30 avril 2024
Cour d'appel de Bordeaux
RG n° 21/04571

1ère CHAMBRE CIVILE

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE BORDEAUX



1ère CHAMBRE CIVILE



--------------------------







ARRÊT DU : 30 AVRIL 2024



PP





N° RG 21/04571 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MINN









[T] [K]



c/



[A] [K]

G.A.E.C. DU GLANE

























Nature de la décision : AU FOND



JONCTION AVEC DOSSIER RG 21/05846



















Grosse délivrée le :



aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 01 juillet 2021 par le Tribunal Judiciaire d'ANGOULEME (RG : 13/01034) suivant deux déclarations d'appel du 04 août 2021 (RG 21/04571) et du 26 octobre 2021 (RG 21/05846)





APPELANT :



[T] [K]

né le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 6]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 2]



représenté par Maître Thomas BAZALGETTE de la SARL AHBL AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX





INTIMÉS :



[A] [K]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 6]

de nationalité Française,

demeurant [Adresse 4]



représenté par Maître Alexandre BIENVENU de la SELARL RAMURE AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX



G.A.E.C. DU GLANE (GROUPEMENT AGRICOLE D'EXPLOITATION EN COMMUN RECONNU DU GLANE) immatriculé au RCS d'Angoulême, agissant poursuites et diligences de son co-gérant Monsieur [A] [S] [K], né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 6], de nationalité française, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 7]



représenté par Maître Valérie JANOUEIX de la SCP BATS - LACOSTE - JANOUEIX, avocat au barreau de BORDEAUX





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 5 mars 2024 en audience publique, en double rapporteur, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Paule POIREL, Président, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries, et Monsieur Emmanuel BREARD, Conseiller,



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :



Président : Mme Paule POIREL

Conseiller : M. Emmanuel BREARD

Conseiller : M.Roland POTEE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier : Mme Véronique SAIGE





ARRÊT :



- contradictoire







- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.






* * *



EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE



M. [U] [K] et son épouse Mme [C] [K] ont eu deux fils, M. [T] [K] né en 1960 et M. [A] [K] né en 1967.



[U] [K] et son fils [T] [K] ont créé le 26 mars 1984 le Groupement Agricole d'Exploitation en Commun du Glane (ci-après dénommé Gaec du Glane), exploitation à vocation céréalière.



Le 1er octobre 1990, M. [U] [K] s'est retiré du Gaec du Glane pour prendre sa retraite, laissant sa femme, Mme [C] [K], prendre sa place au sein du groupement.



Le 1er mars 1993, dans une perspective de transmission familiale de l'exploitation, M. [A] [K] est devenu associé du Gaec du Glane, concomitamment au départ à la retraite de Mme [C] [K] qui lui a vendu ses parts.



Les deux frères, [A] et [T] [K] se sont ainsi retrouvés tous les deux associés du Gaec du Glane, chacun détenant 50 % des parts sociales du groupement et ayant la qualité de cogérant.



Par assignation du 25 avril 2013, M. [A] [K] a fait assigner son frère [T] [K] et le Gaec du Glane devant le tribunal de grande instance d'Angoulême, aux fins de voir, au visa de l'article 1844-7 alinéa 5 du code civil :

- ordonner la dissolution liquidation partage du Gaec du Glane ;

- nommer un administrateur judiciaire pris en qualité de liquidateur afin de procéder aux opérations de liquidations partage du Gaec du Glane, avec possibilité de nommer tous sachant nécessaires à ces opérations ;

- ordonner le paiement des coûts de justice et dépens à la charge du Gaec du Glane.



Parallèlement à cette procédure, [U] et [C] [K] avaient fait assigner devant la même juridiction leur fils [T] [K] et le Gaec du Glane afin d'obtenir le remboursement du compte 'dette parents' du Gaec à hauteur de 34 301,03 euros. Par jugement du 19 novembre 2015, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 28 février 2019, le tribunal de grande instance d'Angoulême a déclaré les époux [K] prescrits à agir en leur demande de remboursement de la somme de 25 916,33 euros et a condamné M. [T] [K] à verser la somme de 8384,70 euros à ses parents.



Dans le cadre de la présente procédure, par ordonnance du 1er décembre 2014, le juge de la mise en état a désigné un mandataire ad hoc avec pour mission de désigner un avocat pour représenter le Gaec du Glane.



Par jugement du 1er juillet 2021, le tribunal judiciaire d'Angoulême a :

- Prononcé la dissolution judiciaire du Gaec Du Glane dont le siège social est à [Adresse 7], inscrit au RCS d'Angoulême sous le n°329 666 077 ;

- désigné Maître [R] [D] de la Selarl [D] en qualité de liquidateur, [Adresse 5], en fixant sa mission ;

- dit que la rémunération du liquidateur sera prise en charge directement par le Gaec du Glane ;

- dit que le liquidateur devra accomplir les formalités légales de publicité de la liquidation ;



- débouté M. [T] [K] de ses demandes reconventionnelles (demande de retrait de son frère du Gaec et demande de révocation de son frère de la co-gérance) ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire ;

- condamné M. [T] [K] aux dépens.





M. [T] [K] a relevé appel de ce jugement par déclaration électronique en date du 4 août 2021, puis du 26 octobre 2021, en ce qu'il a :

- prononcé la dissolution judiciaire du Gaec Du Glane dont le siège social est à [Adresse 7], inscrit au RCS d'Angoulême sous le n°329 666 077 ;

- désigné Maître [R] [D] de la Selarl [D] en qualité de liquidateur, [Adresse 5], en fixant sa mission ;

- dit que la rémunération du liquidateur sera prise en charge directement par le Gaec Du Glane ;

- dit que le liquidateur devra accomplir les formalités légales de publicité de la liquidation ;

- débouté M. [T] [K] de ses demandes reconventionnelles (demande de retrait de son frère du Gaec et demande de révocation de son frère de la co-gérance) ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [T] [K] aux dépens.



Les deux procédures ont été jointes sous le n°RG 21/04571.



L'affaire a fait l'objet d'une médiation selon décision du 27 octobre 2021 et par ordonnance du 8 mars 2023, les parties n'étant pas parvenues à un accord, la fin de la mission du médiateur a été constatée.





M. [T] [K] dans ses dernières conclusions en date du 19 février 2024, demande à la cour de :

- déclarer l'appel de M. [T] [K] recevable et bien fondé ;

- prononcer la jonction des instances enrôlées sous les numéros RG 21/04571 et 21/05846 ;

Réformer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Angoulême le 1er juillet 2021 en ce qu'il a :

- prononcé la dissolution judiciaire du Gaec Du Glane dont le siège social est à [Adresse 7] inscrit au RCS d'Angoulême sous le n°329 666 077,

- désigné Maître [R] [D] de la Selarl [D] en qualité de liquidateur [Adresse 5] avec pour mission de :

* réaliser les opérations de liquidation du Gaec Du Glane et mener à bien les opérations sociales en cours, les instances judiciaires en cours impliquant la société, réaliser tous les éléments de l'actif social, payer le passif et répartir le solde en numéraire entre les associés en proportion de leurs droits respectifs,

* remplir toutes les formalités afférentes ou corrélatives à la dissolution de la société,

* continuer l'exploitation sociale jusqu'au jour de la réalisation de l'actif en entreprenant toutes opérations nécessaires au maintien de la valeur de réalisation des éléments d'actif comme de maintenir la valeur des éléments d'actif que les associés se proposent de partager entre eux,

* faire tous les actes d'administration, représenter la société dissoute vis à vis des tiers, délivrer et certifier tous comptes et documents sociaux de toute nature,

* céder ou résilier tous baux et locations, tous traités et marchés avec ou sans indemnité, résilier avec ou sans indemnité tous les contrats de travail,

* vendre de gré à gré ou aux enchères publiques, selon qu'il avisera, sans aucune formalité de justice, en bloc ou en détail, aux prix, charges et conditions qu'il jugera convenables, tous les biens et droits mobiliers ou immobiliers composant l'actif social,

* requérir toutes adjudications, en fixer la ou les dates, dresser tous les cahiers des charges ;

* établir toutes désignations et origines de propriété des biens à vendre,

* en tant que de besoin, faire tous dires, déclarations, réserves et additions, modifications et rectifications à tous les cahiers des charges et procès-verbaux d'enchères,

* accepter de tous adjudicataires ou de tous autre qu'il appartiendra toutes garanties mobilières ou immobilières offertes, pour assurer le paiement des prix ainsi que le transport de toutes indemnités d'assurances au cas d'incendie et autres,

* recevoir toutes sommes dues à la société, payer ce qu'elle peut devoir, négocier tous règlements par anticipation, accorder toute prorogation de délai,

* de toutes sommes et valeurs reçues ou payées, donner ou retirer toutes quittances et décharges,

* faire tous dépôts dans toutes les banques et établissements de crédit, effectuer tous retraits des mêmes établissements, réaliser toutes opérations de comptes-courants, souscrire, endosser, accepter, tirer et acquitter tous effets de commerce, chèques, virements, billets et mandats,

* souscrire, modifier, résilier toutes polices d'assurances contre incendie, les accidents, ou tous autres risques, aux conditions que le liquidateur jugera convenables, remplir toutes formalités qu'il y aura lieu à ces effets, recevoir toutes indemnités en cas de sinistre,

* produire à tous ordres et contributions dans lesquels la société pourrait être intéressée, faire tous dires et contredits, donner toutes les approbations et autorisations, retirer tous bordereaux de collocation et de distribution,

* en cas de redressement ou liquidation judiciaire ou de sauvegarde de débiteurs sociaux, prendre toutes mesures utiles dans l'intérêt de la société, adhérer à tous arrangements et règlements de toute nature ou les rejeter, recevoir tous dividendes,

* engager ou continuer toutes instances devant tous juges et tribunaux compétents,

* en cas de difficultés et à défaut de paiement, engager, exercer toutes poursuites et actions judiciaires, faire exécuter toutes décisions de justice par tous les moyens et voies de droit, y compris la saisie immobilière, consentir tout acquiescement,

* fixer tous délais aux associés pour retirer toutes sommes pouvant leur revenir, consigner toutes sommes non retirées dans les délais,

* aux effets ci-dessus, passer et signer tous actes, pièces, registres et procès-verbaux, constituer tous mandataires sociaux, faire toutes déclarations et affirmations, élire domicile et généralement faire pour la liquidation de la société tout ce qui sera utile et nécessaire sans aucune restriction ni réserve,

* appeler les associés à statuer sur les comptes du dernier exercice social commencé jusqu'au jour de la dissolution de la société et sur le quitus à donner,

* dire que les correspondances et la notification de tous actes et documents de la liquidation de la société devront être adressés à l'adresse du liquidateur ;

- dit que la rémunération du liquidateur sera prise en charge directement par le GAEC du Glane,

- dit que le liquidateur devra accomplir les formalités légales de publicité de la liquidation;

- débouté [T] [K] de ses demandes reconventionnelles (demande de retrait de son frère du GAEC et demande de révocation de son frère de la cogérance) ;

- dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné [T] [K] aux dépens.

En conséquence :

À titre principal,

- ordonner le retrait de M. [A] [K] du Gaec Du Glane dans les conditions de l'article 20 des statuts ;

- désigner tel professionnel compétent qu'il plaira afin qu'il soit procédé audit retrait dans les conditions prévues à l'article 20 des statuts ;

À titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la Cour rejetterait la demande de retrait de M. [A] [K],

- ordonner la révocation de M. [A] [K] de son mandat de cogérant pour cause légitime ;

En tout état de cause,

- débouter M. [A] [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et appels incidents, dont notamment la demande de dissolution judiciaire du Gaec Du Glane et la demande de révocation de M. [T] [K] de ses fonctions de gérant ;

- condamner M. [A] [K] à payer à M. [T] [K] la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.





M. [A] [K], dans ses dernières conclusions déposées le 13 février 2024, demande à la cour de :

A titre principal :

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a ordonné la dissolution et liquidation partage du Gaec du Glane et désigné un liquidateur amiable en la personne d'un mandataire judiciaire ;

Y ajoutant,

- désigner Maître [L] [Z], de la selarl Ekip, venant aux droits de la Selarl [D] en qualité de liquidateur amiable afin de procéder aux opérations de liquidations partage du Gaec du Glane, avec possibilité de nommer tous sachants nécessaires à ces opérations ;

A titre subsidiaire :

Réformer le jugement dont appel et ordonner la révocation de la co-gérance de M. [T] [K] pour cause légitime,

En tout état de cause :

- débouter M. [T] [K] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner M. [T] [K] à payer à M. [A] [K] une somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civil ainsi qu'aux entiers dépens.





Le Gaec du Glane, dans ses dernières conclusions déposées le 4 novembre 2022, demande à la cour de :

- lui donner acte de ce qu'il s'en remet à justice sur le bien-fondé de l'appel formé par M. [T] [K] du jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Angoulême en date du 1er juillet 2021,

- statuer ce que de droit sur les dépens.



L'affaire a été fixée à l'audience collégiale du 5 mars 2024.



L'instruction a été clôturée par ordonnance du 20 février 2024.






MOTIFS DE LA DÉCISION



Selon l'article 1844-7 du code civil la société prend fin par la dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d'un associé pour justes motifs, notamment en cas d'inexécution de ses obligations par un associé ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société.



La dissolution pour justes motifs correspond à la perte de l'affectio societatis qui se caractérise par la perte de la volonté de continuer à collaborer notamment lorsqu'un associé manque gravement à ses obligations ou en cas de grave mésintelligence.



Le tribunal a justement relevé que dans le cas d'un groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) la notion d'affectio sociatis y est particulièrement importante, la perte de celui-ci compromettant son fonctionnement.



La notion de paralysie vise ici le fonctionnement de la société, c'est à dire sa pérennité fonctionnelle, lorsqu'aucune décision ne pleut plus être prise dans l'intérêt du groupement, peu important que le groupement continue à dégager des bénéfices. Le risque de paralysie en cas de mésentente est d'autant plus important comme en l'espèce où le Gaec est constitué par deux associés égalitaires. En effet, tant l'unanimité qu'exceptionnellement la majorité des trois quarts pour l'approbation des comptes, prévues par les statuts, ne peuvent plus être atteintes paralysant toute prise de décision.



La mésentente entre [T] [K] et son frère, [A] [K], n'est ici pas contestable. Elle ressort à l'évidence de leurs écritures et de leur position procédurale respective, aucune tentative de conciliation n'ayant permis d'y mettre un terme. Leur mésentente sa caractérise également jusque dans la définition de la répartition des tâches entre les cogérants, sur laquelle ils ne sont pas d'accord. Elle a notamment conduit [T] [K] à solliciter la désignation d'un administrateur provisoire en référé pour conduire un procès opposant le Gaec à Mme [B] [K], ou encore le tribunal de grande instance d'Angoulême, courant 2022, pour voir ratifier par son frère des ventes pour le compte du Gaec.



Si la paralysie fonctionnelle du groupement est contestée par [T] à l'appui de sa demande de réformation du jugement qui en a ordonné la dissolution et la liquidation, force est pourtant de constater qu'il se prévaut de cette même paralysie pour l'imputer à son frère en concluant qu'elle 'ne paraît pas susceptible de rémission' et solliciter notamment le retrait du Gaec de l'associé demandeur, son frère [A].



En tout état de cause, le tribunal a justement observé que la mésintelligence entre les frères était telle que les parties sont en désaccord sur les procédures à mener pour ou contre le Gaec et qu'aucun investissement n'avait plus été entrepris dans son intérêt, ni aucun bilan approuvé depuis 10 ans, et il n'est pas allégué que les bilans auraient pu être approuvés depuis le jugement déféré, la situation n'apparaissant pas s'être résorbée.



[T] [K] fait valoir que le comportement de [A], étant seul à l'origine de la mésentente, ce dernier ne pourrait s'en prévaloir pour solliciter, du fait de cette même mésentente entre les associés et de la paralysie qu'elle engendre, la dissolution du Gaec, ce d'autant que l'article 20 des statuts prévoit une procédure de retrait de l'associé demandeur à la dissolution.



Cependant, si l'article 22 des statuts prévoit, que le Gaec est dissout - 3) par décision judiciaire, sur demande d'un ou plusieurs associés, les autres associés ont toutefois la possibilité de demander au tribunal le retrait du ou des demandeurs dans les conditions prévues à l'article 20 des statuts, ces dispositions ne s'appliquent textuellement qu'en cas de pluralité d'associés étant de fait inapplicables lorsque le Gaec ne comprend, comme en l'espèce, que deux associés, la forme sociale du groupement excluant la possibilité d'un associé unique, ce qui impliquerait ipso facto sa dissolution.



Dès lors, ni l'article 22 des statuts, ni l'article 20, ne sauraient en l'espèce faire échec au droit d'un associé de solliciter, pour juste motif, la dissolution du Gaec.



[T] [K] reproche à son frère notamment :

- de refuser des acquisitions utiles (pulvérisateur, semoir, pompe d'irrigation)

pour favoriser des acquisitions inutiles (tracteurs) en vue d'une séparation ultérieure,

- de refuser de l'associer aux décisions concernant les ventes à la coopérative Ocealia,

- de s'opposer aux actions en justice qu'il a entrepris dans l'intérêt du Gaec dans l'exercice du droit de préemption du groupement,

-d'avoir en 2011, en période de sécheresse favorisé un nouveau client du Gaec qui n'était autre que son beau frère pour lui livrer de la paille au détriment des clients habituels du Gaec, raison pour laquelle

-de refuser l'accès du Gaec à des terres sur lesquelles il est titulaire d'un bail qui abritent des hangars servant d'entrepôt pour le matériel agricole du Gaec, terres qui sont la propriété des parents et sur lesquelles [A] a semé du gazon et interdit à tout autre que lui d'y entreposer du matériel ou d'avoir encore modifié la surface louée par le Gaec s'en l'en informer,

-d'alimenter de faux litiges comme s'agissant de l'entretien du forage de [Localité 8] alors que ce forage a été réalisé à son initiative sur un terrain qu'il avait pris à bail et dont il est devenu propriétaire en 1993, avant que son frère [A] ne devienne associé du Gaec etc....



De son côté, [A] [K] a une autre présentation des faits et reproche notamment à [T] [K]:

-des détournements de fonds des comptes du Gaec à hauteur de 200 000 euros sur ses propres comptes et des faux en écriture comptable, alors que s'agissant de ce détournement, M. [T] [K] reconnaît avoir fait un virement de 200 000 euros du compte du Gaec sur son compte courant personnel afin d'adresser au notaire une somme de 149 955,83 euros qui devait absolument lui parvenir dans le cadre d'une acquisition du Gaec dans l'exercice de son droit de préemption, M. [A] [K] ayant fait bloquer les comptes pour s'opposer à la préemption et acquérir les terres pour son propre compte. Ce faisant, [T] [K] reconnaît avoir conservé le surplus (environ 50.000 euros) pour 'une opération d'acquisition de terres à titre personnel' (ses conclusions page 28 in fine), ces éléments confirmant ainsi un détournement de 50 000 euros au détriment du Gaec et une opposition de [A] à l'exercice par le Gaec d'un droit de préemption,

-d'avoir, par son intransigeance, entraîné le Gaec dans un litige prud'homal avec une salariée, ce qui a valu au Gaec une condamnation,

-d'avoir seul, en sa qualité de co-gérant du Gaec, tenté d'exercer son droit de préemption, prétendument au nom du Gaec, sur des terres appartenant aux consorts [M] qu'il projetait d'acquérir,

- d'avoir procédé à des défrichements interdits au risque de perdre les aides de la PAC,

- d'avoir recouru à l'emploi de produits illicites pour le traitement du Colza,

- d'avoir négligé de préempter des terres au profit du Gaec pour les acquérir pour son propre compte, s'étant constitué un patrimoine de 155 ha.



Des pièces sont versées aux débats de part et d'autre à l'appui des griefs que les frères s'adressent mutuellement attestant la réalité de faits mais sans qu'il soit possible de déterminer qui emporte la responsabilité de la discorde et surtout si [A], associé demandeur, est à l'origine de celle-ci ou l'entretient artificiellement dans le seul souci de parvenir à la dissolution du Gaec, ce qui n'est pas établi.



[T] [K] échoue en conséquence à rapporter la preuve que la mésentente serait imputable à [A] qui ne pourrait en conséquence s'en prévaloir pour solliciter la dissolution du Gaec pour justes motifs.



En l'état, ces griefs respectifs ne font qu'illustrer la mésentente palpable qui existe entre les associés telle qu'elle paralyse le fonctionnement du Gaec justifiant la confirmation du jugement qui a ordonné sa dissolution et partant sa liquidation, de sorte que M. [T] [K] est débouté de ses demandes tendant à voir ordonner le retrait du Gaec de [A] [K], par application de l'article 20 des statuts, ainsi que de sa demande subsidiaire tendant à voir ordonner la révocation de M. [A] [K] de son mandat de cogestion pour motif légitime.



Toutefois, il sera désigné Maître [L] [Z] de la Selarl Ekip, venant aux droit de la Selarl [D], en qualité de liquidateur, pour procéder aux opérations de liquidation et partage du Gaec Du Glane, avec possibilité de désigner tout sachant, par réformation du jugement sur ce seul point.



Succombant en son recours, M. [T] [K] en supportera les dépens et sera équitablement condamné à payer à M. [A] [K] une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS



La Cour



Statuant dans les limites de sa saisine



Confirme le jugement entrepris sauf à désigner Maître [Z] de la selarl Ekip au lieu et place de la selarl [D] en qualité de liquidateur pour procéder à la liquidation et au partage du Gaec Du Glane dans les termes de la mission ordonnée par le tribunal judiciaire d'Angoulême.



Y ajoutant :



Condamne [T] [K] à payer à [A] [K] une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.



Condamne [T] [K] aux dépens du présent recours.





Le présent arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



Le Greffier, Le Président,

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