25 avril 2024
Cour d'appel de Paris
RG n° 21/03554

Pôle 4 - Chambre 10

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 10



ARRÊT DU 25 AVRIL 2024



(n° , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03554 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDFHR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 janvier 2021 - Tribunal judiciaire de PARIS RG n° 18/11204





APPELANTE



SA SNCF VOYAGEURS, venant aux droits de la SNCF MOBILITÉS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Vincent RIBAUT de la SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Assistée à l'audience de Me Laurence LICHTMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0905







INTIMÉS



Monsieur [J] [K]

[Adresse 1]

[Localité 5]



Représenté par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assistée à l'audience de Me Maximilien MATTEOLI de la SELARL ARMA, avocat au barreau de PARIS, toque : J086





INTERVENANT VOLONTAIRE



CAISSE DE PRÉVOYANCE ET DE RETRAITE DU PERSONNEL DE LA SNCF (CPRPSNCF) , prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée et assisté à l'audience de Me Cécile POITVIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0048









COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été plaidée le 08 Février 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Florence PAPIN, Présidente

Mme Valérie MORLET, Conseillère

Madame Anne ZYSMAN, Conseillère



qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par MadameValérie MORLET dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.





Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA





ARRÊT :



- contradictoire



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Florence PAPIN, Conseillère et par Catherine SILVAN, greffier, présent lors de la mise à disposition.




***



Faits et procédure



Une altercation a le 27 septembre 2013 opposé en gare [7] plusieurs agents salariés de la SNCF à un usager, Monsieur [J] [K].



Madame [U] [Y], Madame [S] [R] et Monsieur [O] [W] ont déposé plainte pour des faits de violences auprès des services de police de [Localité 8] dès le 27 septembre 2013. Monsieur [D] [A] a déposé plainte pour des faits de violences et dégradations le 1er octobre 2013.



L'altercation a entraîné une incapacité totale de travail (ITT) d'un jour pour Monsieur [W], et de trois jours pour Mesdames [Y] et [R].



Monsieur [K] a le 2 octobre 2013 été convoqué par le Procureur de la République de Paris pour le 16 octobre 2013 en vue d'un rappel à la loi ou d'un avertissement du fait d'outrages contre Madame [R] et de violences volontaires n'ayant pas entraîné une ITT supérieure à huit jours sur Madame [Y] et Monsieur [W]. Il a déféré à cette convocation et le parquet du tribunal de grande instance de Paris a ce 16 octobre 2013 décidé de classer l'affaire sans suite, après rappel à la loi/avertissement.



Le conseil de l'EPIC SNCF Mobilités a par courrier du 10 septembre 2018 adressé à Monsieur [K] une mise en demeure de lui rembourser la somme globale de 171.578,51 euros, correspondant à sa créance provisoire pour les prestations versées à ses quatre agents, Messieurs [A] et [W] et Mesdames [Y] et [R], en qualité d'auto assureur du risque AT-MP (Accident du Travail/Maladie Professionnelle) et d'employeur.



En l'absence de réponse et faute de solution amiable, la SA SNCF Voyageurs, venant aux droits de la SNCF Mobilités, a par acte du 18 septembre 2018 assigné Monsieur [K] devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de le voir condamner en sa qualité de tiers responsable à lui rembourser la somme 262.235,51 euros, en recouvrement de prestations versées à ses salariés.



*



Le tribunal, devenu tribunal judiciaire, par jugement du 14 janvier 2021, a :



- dit la SNCF irrecevable en ses demandes,

- condamné la SNCF à payer à Monsieur [K] la somme de 2.000 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SNCF aux dépens.



La SNCF a par acte du 22 février 2021 interjeté appel de ce jugement, intimant Monsieur [K] devant la Cour.



*



La SNCF, dans ses dernières conclusions signifiées le 6 novembre 2023, demande à la Cour de :



- la juger recevable en son appel et l'y dire bien fondée,

- infirmer le jugement en ce qu'il :

. l'a dite irrecevable en ses demandes,

. l'a condamnée à payer à Monsieur [K] la somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

. l'a condamnée aux dépens,



Et statuant à nouveau,



- condamner Monsieur [K] à lui verser les sommes de :

. 27.632,57 euros pour les prestations versées à Madame [R] en sa qualité d'auto-assureur AT/MP et d'employeur,

. 218.480,75 euros pour les prestations versées à Madame [Y],

. 540,01 euros pour les prestations versées à Monsieur [A],

. 2.530,16 euros pour les prestations versées à Monsieur [W],

. 1.091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'accident de Madame [R] prévue à l'article L454-1 du code de sécurité sociale,

. 1.091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'accident de Madame [Y],

. 126,12 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'accident de Monsieur [A],

. 575,62 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'accident de Monsieur [W],

. 1.000 euros en réparation du trouble occasionné du fait de ses agissements à l'exploitation du service public,

- condamner Monsieur [K] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Monsieur [K] aux entiers dépens.



Monsieur [K], dans ses dernières conclusions signifiées le 20 novembre 2023, demande à la Cour de :



A titre principal,



- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé irrecevable l'action de SNCF à son encontre faute d'intérêt à agir,

- débouter la SNCF de l'ensemble de ses prétentions à son encontre,



A titre subsidiaire,



- débouter la SNCF de l'ensemble de ses demandes,





En tout état de cause,



- condamner la SNCF à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SNCF aux entiers dépens.



La Caisse de Prévoyance et de Retraite du Personnel de la SNCF (CPRP SNCF ou CPR) est volontairement intervenue à l'instance d'appel par conclusions du 21 septembre 2021, au titre desquelles elle demande à la Cour de :



- dire recevable et bien fondée son intervention à produire les pièces « nécessaires au bien-fondé [des demandes] de la SNCF »,

- constater que les frais de soins qu'elle a versés ont bien été facturés à la SNCF (cf. attestation jointe) et ont donc été supportés par celle-ci,

. pour Madame [R] : 1033,45 euros,

. pour Madame [Y] : 20.024,90 euros + rente AT avec des arrérages échus de 814,19 euros et un capital restant de 56.769,53 euros,

. pour Monsieur [A] : 44 euros,

. pour Monsieur [W] : 66 euros.



*



La clôture de la mise en état du dossier a été ordonnée le 29 novembre 2023, l'affaire plaidée le 8 février 2024 et mise en délibéré au 25 avril 2024.




Motifs



A titre liminaire, sur l'intervention volontaire de la CPR



La CPRP SNCF indique avoir établi le relevé de prestations comprenant les dépenses de soins qu'elle a versées aux agents ainsi que le montant des salaires maintenus par la SNCF les concernant. Elle demande donc à être reçue en son intervention, fondée à produire les pièces nécessaires à la recevabilité de l'action de la compagnie ferroviaire.



Sur ce,



L'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant (article 325 du code de procédure civile).



L'intervention volontaire est quant à elle principale ou accessoire (article 328 du code de procédure civile). Elle est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme et accessoire lorsqu'elle appuie les prétentions d'une partie, alors recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie (articles 329 et 330 du même code).



Aussi, quand bien même la CPR ne présente aucune prétention à son profit, son intervention, accessoire, qui permet la production des pièces justifiant de la recevabilité de l'action de la SNCF, apparaît recevable et sera déclaré telle.



Sur la recevabilité des demandes de la SNCF



Les premiers juges ont considéré, au vu des seuls relevés de prestations émanant de la CPR, qu'il n'était pas établi que la SNCF Mobilités avait effectivement supporté le coût final des prestations versées par la CPR aux agents concernés par l'incident du 24 septembre 2013. Ils ont déclaré la compagnie ferroviaire irrecevable en son recours, faute d'intérêt à agir.



La SNCF, qui fait valoir la responsabilité de Monsieur [K] à l'origine des dommages subis par ses quatre agents, reproche aux premiers juges d'avoir ainsi statué. Elle fait en premier lieu valoir la recevabilité de ses demandes, présentées en qualité d'auto-assureur du risque AT/MP, rappelant la création de la CRP et indiquant avoir par convention applicable au 1er juillet 2008 donné mandat à celle-ci de gérer pour son compte les risques accidents du travail et maladies professionnelles. Elle explique que par l'intermédiaire de la caisse, elle assure les missions de liquidation des prestations en nature, de gestion et d'ordonnancement des rentes AT/MP, et que, parallèlement, elle assure le service des prestations en espèces (maintien des salaires de ses agents pendant les arrêts de travail) puis précise que dans ce cadre, la CPR établit, pour son compte, des relevés de prestations destinés à être produits dans les dossiers où elle exerce ses recours contre les tiers responsables. La SNCF fait également valoir la recevabilité de son action en sa qualité d'employeur et estime être seule recevable en cette action, à l'exclusion de la CPR. Elle considère qu'exiger une preuve de la refacturation des prestations par la CPR est contraire à l'objet du mandat et inutile et qu'en conséquence les frais de gestion lui sont dus.



Monsieur [K] conclut à titre principal à la confirmation du jugement qui a retenu l'irrecevabilité de l'action de la SNCF rappelant que la CPR agit tant en son nom personnel en assurant le remboursement des frais de soins et le versement des salaires en période d'indisponibilité qu'en qualité de mandataire de la SNCF pour le versement des charges patronales afférentes aux salaires maintenus pendant les périodes d'indisponibilité et que dans tous les cas, seule la CPR verse les prestations correspondantes et a qualité pour agir.



La CPR indique avoir établi un relevé de prestations comprenant non seulement les dépenses de soins qu'elle a versées aux victimes mais également le montant des salaires maintenus par la SNCF concernant les assurés en cause, pièce nécessaire à la recevabilité de l'action de la SNCF.



Sur ce,



L'irrecevabilité est une fin de non-recevoir qui sanctionne, sans examen au fond, un défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée (article 122 du code de procédure civile).



La SNCF, pour agir en remboursement de prestations versées à ses agents contre Monsieur [K], doit préalablement justifier de sa qualité et de son intérêt à agir et, ainsi, établir avoir eu la charge des prestations dont elle réclame le paiement.



1. sur la qualité à agir de la SNCF en tant qu'employeur



L'article 32 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation (loi Badinter) dispose que les employeurs sont admis à poursuivre directement contre le responsable des dommages ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées à la victime pendant la période d'indisponibilité de celle-ci.



La SNCF peut donc, en vertu de ce texte et en sa qualité d'employeur des quatre agents ayant subi un préjudice du fait de Monsieur [K], poursuivre directement ce dernier en remboursement des charges patronales afférentes aux salaires maintenus desdits agents.



Versant aux débats les bulletins de salaires de ses agents, la compagnie ferroviaire justifie des sommes restées à sa charge et apparaît recevable en son action à ce titre engagée contre Monsieur [K].



2. sur la qualité à agir de la SNCF en tant qu'auto-assureur



Il ressort par ailleurs des dispositions de l'article L413-14 du code de la sécurité sociale, tel qu'applicable en 2013 au moment des faits, que la SNCF verse directement à son personnel les prestations d'accident du travail, renvoyant à un décret pour ses modalités d'application.



La SNCF peut ainsi, en vertu de ce texte, agir contre Monsieur [K], tiers responsable de l'accident de travail subi par ses agents, en remboursement des prestations servies à ceux-ci en sa qualité d'auto-assureur.



Elle doit cependant justifier des sommes versées, ce qu'elle peut faire directement lorsqu'elle a elle-même versé lesdites prestations, mais qu'elle doit faire par l'intermédiaire de justificatifs produits lorsque celles-ci ont été versées pour son compte par un tiers.



Dans ce cadre, en effet, la SNCF a la possibilité de confier la gestion des prestations d'accident de travail à un organisme tiers, telle la CPR, créée par décret n°2007-730 du 7 mai 2007 relatif à la caisse de prévoyance et de retraite du personnel ferroviaire.



C'est ainsi que la SNCF a le 1er juillet 2008 conclu avec la CPR une convention portant mandat de gestion, déléguant à ladite caisse des activités et prestations sociales, la caisse devant alors les gérer « pour le compte » de la compagnie ferroviaire (articles 1er et 2 de la convention). Il est renvoyé, pour l'énumération des prestations et activités gérées par la CPR pour le compte de la SNCF à une annexe à la convention, laquelle n'est pas versée aux débats.



L'article 11 du décret n°2007-1056 du 28 juin 2007, relatif aux ressources de la caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la société nationale des chemins de fer français, énonce que le mandat de gestion confié à une caisse par la SNCF porte notamment sur la comptabilisation et la gestion des prestations et activités relatives :



- aux remboursements des soins délivrés aux agents dans le cadre de la réglementation du service médical de la SNCF,

- aux prestations d'accidents du travail et maladies professionnelles,

- aux prestations de privation d'emploi,

- aux prestations supplémentaires du régime de prévoyance des cadres supérieurs,

- à la délivrance et la gestion des facilités de circulation accordées aux retraités et à leurs ayants droit en fonction de la réglementation spécifique de la SNCF et homologuées par le ministre chargé des transports.



Sur ce fondement, l'article 8-1 de la convention portant mandat de gestion du 1er juillet 2008 par la SNCF à la CPR stipule que les dépenses et recettes de prestations effectivement payées ou encaissées par la caisse pour le compte de la compagnie ferroviaire sont facturées ou reversées à cette dernière, directement aux services concernés.



Ainsi que l'observe la SNCF, la refacturation par la CPR est obligatoire et automatique. Ce point n'implique pas que la compagnie ferroviaire puisse agir sans justifier de cette refacturation.



Ainsi, si la SNCF assure, par l'intermédiaire de la CPR, la gestion et la liquidation des prestations en nature, la gestion et l'ordonnancement des rentes AT/MP, aucun texte ne dispense la compagnie ferroviaire de justifier de la recevabilité de son action directe contre le tiers responsable par la production des factures effectivement émises par la caisse.



Ce point est en l'espèce confirmé par l'intervention volontaire de la CPR aux fins, selon les propres termes de celle-ci dans le corps de ses écritures, de produire les pièces « nécessaires à la recevabilité de l'action de la SNCF ».



Faute de justifier des factures de la CPR devant les premiers juges, ceux-ci ont à bon droit déclaré la SNCF irrecevable en son action des chefs des prestations servies par ladite caisse.



La CPR intervient désormais volontairement devant la Cour. Si elle ne produit pas aux débats des « factures » ainsi intitulées des dépenses de prestations effectivement payées pour le compte de la SNCF en exécution de son mandat de gestion, elle communique bien ses relevés de prestations définitifs concernant les quatre agents en cause, ainsi qu'une attestation signée le 21 juin 2021 par Madame [H] [T], sa directrice comptable et financière, indiquant le montant des dépenses engagées par la caisse et facturées à la compagnie ferroviaire concernant les quatre assurés.



La CPR a donc réglé les sommes, refacturées à la SNCF ainsi qu'elle l'indique dans ses écritures et ce qui est démontré par l'absence de recours personnel de la caisse, qui demande seulement à la Cour de constater que ces frais ont bien été finalement supportés par la compagnie ferroviaire.



Aussi, au vu de cette nouvelle pièce, la Cour, sur infirmation du jugement sur ce point, déclarera la SNCF recevable en son action contre Monsieur [K], tant au titre des charges patronales restées à sa charge en sa qualité d'employeur des quatre agents blessés, qu'au titre des prestations sociales versées par la CPR et qui lui ont été facturées. Ses demandes à ces titres doivent donc être examinées.



Au fond, sur le recours de la SNCF contre Monsieur [K]



La SNCF fait état de son droit à réparation. Elle évoque les contours de son recours subrogatoire et l'absence de restriction quant à la nature des blessures infligées à ses agents, l'existence d'un lien de causalité entre les préjudices qu'elle allègue et le fait dommageable (par confusion entre l'incapacité totale de travail au sens pénal et les jours d'arrêt de travail). Elle verse aux débats les arrêts de travail de ses quatre agents, ainsi que les justificatifs de mi-temps thérapeutiques. Elle indique exercer son recours « poste par poste, à due concurrence du recours constitué par l'indemnité mise à la charge du tiers responsable pour réparer le préjudice évalué en droit commun » et rappelle que le contrôle du bien-fondé des arrêts de travail est possible mais non obligatoire (et qu'il y a en tout état de cause été procédé). La SNCF fait en conclusion état d'une créance définitive, en sa qualité d'auto-assureur du risque AT/MP, à hauteur de 18.971,24 euros concernant Madame [R], de 172.613,42 euros concernant Madame [Y], de 378,35 euros concernant Monsieur [A] et de 1.726,85 euros concernant Monsieur [W], outre 2.883,74 euros de frais de gestion. Elle fait ensuite état d'une créance, en sa qualité d'employeur desdits agents au titre des cotisations patronales, de 8.661,33 euros pour Madame [R], de 45.867,33 euros pour Madame [Y], de 161,66 euros pour Monsieur [A] et de 803,31 euros pour Monsieur [W]. Elle sollicite également une indemnisation d'un trouble à l'exploitation du service public à hauteur de 1.000 euros.



Monsieur [K], à titre subsidiaire, se prévaut du caractère mal fondé des demandes de la SNCF. Au titre des frais de soins et traitements, sur la demande de la SNCF en remboursement des charges patronales, il rappelle que l'action en recouvrement de la SNCF est limitée aux sommes versées à ses agents en réparation de l'atteinte portée à leur intégrité physique et que les préjudices doivent être déterminés selon le droit commun, poste par poste et estime que la SNCF ne caractérise pas le lien de causalité entre les sommes réclamées et l'accident, observant des lacunes et incohérences dans les pièces qu'elle fournit. Au titre de la demande de la SNCF en remboursement des charges patronales, il rappelle que ce recours doit s'exercer dans la limite de la réparation du préjudice à laquelle il est tenu pour la seule période de l'incapacité temporaire totale de travail fixée selon le droit commun et observe qu'il n'est pas justifié du lien entre les arrêts de travail prolongés et l'incapacité de travail initialement fixée. Aussi conclut-il au débouté de la SNCF de ses prétentions.



La CPR indique que la SNCF étant auto-assureur du risque AT/MP, elle seule supporte la charge définitive des prestations relatives à ces accidents avec tiers responsable, alors que les salaires sont maintenus puis inclus par la caisse dans le relevé de prestations, seuls les frais de soins versés par la caisse étant refacturés à la compagnie ferroviaire.



Sur ce,



Il résulte des termes de l'article L454-1 alinéa du code de la sécurité sociale que si la responsabilité du tiers auteur de l'accident est entière, la caisse - ou en l'espèce la SNCF à laquelle le texte est applicable - est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément.



Ainsi, si après avoir indemnisé ses agents au titre d'un accident de travail la SNCF ne peut pas exercer de recours contre le tiers responsable au titre des indemnités versées en réparation de préjudices personnels (souffrances endurées, préjudices esthétiques et d'agrément), elle dispose de ce recours au titre des indemnités réparant les préjudices physiques de ses agents.



Les prestations sociales et cotisations patronales versées au titre d'arrêts de travail faisant suite non seulement à une atteinte physique, mais également à un choc psychologique ou un syndrome post-traumatique, donnent ainsi lieu à recours, alors que ces préjudices relèvent d'un préjudice certes psychique mais empêchant physiquement le travail et ouvrant droit à des prestations sociales se rapportant aux postes de préjudice couvrant les pertes de gains professionnels ou l'incidence professionnelle, sans lien avec les souffrances endurées, évaluées de manière distincte et n'ouvrant droit qu'à une indemnisation à caractère personnel, alors non soumise à recours.



Le paiement de prestations sociales et de cotisations patronales restées à la charge de la SNCF au titre des accidents de travail des agents victimes de violence peuvent donner lieu à un recours contre Monsieur [K] à charge pour la compagnie ferroviaire d'établir que ces frais sont directement et certainement imputables aux faits reprochés à l'intéressé, notamment lorsque le nombre de jours d'arrêts de travail prescrits aux agents victimes dépasse le nombre de jours d'ITT fixé dans le cadre de la procédure pénale aux fins de caractériser l'infraction de violence.



1. sur le recours de la SNCF concernant les sommes versées à Madame [Y]



Madame [R], entendue par les services de police le 27 septembre 2013, a déclaré qu'elle se trouvait ce jour en « mission d'accueil embarquement » et qu'au cours d'un contrôle de billets la « contrôleuse » avec laquelle elle se trouvait a tenté de discuter avec Monsieur [K] qui n'avait pas de billet et est montée dans le train, recevant alors de la part de l'intéressé « une gifle qui l'a fait chuter au sol de la voiture ». Madame [Y], en « mission de contrôle », a précisé le même jour que Monsieur [K] lui avait donné un coup violent avec sa main au niveau de l'oreille gauche et que, déséquilibrée, elle est tombée.



Monsieur [K] a devant les services de police le 2 octobre 2013, sur les plaintes déposées pour violences par les agents de la SNCF, déclaré que « des personnes sont venues afin de [l]'arracher de la main courante », qu'elles lui sont « tombées dessus » et qu'il était donc « fort possible aussi qu'en [se] débattant », il ait « donné des coups de pied », reconnaissant également un coup « au niveau de l'oreille gauche » de l'un des agents.



Le médecin de l'Unité Médico-Judiciaire (UMJ) qui a examiné Madame [Y] dans le cadre de la procédure pénale a retenu, alors que la plaignante déclarait « avoir reçu une gifle sur la joue et un coup de pied au niveau de l'abdomen de la part d'un client de TGV » une ITT de trois jours (rapport du 28 septembre 2013, dossier pénal), en cohérence avec les explications de la victime et celles de l'auteur des faits.



Monsieur [K] a le même jour, 2 octobre 2013, été convoqué devant le Procureur de la République pour un rappel à la loi, le 16 octobre 2013, pour des faits de violences n'ayant pas entraîné une ITT supérieure à huit jours sur la personne de Madame [Y].



Madame [Y] a bénéficié de nombreux arrêts de travail en suite de l'accident du 27 septembre 2013, pour un syndrome post-traumatique (avec céphalées, vertiges, vomissements faisant suite à un traumatisme crânien, asthénie, amaigrissement, etc.). Les certificats sont versés aux débats (certificat initial puis de prolongation mentionnant tous le 27 septembre 2013 comme date de la première constatation médicale de la maladie professionnelle), évoquant une reprise à mi-temps thérapeutique en accord avec la médecine du travail à compter du 10 mars 2017 et jusqu'au 19 septembre 2018.



Le docteur [I], médecin-conseil de la CPR, atteste le 18 août 2021 de neuf convocations de Madame [Y] « pour un examen clinique dans le cadre du suivi de [ses] arrêts de travail pour [son] accident de travail de 2013 » les 31 mars et 1er septembre 2015, 9 février et 13 septembre 2016, 11 octobre 2017, 14 février et 3 octobre 2018, 18 décembre 2019 et 22 janvier 2020. L'intéressée s'est présentée à toutes les convocations, sauf celles des 1er septembre 2015 et 18 décembre 2019, pour lesquelles elle était excusée. Madame [Y] a été déclarée « consolidée » lors du rendez-vous du 22 janvier 2020. Des contrôles ont ainsi bien été réalisés, qui n'ont pas remis en question le bien-fondé des arrêts de travail en suite de l'agression.



Madame [Y] n'a pas été examinée par un médecin expert, mais aucun élément du dossier ne remet en question l'imputabilité de ses arrêts de travail, jusqu'au mois de janvier 2020, à l'agression dont elle a été victime le 27 septembre 2013 de la part de Monsieur [K].



Ainsi, au regard de la concordance entre les faits de violence dénoncés par Madame [Y] et ceux qu'a reconnus Monsieur [K], poursuivi pour ces faits jusqu'à un rappel à la loi, et du lien établi entre ces violences et les arrêts de travail d'une durée bien supérieure aux trois jours d'ITT retenus après les faits, la SNCF est fondée à poursuivre son recours contre l'auteur des violences.



Il sera en premier lieu fait droit aux demandes de la SNCF au regard des bulletins de paie de Madame [Y], du relevé de prestations définitif de la CPR du 11 août 2020 et de son attestation du 21 juin 2021 la concernant, à hauteur des sommes de :



- 13.564,99 + 6.459,91 = 20.024,90 euros au titre des frais médicaux (consultations, analyses, hospitalisation, orthèse, orthoptie, soins kinésithérapiques, frais pharmaceutiques),

- 95.004,80 euros au titre des salaires maintenus pendant les arrêts de travail à temps plein et tenant compte du seul mi-temps thérapeutique pendant les périodes précitées,

- 45.867,33 euros au titre des charges patronales versées,



soit la somme totale de 160.897,03 euros.



La CPR a en outre alloué à Madame [Y] « une rente en réparation de l'accident du travail » au regard du taux d'incapacité permanente partielle (IPP) retenu par son médecin-conseil à la date de sa consolidation (courrier recommandé du 27 mai 2020 de la caisse à l'intéressée). Il apparaît à la lecture d'un constat d'accord conclu entre Madame [Y] et le Fonds de Garantie des Victimes le 9 septembre 2021, que la créance de sécurité sociale à ce titre est imputée à hauteur de 22.080 euros sur le déficit fonctionnel permanent de l'intéressée, laissant un solde de 56.769,53 euros. Cependant, et malgré les termes de l'accord, la rente « accident du travail » a vocation à indemniser Madame [Y] des conséquences de l'accident du 27 septembre 2013 subies dans le cadre de son travail, et doit donc s'imputer sur ses pertes de gains professionnels puis son incidence professionnelle et non sur le déficit fonctionnel permanent, lequel reste un préjudice personnel de la victime. Aussi convient-il de faire droit à la demande de la SNCF, qui justifie de la refacturation par la CPR de la rente d'accident du travail allouée à Madame [Y] (attestation du 21 juin 2021), à hauteur des sommes de 814,19 euros au titre des arrérages échus, et de 56.769,53 euros au titre du capital restant dû, soit une somme totale supplémentaire de 57.583,72 euros.



Monsieur [K] sera en outre condamné à payer à la SNCF la somme de 1.091 euros (montant maximal au vu des sommes en cause) à titre d'indemnité forfaitaire en contrepartie des frais engagés pour obtenir lesdits remboursements, prévue à l'article L454-1 alinéa 8 du code de la sécurité sociale et dont le montant a été modifié par l'arrêté du 20 décembre 2016 relatif à ses montants minimal et maximal.



2. sur le recours de la SNCF concernant les sommes versées à Madame [R]



Madame [R], entendue le 27 septembre 2013, a déclaré aux services de police le 27 septembre 2013 que Monsieur [K] l'avait prise par le cou « avec son bras gauche comme une prise de catch » et a tenté de monter à bord du train avec elle, qu'elle a réussi à le repousser et à se dégager. Elle évoque également des insultes.



Monsieur [K], entendu par les services de police le 2 octobre 2013 en suite des plaintes déposées pour violences par Mesdames [R] et [Y] et Monsieur [W], a reconnu avoir proféré des outrages et, notamment, avoir repoussé « une agent » et l'avoir prise par le cou pour se frayer un passage alors qu'elle bloquait son entrée dans le train.



Le médecin de l'UMJ qui a examiné Madame [R] dans le cadre de la procédure pénale a retenu pour des violences ayant « consisté en la saisie de la victime par le cou avec tirage sur une distance non précisée » une ITT de trois jours (rapport du 28 septembre 2013, dossier pénal), en cohérence non seulement avec les explications de la victime, mais également avec celles de l'auteur des faits.



Monsieur [K] a cependant le même jour, 2 octobre 2013, été convoqué devant le Procureur de la République pour un rappel à la loi, le 16 octobre 2013, non pour des faits de violence, mais pour des outrages contre Madame [R].



Madame [R] a bénéficié de nombreux arrêts de travail en suite des faits, notamment pour anxiété, troubles du sommeil, cervicalgies et dorsalgies, syndrome anxio-dépressif, etc., dont les certificats sont versés aux débats. Après un arrêt de travail « initial » du 27 septembre 2013, les autres sont des arrêts « de prolongation », à l'exception d'un arrêt « de rechute » du 21 mai 2014 et de deux arrêts « initiaux » des 7, 20 et 28 mai 2015. Ils couvrent bien les périodes du 27 septembre au 12 décembre 2013, puis du 22 mai au 4 septembre 2014 (temps plein), et du 13 décembre 2013 au 15 mai 2014 puis du 5 septembre 2014 au 23 juillet 2015 (mi-temps thérapeutique). Si la plupart des certificats ou avis d'arrêt de travail mentionnent le 27 septembre 2013 comme date de la première constatation de l'accident de travail, deux sont illisibles voire taisants sur ce point.



Si la SNCF reconnaît ne pas avoir réclamé de contrôle desdits arrêts de travail, le docteur [F] [I], médecin-conseil de la CPR, atteste le 18 août 2021 de quatre convocations de Madame [R] « pour un examen clinique dans le cadre du suivi de [ses] arrêts de travail pour [son] accident de travail de 2013 » les 13 octobre 2016, 7 juin et 15 décembre 2017, auxquelles l'intéressée s'est rendue, et le 15 mai 2018, à laquelle elle n'a pas déféré. Des contrôles ont donc bien été effectués, qui n'ont pas remis en cause le bien-fondé des arrêts de travail en suite de l'agression.



Le docteur [M] [B], mandaté dans le cadre de la procédure engagée par l'intéressée devant le Fonds de Garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infraction, qui a examiné Madame [R] en présence d'un sapiteur psychiatre et a eu connaissance de ces arrêts de travail, a rendu un rapport d'expertise médicale le 20 février 2017. Il indique qu'elle « présente une symptomatologie compatible avec un diagnostic d'état de stress post-traumatique » réunissant un événement traumatique (les violences dont elle a été victime le 27 septembre 2013), une rupture franche avec l'état psychique antérieur, une symptomatologie associant des cauchemars, des reviviscences, une anxiété et une hypervigilance. Il précise que les faits du 27 septembre 2013 ont été à l'origine d'un arrêt de travail à temps plein pendant quatre mois du 28 septembre au 12 décembre 2013, puis du 22 mai au 4 septembre 2014, et d'un mi-temps thérapeutique avec aménagement du poste de travail du 13 décembre 2013 au 15 mai 2014 puis du 5 septembre 2014 au 23 juillet 2015, pendant une période totale de un an et trois mois, ajoutant qu'un nouvel arrêt de travail à partir du 24 juillet 2015 est imputable à une sciatique « sans rapport avec les faits ». L'expert a ainsi tenu compte d'autres faits justifiant des arrêts de travail pour ne retenir que les arrêts en lien avec les faits dénoncés par Madame [R]. Aucun élément ne vient remettre en cause son rapport et aucun élément du dossier ne vient non plus révéler l'existence d'un état pathologique antérieur ou à tout le moins distinct qui aurait justifié les arrêts de travail.



Ainsi, au regard de la concordance entre les faits de violence dénoncés par Madame [R] et ceux qu'a reconnus Monsieur [K] (quand bien même il n'a pas été pénalement poursuivi pour ces faits) et du lien établi entre ces violences et les arrêts de travail d'une durée bien supérieure aux trois jours d'ITT retenus par l'UMJ, d'abord à temps plein puis à mi-temps, la SNCF est fondée à poursuivre son recours contre l'auteur des violences à hauteur des sommes, dont le paiement ou la facturation sont justifiés par la production des bulletins de paie de Madame [R], l'attestation du 21 juin 2021 de la CPR et son relevé de prestations définitif du 22 octobre 2021 la concernant, de :



- 134,05 + 899,40 = 1.033,45 euros au titre des frais médicaux (consultations, hospitalisations, examens, frais pharmaceutiques),

- 17.937,79 euros au titre des salaires maintenus pendant les arrêts de travail à temps plein et tenant compte du seul mi-temps thérapeutique pendant les périodes précitées,

- 8.661,33 euros au titre des charges patronales versées,



soit la somme totale de 27.632,57 euros.



Monsieur [K] sera en outre condamné à payer à la SNCF la somme de 1.091 euros (montant maximal au vu des sommes en cause) à titre d'indemnité forfaitaire en contrepartie des frais engagés pour obtenir lesdits remboursements, prévue à l'article L454-1 du code de la sécurité sociale.



3. sur le recours de la SNCF concernant les sommes versées à Monsieur [W]



Monsieur [W], en « mission accueil embarquement » le 27 septembre 2013, a déclaré aux services de police avoir remarqué un homme violent dans ses paroles, dans ses gestes « et sa volonté d'en découdre », lui avoir parlé pour « attirer son attention ». Il a précisé que Monsieur [K] s'est tourné vers lui et lui a « porté au moins deux coups de pieds sur le bas du ventre ».



Monsieur [K] a devant les services de police le 2 octobre 2013 indiqué que « des personnes sont venues afin de [l]'arracher de la main courante », qu'elles lui sont « tombées dessus » et qu'il était donc « fort possible aussi qu'en [se] débattant », il ait « donné des coups de pied ».



Le médecin de l'UMJ qui a examiné Monsieur [W] dans le cadre de la procédure pénale a retenu pour des violences ayant consisté « en des coups de pied » une ITT de un jour (rapport du 28 septembre 2013, dossier pénal), en cohérence avec les explications de la victime et de l'auteur des faits.



Monsieur [K] a le même jour, 2 octobre 2013, été convoqué devant le Procureur de la République pour un rappel à la loi, le 16 octobre 2013, pour des faits de violences n'ayant pas entraîné une ITT supérieure à huit jours sur la personne de Monsieur [W].



Monsieur [W] a bénéficié d'un arrêt de travail du 27 septembre au 13 octobre 2013, pour des douleurs abdominales, une insomnie et une angoisse. Le certificat est communiqué et vise bien la date du 27 septembre 2013 pour première constatation médicale de la maladie professionnelle.



Le docteur [I], médecin-conseil de la CPR, atteste le 18 août 2021 de trois convocations de Monsieur [W] « pour un examen clinique dans le cadre du suivi de [ses] arrêts de travail pour [son] accident de travail de 2013 » les 4 et 18 décembre 2013 et 22 janvier 2014. Il ne s'y est jamais présenté, mais les convocations sont postérieures à la fin de son arrêt de travail. Si la CPR indique dans son relevé de prestations le concernant qu'il a consulté un médecin les 27 septembre, 12 et 25 octobre 2013, rien n'établit que les deux dernières consultations aient été justifiées par les suites de l'agression du 27 septembre 2013.



Ainsi, s'il est justifié d'un lien entre cette agression et l'arrêt de travail de Monsieur [W] jusqu'au 13 octobre 2013 (sur 16 jours), il n'est pas établi que l'arrêt de travail postérieur, dont fait état la SNCF, soit en lien avec celle-ci.



La SNCF est donc fondée, en ce qui le concerne, à poursuivre son recours contre Monsieur [K] à hauteur des seules sommes, dont le paiement ou la facturation sont justifiés par la production de son bulletin de paie du mois d'octobre 2013, l'attestation du 21 juin 2021 de la CPR et son relevé de prestations définitif du 22 octobre 2021 le concernant, de :



- (1.660,85 ÷ 31) X 16 = 857,21 euros au titre du salaire maintenus pendant l'arrêt de travail, au prorata temporis du nombre de jours de l'arrêt en lien avec l'agression,

- (803,31 ÷ 31) X 16 = 414,61 euros au titre des charges patronales versées, au prorata temporis,

- (161,66 ÷ 31) X 16 = 83,43 euros au prorata temporis également,



soit la somme totale de 1.355,25 euros.



La SNCF sera déboutée de sa demande au-delà de cette somme, tant au titre du salaire et des cotisations patronales qu'au titre des frais médicaux, dont le lien avec l'agression n'est pas établi.



Monsieur [K] sera en outre condamné à payer à la SNCF la somme de 451,75 euros (correspondant au tiers des sommes en cause) à titre d'indemnité forfaitaire en contrepartie des frais engagés pour obtenir lesdits remboursements, indemnité prévue par l'article L454-1 du code de la sécurité sociale.



4. sur le recours de la SNCF concernant les sommes versées à Monsieur [A]



Monsieur [A] ne s'est présenté devant les services de polices que le 2 octobre 2013. Il indique être intervenu sur l'appel au secours d'un collègue et avoir « pris un violent coup dans les jambes et notamment au niveau de sa poche où se trouvait [son] téléphone portable personnel ».



Aucun des témoignages de Mesdames [Y] et [R] ou de Monsieur [W] du 27 septembre 2013 ne permet d'identifier Monsieur [A]. La déclaration d'accident du travail du 30 septembre 2013, a été complétée par l'employeur (la SNCF) sur les déclarations de Monsieur [A].



Celui-ci n'a pas été vu par le médecin de l'UMJ. Il n'a bénéficié d'aucun arrêt de travail.



Monsieur [K] n'a pas été poursuivi pour des faits de violence contre Monsieur [A].



Il n'est ainsi pas établi que les deux consultations d'un médecin des 2 et 9 octobre 2013 mentionnées par la CPR sur le relevé de prestations du 20 février 2014 concernant Monsieur [A] soient en lien avec les faits de violences commis par Monsieur [K] en gare [7] le 27 septembre 2013.



La SNCF sera en conséquence déboutée de toute demande en paiement contre Monsieur [K] au titre de son recours concernant Monsieur [A], présentée à hauteur de 540,01 euros au titre des prestations versées et de 126,12 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion de l'article L454-1 du code de la sécurité sociale.









5. sur l'indemnisation des troubles d'exploitation



Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer (article 1240 du code civil).



Or la violence de Monsieur [K] le 27 septembre 2013 a perturbé l'exploitation sereine du service public des transports à la gare [7], faisant notamment intervenir plusieurs voyageurs ainsi que cela résulte des diverses auditions par les services de police.



L'intéressé sera en conséquence condamné à payer la somme de 1.000 euros en juste indemnisation du préjudice subi par la SNCF de son fait.



***



Au terme de ces développements, Monsieur [K] sera condamné à payer à la SNCF, en suite des faits du 27 septembre 2013, les sommes de :



- 160.897,03 + 57.583,72 = 218.480,75 euros au titre des prestations versées à Madame [Y],

- 27.632,57 euros au titre des prestations versées à Madame [R],

- 1.355,25 au titre des prestations versées à Monsieur [W]

- 1.091 + 1.091 + 451,75 = 2.633,75 euros indemnité forfaitaire de gestion,

- 1.000 euros en réparation du trouble d'exploitation.



La SNCF sera déboutée de toute demande présentée contre Monsieur [K] au titre des prestations versées à Monsieur Monsieur [A].



Sur les dépens et frais irrépétibles



Le sens de l'arrêt conduit à l'infirmation du jugement en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles de première instance, mis à la charge de la SNCF.



Statuant à nouveau et ajoutant au jugement, la Cour condamnera Monsieur [K], qui succombe à l'instance, aux dépens de première instance et d'appel, en application de l'article 696 du code de procédure civile.



Tenu aux dépens, Monsieur [K] sera également condamné à payer la somme équitable de 2.000 euros à la SNCF en indemnisation des frais exposés en première instance et en cause d'appel et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.



Ces condamnations emportent rejet des demandes de Monsieur [K] de ces chefs.



Par ces motifs,



La Cour,



Reçoit l'organisme de sécurité sociale Caisse de Prévoyance et de Retraite du Personnel de la SNCF (CPRP SNCF) en son intervention volontaire,



Infirme le jugement en toutes ses dispositions,



Statuant à nouveau et y ajoutant,



Dit la SA SNCF Voyageurs, venant aux droits de l'EPA SNCF Mobilités, recevable en ses demandes,







Condamne Monsieur [J] [K] à payer à la SA SNCF Voyageurs les sommes de :



- 218.480,75 euros au titre des prestations versées à Madame [U] [Y],

- 27.632,57 euros au titre des prestations versées à Madame [S] [R],

- 1.355,25 euros au titre des prestations versées à Monsieur [O] [W],

- 2.633,75 euros au titre des indemnités forfaitaires de gestion,

- 1.000 euros en réparation du trouble d'exploitation.



Déboute la SA SNCF Voyageurs de toute demande présentée contre Monsieur [J] [K] au titre des prestations versées à Monsieur [D] [A],



Condamne Monsieur [J] [K] aux dépens de première instance et d'appel,



Condamne Monsieur [J] [K] à payer la somme de 2.000 euros à la SA SNCF Voyageurs en indemnisation de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.





LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

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