28 mars 2024
Cour d'appel de Colmar
RG n° 21/03602

Chambre 4 SB

Texte de la décision

MINUTE N° 24/258

















NOTIFICATION :







Copie aux parties



- DRASS







Clause exécutoire aux :



- avocats

- parties non représentées









Le





Le Greffier



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE - SECTION SB



ARRET DU 28 Mars 2024





Numéro d'inscription au répertoire général : 4 SB N° RG 21/03602 - N° Portalis DBVW-V-B7F-HUYB



Décision déférée à la Cour : 15 Juillet 2021 par le pôle social du Tribunal Judiciaire de STRASBOURG





APPELANTE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]



Comparante en la personne de Mme [N] [G], munie d'un pouvoir spécial





INTIMEE :



S.N.C. [5]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentée par Me Bruno LASSERI, avocat au barreau de PARIS, dispensé de comparution





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Janvier 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. LEVEQUE, Président de chambre, chargé d'instruire l'affaire.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



M. LEVEQUE, Président de chambre

Mme GREWEY, Conseiller

M. LAETHIER, Vice-Président placé



qui en ont délibéré.



Greffier, lors des débats : Mme WALLAERT, Greffier











ARRET :



- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe par M. LEVEQUE, Président de chambre,

- signé par M. LEVEQUE, Président de chambre, et Mme WALLAERT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.






* * * * *





Exposé du litige



Sur contestation par la SNC [5] de la prise en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde d'une maladie déclarée par sa salariée [I] [S], le tribunal judiciaire de Strasbourg, par jugement du 15 juillet 2021, a :



- déclaré le recours recevable ;

- constaté que la maladie déclarée ne correspond pas aux affections visées au tableau n° 48 des maladies professionnelles ;

- dit que la décision de prise en charge est inopposable à l'employeur ;

- condamné la caisse aux dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire.



Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que le certificat médical accompagnant la déclaration de maladie faisait état d'une hernie discale postérolatérale G L5S1 symptomatique ; que si le médecin-conseil de la caisse se réfère à une sciatique par hernie discale, le tableau ne vise une telle pathologie qu'accompagnée d'une atteinte radiculaire de topographie concordante, dont la caisse n'apporte pas la preuve, dont elle avait la charge, par le seul avis de son médecin-conseil, non-étayé et de plus postérieur à la prise en charge, selon lequel la symptomatologie était compatible avec une compression radiculaire de topographie L5.



La caisse a interjeté appel de cette décision, qui lui a été notifiée le 19 juillet 2021, par courrier recommandé avec demande d'avis de réception, expédié le 28 juillet suivant.



L'appelante, par conclusions enregistrées le 24 novembre 2021, demande à la cour de :



à titre principal,



- infirmer le jugement ;

- constater que la pathologie figure au tableau n° 98 des maladies professionnelles ;

- constater que la salariée a été exposée au risque conformément au même tableau ;

- débouter l'employeur de ses demandes ;

- lui déclarer opposable la prise en charge ;



à titre subsidiaire,

- ordonner une expertise judiciaire visant à déterminer si la pathologie figure au tableau précité.









L'appelante soutient que la maladie correspond au tableau, ce qui résulte du fait que la fiche du colloque médico-administratif renvoie explicitement au code syndrome 098AAM51B, et ce qu'elle établit, pouvant le faire par tout moyen y compris l'avis postérieur à la prise en charge émis par son médecin-conseil, qui répercute les constats médicaux qui ont pu être opérés dans le dossier de l'assurée ; qu'en effet, le médecin-conseil a conclu à l'issue de l'examen de l'assurée que son état était compatible avec une compression radiculaire de même topographie, ces conclusions étant selon lui compatibles avec les résultats d'une imagerie IRM pratiquée le 17 octobre 2017 ; que par ailleurs, les conditions prévues au tableau quant à l'exposition de l'assurée au risque sont remplies, dès lors que l'emploi de caissière exposait Mme [S] à des travaux de manutention manuelle habituelle de charges lourdes, « notamment dans le chargement et le déchargement en cours de fabrication, dans la livraison, y compris pour le compte d'autrui, le stockage et la répartition des produits industriels et alimentaires »,ainsi que le montrent les tâches décrites par l'assurée dans le questionnaire adressé par la caisse ; et, subsidiairement, dans le cas où l'employeur apporterait un commencement de preuve que la maladie n'est pas celle visée au tableau.





La société [5], par conclusions enregistrées le 22 avril 2022, demande à la cour de :



- confirmer le jugement en ce qu'il lui a déclaré la prise en charge inopposable ;

- débouter la caisse de ses demandes.



L'intimée soutient, à titre principal, que la maladie déclarée ne correspond pas à celle visée au tableau faute d'être accompagnée d'une compression radiculaire de topographie concordante ; qu'en effet, la compression radiculaire n'est démontrée par aucune des pièces figurant au dossier et ne pouvait donc être vérifiée au moment de la consultation des pièces avant la prise en charge ; qu'au contraire, ainsi que le rappelle le médecin-conseil de l'employeur, l'imagerie médicale doit montrer une hernie discale avec conflit disco-radiculaire, c'est-à-dire d'une hernie venant comprimer la racine nerveuse à son émergence du droit de conjugaison du même côté que la hernie, ce qui n'est pas le cas de l'IRM mentionnée par le médecin-conseil sans précision de la latéralité, au demeurant non-produite ; qu'il appartenait à la caisse, faute de concordance entre la maladie et le tableau, de saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; et qu'aucune expertise ne peut être organisée pour palier la carence de la caisse dans son instruction de la demande de reconnaissance professionnelle de la maladie.



A titre subsidiaire, l'intimée soutient que la caisse ne rapporte pas la preuve de l'exposition de la salariée au risque visé au tableau, à savoir la manipulation habituelle de charges lourdes, dès lors que si la salariée a répondu, au questionnaire de la caisse, qu'elle réalisait des ports de colis alimentaires dont un certain nombre pesaient entre 10 et 17 kg, ses fonctions n'incluaient de la manutention qu'à hauteur de 30 % et pour des colis dont 75 % pesaient moins de 8 kg.



À l'audience du 25 janvier 2024, la caisse s'en est rapportée à ses écritures et la société était dispensée de comparaître. Il est renvoyé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs moyens de fait et de droit, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.




















Motifs de la décision



L'article L.461-1 du code de la sécurité sociale dispose qu'est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau des maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.



En application de l'article 9 du code de procédure civile, selon lequel 'Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.', il incombe ici à la caisse, qui se prévaut de la présomption précitée, d'établir que les conditions en sont réunies.



La maladie litigieuse est décrite comme suit dans les pièces produites devant la cour :



La maladie a été déclarée comme « douleurs lombaires avec sciatalgies persistantes provoquant des incapacités de mouvements à [se] déplacer ».



Le certificat médical initial constate une « hernie discale postérolatérale G L5S1 symptomatique ».



La fiche du colloque médico-administratif mentionne, au titre du « libellé complet du syndrome », une « sciatique par hernie discale L5-S1 ».



L'avis du médecin-conseil en date du 20 février 2019 indique que, suite à la demande de prise en charge, l'assurée a été examinée par le même médecin qui avait constaté une symptomatologie sciatalgique gauche avec un examen clinique déficitaire du côté gauche « compatibles avec une compression radiculaire de topographie L5 », que « une IRM du rachis lombaire pratiquée le 17 octobre 2017 concluait à une hernie discale postéroloatérale gauche L5S1 » et que l'examen clinique est concordant avec les résultats de cette imagerie.



Aucune de ces pièces ne constate la présence d'une compression radiculaire. Seule l'une d'entre elle mentionne la compatibilité des symptômes avec une telle compression, mais la compatibilité signifie seulement que la coexistence des symptômes avec la compression radiculaire est possible, et non qu'elle existe.



En conséquence, la caisse n'ayant pas apporté la preuve, qui lui incombait, que la pathologie était accompagnée d'une compression radiculaire conformément à la maladie du tableau n° 98 qu'elle invoque, la cour ne peut retenir la présomption d'imputabilité prévue à ce tableau, et sans ordonner l'expertise qui ne peut palier la carence probatoire de parties conformément à l'article 146 du code de procédure civile, confirmera le jugement.































Par ces motifs





La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe :





Déboute la caisse primaire d'assurance maladie de Gironde de sa demande d'expertise ;



Confirme le jugement rendu entre les parties le 15 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Strasbourg ;



Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde aux dépens d'appel.







La greffière, Le président de chambre,

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