2 mai 2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 24-80.847

Chambre criminelle - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2024:CR00681

Texte de la décision

N° Y 24-80.847 F-B

N° 00681


AO3
2 MAI 2024


CASSATION


M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 2 MAI 2024



Le procureur général près la cour d'appel de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 7e section, en date du 21 décembre 2023, qui, dans la procédure suivie contre M. [H] [S] des chefs de viol, proxénétisme, aggravés, et complicité de menaces, a ordonné sa mise en liberté et l'a placé sous contrôle judiciaire.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de Mme Diop-Simon, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 mai 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Diop-Simon, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Oriol, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [H] [S], mis en examen des chefs susvisés, et placé en détention provisoire le 26 août 2021, a été mis en accusation par ordonnance du juge d'instruction, en date du 27 mars 2023, devant la cour criminelle départementale.

3. L'accusé a relevé appel de cette décision le 11 avril 2023.

4. Par arrêt du 4 juillet 2023, la chambre de l'instruction a déclaré cet appel irrecevable comme tardif.

5. Le 27 octobre 2023, le procureur de la République a saisi la chambre de l'instruction aux fins de prolongation exceptionnelle de la détention provisoire de M. [S].

Examen de la recevabilité du mémoire du procureur général


6. Le procureur général s'est pourvu en cassation contre l'arrêt attaqué, le 26 décembre 2023, et son mémoire est parvenu à la Cour de cassation, le 9 février 2024, dans le délai d'un mois de l'arrivée du dossier à cette juridiction.

7. Ce mémoire est donc recevable, au regard des dispositions de l'article 567-2 du code de procédure pénale, applicable aux mémoires déposés tant par le ministère public que par les autres demandeurs, à l'occasion d'un pourvoi formé en matière de détention provisoire.


Examen du moyen

Enoncé du moyen

8. Le moyen, pris de la violation des articles 181, alinéas 8 et 9, 186, 502, 503, 509 du code de procédure pénale, critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la mise en liberté de M. [S] aux motifs qu'il n'a pas comparu devant la cour criminelle départementale avant le 7 octobre 2023, et que la chambre de l'instruction n'a pas été saisie avant cette date d'une demande de prolongation exceptionnelle de la détention provisoire, alors que le délai de comparution devant la cour criminelle départementale ne peut commencer à courir qu'à compter de la décision définitive rendue à la suite de l'appel, même formé hors délai, contre l'ordonnance de mise en accusation.



Réponse de la Cour

Vu les articles 181, alinéas 8 et 9, et 181-1 du code de procédure pénale :

9. Selon ces textes, lorsque l'accusé est en détention provisoire, il doit être mis immédiatement en liberté si la cour criminelle départementale n'a pas commencé à examiner l'affaire au fond à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la date à laquelle l'ordonnance de mise en accusation est devenue définitive. Toutefois, si l'audience sur le fond ne peut se tenir avant l'expiration de ce délai, la chambre de l'instruction peut, à titre exceptionnel, par une décision mentionnant les raisons de fait et de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire, ordonner la prolongation de la détention pour une nouvelle durée de six mois. Si l'accusé n'a toujours pas été jugé à l'issue de cette nouvelle prolongation, il est remis immédiatement en liberté.

10. Pour ordonner la mise en liberté de M. [S] et son placement sous contrôle judiciaire, l'arrêt attaqué énonce que l'appel formé par celui-ci, le 11 avril 2023, contre l'ordonnance de mise en accusation, a été effectué après le 6 avril 2023 à 24 heures, date d'expiration du délai d'appel.

11. Les juges relèvent que, faute d'appel exercé dans le délai, l'ordonnance de mise en accusation est devenue définitive le 7 avril 2023, et que M. [S] devait comparaître devant la cour criminelle départementale avant le 7 octobre 2023.

12. Ils en concluent que, n'ayant pas été saisis d'une demande de prolongation exceptionnelle de la détention provisoire de l'accusé avant cette date, celui-ci est irrégulièrement détenu.

13. En prononçant ainsi, alors que le délai de comparution de six mois de l'accusé détenu devant la cour criminelle départementale n'a commencé à courir qu'à compter de la date à laquelle l'arrêt de la chambre de l'instruction du 4 juillet 2023, ayant déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance de mise en accusation, était devenu définitif, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés.

14. La cassation est par conséquent encourue.

Portée et conséquences de la cassation

15. La cassation de l'arrêt de la chambre de l'instruction a pour conséquence que le mandat de dépôt délivré le 30 août 2021, dont l'ordonnance de mise en accusation a maintenu les effets, reprend ses pleins et entiers effets.




PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 21 décembre 2023, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT que le mandat de dépôt délivré le 30 août 2021 reprend ses effets ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du deux mai deux mille vingt-quatre.

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