"CSM - Réseau européen des Conseils de Justice Conférence des 24 et 25 septembre 2015"

24/09/2015

Intervention de Monsieur Jean-Claude Marin, Procureur général près la Cour de cassation, Président de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet à l'occasion des conférences du Réseau européen des Conseils de Justice

Monsieur le Président, Cher Lord Justice Vos,

Mesdames et Messieurs les membres des Conseils de Justice,

Mesdames et Messieurs les représentants de la Commission européenne,

Mesdames et Messieurs,

Dans la continuité des propos tenus par Monsieur le Premier Président, je me réjouis de vous accueillir ici à la Cour de cassation pour cette réunion de lancement.

En mes qualités de Procureur général près notre Cour suprême judiciaire et président de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l’égard des magistrats du parquet, cette rencontre est la seconde avec les membres du réseau européen des Conseils de Justice.

Votre très nombreuse assemblée témoigne du dynamisme de ce réseau et de l’importance sans cesse renouvelée des échanges ainsi organisés.

Cette première réunion de l’année est traditionnellement consacrée au lancement des groupes de travail qui vous occuperont jusque la prochaine assemblée générale qui se tiendra à Varsovie au mois de juin 2016.

Cette année encore, vous aurez à vous intéresser à des sujets essentiels pour le bon fonctionnement de l’institution judiciaire ; la qualité de la Justice, la place de la société civile dans la « gouvernance judiciaire » et le financement de l’autorité judiciaire.

Pour chacune de ces thématiques, vous aurez à vous interroger sur vos propres pratiques, à les questionner, à défendre certains aspects qui vous paraîtront essentiels et à identifier un langage commun.

C’est ce langage commun susceptible de représenter cette diversité, mais aussi de guider nos Conseils de Justice vers une amélioration de leurs pratiques nationales qui révèle toute l’importance de votre présence aujourd’hui.

Cette année, à l’issue de l’assemblée générale qui s’est tenue à La Haye, au mois de juin dernier, vous avez décidé de poursuivre les travaux initiés sur l’indépendance et la responsabilité des magistrats, en vous concentrant sur un enjeu fondamental : La qualité de la Justice.

Le groupe de travail consacré à cette thématique sera coordonné par Mme Nuria Diaz, membre du Conseil espagnol du pouvoir judiciaire et M. Alain Lacabarats, membre du CSM Français. Soyez certains que vos travaux intéresseront l’ensemble des membres de notre Conseil supérieur de la magistrature.

Car si le Conseil supérieur est composé de deux formations, l’une compétente à l’égard des magistrats du siège, l’autre à l’égard des magistrats du parquet, il n’existe qu’un seul Conseil supérieur pour toute la magistrature et tout sujet essentiel relatif au fonctionnement de l’institution judiciaire est débattu au sein de ce Conseil unique.

Votre réseau amènera ainsi nos Conseils de Justice, dont les missions en matière de nomination, de discipline laissent peu de temps disponible, à réfléchir à cette question pourtant éminemment liée à l’indépendance de l’autorité judiciaire.

Dans une dimension européenne, la qualité de la Justice s’appréhende essentiellement au regard du droit à un procès équitable garanti par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cette qualité s’apprécierait ainsi seulement par des garanties procédurales telles que l’accès à un tribunal, le respect des droits de la défense, la publicité des audiences, l’indépendance et l’impartialité du tribunal, ainsi qu’au droit à un recours effectif tel que défendu par l’article 13 de la Convention européenne.

Si cette définition très large semble faire consensus, son appréciation concrète est plus problématique.

Une certaine conception, s’appuyant sur les critères définis par la Convention européenne, a déduit de ces mêmes critères une exigence d’efficacité de la Justice. Cette approche doit amener les Conseils à s’interroger sur les modes d’évaluation de la qualité de la justice notamment par l’élaboration d’indicateurs pertinents susceptibles d’être mis en œuvre. Mais elle ne saurait être réduite à une dimension purement quantitative et statistique.

Cette dernière n’offrirait qu’une lecture partielle du fonctionnement du système judiciaire tant les facteurs concourant à son exercice sont multiples, qu’il s’agisse de la qualité des décisions juridictionnelles, des critères utilisés pour fixer les budgets judiciaires en intégrant les conditions d’accès à la Justice ou la mise en place de modes alternatifs de règlements des litiges.

Aussi, nous, les Conseils de Justice, devons-nous être parties prenantes à ce débat en nous interrogeant sur les moyens d’évaluer cette qualité, en nous interrogeant sur les conséquences de ces évaluations et notamment à leurs conséquences aux risques en matière de détermination des moyens financiers alloués aux juridictions et, enfin, en tentant de définir des bonnes pratiques communes.

Ce sont ces lignes directrices qui permettront aux Conseils de Justice de renforcer leur légitimité en intervenant sur de tels sujets trop souvent exclusivement confiés à des services gestionnaires, ministériels ou non.

Ce sont ces bonnes pratiques qui nous permettrons d’intervenir utilement et de défendre l’indépendance de l’autorité judiciaire à chacune des étapes de son fonctionnement.

Ces quelques développements démontrent l’utilité de vos travaux et l’importance que le Conseil supérieur de la magistrature français y attache.

Je vous souhaite des échanges de qualité et des débats fructueux, confiant dans votre capacité à nous enrichir et à renforcer le rôle des Conseils des Justice dans le fonctionnement de l’autorité judiciaire.

  • Relations institutionnelles
  • Discours

Par Jean-Claude Marin

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.