24 mai 2023
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-10.207

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2023:SO00584

Texte de la décision

SOC.

CZ



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 24 mai 2023




Rejet


Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 584 F-D

Pourvoi n° Z 22-10.207

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de Mme [T].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 avril 2022.





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 24 MAI 2023

L'association Présence active personnes agées de la ville de Lyon,(PAPAVL), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 22-10.207 contre l'arrêt rendu le 12 novembre 2021 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant à Mme [L] [T], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'association Présence active personnes agées de la ville de Lyon, de la SCP Thouvenin, Coudray

et Grévy, avocat de Mme [T], après débats en l'audience publique du 12 avril 2023 où étaient présentes Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, Mme Laplume, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L.431-3 alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 12 novembre 2021), Mme [T] a été engagée à compter du 2 janvier 2015, en qualité d'aide à domicile, suivant contrat à temps partiel, par l'association Présence active personnes âgées de la ville de Lyon (l'association), spécialisée dans le secteur de l'aide à domicile et le maintien des personnes âgées à domicile.

2. Elle a également conclu, entre janvier et avril 2015, des contrats de travail d'aide à domicile avec six particuliers, bénéficiaires de prestations d'aide à domicile, dans le cadre de mandats conclus par ces derniers avec l'association.

3. Victime d'un accident du travail et déclarée, par le médecin du travail, inapte de manière définitive à son poste et apte à un poste de type administratif, la salariée a été licenciée le 29 décembre 2016.

4. Estimant que l'association était son véritable employeur dans le cadre des contrats de travail qu'elle avait conclus avec les six employeurs particuliers et contestant la rupture de son contrat de travail, la salariée a saisi la juridiction prud'homale.

Examen des moyens

Sur le second moyen


5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. L'association fait grief à l'arrêt de dire qu'elle est le véritable employeur de Mme [T] dans le cadre des relations de travail entre celle-ci d'une part, et Mme [M], M. [W], Mme [B], Mme [V], Mme [E] et M. [R] d'autre part, de dire que le contrat de travail qu'elle a conclu relève, dans le cadre de l'exécution des prestations de travail au profit de ces derniers de la convention collective nationale de l'aide, de l'accompagnement, des soins et des services à domicile, de la condamner à remettre à Mme [T] des bulletins de salaire et documents de fin de contrat et à lui verser des sommes sur la période de janvier 2015 au 29 décembre 2016, alors :

« 1°/ que les personnes morales qui interviennent dans le domaine de l'assistance aux personnes âgées ayant besoin d'une aide favorisant leur maintien à domicile, peuvent exercer leur mission en tant que prestataire de services avec leurs moyens en matériel et personnel auprès de ces personnes, ou en tant que mandataires de ces personnes qui emploient directement leurs salariés, en accomplissant pour leur compte toute démarche administrative fiscale et sociale liée à ces emplois ; qu'il était constant en l'espèce que Mme [T] était, en sa qualité d'aide à domicile, à la fois salariée de l'association pour 84 heures mensuelles, et également salariée de plusieurs personnes âgées auprès desquelles l'association intervenait en tant que mandataire ; que l'association faisait valoir que si elle planifiait les interventions de Mme [T] auprès des personnes âgées qui employaient directement cette dernière et si elle validait ses congés, elle le faisait afin de coordonner les interventions de Mme [T] auprès de ces personnes dont elle était mandataire, avec les interventions effectuées par Mme [T] auprès d'autres personnes dans le cadre du contrat de travail qui les liait ; qu'en retenant que Mme [T] travaillait sous l'autorité de l'association qui avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives y compris lorsqu'elle intervenait auprès des personnes âgées à qui elle était liée par un contrat de travail, après avoir relevé qu'elle planifiait les interventions de Mme [T], modifiait les plannings et validait ses congés, sans distinction entre les personnes auprès desquelles elle intervenait, et que Mme [T] lui rendait compte de ses interventions pour l'ensemble des personnes auprès desquelles elle travaillait, sans rechercher, comme elle y était invitée, si cette intervention de l'association n'était pas justifiée par le fait qu'elle était employeur de Mme [T] pour une partie de l'activité de cette dernière et mandataire des particuliers qui employaient Mme [T] pour le reste de son activité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 7232-6 du code du travail ;

2°/ que l'association faisait valoir que les particuliers qui l'employaient décidaient seuls de son recrutement et informaient directement Mme [T] de leurs absences sans passer par l'association ; qu'en retenant que Mme [T] travaillait sous l'autorité de l'association qui avait le pouvoir de lui donner des ordres et des directives y compris lorsqu'elle intervenait auprès des personnes âgées à qui elle était liée par un contrat de travail, sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que lorsqu'elles interviennent comme mandataires des particuliers employeurs, les associations sont chargées pour le compte de ces derniers, de l'accomplissement des formalités administratives et des déclarations sociales et fiscales liées à l'emploi de leurs salariés ; que l'association faisait en l'espèce valoir que si elle faisait remplir des fiches de présence à Mme [T] et lui demandait de l'informer de ses absences lorsqu'elle intervenait auprès des particuliers qui l'employaient, c'était dans le but d'établir ses bulletins de paie dans le cadre du contrat de mandat qui la liait à ces particuliers, de même que c'était en sa qualité de mandataire de ces derniers qu'elle avait licencié Mme [T] ; qu'en retenant que l'association avait exercé un pouvoir de contrôle et de sanction à l'égard de Mme [T], matérialisé par l'obligation faite à cette dernière de remplir des fiches de présence, et par le fait que c'était l'association qui avait rompu les contrats de travail liant Mme [T] aux particuliers employeurs, sans rechercher, comme elle y était invitée, si ces circonstances n'étaient pas inhérentes au contrat de mandat liant l'association aux particuliers employeurs de Mme [T], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 7232-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve, a constaté, par motifs propres et adoptés, que s'agissant des prestations de Mme [T] dans le cadre des contrats de travail qu'elle avait conclus avec six particuliers, l'association planifiait ses interventions, validait les modifications de planning qu'elle lui communiquait via une application téléchargée sur un téléphone professionnel qu'elle lui fournissait, que Mme [T] rendait compte à l'association de toute difficulté rencontrée, devait observer toutes les instructions et consignes, qu'elle transmettait à l'association ses feuilles de présence comprenant ses heures d'arrivée et de départ et la sollicitait pour ses congés, qu'il lui était interdit de traiter de « gré à gré » avec les particuliers et d'accepter de la personne aidée des tâches non approuvées par l'association qui ne correspondaient ni au planning ni aux instructions de son responsable et qu'elle avait été licenciée par l'association pour le compte de deux personnes âgées dans le cadre des contrats de travail conclus avec ces dernières.

8. Ayant ainsi relevé que dans le cadre de cette prestation, Mme [T] avait travaillé sous l'autorité de l'association qui avait le pouvoir de lui donner des ordres et directives, d'en contrôler l'exécution et de la sanctionner en disposant du pouvoir de rompre le contrat de travail, la cour d'appel, procédant aux recherches prétendument omises et sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire que les conditions de travail étaient déterminées unilatéralement par l'association et qu'il existait entre l'intéressée et cette dernière un lien de subordination de sorte qu'elle était son véritable employeur.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.


PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association Présence active personnes agées de la ville de Lyon aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Présence active personnes agées de la ville de Lyon et la condamne à payer à la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy la somme de 3.000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille vingt-trois.

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