salarié de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi applicable à défaut de choix et que les dispositions impératives de la loi française doivent donc s'appliquer au contrat de travail liant les parties ;

1°) ALORS QU'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, en estimant que, les parties ayant choisi la loi monégasque, les dispositions impératives de la loi française devaient néanmoins s'appliquer au contrat de travail liant les parties, quand le choix par les parties d'une loi autre que la loi française ne rend pas nécessairement applicables au contrat les dispositions impératives de la loi française, la cour d'appel a violé les articles 3 et 6 de la Convention de Rome ;

2°) ALORS, en toute hypothèse, QU'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que la loi choisie par les parties était la loi monégasque et rappelé que ce choix ne pouvait toutefois pas priver le salarié de la protection que lui assuraient les dispositions auxquelles il ne pouvait être dérogé par accord en vertu de la loi applicable à défaut de choix, la cour d'appel a affirmé péremptoirement que les dispositions impératives de la loi française devaient donc s'appliquer au contrat de travail liant les parties ; qu'en faisant ainsi application des dispositions impératives de la loi française, sans chercher à caractériser en quoi ces dispositions auraient dû s'appliquer, à défaut de choix, au regard des critères posés par le paragraphe 2 de l'article 6 de la Convention de Rome, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3 et 6 de cette convention ;

3°) ALORS QU'il résulte de l'article 6 §1 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection qui lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable, à défaut de choix, en vertu du paragraphe 2 de cet article ; que selon ce paragraphe 2, la loi applicable à défaut de choix est soit la loi du pays où le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail, soit si le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi du pays où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur, à moins qu'il ne résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat de travail présente des liens plus étroits avec un autre pays, auquel cas la loi de cet autre pays est applicable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le salarié, qui exerçait ses fonctions en dehors de tout établissement ou entreprise, travaillait tant en France qu'à Monaco, que la prise et la fin de service pouvaient s'effectuer au dépôt de Monaco, que le contrat de travail, qui avait été signé à Monaco, fixait le lieu de travail à l'adresse de la société à Monaco et à son dépôt de Menton, que la durée du travail effectif était égale à 169 heures par mois, que la caisse de retraite était l'AMRR, caisse monégasque, et que les clauses attributives de juridiction désignaient la juridiction monégasque ; qu'en faisant néanmoins application des dispositions impératives de la loi française, quand il ressortait de ses propres constatations que le salarié n'accomplissait pas habituellement son travail dans un même pays, que le contrat de travail présentait les liens les plus étroits avec la principauté de Monaco et qu'en tout état de cause, l'établissement qui avait embauché le salarié se trouvait à Monaco, de sorte qu'à défaut de choix des parties c'était tout de même la loi monégasque qui aurait été applicable, ce dont il s'évinçait que les dispositions impératives de la loi française ne pouvaient en tout état de cause être applicables, la cour d'appel a violé les articles 3 et 6 de la Convention de Rome.

SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ces chefs, d'AVOIR condamné la société Les rapides du littoral à payer à M. L... diverses sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents, de rappel d'indemnités de repos compensateur et congés payés y afférents, de rappel de prime d'ancienneté et congés payés y afférents, de rappel de prime de 13ème mois et congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE sur le rappel d'heures supplémentaires dont l'indemnité de congés payés : que M. L... revendique l'application des dispositions impératives de la loi française en matière de durée du travail et de rémunération des heures supplémentaires ; qu'il sollicite en conséquence le paiement des majorations dues sur heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures hebdomadaires, ainsi que les congés payés afférents ; que la société anonyme monégasque Les rapides du littoral réplique que la durée légale du travail en France (35 heures hebdomadaires) n'est pas considérée comme une règle impérative au sens de la Convention de Rome, la loi française permettant elle-même une dérogation par accord collectif, d'une part, à la durée hebdomadaire de travail et, d'autre part, au montant de la majoration pour heures supplémentaires et que, dès lors, M. L... doit être débouté de sa demande de ce chef ; que le choix par les parties de la loi monégasque ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi française ; qu'il résulte des dispositions de l'article 3.3 de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que les dispositions impératives d'une loi sont celles auxquelles cette loi ne permet pas de déroger par contrat ; qu'alors que la loi monégasque prévoit une durée hebdomadaire de travail de 39 heures, sans paiement de majoration des heures effectuées entre la 36ème et la 39ème heure, la loi française fixe la durée légale de travail à 35 heures hebdomadaires ; que s'il peut être dérogé à cette durée de travail, des heures supplémentaires effectuées au-delà de la 35ème heure doivent cependant être rémunérées à un taux horaire majoré ; que ces dispositions impératives du droit français, qui protègent les salariés en matière de la rémunération des heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures hebdomadaires de travail, sont donc plus favorables que le droit monégasque ; qu'en conséquence, il sera fait droit à la réclamation du salarié en paiement des majorations sur heures supplémentaires exécutées au-delà de 35 heures hebdomadaires, selon le calcul détaillé qu'il présente dans ses écritures non utilement discuté ; sur le rappel d'indemnités de repos compensateur dont indemnité de congés payés : que cette demande est subséquente à la précédente ; que le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur en temps utile, a droit à l'indemnisation du préjudice subi ; que celle-ci comporte à la fois le montant de l'indemnité de repos compensateur et le montant de l'indemnité de congés payés afférents ; qu'en conséquence, il sera fait droit à la réclamation du salarié ; sur le rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté : que M. L... qui percevait une prime d'ancienneté correspondant à 12% de son salaire de base brut, réclame le paiement d'un rappel de sa prime d'ancienneté calculé sur le rappel de salaire alloué au titre de la majoration sur heures supplémentaires ; que cette demande est subséquente à la demande en paiement d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ; qu'en conséquence, il sera fait droit à la réclamation du salarié ; sur le rappel de prime de 13ème mois : qu'en l'état du rappel de prime d'ancienneté alloué ci-dessus, M. L... réclame le paiement d'un rappel de prime de 13ème mois selon le calcul détaillé et exact présenté dans ses écritures et non utilement discuté par l'employeur ; qu'il convient de faire droit à sa réclamation ;

ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que le salarié ne pouvait en tout état de cause, au regard des règles régissant la prescription, solliciter de rappel de salaire pour la période antérieure au 6 mars 2009, puisqu'il avait saisi le conseil de prud'hommes le 6 mars 2014 et non le 28 janvier 2014 comme il le prétendait (conclusions p. 40) ; qu'en faisant droit à l'intégralité des demandes de rappel de salaires et d'indemnités subséquentes formées par le salarié, sans répondre au moyen de l'employeur selon lequel une partie de ces demandes était prescrite, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

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