18 août 2023
Cour d'appel de Nîmes
RG n° 23/00922

2ème chambre section B

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











ARRÊT N°



N° RG 23/00922 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IX5L



CS



PRESIDENT DU TJ D'AVIGNON

20 février 2023

RG :22/00561



[U]

[Y]



C/



[H]

Etablissement Public MADAME LA PRÉFÈTE DU DÉPARTEMENT DE [Localité 11]



Grosse délivrée

le

à











COUR D'APPEL DE NÎMES



CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section B



ARRÊT DU 18 AOUT 2023





Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Président du TJ d'AVIGNON en date du 20 Février 2023, N°22/00561



COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :



Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l'article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.



COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Nicole GIRONA, Présidente de Chambre

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

M. André LIEGEON, Conseiller



GREFFIER :



Madame Véronique PELLISSIER, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision



DÉBATS :



A l'audience publique du 19 Juin 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 Août 2023.

Les parties ont été avisées que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d'appel.





APPELANTS :



Monsieur [M] [U]

né le 16 Avril 1972 à [Localité 10]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté par Me Claire LANGEVIN de la SELAS PHILAE, Plaidant, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Représenté par Me Anne-catherine VIENS, Postulant, avocat au barreau de NIMES





Madame [O] [Y]

née le 03 Août 1965 à [Localité 7] (USA)

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Claire LANGEVIN de la SELAS PHILAE, Plaidant, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

Représentée par Me Anne-catherine VIENS, Postulant, avocat au barreau de NIMES





INTIMÉS :



Monsieur [R] [H], décédé le 28 mars 2023 à [Localité 8]

assigné le 22 mars 2023 à Etude d'huissier

né le 17 Mars 1962 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Etablissement Public MADAME LA PRÉFÈTE DU DÉPARTEMENT DE [Localité 11]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représentée par Me Myriam SILEM de la SA SASU COMTAT JURIS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CARPENTRAS





Statuant sur appel d'une ordonnance de référé



Ordonnance de clôture du 12 Juin 2023, révoquée sur le siège sur demande conjointe des parties et clôturée à nouveau au jour de l'audience avant l'ouverture des débats,



ARRÊT :



Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Madame Corinne STRUNK, Conseillère pour la Présidente de Chambre empêchée, le 18 Août 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.






EXPOSE DU LITIGE



Par acte notarié dressé le10 août 2012, M. [M] [U] et Mme [O] [Y] ont acquis auprès de M. [Z] [J] une maison d'habitation d'une superficie de 101,35 m², sise [Adresse 1] sur la commune de [Localité 9], cadastrée [Cadastre 3].



Il s'avérait que [R] [H], ancien propriétaire du bien litigieux, avait été condamné le 21 octobre 2009 par le tribunal correctionnel d'Avignon à procéder à la démolition de l'ensemble de l'ouvrage édifié sur la parcelle cadastrée [Cadastre 3] qui correspond en la construction d'une extension de 30 m² en zone non constructible en présence d'un risque d'inondation pour être située à proximité de [Localité 5].





Le 28 juin 2022, M. [P], agent de constatation missionné et assermenté en urbanisme, s'est transporté pour rédiger un état des lieux, a dressé un procès-verbal de constat de non-exécution d'une décision de justice, attestant que M. [H] n'a pas exécuté le jugement n° 2654/09 rendu le 4 octobre 2009 par le tribunal correctionnel d'Avignon.



Sur assignation délivrée le 25 novembre 2022 à la demande de Mme la Préfète de [Localité 11], le juge des référés du tribunal judiciaire d'Avignon , par ordonnance du 20 février 2023, a :



- ordonné, avec le plein bénéfice des délais légaux, l'expulsion de M. [H], M [U] et Mme [Y], et de tous les occupants de leurs chefs et des occupants sans droits ni titre de l'ouvrage irrégulier sis [Adresse 1] - parcelle cadastrées section [Cadastre 3] à [Localité 9] en [Localité 11], le cas échéant avec le concours de la force publique, défense leur étant faite de s'y

réinstaller eux ou tous occupants de leur chef sans droit ni titre,

- ordonné que les meubles se trouvant sur place seront entreposés en un lieu indiqué par les personnes expulsées à leurs frais ou à défaut choisi par le demandeur, en tout local adapté, aux frais, risques et périls de M. [H], M. [U] et Mme [Y] et décrits par le commissaire de justice chargé de l'exécution, avec sommation aux personnes expulsées d'avoir à les retirer dans le délai d'un moins à compter de la signification du procès-verbal d'expulsion ;

- débouté M. [H], M. [U] et Mme [Y] de l'ensemble de leurs demandes, sauf quant aux délais d'expulsion :

- condamné M. [H] à verser la somme de 600,00 euros à Mme la Préfète du département de [Localité 11] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.



Par déclaration du 14 mars 2023, M. [M] [U] et Mme [O] [Y] ont interjeté appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions.



[R] [H] est décédé le 28 mars 2023.



Par des conclusions notifiées le 15 juin 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de leurs moyens et prétentions, M. [M] [U] et Mme [O] [Y], appelants, demandent à la cour, au visa des dispositions de l'article 835 du code de procédure civile, des articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789, de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, puis de l'article 1 du protocole additionnel n°1 à la Convention susvisée, de :

- Vu le décès de M. [H], de prononcer la révocation de l'ordonnance de clôture, de leur donner acte de leur désistement vis-à-vis de ce dernier et de prononcer le désistement partiel à l'égard de M. [H];



- Vu l'absence de trouble illicite et de dommage imminent ainsi que l'inaction de la personne publique pendant plus de 10 ans outre l'absence de tout contrôle de proportionnalité au droit de la propriété et au droit de la vie privée des appelants :

- infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé du 20 février 2023 prononcée par le tribunal judiciaire d'Avignon,

- juger n'y avoir lieu à la moindre expulsion,

- débouter Mme la Préfète du [Localité 11] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- la condamner au paiement de la somme de 3.500,00 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.



Au soutien de leur appel, ils font valoir tout d'abord que les conditions requises à l'article 835 du code de procédure civile ne sont pas remplies en raison de l'inaction de l'autorité préfectorale, de la réalisation des travaux sur la digue ainsi que de leur bonne foi, et qu'en conséquence, aucun trouble manifestement illicite ou dommage imminent n'est caractérisé.



Ils font ensuite état de l'absence de tout contrôle de proportionnalité de l'atteinte à leur droit de propriété et à leur droit à la vie privée expliquant que l'expulsion ordonnée, sur le fondement d'un jugement correctionnel contre M. [H], qui n'est plus propriétaire du bien litigieux, constitue une atteinte disproportionnée à leur droit de propriété et leur droit à une vie privée et familiale.



Au soutien de ce moyen, ils indiquent ignorer la procédure intentée à l'encontre de M. [R] [H], ainsi que sa condamnation par le tribunal correctionnel d'Avignon en date du 4 novembre 2009, soit 3 avant qu'ils ne deviennent propriétaires et 13 ans avant l'assignation en référé.



Ils indiquent être de bonne foi puisqu'ils ont effectué les démarches nécessaires notamment en interrogeant les services du parquet du tribunal judiciaire d'Avignon le 16 octobre 2017 afin de savoir si des procédures pénales entachaient le bien après que la commune de [Localité 9] ait refusé la mise en place d'un compteur électrique définitif sur le terrain litigieux.



Ils entendent préciser que si un procès-verbal de non-exécution d'une décision de justice a été rédigé en date du 28 juin 2022, il ne leur a jamais été notifié puisque les destinataires de ce procès-verbal étaient le maire de [Localité 9], la Direction de l'Urbanisme de ladite mairie, et la Direction Départementale des Territoires.



Ils soulignent que l'article 1 protocole 1 de la Convention EDH impose de considérer que l'atteinte est consommée dès lors qu'elle est effective, peu importe que ce soit par l'une plutôt qu'une autre des règles internes du droit de l'urbanisme.



Ensuite, ils dénoncent de graves troubles disproportionnés à leur vie privée au visa de l'article 8 de la même convention eu égard à leur installation durable en les lieux visés par la démolition, leur endettement à dessein et leur projet de vie.



Ils exposent que si la démolition est en l'espèce déjà actée par le jugement de 2009, sa mise à exécution 13 ans plus tard à l'égard d'un autre propriétaire exige d'effectuer à nouveau ce contrôle de proportionnalité.



Ils rappellent enfin qu'ils ont souscrit un prêt afin d'acquérir le bien litigieux, et qu'au regard des taux d'emprunts actuels, et de l'état de santé de M. [U], il leur sera impossible d'acquérir un nouveau bien pour s'y reloger, aucune solution de relogement n'étant possible à ce jour.





Mme la Préfète de [Localité 11], intimée, par conclusions notifiées le 20 avril 2023, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de leurs moyens et prétentions, sollicite de la cour, au visa de l'article L.211-3 du code de l'organisation judiciaire, de l'article L.480-9 du code de l'urbanisme et des articles 834 et 835 du code de procédure civile, de :

- la juger recevable et bien fondée

- confirmer l'ordonnance en date du 20 février 2023 du juge des référés du tribunal judiciaire d'Avignon

- condamner M. [U] et Mme [Y] in solidum à verser la somme de 1080 € à Mme la Préfète du département de [Localité 11] au titre de l'article 700 du code de la procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.



Mme la Préfète du [Localité 11] soutient l'existence d'un trouble manifestement illicite qui résulte de la construction édifiée en violation du code de l'urbanisme car cette dernière a été réalisée sans permis de construire et en méconnaissance du plan d'occupation des sols en vigueur. Elle ajoute sur ce point qu'il existe un risque inondation, la parcelle étant en Zone Rouge hachurée du P.P.R.I. de [Localité 5], inconstructible en zone inondable.



Elle indique que les appelants n'ont pas été diligents et s'il doit y avoir une responsabilité, elle est à rechercher éventuellement chez le rédacteur de l'acte de vente régularisé par les acquéreurs.



Elle rappelle que le juge des référés dispose d'une compétence générale lui permettant de prescrire toutes mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent afin de faire cesser le trouble manifestement illicite que constitue l'inexécution des mesures de démolition ordonnées judiciairement.



Elle soutient ensuite que les appelants ne démontrent pas une quelconque atteinte à leur droit de propriété ainsi qu'une atteinte disproportionnée au droit au domicile, à la vie privée et familiale n'ayant pas d'enfants mineurs scolarisés.



Elle rejette en effet l'idée d'une atteinte au droit de propriété sur le fondement d'une décision QPC 2020-853 du 31 juillet 2020 du Conseil constitutionnel, laquelle estime que l'article 480-14 du code de l'urbanisme, qui permet la démolition de constructions édifiées en violation du plan local d'urbanisme, n'est pas contraire au droit de propriété dans son principe.





La clôture de la procédure est intervenue le 12 juin 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 19 juin 2023. Par ordonnance du 19 juin 2023, l'ordonnance du 16 mars 2013 a été révoquée pour une nouvelle clôture arrêtée au 19 juin 2023. L'affaire a été mise en délibéré, par disposition au greffe, au 18 août 2023.






MOTIFS DE LA DECISION :



Sur le désistement :



Les appelants demandent à la cour de prononcer le désistement partiel à l'égard de [R] [H] décédé le 28 mars 2023. La cour leur donnera acte de cette demande, la justification de ce décès étant justifié.





Sur le fond :



L' article 835 alinéa 1 du code de procédure civile prévoit que le président du tribunal judiciaire, ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.



La violation des dispositions légales et réglementaires en matière d'urbanisme constitue un trouble manifestement illicite au sens de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile, qu'il appartient au juge des référés de faire cesser, notamment en ordonnant l'expulsion des occupants des lieux construits de manière illicite.



Le tribunal correctionnel d'Avignon, dans sa décision rendue le 21 octobre 2009, a condamné [R] [H] à procéder à la démolition de l'ensemble de l'ouvrage édifié sur la parcelle cadastrée [Cadastre 3] située sise [Adresse 1] sur la commune de [Localité 9]. Le tribunal sanctionnait l'édification d'une extension de 30 m² du bâtiment, le tout situé en zone non constructible en présence d'un risque d'inondation majeur pour être situé à proximité de [Localité 5] dans 'la zone la plus exposée en cas de rupture de la digue dont la DDEA pointe le caractère insuffisant' et ce sans autorisation et en violation du plan d'occupation des sols.



Le tribunal relevait que '[R] [H] avait en parfaite connaissance de cause d'abord acheté le bien immobilier, a ensuite effectué d'importants travaux puis a procédé à sa vente...'.



Il est à relever que le juge pénal a ordonné la démolition de l'ensemble immobilier, puisque la totalité de l'habitation est située en zone non constructible et inondable sans qu'aucune autorisation n'ait été accordée par l'administration; le tribunal correctionnel n'a pas entendu limiter la démolition à l'extension de 30 m² contrairement à ce qu'avancent les appelants dans leurs écritures.



Ceci étant, la preuve de la non-exécution de la décision susvisée est rapportée par le procès-verbal de constatation dressé le 28 juin 2022 par M. [P], agent de constatation missionné et assermenté en urbanisme, qui a témoigné de la non-exécution d'une décision de justice, attestant que M. [H] n'a pas exécuté le jugement n° 2654/09 rendu le 21 octobre 2009 par le tribunal correctionnel d'Avignon.



Les appelants, qui ne contestent pas cette non-exécution, soutiennent néanmoins ignorer l'existence d'une telle décision et l'obligation de détruire l'habitation, dont ils n'ont pas été informés lors de l'acquisition de l'immeuble, soulignant que le jugement du 21 octobre 2009 concerne uniquement [R] [H]. Ils opposent l'atteinte disproportionnée au droit de propriété revendiquant également la protection de leur vie privée et familiale soutenant que le risque d'inondation n'est plus comparable à celui existant en 2009 au regard des travaux de renforcement du système existant réalisé entre 2015 et 2017. Ils produisent en ce sens en pièce 3 un document se référant expressément à ces travaux indiquant que le système actuel assure un niveau de protection correspondant à des crues centenaires de 5000 m3 et à un niveau de sûreté vérifié pour les crues les plus exceptionnelles.



En l'état, au regard du procès-verbal susvisé, dont la force probante n'est pas discutée, il est constant qu'en dépit de la condamnation pénale, la démolition de la construction irrégulière sur la parcelle [Cadastre 3] n'est toujours pas intervenue.



Le moyen selon lequel la condamnation ne concerne pas les appelants est cependant inopérant quant à l'obligation de démolition, puisqu'il résulte du jugement du 21 octobre 2009 que 'la revente du bien ne s'oppose pas, ainsi qu'il est jugé par une jurisprudence constante, au prononcé de mesures de restitution, mesures à caractère réel qui suivent le bien et doivent être exécutées même en cas de changement de propriétaire'.



Le refus d'exécuter une décision de justice ayant force de chose jugée est en soi constitutif d'un trouble manifestement illicite et permet en outre, en application de l'article 480-9 du code de l'urbanisme, à l'autorité administrative compétente de procéder aux travaux nécessaires à son exécution telle qu'une mesure d'expulsion.



Cependant, le droit au respect de la vie privée et familiale est un droit fondamental pour garantir à l'individu la jouissance effective des autres droits fondamentaux.



Il s'ensuit que dans le cadre d'une procédure d'expulsion, il doit être recherché si la mesure ordonnée est proportionnée au regard de ce droit.



En l'espèce, il est justifié dans l'acte de vente reçu le 10 août 2012 par Me [L], notaire à [Localité 6], que les consorts [Y]/[U] ont fait l'acquisition auprès de [Z] [J], par suite de l'acquisition faite de [R] [F] le 28 juillet 2008, 'd'une maison d'habitation de 101,35 m² avec terrain attenant clos et arboré figurant au cadastre sous la référence section [Cadastre 3]" au prix de 220.000 euros sans qu'ils n'aient été avisés à ce moment là de l'existence de cette condamnation ou du caractère illégal de la construction nécessitant sa démolition sauf à être informés de la localisation de l'immeuble dans le périmètre d'exposition délimité par le plan de prévention des risques naturels prescrit et approuvé le 21 janvier 2002 et 23 mai 2001 (inondation et crues torrentielles).



Il est en effet indiqué dans l'acte de vente que 'le vendeur a déclaré qu'il n'était frappé d'aucune mesure restreignant son pouvoir de disposer librement du bien vendu'.



Enfin, s'agissant de la partie 'procès avec la commune', l'acte de vente mentionne que 'la commune de [Localité 9] a intenté une action contre le vendeur pour exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, faits commis entre le 1er avril 2008 jusqu'au 30 avril 2008. L'affaire a été appelée à l'audience du 16 février 2011 et renvoyée en délibéré au 21 juin 2011. Par jugement correctionnel en date du 5 juillet 2011, le tribunal de grande instance d'Avignon a débouté la commune de [Localité 9] sur ses demandes et a relaxé le vendeur des fins de poursuite'.



Pour finir, il est justifié qu'après avoir essuyé un refus pour le déplacement d'un coffre électrique et en suite d'un courrier adressé à la mairie en 2017, les appelants n'ont pas été informés par la commune de [Localité 9] du caractère illégal de leur construction ni de la nécessité de procéder à sa démolition.



C'est donc en parfaite bonne foi que les appelants ont fait l'acquisition d'un immeuble et l'ont occupé pendant 11 années et y ont établi leurs intérêts ignorant à cet égard l'existence de la condamnation pénale et que l'habitation était vouée à être détruite, éléments qu'ils ont découverts seulement en 2022 lors de l'assignation délivrée par la Préfète de [Localité 11]. Le maintien dans le logement n'est donc en rien une violation manifeste et volontaire des règles d'urbanisme et d'une décision de justice.



Au vu de ces éléments, l'exécution forcée de la décision du tribunal correctionnel, rendue le 21 octobre 2009, constitue une atteinte à la vie privée et familiale des consorts [Y]/[U] prohibée par l'article 8 de la CEDSH, les appelants ignorant tout du conflit ayant opposé la commune de [Localité 9] à [R] [H] et l'obligation de démolition découlant de la décision de justice dont il est réclamé l'exécution près de 13 années après son prononcé excluant de ce seul fait l'existence d'un dommage imminent au sens de l'article 835 al 1er du code de procédure civile.



Les appelants se trouvent ainsi confrontés à une demande d'expulsion de leur logement, qu'ils ont acquis au moyen d'un prêt immobilier comme le révèle l'acte de vente, en sanction d'une décision de justice à laquelle ils ne sont pas parties et sont contraints de se reloger alors qu'ils doivent poursuivre le paiement d'un prêt immobilier dont la charge va réduire considérablement leur capacité financière pour trouver un nouvel hébergement.



Il paraît en outre excessif d'ordonner en référé une mesure d'expulsion en raison de la violation de règles d'urbanisme impératives et d'une condamnation pénale près de 13 années après la condamnation initiale et alors même que les appelants ont découvert leur existence seulement le 25 novembre 2022 au moment de la délivrance de l'assignation à la demande de Mme la Préfète de [Localité 11].



Pour l'ensemble de ces considérations, il convient d'infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions et dire n'y avoir lieu à référé compte-tenu de l'atteinte à la vie privée et familiale prohibée telle qu'énoncée par l'article 8 de la CEDSH qu'entraînerait la mesure d'expulsion.



En cause d'appel, il convient de laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens.



L'équité commande de ne pas faire droit aux demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.





PAR CES MOTIFS :



La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référés et en dernier ressort,





Donne acte à M. [M] [U] et Mme [O] [Y] de leur désistement d'appel à l'encontre de [R] [H],



Infirme l'ordonnance de référé rendue le 20 février 2023 par le juge des référés du tribunal judiciaire d'Avignon, en toutes ses dispositions,



Statuant à nouveau,



Dit n'y avoir lieu à référé,



Dit n'y avoir lieu à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,



Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens.



Arrêt signé par la conseillère pour la présidente empêchée et par la greffière.





LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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