6 septembre 2023
Cour d'appel de Paris
RG n° 22/02632

Pôle 5 - Chambre 6

Texte de la décision

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 06 SEPTEMBRE 2023



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/02632 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFFVF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Décembre 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de BOBIGNY - RG n° 20/08284





APPELANTS



Monsieur [J] [R] [G]

né le [Date naissance 1] 1972, à [Localité 7] (SRI LANKA), de nationalité française,

[Adresse 3]

[Localité 6]



Madame [S] [T] épouse [R] [G]

née le [Date naissance 2] 1980, à [Localité 7] (SRI LANKA), de nationalité française

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représentés par Me Jonathan BEN AYOUN, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 206





INTIMEE



S.A. ARKEA DIRECT BANK

immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTERRE sous le numéro 384 288 890, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège

[Adresse 8]

[Localité 4]



Représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOET HELAIN, avocat au barreau d'ESSONNE





COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Marc BAILLY, Président, chargé du rapport.



Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :



M. Marc BAILLY, Président de chambre

M. Vincent BRAUD, Président

MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère





Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL





ARRET :



- CONTRADICTOIRE



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Marc BAILLY, Président de chambre et par Yulia TREFILOVA, Greffier,présent lors de la mise à disposition.








*

* *



Vu le jugement du tribunal de grande instance de Bobigny en date du 7 décembre 2021 qui, saisi par l'assignation délivrée par la société Arkea Direct Bank, le 23 septembre 2020, à M. [J] [R] [G] et à Mme [S] [T] épouse [R] [G] en reconnaissance de la déchéance du terme prononcée le 11 mars 2020 d'un prêt immobilier de la somme de 201 110 euros qu'elle leur a consenti par offre du 30 juin 2017 acceptée le 11 juillet suivant, destiné à l'acquisition d'un bien immobilier sis à [Localité 6] à raison de l'inexactitude des renseignements fournis par eux pour son obtention et sur le fondement des dispositions conventionnelles, a notamment, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :



- déclaré la société Arkea Direct Bank recevable et partiellement bienfondée en ses demandes,

- condamné solidairement les emprunteurs à lui payer à la banque la somme de 182 794,23 euros arrêtée au 1er septembre 2020 euros avec intérêts au taux conventionnel de 2,05 % à compter de cette date,

- condamné solidairement les emprunteurs à payer à la banque la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;





Vu l'appel interjeté par M. [J] [R] [G] et à Mme [S] [T] épouse [R] [G] par déclaration au greffe du 2 février 2022 ;





Vu les dernières conclusions en date du 11 avril 2023 de M. [J] [R] [G] et à Mme [S] [T] épouse [R] [G] qui font valoir:



- qu'ils ont eu l'opportunité d'acquérir la maison mitoyenne de la leur, mise en vente et, s'exprimant approximativement en langue française ont eu recours à un courtier aux fins de trouver le prêt dont ils ont acquitté toutes les échéances avec régularité,



- que c'est avec surprise qu'ils ont vu prononcer la déchéance du terme à raison de documents prétendument non conformes sans autres précisions de la part de la banque ce qui marque une rupture brutale des relations conventionnelles,



- que la déchéance n'est pas justifiée pour être fondée sur des éléments en réalité partiellement conformes et sans conséquence, qu'ils n'ont pu répondre aux critiques qu'à réception de l'assignation du 23 septembre 2020, que les incohérences de l'état civil de monsieur résultent d'une erreur de transcription des actes par interversion de son nom de famille avec prénom,



- que si la banque s'est prévalue d'erreurs dans les cotisations patronales des AGS, sur ses bulletins de paie, elle ne l'avait pas vérifié au moment de la souscription du prêt et ne s'explique pas sur leur caractère déterminant, que, de même, la comparaison de l'avis d'imposition et des fiches de paies remises par le courtier pouvait être faite dès l'origine,



- qu'en tout état de cause les éléments qui leur sont opposés ne leur sont pas imputables puisque c'est le courtier qui en est à l'origine puisqu'une partie substantielle des documents qu'ils lui avaient remis ne correspondent pas notamment s'agissant de leurs situations processionnelles, or le comportement reprochable doit leur être imputé selon la clause même du contrat de prêt qui doit s'interpréter strictement compte tenu de la gravité des conséquences attachées à sa mise en oeuvre, en l'espèce à mauvais escient, de sorte qu'ils demandent à la cour d'infirmer le jugement et de :



'- Juger n'y avoir lieu au prononcé de la déchéance du terme.

-Ordonner la poursuite des relations contractuelles entre les parties.

-Débouter la société ARKEA DIRECT BANK de l'intégralité de ses prétentions, fins et conclusions.

-Condamner la société ARKEA DIRECT BANK à payer à Monsieur [J] [R] [G] et Madame [S] [T] épouse [R] [G] la somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles.' ;



Vu les dernières conclusions la société Arkea Direct Bank en date du 28 juillet 2022 qui poursuit la confirmation du jugement et l'obtention d'une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles en exposant :



- que ce sont les incohérences sur les fiches de paie des deux membres du couple et le doute sur l'état civil de monsieur qui l'ont conduit à mettre en oeuvre la clause acceptée par les emprunteurs qui l'ont ratifiée en signant l'acte de prêt et en paraphant chaque page, qu'ils n'ont jamais tenté d'entrer en contact avec la banque pour s'expliquer alors qu'il ne résulte d'aucune disposition qu'elle aurait eu à motiver sa décision plus avant,



- qu'elle disposait d'un délai de 5 ans pour agir sans être contrainte auparavant et que l'erreur sur le taux de cotisation AGS n'était pas immédiatement décelable, que les emprunteurs conviennent eux-mêmes de l'incohérence des éléments et la fausseté des documents,



- qu'ils ne prouvent pas que les documents ont été remis par un courtier et non par eux-même et que cela importe peu dans la mesure où c'est sur leur considération que le prêt a été accordé alors qu'ils ne justifient pas avoir exercé une quelconque action à l'encontre du courtier ;





Vu l'ordonnance de clôture rendue le 18 avril 2023 ;






MOTIFS



La banque produit les conditions générales du prêt qui stipulent en leur article IV-7 que les sommes deviendront immédiatement exigibles 'notamment en cas de déclarations, justifications ou renseignements faux et inexacts de l'emprunteur sur des éléments essentiels à la conclusion du contrat, comme au cas ou celui-ci se serait rendu coupable de toute mesure frauduleuse envers le prêteur'.



Elle expose avoir prononcé l'exigibilité immédiate du prêt par lettre recommandée avec accusé de réception du 11 mars 2020 en application de cette clause à raison de la non conformité des pièces du dossier et expose notamment qu'il existe un doute sur l'état civil de monsieur en ce que le nom de son père [J] est porté par lui comme prénom et sur le taux incohérent avec la réglementation de la cotisation AGS apparente sur les bulletins de salaires produits, ce qui conduit à douter de leur autenticité.



La clause rapportée ci-dessus ne saurait être regardée comme abusive puisque subordonnant l'exigibilité anticipée à la production de faux ayant une influence sur la décision de l'octroi du crédit et ne faisant pas accroire à l'emprunteur qu'il ne pourrait contester la décision, étant observé que c'est la banque qui a pris l'initiative du présent litige et, au demeurant les époux [R] [G] ne le soutiennent pas.



La banque n'étaye pas la fausseté de l'état civil de M. [J] [R] [G] qui ne résulte pas de la circonstance que son livret de famille porte inscription de ce que son père aurait pour patronyme '[U] [J]' alors qu'il produit une copie de la carte nationale d'identité portant l'état civil mentionné dans le dossier de prêt délivrée par la préfecture de [Localité 5] et non arguée de faux.



En revanche, il ne peut qu'être constaté que les époux [R] [G] ne contestent pas la fausseté des bulletins de salaire produit à la banque à l'appui de leur demande de prêt.



Ce n'est évidement pas la différence minime de cotisations aux AGS inscrite sur ceux-ci, en elle-même, qui fonde l'acquisition de la déchéance du terme mais la fausseté des dits bulletins de paie qu'elle révèle, étant ajouté qu'elle ne résultait pas d'une simple lecture de ces pièces.



Or, alors qu'il résulte des bulletins remis à la banque que M. [R] [G] qu'il était employé par la société CNCedric depuis le 1er septembre 2013 et était chef cuisinier au salaire de 36 069,75 euros annuels en 2016 et d'environ 3 100 euros mensuels en 2017, il expose n'avoir pas été chef cuisinier mais cuisinier et produit des bulletins de salaire mentionnant un revenu annuel imposable en 2016 de 12 259 euros soit une somme presque trois fois inférieure à celle indiquée.



Alors que les bulletins de salaire de madame remis à la banque font état d'une embauche le 10 janvier 2016 en qualité d'agent de service par la Société Générale de nettoyage et d'un salaire imposable cumulé de 6 895,44 au mois d'avril 2017 soit

1 723,86 euros mensuels, elle expose qu'elle n'a été embauchée qu'au mois de septembre 2016, à temps partiel et pour un salaire moyen mensuel bien moindre de l'ordre de 400 euros en moyenne alors que son revenu annuel en 2015 était de 1 308 euros et celui de monsieur sur l'avis d'imposition de 26 004 euros.



Il n'est pas contestable que l'importance exacte des revenus des candidats emprunteurs constitue un élément essentiel à la décision d'octroi du prêt et il ressort de ce qui précède qu'en l'espèce la banque démontre avoir été trompée sur ceux-ci dans une proportion déterminante au regard des échéances mensuelles du prêt de 963,49 euros en 299 échéances mensuelles soit presque 25 ans puisque les revenues réels sont inférieurs des deux tiers à ceux émanant des pièces remises.



Enfin, les époux [R] [G] n'objective par aucune pièce ni même par aucune déclaration circonstanciée le fait même qu'un courtier serait intervenu lors de l'octroi du prêt étant observé que l'offre ne mentionne aucun frais de courtage et que la banque expose quant à elle qu'elle s'est vue remettre lesdits documents par les candidats emprunteurs eux-mêmes.



C'est donc à bon droit que le tribunal a jugé que la clause a été régulièrement appliquée et il y a lieu de confirmer le jugement non autrement critiqué, de condamner les époux [R] [G] aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la banque la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS





La cour,

statuant publiquement et contradictoirement,



CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;



Y ajoutant,



CONDAMNE M. [J] [R] [G] et Mme [S] [T] épouse [R] [G] à payer à la société Arkéa Direct Bank à payer à la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;



CONDAMNE M. [J] [R] [G] et Mme [S] [T] épouse [R] [G] aux dépens d'appel.









LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.