9 janvier 2024
Cour d'appel d'Agen
RG n° 22/00840

CHAMBRE SOCIALE

Texte de la décision

ARRÊT DU

09 JANVIER 2024



PF/LI



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N° RG 22/00840 - N° Portalis DBVO-V-B7G-DBNW

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[L] [Z]





C/





S.A.R.L. LA FORGE DES PINS prise en la personne de don représentant légal domicilié en cette qualité audit siège





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Grosse délivrée

le :

aux avocats

ARRÊT n° /2024









COUR D'APPEL D'AGEN

Chambre Sociale











La COUR d'APPEL D'AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l'affaire







ENTRE :



[L] [Z]

née le 14 Octobre 2000 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Catherine LESIMPLE-COUTELIER, avocat au barreau de TOURS







APPELANT d'un jugement du Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MARMANDE en date du 13 Octobre 2022 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. 22/00005



d'une part,







ET :



S.A.R.L. LA FORGE DES PINS prise en la personne de don représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]



Représentée par Me Yann DELBREL, avocat au barreau D'AGEN







INTIMÉ



d'autre part,





COMPOSITION DE LA COUR :



l'affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 14 Novembre 2023 devant la cour composée de :





Pascale FOUQUET, Conseiller, qui a fait un rapport oral à l'audience

Anne Laure RIGAULT, Conseiller



qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre elles-mêmes de :



André BEAUCLAIR, président de chambre



en application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, et après qu'il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,



Greffière : lors des débats :Nathalie CAILHETON

lors de la mise à disposition : Laurence IMBERT





ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile




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I - EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE







Madame [Z] a été embauchée en tant qu'apprentie maréchal-ferrant par la société La Forge des Pins par contrat d'apprentissage du 14 juin 2021 Un second contrat d'apprentissage en date du 24 juin 2021 à effet au 1er juillet 2021 jusqu'au 30 juin 2024,a été conclu entre les parties et régulièrement déposé auprès de l'OPCO.



La convention collective applicable est celle des entreprises de commerce, de location et de réparation de tracteur, machines et de matériels agricoles, de matériels de travaux publics, de bâtiment et de manutention.



Madame [Z] ne s'est plus présentée sur le lieu de travail à compter du 9 septembre 2021.Le 12 septembre 2021, l'employeur écrivait par sms à la salariée « Je te tiens au courant pour la signature de la rupture de contrat ». La salariée répondait « rester à disposition pour la signature de la rupture du contrat ».



Le lundi 14 septembre, la salariée informait son employeur qu'elle avait demandé la rupture du contrat au centre de formation des apprentis. Elle n'a jamais suivi la formation au centre d'apprentissage.



Par courriel du 19 septembre 2021, l'employeur lui communiquait un formulaire de rupture mentionnant comme motif « rupture à l'initiative de l'apprenti » ainsi que ses documents de fin de contrat.



Par courrier recommandé en réponse du 24 septembre 2021, Madame [Z] marquait son désaccord avec le motif de rupture et invoquait les griefs suivants : non-paiement des heures supplémentaires, non-respect de la durée du travail quotidien, non-respect de la durée du travail hebdomadaire, non-respect du repos quotidien, non-respect du temps de pause, absence de visite médicale d'embauche.



Le 3 octobre 2021, l'employeur lui adressait un nouveau formulaire portant la mention suivante :« rupture d'un commun accord ».





Par requête du 1er février 2022, la salariée a saisi le conseil des prud'hommede Marmande en rappel d'heures supplémentaires entre juin et septembre 2021, en rappel de salaires jusqu'à la fin du contrat à durée déterminée (CDD) de mai 2021 à juin 2024 et congés payés afférents, en indemnité de travail dissimulé, en dommages et intérêts pour rupture abusive du CDD et en demandes annexes.



Par jugement du 13 novembre 2022, le conseil de prud'hommes de Marmande a :

- Constaté que Madame [Z] a abandonné son poste le 8 septembre 2021, qu'elle a informé Monsieur [G], gérant de la société La Forge des pins, de son intention de ne plus continuer son apprentissage. Le 14 septembre 2021, elle lui transmet un sms qui est sans équivoque de vouloir mettre un terme à son contrat. Elle demande les documents de rupture ainsi que les documents de solde de tout compte. Elle a également fait la demande d'un document de rupture au CFA après les avoir informés ne plus vouloir faire cette formation. Le conseil valide donc que Madame [Z] avait la ferme intention de démissionner et par conséquent la déboute de toutes ses demandes.

- Jugé que le contrat est rompu le 8 septembre 2021.

- Condamné Madame [Z] à payer 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamné Madame [Z] aux entiers dépens.



Par déclaration enregistrée au greffe de la cour le 21 octobre 2022, Madame [Z] a régulièrement déclaré former appel du jugement en désignant la société La Forge des Pins en qualité de partie intimée et en visant les chefs de jugement critiqués qu'elle cite dans sa déclaration d'appel.



L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 octobre 2023 et l'affaire fixée pour plaider à l'audience du 14 novembre 2023.



Mme [Z] a conclu le 24 octobre 2023 et a demandé la révocation de l'ordonnance de clôture en raison de son changement de nom de famille de [Z] en Pauvert selon décision du 13 octobre 2023.





II - MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES



Dans ses dernières conclusions n°2 enregistrées au greffe le 19 septembre 2023, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l'appelant, Madame [Z] demande à la cour de :



- Dire et juger son appel recevable et bien-fondé.

- Et en conséquence, infirmer le jugement du conseil des prud'hommes de Marmande et

- Dire et juger que son salaire moyen est de 1 514,21 euros compte tenu des heures supplémentaires réalisées entre juin et septembre 2021.

- En conséquence :

Condamner La Forge des pins à lui payer les sommes de :

15 000 au titre de rappel de salaire suite à la rupture illicite du CDD de droit commun ou surabondamment de son contrat d'apprentissage.

1 500 euros au titre des congés-payés afférents.

2 072,38 euros au titre du rappel de salaire sur les heures supplémentaires effectuées entre juin et septembre 2021.

207,24 euros au titre des congés-payés y afférents.

9 085,26 euros au titre des dommages-intérêts pour travail dissimulé.

Condamner La Forge des pins à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ordonner que les intérêts majorés et capitalisés courent à compter de la saisine du conseil de prud'hommes conformément à l'article 1343-2 du code civil.

Condamner La Forge des pins à lui remettre les bulletins de paye, certificat de travail et attestation pôle emploi rectifiée en application des dispositions qui précèdent dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement ou, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 50 euros par document et par jour de retard, qu'elle pourra faire liquider en sa faveur en saisissant à nouveau la présente juridiction.

Condamner La Forge des pins aux entiers dépens qui comprendront le cas échéant les frais d'exécution forcés.



Au soutien de ses prétentions, Mme [Z] fait valoir que :



- L'employeur ne pouvait prévoir une période d'essai dans son second contrat puisqu'elle était effectivement présente dans l'entreprise sur le même poste dès le 14 juin 2021 et qu'à la signature du second contrat ' le 24 juin 2021 à effet au 1er juillet 2021 ' l'employeur avait donc déjà pu la tester « ouvrière maréchal-ferrant » du 14 au 30 juin 2021, elle ne peut a fortiori se voir imposer une période d'essai en qualité d'apprenante sur ce même poste



- La rupture n'est pas intervenue dans les 45 jours de début de la formation pratique :

- le premier contrat de formation a été conclu entre les parties le 14 juin 2021, date de début de ses prestations, soit plus de 45 jours avant le 19 septembre 2021, date de rupture.

- depuis le 1er janvier 2020, les contrats de formation font uniquement d'un dépôt et non plus d'un enregistrement

L'employeur a conscience d'être hors délais puisqu'il lui adresse le 19 septembre le formulaire de rupture en cochant comme motif de rupture « à l'initiative de l'apprentie » et non « Au cours des 45 premiers jours »

- sur l'attestation Pôle emploi et le certificat de travail, l'employeur a clairement indiqué une période d'emploi du 14 juin au 8 septembre 2021

- la conclusion d'un second contrat d'apprentissage entre les mêmes parties pour le même poste ne fait pas courir un nouveau délai de résiliation unilatérale

- le décompte du délai de 45 jours doit se faire en jours calendaires et il est de 65 jours du 1er juillet au 18 septembre 2021



- Elle conteste toute démission non équivoque



- Il n'existe aucun accord de rupture signé des deux parties



- La remise des documents de rupture le 19 septembre puis le 3 octobre 2021 équivaut à un licenciement de fait et est dénué de cause réelle et sérieuse.

- Le contrat été rompu en dehors des cas visés sans respect de la procédure et il est donc sans cause réelle et sérieuse

- Elle était auparavant salariée et a quitté son emploi pour intégrer la formation

- Elle alterne les CDD et l'interim



- Elle a été hébergée par son employeur pendant 3 semaines, adoptant le même rythme de travail que lui (6h45 jusque très souvent 20h), y compris le samedi et produit les tickets restaurant

- L'employeur considère à tort que ses heures supplémentaires ont été payées par compensation, à raison de 3 semaines d'hébergement et 2,5 mois de pensions pour le cheval

- Madame [K] et Monsieur [E] sont placés sous la subordination de l'employeur, leurs attestations sont sujettes à caution

- Les autres attestations émanent de salariés partis avant son arrivée

- L'employeur ne produit aucun élément pour justifier de sa durée de travail



- L'employeur n'a ni payé ni déclaré les 260 heures supplémentaires accomplies

- L'employeur le reconnaît implicitement par la production des tickets de restaurant établis le samedi attestant qu'elle venait travailler





Dans ses dernières conclusions enregistrées au greffe le 11 avril 2023, expressément visées pour plus ample exposé des moyens et prétentions de l'intimée, la société La Forge des Pins demande à la cour de :



- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil de prud'hommes de Marmande du 13 octobre 2022 en ce qu'il a :

- Débouté Madame [Z] de toutes ses demandes,

Jugé que le contrat est rompu le 8 septembre 2021,

Condamné Madame [Z] à payer 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Débouter Madame [Z] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Condamner Madame [Z] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

Condamner Madame [Z] aux entiers dépens.



Au soutien de ses prétentions, la société La Forge des Pins fait valoir que :



Le contrat a été rompu régulièrement, à l'initiative de l'apprentie

- elle lui a demandé un formulaire de rupture du contrat d'apprentissage et ne s'est jamais présentée au CFA pour suivre sa formation

- elle a acquiescé à sa demande en lui faisant parvenir, le 19 septembre 2021, les documents de fin de contrat

- la salariée l'a piégée en sollicitant une rupture sans évoquer de motif, sans formuler aucun reproche à son encontre puis en refusant de signer les documents sollicités



- le seul contrat valable est celui enregistré, du 24 juin 2021 à effet au 1er juillet 2021 et prévoyant une période d'essai. La salariée était en congés du 29 juillet au 11 août et il convient de soustraire les week-ends et les jours fériés. Que la rupture soit fixée au 8 septembre ou au 14 septembre, elle est intervenue dans le délai légal de 45 jours

- la salariée n'a droit à aucune réparation

- du 14 juin au 30 juin 2021, il s'agissait d'un contrat à durée déterminée, raison pour laquelle elle lui a spontanément versé un complément de salaire en avril 2022



- elle a consenti à la rupture sollicitée par la salariée laquelle a été validée par le CFA

- la salariée ne rapporte la preuve d'aucun préjudice






III - MOTIFS DE LA DECISION



Sur le rabat de l'ordonnance de clôture



En vertu des dispositions de l'article 803 du code de procédure civile, la révocation de l'ordonnance de clôture doit intervenir avant la clôture des débats ou, à défaut, s'accompagner de leur réouverture, de sorte qu'une même décision ne peut simultanément révoquer l'ordonnance de clôture et statuer sur le fond du litige.



Dans les motifs de son dernier jeu d'écriture, déposé le 24 octobre 2023, Madame [Z] demande à la cour de révoquer l'ordonnance de clôture, afin que la juridiction prenne en considération son changement de nom et de statuer sur le fond du litige.



La cour ne pouvant, dans un même arrêt, accepter la demande de rabat de clôture et examiner les prétentions de fond des parties, il convient de déterminer si l'arrêt à intervenir doit porter sur la révocation de l'ordonnance de clôture ou statuer sur le fond du litige.



L'article 954 §3 du code de procédure civile dispose que : « La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion. », peu importe que la prétention figure dans les motifs.



Or, la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 5 octobre 2023 ne figure pas au dispositif des « conclusions d'appelant devant la cour d'appel d'Agen n°3 » déposées le 24 octobre 2023.



La cour n'est donc pas valablement saisie de cette prétention en application de l'article cité ci-dessus.



Conformément aux dispositions de l'article 802 du code de procédure civile : « Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office. »



A défaut de révocation de l'ordonnance de clôture, les « conclusions d'appelant devant la cour d'appel d'Agen conclusion n°3 » de Madame [Z] communiquées à la cour le 24 octobre 2023 sont déclarées d'office irrecevables.



Les dernières conclusions valablement communiquées au débat par Madame [Z] avant l'ordonnance de clôture sont ses « conclusions d'appelant devant la cour d'appel d'Agen n°2 » du 19 septembre 2023, qui seront retenues par la cour dans le cadre des débats.



Sur la rupture du contrat d'apprentissage



La cour précise en premier lieu que ses demandes en rappel de salaire pour rupture du CDD de mai 2021 à juin 2024 sont différentes de celles présentées en première instance. La cour doit donc statuer sur la demande ainsi modifiée.



En vertu des dispositions de l'article L.6222-18 du code du travail : « Le contrat d'apprentissage peut être rompu par l'une ou l'autre des parties jusqu'à l'échéance des quarante-cinq premiers jours, consécutifs ou non, de formation pratique en entreprise effectuée par l'apprenti.

Passé ce délai, le contrat peut être rompu par accord écrit signé des deux parties.

A défaut, le contrat peut être rompu en cas de force majeure, de faute grave de l'apprenti, d'inaptitude constatée par le médecin du travail dans les conditions définies à l'article L. 4624-4 ou en cas de décès d'un employeur maître d'apprentissage dans le cadre d'une entreprise unipersonnelle. La rupture prend la forme d'un licenciement prononcé selon les modalités prévues aux articles L. 1232-2 à L. 1232-6 et L. 1332-3 à L. 1332-5. En cas d'inaptitude constatée par le médecin du travail, l'employeur n'est pas tenu à une obligation de reclassement.

Au-delà de la période prévue au premier alinéa du présent article, la rupture du contrat d'apprentissage peut intervenir à l'initiative de l'apprenti et après respect d'un préavis, dans des conditions déterminées par décret. L'apprenti doit, au préalable, solliciter le médiateur mentionné à l'article L. 6222-39 ou, pour les apprentis du secteur public non industriel et commercial, le service désigné comme étant chargé de la médiation.».



L'article L6222-21 du code du travail dispose que : « La rupture pendant la période prévue au premier alinéa de l'article L. 6222-18 ne peut donner lieu à indemnité à moins d'une stipulation contraire dans le contrat.»



En vertu des dispositions de l'article L.6224-1 du code du travail, le contrat d'apprentissage doit être transmis à l'opérateur de compétence, qui procède à son dépôt.



Les parties ont signé successivement un premier contrat d'apprentissage le 14 juin 2021 portant sur une période du 14 juin 2021 au 30 juin 2024 puis un second contrat d'apprentissage le 24 juin 2021 à effet du 1er juillet 2021 jusqu'au 30 juin 2024 lequel a fait l'objet d'un dépôt auprès de l'OCPO ce qui opère validation du contrat.



Seul le second contrat d'apprentissage doit recevoir application de la faculté de résiliation discrétionnaire de 45 jours instaurée par l'article L.6222-18 du code du travail, soit à compter du 1er juillet 2021.



En effet, la salariée a abandonné son poste le 8 septembre ce qui correspond à la date de rupture du contrat d'apprentissage. La cour confirme le jugement de ce chef.

La rupture du contrat a eu lieu le 39 ème jour de sa formation pratique, soit dans le délai imparti de 45 jours. En conséquence, aucune indemnité n'est due.



L'employeur justifie avoir réglé ses salaires de Mme [Z] du 14 juin au 30 juin 2021.



Il n'existe par conséquent aucune rupture abusive du contrat ni de conclusion d'un CDD du 14 juin au 30 juin 2024 mais un seul contrat d'apprentissage du 1er juillet au 30 juin 2024 rompu le 8 septembre 2021 par l'apprentie soit dans le délai légal.



La cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande au titre de la rupture abusive du contrat d'apprentissage et la déboute de sa demande s'élevant à 15 000 euros à titre de rappel de salaire et congés payés afférents, dont le calcul n'est pas précisé, suite à la rupture illicite du CDD de droit commun ou surabondamment de son contrat d'apprentissage.





Sur les heures supplémentaires



En vertu des dispositions de l'article L.3171-4 du code du travail : « En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. »



La preuve des heures effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties 



Il résulte de l'article L3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.



La cour relève que la liquidation des heures supplémentaires a évolué dans le cadre de la procédure.



En l'espèce, Madame [Z] produit au soutien de ses prétentions :

- un tableau Excel récapitulant les heures jour après jour, semaine après semaine en tenant compte heures des pauses méridiennes, qu'elle affirme avoir accomplies

- le SMS du 27 septembre 2021 de son employeur : « Nous avons bien reçu ton courrier. Nous t'avons hébergé 3 semaines en juin et ton cheval est resté 2 mois et demi en pension. Il me semble que nous sommes quittes 

- plusieurs tickets de caisse de restauration



Ces éléments sont suffisamment précis pour que l'employeur puisse y répondre en produisant ses propres arguments.



A titre liminaire, tout salarié est libre de produire, même a posteriori, un tableau élaboré par ses soins et le caractère tardif de sa demande ne le prive pas de la possibilité de présenter une demande à ce titre.



L'employeur, de son côté, verse au débat l'attestation de Madame [K], seconde apprentie, laquelle atteste le 17 février 2022 : « Compte-tenu qu'elle (Madame [Z]) avait les mêmes horaires que moi, elle n'a pas effectué d'heures de travail supplémentaires. D'ailleurs, elle ne s'est jamais plainte des horaires ni de ses conditions de travail. Elle n'a jamais demandé de rémunération ni de repos compensateur ».



L'employeur produit les attestations d'anciens apprentis, M. [E], M. [C], Melle [D] et M. [B], selon lesquels les conditions de travail étaient satisfaisantes.



D'une part, la cour constate, dans son pouvoir souverain, que ces attestations, dont la force probante est remise en cause par la salariée en raison du lien de subordination existant avec M. [G], présentent des garanties suffisantes : Mme [K] a quitté l'entreprise depuis le 30 octobre 2022 et a maintenu les termes précités par une nouvelle attestation du 28 février 2023 ; les autres attestants ne sont pas salariés de la société.



D'autre part, le SMS du 27 septembre 2021 produit par la salariée est sorti de son contexte. Il s'agit d'une réponse à un objet ignoré. Les échanges qui précédent sur la pièce produite sont antérieurs de plusieurs jours et concernent la rupture en termes généraux.

La production de tickets de caisse de restauration édités plusieurs samedi ne constituent aucun indice concourant à la preuve d'heures supplémentaires sur la période considérée.



Le caractère évolutif des demandes et le témoignage de Madame [K], qui écarte la réalisation systématique d'heures supplémentaires ainsi que l'absence de tout élément corroborant le tableau produit, conduit la cour à rejeter la demande en heures supplémentaires et en congés payés afférents ; les premiers juges ayant omis de statuer de ce chef.



Sur le travail dissimulé



En vertu des dispositions de l'article L.8221-5 du code du travail : « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur : 2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie »



A défaut de preuve d'heures supplémentaires accomplies et de démonstration de tout élément intentionnel, les premiers juges n'ayant pas statué de ce chef, la cour déboute Madame [Z] de ses prétentions au titre du travail dissimulé.







Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens



Le jugement de première instance sera confirmé sur les dépens et les frais non répétibles de procédure.



Mme [Z], qui succombe, sera condamnée aux entiers dépens d'appel et à payer à la société La Forge des Pins la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS





LA COUR, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,



SE DECLARE non saisie de la demande en révocation de l'ordonnance de clôture,



DECLARE d'office irrecevables les conclusions n°3 de Mme [Z] en date du 24 octobre 2023,



CONFIRME le jugement rendu le 13 novembre 2022 en ce qu'il a

- jugé que le contrat était rompu depuis le 8 septembre 2021

- a débouté Mme [Z] de ses demandes en reconnaissance de la rupture abusive du contrat d'apprentissage et en dommages et intérêts,

- a condamné Mme [Z] à payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné Mme [Z] aux dépens



Statuant de nouveau et y ajoutant,



DEBOUTE Mme [Z] de sa demande en rappel de salaire de mai 2021 à juin 2024 et congés payés afférents pour rupture illicite du CDD,



DEBOUTE Mme [Z] de sa demande en rappel de salaire sur heures supplémentaires et congés payés afférents,



DEBOUTE Mme [Z] en indemnisation pour travail dissimulé,



CONDAMNE Mme [Z] aux dépens d'appel,



CONDAMNE Mme [Z] à payer à la société La Forge des Pins la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.



Vu l'article 456 du code de procédure civile, le présent arrêt a été signé par Pascale FOUQUET, conseiller ayant participé au délibéré en l'absence de M. le président de chambre empêché, et par Laurence IMBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.







LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

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