11 mars 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-16.454

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:SO00332

Texte de la décision

SOC.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 11 mars 2020




Rejet


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 332 F-D

Pourvoi n° H 18-16.454




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 11 MARS 2020

Le syndicat Pour la Défense des Postiers, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° H 18-16.454 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 1), dans le litige l'opposant à la société La Poste, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La société La Poste a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat du syndicat Pour la Défense des Postiers, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société La Poste, après débats en l'audience publique du 5 février 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Joly, conseiller référendaire rapporteur, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 avril 2018), statuant en référé, que le syndicat pour la Défense des Postiers (le syndicat) a été créé le 13 mai 2015, ce dont la société La Poste (La Poste) a été informée par lettres des 29 et 30 mai 2015 ; que par acte du 5 décembre 2016, le syndicat a fait assigner La Poste devant le juge des référés du tribunal de grande instance aux fins d'obtenir sa condamnation à la mise en place de l'aide à l'acheminement des correspondances pour les années 2015, 2016 et 2017 sous astreinte et l'octroi de journées d'absence syndicale ;

Sur le pourvoi incident, qui est préalable :

Attendu que La Poste fait grief à l'arrêt de rejeter l'exception d'incompétence au profit des juridictions de l'ordre administratif, alors, selon le moyen, que la contestation portant sur la légalité et la mise en oeuvre d'un accord collectif du 4 décembre 1998 gouvernant l'exercice du droit syndical, conclu à La Poste non en application de l'article L. 2233-1 du code du travail, mais de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, et du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 réglant le droit syndical dans la fonction publique, destiné à s'appliquer tant aux agents publics qu'aux personnels de droit privé, relève de la compétence des juridictions administratives ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 33 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16 et 24 août 1790 et le décret du 16 fructidor An III ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel n'était pas saisie d'une contestation de la légalité de l'accord collectif du 4 décembre 1998 et, d'autre part, que la cour d'appel a exactement retenu que les décisions par lesquelles La Poste attribue aux organisations syndicales l'aide à l'acheminement des correspondances du siège des organisations syndicales et des autorisations d'absence ne relèvent pas de l'organisation du service public ;

D'où il suit que la juridiction judiciaire est compétente pour statuer sur les demandes du syndicat ;



Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que le syndicat fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes au titre de l'aide à l'acheminement des correspondances et de l'allocation d'une provision en réparation de son préjudice moral, alors, selon le moyen, que le juge ne peut refuser de statuer, en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'il suit de là qu'en rejetant les demandes du syndicat au titre de l'aide à l'acheminement des correspondances, dont elle admettait pourtant le bien-fondé en son principe, en se fondant sur l'insuffisance des preuves apportées par le syndicat quant aux modalités pratiques de l'exercice de ce droit, en particulier les modalités de calcul du nombre d'enveloppes devant lui être alloué, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil ;

Mais attendu que c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, qui a constaté que le syndicat n'apportait pas les éléments de preuve suffisants concernant le calcul qui devait être retenu pour prononcer une condamnation à l'encontre de La Poste, a rejeté ses demandes ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen du pourvoi principal ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mars deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour le syndicat Pour la Défense des Postiers.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté le SDP de ses demandes au titre de l'aide à l'acheminement des correspondances et de l'allocation d'une provision en réparation de son préjudice moral ;

AUX MOTIFS QUE Sur le bien-fondé de la demande du Syndicat pour la défense des postiers relative à l'aide à l'acheminement en application de l'article 808 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de grande instance peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ; qu'en application de l'article 809, alinéa 1er, le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en l'espèce, la société La Poste soulève en premier lieu un moyen d'irrecevabilité tiré de l'absence de trouble manifestement illicite et de l'absence de demande du syndicat auprès de sa direction, préalable à l'assignation, de sorte que le syndicat ne peut pas se prévaloir d'un refus qui lui aurait été opposé sur les droits réclamés ; que la société fait ensuite valoir que le SDP ne remplit pas la condition d'ancienneté de deux ans requise par l'accord-cadre du 4 décembre 1998 pour bénéficier de l'aide à l'acheminement ; qu'elle ajoute que cet accord a fait l'objet d'une abrogation par décision de son directeur général du 5 avril 2017 ; que le Syndicat pour la Défense des Postiers expose en réplique qu'il a présenté plusieurs demandes à la société qui a refusé de lui octroyer les enveloppes en franchise postale par lettre du 2 mai 2016 ; que ce refus constitue une entrave à l'exercice des droits syndicaux qui justifie l'intervention du juge des référés ; que le syndicat forme un appel incident sur le rejet de ses demandes portant sur les années 2015 et 2016 et sur l'absence de précision sur le nombre d'enveloppes qui devaient lui être remises par la société au motif que le premier juge ne s'est pas expliqué sur ce rejet ; qu'il s'oppose au moyen qui consiste à limiter ce droit aux seules organisations syndicales représentatives, estime qu'il a plus de deux ans d'ancienneté au jour où la cour statue, et ajoute que l'abrogation unilatérale de l'accord cadre du 4 décembre 1998 par la société a été jugée manifestement illicite par ordonnance du 3 novembre 2017 du juge des référés de Paris ; qu'en droit, le refus par l'employeur de mettre en oeuvre les droits syndicaux constitue un trouble manifestement illicite qui justifie la compétence du juge des référés et il résulte clairement du courrier du 2 mai 2016 de la directrice générale adjointe de la société, Mme X..., adressé à M. Y... secrétaire général du SDP, que l'aide à l'acheminement du courrier était refusé au syndicat au motif que cette aide était réservée aux seules organisations syndicales représentatives ; que la juridiction de référés est par suite compétente pour apprécier le bien-fondé des demandes du syndicat ; qu'il ressort de l'article 2 de l'accord-cadre du 4 décembre 1998 que l'ensemble des organisations syndicales se voient reconnaître les droits syndicaux énumérés par le code du travail (réunions, affichage, affichage et distribution de documents, collecte de cotisations, autorisations d'absence) auxquels s'ajoute un droit spécifique à l'entreprise, qui résulte du bénéfice d'une aide à l'acheminement des correspondances énoncé par l'article 2.A.4 ; que contrairement à ce qui est soutenu par La Poste, ce droit n'est pas réservé aux seules organisations syndicales représentatives puisqu'il est posé dans son principe à l'article 2 de l'accord-cadre, réaffirmé dans l'annexe A de l'accord, dans son article A.4, comme faisant partie des droits reconnus à l'ensemble des organisations syndicales, sans condition d'ancienneté sur la date de leur constitution ; que La Poste ne peut pas non plus se prévaloir de l'abrogation de l'accord-cadre par décision du 5 avril 2017 de son directeur général dès lors que cette décision vaut dénonciation d'un accord d'entreprise, soumise à des conditions de régularité, qui ont été considérées comme n'étant pas remplies par l'ordonnance du 3 novembre 2017 par le juge des référés de Paris, et qu'au surplus cette dénonciation ne pourrait produire ses effets qu'à l'expiration du délai de 15 mois de survie de l'accord, ce qui n'est pas le cas à la date où la cour statue ; que par suite, le syndicat est en droit de se prévaloir de l'accord-cadre du 4 décembre 1998 et de réclamer à la direction générale de La Poste le bénéfice de l'aide à l'acheminement de ses correspondances ; que s'agissant toutefois des modalités pratiques de l'exercice de ce droit, le premier juge a exactement relevé que les modalités de calcul du nombre d'enveloppes sont méconnues au vu des seules dispositions de l'accord-cadre qui énonce à l'article A.4 de l'annexe A que « cette aide est allouée sous forme d'un droit de tirage dans le cadre du dispositif actuel relatif aux enveloppes spécifiques » ; qu'il appartient au syndicat, dont la seule demande est de réclamer en référé un nombre déterminé d'enveloppes, d'apporter des éléments de preuve suffisants sur le calcul qui doit être retenu pour prononcer une condamnation à l'encontre de la société ; que le SDP produit deux tableaux relatifs au nombre d'enveloppes accordées au syndicat Sud pour les années 2015 et 2016, détaillés par département du territoire national, sans y ajouter aucun document permettant de comprendre l'origine du calcul de ces chiffres, de sorte ces deux seuls tableaux sont insuffisants pour prononcer une condamnation en référé, alors au surplus que la cour relève au vu des documents produits, que le nombre d'enveloppes dont a bénéficié ce syndicat (3.000 enveloppes sur l'ensemble du territoire) est très inférieur au nombre d'enveloppes réclamés par le syndicat SDP (260.000 enveloppes par an) ; que le SDP produit également une lettre du 1er décembre 2008 de la société adressée à la Fédération CFTC des Postes et Télécommunications, qui fait état d'un droit de tirage de 780.000 enveloppes de correspondance, mais cette pièce est insuffisamment détaillée et ne permet pas de comprendre l'étendue de ce droit quant aux années et aux secteurs d'activité et/ou géographique concernés ; que par suite le premier juge ne pouvait pas faire droit à la demande du syndicat en prononçant une condamnation de la société à remettre un nombre d'enveloppes qui restait indéterminé ; qu'au vu de ces éléments, les demandes présentées à ce titre par le SDP doivent être rejetées et l'ordonnance du 23 février 2017 sera réformée à ce titre ; (
) Sur la demande de provision d'une indemnité pour réparation du préjudice moral que les demandes du Syndicat pour la Défense des Postiers étant rejetées sur les deux plans, au titre de l'aide à l'acheminement et au titre des autorisations d'absence, aucun motif ne justifie l'octroi d'une indemnité provisionnelle sur préjudice ;

ALORS QUE le juge ne peut refuser de statuer, en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'il suit de là qu'en rejetant les demandes du SDP au titre de l'aide à l'acheminement des correspondances, dont elle admettait pourtant le bien-fondé en son principe, en se fondant sur l'insuffisance des preuves apportées par le syndicat quant aux modalités pratiques de l'exercice de ce droit, en particulier les modalités de calcul du nombre d'enveloppes devant lui être alloué, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté le SDP de ses demandes au titre des autorisations spéciales d'absence et de l'allocation d'une provision en réparation de son préjudice moral ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE Sur le bien-fondé de la demande relative aux autorisations spéciales d'absence le Syndicat pour la Défense des Postiers sollicite l'infirmation de l'ordonnance du 23 février 2017 en ce qu'elle a rejeté ses prétentions relatives au refus injustifié de La Poste d'octroyer à plusieurs salariés des journées d'absence, refus constitutif d'une entrave ; qu'il expose que la société n'a pas donné suite à plusieurs demandes d'autorisation d'absence, ou y a répondu tardivement, ou a invoqué à tort un motif tiré de la nécessité du service ; que la société La Poste soutient qu'elle ne s'est pas opposée à l'octroi des journées d'absence réclamées par le SDP ; qu'elle précise que sur les quatre journées d'absence visées par le syndicat pour la fin du mois de décembre 2016, deux concernaient des agents qui étaient en congés, les deux autres ayant été refusées en raison des nécessités de service liées à la période de A... ; que le juge des référés de Paris a fait droit à la thèse de l'employeur au constat des tableaux de service justifiant de l'absence pour congés des deux salariés concernés et pour les deux autres, de la justification des nécessités de service ayant motivé le refus d'autorisation ; que le syndicat ne produit aucune pièce contraire en appel qui pourrait justifier l'infirmation de l'ordonnance à ce titre, les conclusions qu'elle dépose reconnaissant en outre que pour un autre salarié M. O..., la demande a fait l'objet d'une acceptation, sans pièce justificative qui serait susceptible de montrer un éventuel retard dans la réponse d'autorisation d'absence ; qu'au vu de ces éléments, les demandes du SDP devaient être rejetées et l'ordonnance sera confirmée à ce titre ; Sur la demande de provision d'une indemnité pour réparation du préjudice moral que les demandes du Syndicat pour la Défense des Postiers étant rejetées sur les deux plans, au titre de l'aide à l'acheminement et au titre des autorisations d'absence, aucun motif ne justifie l'octroi d'une indemnité provisionnelle sur préjudice ;

AUX MOTIFS ADOPTES QUE Sur la demande de provision en application de l'article 809 alinéa 2, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier ; qu'au soutien de sa demande de provision, le SDP invoque l'attitude fautive de la société La Poste qui entrave son action syndicale en ne lui octroyant pas les moyens nécessaires ; qu'en réplique, la société La Poste fait valoir que la demande de provision n'est justifiée ni dans son principe, ni dans son quantum, qu'elle se conforme à la réglementation en vigueur et que le SDP bénéficie des avantages matériels et facilités statutaires auxquels il peut prétendre ; qu'il n'est pas contesté que des panneaux syndicaux ont été mis à la disposition du SDP ; qu'il ressort des développements qui précèdent qu'en n'octroyant pas au SDP l'aide à l'acheminement des correspondances à laquelle il peut prétendre, la société La Poste a porté atteinte aux droits du syndicat et partant commis une faute engageant sa responsabilité à son encontre ; que cependant dès lors que les modalités de calcul du droit de tirage sont inconnues et que la demande précise d'octroi d'un droit de tirage d'une enveloppe par agent a été formée pour la première fois par l'assignation du 05 décembre 2016, le préjudice allégué par le SDP à ce titre apparait sérieusement contestable ; que s'agissant des autorisations spéciales d'absence, aux termes de son acte introductif d'instance, le SDP sollicitait la condamnation de la société La Poste à lui octroyer les autorisations spéciales d'absence prévues à l'article 13 du décret du 28 mai 1982, autorisations sollicitées le 22 novembre 2016 afin que certains de ses membres puissent assister à son conseil syndical du 20 décembre 2016 ; que le SDP demande désormais qu'il lui soit donné acte que la société La Poste lui a octroyé les journées d'absence syndicale sollicitées dans son acte introductif d'instance à l'exception des agents T..., I... et U... ; qu'il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande de « donner acte » qui ne constitue pas une prétention au sens des dispositions de l'article 4 du code de procédure civile et n'est pas susceptible de conférer un droit à la partie qui la réclame ; qu'il convient en revanche d'examiner s'il est établi, avec l'évidence requise en référé, que par son traitement des demandes d'autorisation spéciale d'absence, la société La Poste a porté atteinte aux droits du SDP et s'il en est, le cas échéant, résulté un préjudice non sérieusement contestable pour le syndicat ; que l'article 13 du décret du 28 mai 1982 prévoit que « Des autorisations spéciales d'absence sont accordées, sous réserve des nécessités du service, aux représentants des organisations syndicales mentionnées aux 1° et 2°, qui sont mandatés pour assister aux congrès syndicaux ou aux réunions de leurs organismes directeurs, dont ils sont membres élus ou pour lesquels ils sont nommément désignés, conformément aux dispositions des statuts de l'organisation » ; qu'il ressort des pièces versées aux débats que les autorisations d'absence sollicitées le 22 novembre 2016 pour MM. Q... O... et P... Y... ont été accordées le 25 novembre 2016 pour le premier et le 28 novembre 2016 pour le second, soit avant l'introduction de la présente instance et dans des délais non critiquables ; que s'agissant de Mme B... T... et de M. G... I..., il n'est pas contesté que le 20 décembre 2016, il était prévu qu'ils soient en congés pour la première et en repos de cycle pour le second ; que pour ce qui concerne Mme U..., qui appartient comme Mme T... et M. I... au site de Feytat, le directeur de l'établissement atteste, dans le cadre de la présente procédure, qu'il n'a pas été possible de faire droit à la demande en raison des absences déjà prévues le 20 décembre 2016 et de la surcharge d'activité à cette période de l'année ; que le tableau de service produit aux débats justifie des différentes absences invoquées ; que le seul fait que la demande ait été présentée un mois avant la date de l'absence sollicitée ne permet pas de considérer que la société disposait du temps nécessaire pour s'organiser et qu'elle ne peut par conséquent invoquer les nécessités du service pour justifier le refus de l'autorisation d'absence ; que les nécessités du service sont également invoquées pour justifier du refus de la demande d'autorisation spéciale d'absence de M. F... E... et ce, sans contestation du SDP ; qu'au vu de ces éléments, l'obligation alléguée par le syndicat au titre d'une entrave à l'exercice du droit syndical résultant du traitement des demandes d'autorisation spéciales d'absence apparait sérieusement contestable ; que le SDC ne rapportant pas la preuve qui lui incombe du caractère non sérieusement contestable de la créance d'indemnisation qu'il allègue, il ne peut y avoir lieu à référé sur sa demande de provision ;

ALORS QU'il résulte de l'article 521 de l'accord-cadre du 4 décembre 1998 que des autorisations spéciales d'absence sont accordées, sous réserve des seules nécessités de service, aux représentants syndicaux et agents dûment mandatés pour participer aux réunions des instances statutaires et autres activités des organisations syndicales ; que les demandes d'autorisations spéciales d'absence, accompagnées de la convocation, doivent être déposées au moins 8 jours à l'avance auprès du chef de service ou du chef d'établissement ; que les agents concernés sont informés par écrit, à la réception de la demande et au plus tard 5 jours avant la date présumée, des raisons qui ne permettraient pas exceptionnellement d'accorder une autorisation spéciale d'absence ; qu'à défaut, l'autorisation est réputée accordée sous réserve du respect des dispositions ci-après ; qu'en déboutant le SDP de ses demandes au titre des autorisations spéciales d'absence, motifs pris de ce que La Poste a justifié, dans le cadre de l'instance prud'homale des motifs de refus des autorisations d'absence, lorsque le défaut de réponse formelle de La Poste, dans le délai imparti par l'accord-cadre précité, caractérise une entrave syndicale, constitutive d'un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 1er, du code de procédure civile, ensemble l'accord-cadre du 4 décembre 1998.
Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société La Poste.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté l'exception d'incompétence au profit des juridictions de l'ordre administratif soulevée par La Poste ;

AUX MOTIFS propres QUE "La société La Poste soutient que le litige relève de la compétence de la juridiction administrative au motif que les textes qui régissent l'exercice du droit syndical, à savoir la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et l'accord-cadre du 4 décembre 1998 dont le syndicat demande l'application, sont antérieurs à la loi de privatisation de la société de 2010 ;

QUE le Syndicat pour la défense des postiers s'oppose au moyen en faisant valoir que la juridiction administrative reste compétente uniquement pour les questions relatives aux droits et obligations des fonctionnaires et aux litiges relevant de l'organisation du service public, ce qui ne concerne pas sa demande ;

QU'il ressort en effet des explications et pièces produites par les parties qu'elles sont en désaccord sur l'application de l'accord-cadre du 4 décembre 1998 portant instruction du 26 janvier 1999 relative à l'exercice du droit syndical au sein de La Poste devenue société anonyme depuis le 1er mars 2010, instruction dont le Syndicat pour la défense des postiers demande à bénéficier au titre de l'annexe A qui définit les droits reconnus aux organisations syndicales ;

QUE la société La Poste qui se limite à invoquer l'antériorité de ces dispositions au regard de son statut de 2010, ne précise aucunement en quoi les demandes du Syndicat pour la défense des postiers poseraient une question relative à l'organisation d'un service public ou à l'application de la loi du 13 juillet 1983 régissant les droits des fonctionnaires, seuls litiges qui relèvent de la compétence de la juridiction administrative ;

QUE le premier juge a par suite exactement considéré que les décisions accordant ou refusant d'accorder à une organisation syndicale les droits et moyens définis par l'accord-cadre du 4 décembre 1998, ne participent pas de l'organisation du service public ;

QUE l'ordonnance du 23 février 2017 sera donc confirmée en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la Poste" ;

ET AUX MOTIFS adoptés QUE "la société La Poste soutient en substance que le code du travail ne s'applique pas à l'exercice du droit syndical en son sein lequel demeure régi par la loi du 10 juillet 1983 et le décret du 28 mai 1982 et que, partant, le présent litige, qui concerne l'application dudit décret est de ceux qu'il appartient à la juridiction administrative de connaître ;

QU'en réplique, le SDP fait valoir qu'il est constant que la société La Poste n'a pas la même organisation en termes d'institutions représentatives du personnel qu'une société classique ; que cependant la présente affaire ne concerne ni un problème de fonctionnement d'une institution représentative du personnel visée par le code du travail, ni le statut de droit public des fonctionnaires de la société mais l'exercice du droit syndical ; que les deux catégories de personnel employées par La Poste sont concernées et que dès lors le juge judiciaire est compétent ;

QUE la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-123 du 09 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales prévoit que la personne morale de droit public La Poste est transformée à compter du 1er mars 2010 en une personne morale de droit privé et qu'elle constitue avec ses filiales "un groupe public qui remplit des missions de service public et d'intérêt général et exerce d'autres activités dans des conditions qui sont définies par la présente loi et par les textes qui régissent chacun de ses domaines d'activité" (article 2) ;

QUE la société La Poste emploie des corps de fonctionnaires qui, selon l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 sont "régis par des statuts particuliers pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, qui comportent des dispositions spécifiques dans les conditions prévues aux alinéas ci-après, ainsi qu'à l'article 29-1" ;

QU'elle emploie également des agents contractuels sous le régime des conventions collectives ;

QUE l'article 31 de la loi du 2 juillet 1990 prévoit que " L'emploi des agents soumis au régime des conventions collectives n'a pas pour effet de rendre applicables à La Poste les dispositions du code du travail relatives aux comités d'entreprise, ni celles relatives aux délégués du personnel et aux délégués syndicaux. Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles les agents de La Poste sont représentés dans des instances de concertation chargées d'assurer l'expression collective de leurs intérêts, notamment en matière d'organisation des services, de conditions de travail et de formation professionnelle. Il précise en outre, en tenant compte de l'objectif d'harmoniser au sein de La Poste les institutions représentatives du personnel, les conditions dans lesquelles la représentation individuelle des agents de droit privé est assurée, et établit les règles de protection, au moins équivalentes à celles prévues par le code du travail pour les délégués du personnel, dont bénéficient leurs représentants" ;

QU'il résulte de ces textes qu'en absence de dispositions législatives spéciales contraires, le code du travail ne s'applique pas à l'exercice du droit syndical au sein de la société La Poste qui reste régi par le décret du 28 mai 1982 relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique ;

QUE l'application de ce décret n'emporte cependant pas nécessairement la compétence des juridictions de l'ordre administratif ;

QUE si, compte tenu du statut particulier de la société La Poste, tenant tant aux missions qu'elle exerce qu'aux catégories de personnel qu'elle emploie, certaines des décisions de ses organes dirigeants peuvent être soumises au contrôle des juridictions administratives, ce n'est que si ces décisions relèvent de l'organisation du service public, les juridictions judiciaires étant compétentes dans les autres cas ;

QUE les décisions accordant ou refusant d'accorder à une organisation syndicale les droits et moyens auxquels elle est en droit de prétendre sont des décisions individuelles ne participant pas de l'organisation du service public ;

QUE les juridictions de l'ordre judiciaire sont par conséquent compétentes pour trancher le présent litige et l'exception d'incompétence soulevée par La Poste sera rejetée" ;

ALORS QUE la contestation portant sur la légalité et la mise en oeuvre d'un accord collectif du 4 décembre 1998 gouvernant l'exercice du droit syndical, conclu à La Poste non en application de l'article L. 2233-1 du code du travail, mais de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990, de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, et du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 réglant le droit syndical dans la fonction publique, destiné à s'appliquer tant aux agents publics qu'aux personnels de droit privé, relève de la compétence des juridictions administratives ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 33 du code de procédure civile, ensemble la loi des 16 et 24 août 1790 et le décret du 16 fructidor An III.

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