7 mars 2023
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 21/02433

Chambre 1-1

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-1



ARRÊT EN MATIERE REGLEMENTAIRE

DU 07 MARS 2023



N° 2023/ D01





Rôle N° RG 21/02433 - N° Portalis DBVB-V-B7F-BG65F



[W] [P] [V] [R]



C/

CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS

PROCUREUR GENERAL

BATONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE NICE



















Copie exécutoire délivrée le :

à :



Notification par LRAR



- Me HOANG

- M. Le Bâtonnier

- CONSEIL DE L'ORDRE

- Ministère public



Copie par LS :



- Me Philippe KLEIN

- Me Thierry TROIN



Décision déférée à la Cour :



Décision en date du 05 Février 2021, rendue par le Conseil de l'ordre des avocats au barreau de NICE.



APPELANT



Maître Thê Vinh Bernard HOANG

né le [Date naissance 2] 1955 à [Localité 5] (VIETNAM) , demeurant [Adresse 1]



Non comparant

représenté par Me Philippe KLEIN de la SCP RIBON KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Pascale KLEIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE









INTIMES



CONSEIL DE L'ORDRE DES AVOCATS AU BARREAU DE NICE

demeurant [Adresse 4]



et



Monsieur le BATONNIER DE L'ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE NICE,

demeurant [Adresse 4]



ensemble représentés par Me Thierry TROIN de la SELARL BENSA & TROIN AVOCATS ASSOCIÉS, avocat au barreau de NICE substituée par Me Benoît PORTEU DE LA MORANDIERE, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE





Madame la PROCUREURE GENERALE

demeurant [Adresse 3]



représentée par Monsieur Thierry VILLARDO, avocat général















*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR









L'affaire a été débattue, à la demande des parties et sans opposition, en audience publique le 25 Janvier 2023 en audience solennelle tenue dans les conditions prévues par l'article R 312-9 du code de l'organisation judiciaire devant la Cour composée de :



M. RENAUD LE BRETON DE VANNOISE, Premier Président

Monsieur Olivier BRUE, Président

Madame Anne SEGOND, Présidente

Mme Danielle DEMONT, Conseiller

Madame Louise DE BECHILLON, Conseillère



qui en ont délibéré





Greffier lors des débats : Madame Céline LITTERI





Ministère Public : Monsieur Thierry VILLARDO, avocat général, présent uniquement lors des débats



DEROULEMENT DES DEBATS





Mme DEMONT, Conseillère, est entendue en son rapport,



Me Pascale KLEIN, conseil de l'appelant, est entendue en sa plaidoirie,



Monsieur Thierry VILLARDO, avocat général est entendu en ses réquisitions,



Me Benoît PORTEU DE LA MORANDIERE, conseil des intimés, est entendu en sa plaidoirie,



Me Pascale KLEIN, conseil de l'appelant, a eu la parole en dernier





Sur quoi les débats sont déclarés clos et l'affaire mise en délibéré, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe de la cour le 07 mars 2023







ARRÊT





Contradictoire

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 Mars 2023.





Signé par M. RENAUD LE BRETON DE VANNOISE, Premier Président et Madame Céline LITTERI, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


















EXPOSE DU LITIGE



Par délibération en date du 1er février 2021 notifiée à l'intéressé le 5 février 2021, le Conseil de l'Ordre des avocat de Nice a prononcé l'omission de Me [V] [W][P] [R] du tableau, au visa de l'article 105 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.



Pour motiver l'omission, le Conseil de l'ordre retient que Me [W][P] [R], régulièrement convoqué, n'a pas comparu, ayant informé le bâtonnier de son absence pour des raisons de santé ; qu'il ne dispose pas de renseignements émanant de Maître [W][P] [R] concernant son exercice professionnel, en suite de la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la Selarl [R], dont il était l'unique associé ; et que Me [R] produit divers certificats médicaux laissant apparaître que cet avocat ne peut pas se déplacer à plus de 3 km de son domicile, ce qui implique l'impossibilité pour lui d'exercer son activité professionnelle.



Par lettre recommandée dont il été accusé réception le 17 février 2021, Me [V] [W][P] [R] a déféré à la cour cette délibération, en faisant valoir au soutien de son recours qu'il n'a jamais été entendu en ses explications, ni convoqué à cet effet ; et qu'il n'est concerné par aucun des cas énumérés par l'article 105 du décret du 27 novembre 1991 visé par le conseil de l'ordre relatif à «une maladie ou infirmité graves ».



*

À l'audience des plaidoiries, Me Hoang, absent, représenté par Me [B] qui ne s'est pas opposé à l'évocation de l'affaire en audience publique, s'en rapporte aux termes de son recours, ajoutant qu'il demande à être inscrit afin de pouvoir prétendre au bénéfice d'une pension de retraite.



*

Par conclusions communiquées aux autres parties par RPVA le 13 avril 2021, reprises oralement à l'audience des plaidoiries, le ministère public en la personne du procureur général, a conclu à l'irrecevabilité du recours, et subsidiairement, à son rejet.



Le ministère public fait valoir, sur la recevabilité, que faute d'avoir exercé le recours préalable prévu par l'article 15 du décret du 27 novembre 1991, le recours prévu à l'article 16 n'est pas recevable.

Sur le fond il soutient :

' qu' aux termes de I 'article 105 du décret susvisé, « Peut être omis du tableau :

1° L'avocat qui, soit par l' effet d 'une maladie ou infirmité graves ou permanentes, soit par acceptation d'activités étrangères au barreau, est empêché d'exercer réellement son activité ;

(')

3° L'avocat qui, sans motifs légitimes, n'exerce pas effectivement sa profession . »

' que Me [W][P] [R] dont la Selarl a fait l 'objet d'une liquidation judiciaire ne peut pas exercer dans ce cadre ; qu'invité à s'expliquer sur ce point par le Conseil de l'ordre, il a produit lui-même un certificat médical faisant mention d'une incapacité à se déplacer à plus de 3 km de

son domicile ; et que Me [W][P] [R] ne justifie pas que son état de santé, incompatible avec l'exercice de sa profession, laquelle suppose de nombreuses allées et venues, se serait amélioré ni qu'il se trouverait juridiquement en capacité d'exercer sa profession suite à la procédure collective ayant affecté sa structure d'exercice.



*

Le bâtonnier d'Aix -en-Provence représentant le Conseil de l'ordre des avocats au barreau de Nice, a été entendu en sa plaidoirie.

Il a repris oralement ses conclusions du 29 avril 2021, dont le conseil de Me [R] a déclaré avoir eu connaissance, par lesquelles il demande à la cour, à titre principal, de déclarer le recours de Maitre [W][P] [R] irrecevable, à titre subsidiaire, de le débouter de sa demande, et de le condamner à lui payer la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.



Le Conseil de l'ordre des avocats au barreau de Nice expose que par jugement en date du 2 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Nice a prononcé la clôture des opérations de liquidation judiciaire de la Selarl [R] pour insuffisance d'actif ; que par lettres des 10 novembre et 10 décembre 2020, le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice a convoqué M. [W][P] [R] aux fins d'omission devant le conseil de l'ordre pour le 7 décembre 2020, puis le 11 janvier 2021 ; que M. [W][P] [R] a demandé le report du fait de son état de santé et qu'il a été de nouveau convoqué, le 12 janvier 2021, pour la séance du 1er février 2021 à 15 heures ; qu'il a écrit afin de solliciter un nouveau report du fait de son état de santé jusqu'au 30 avril 202, terme d'un nouvel arrêt travail ; que c'est dans ces conditions que son omission a été prononcée par délibération en séance du 1er février 2021 notifiée le 5 février 2021 ; et que les 15 et 17 février 2021, la demande de remise en fonction de la clé RPVA de la Selarl [R] a été rejetée, compte tenu de l'omission décidée.



Le Conseil de l'ordre soutient en premier lieu qu'en l'absence de réclamation préalable édictée par l'article 15, le recours prévu à l'article 16 du décret formé par Me [W][P] [R] est irrecevable.



Le Conseil soutient au fond que les demandes répétées de report de comparution devant le conseil de l'ordre sur une période de plus de six mois démontrent l'impossibilité d'exercice de la profession d'avocat tout autant que le certificat médical produit, indiquant que M. [W][P] [R] ne peut pas se déplacer à plus de 3 km de chez lui pendant trois mois.

Il ajoute que la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de la Selarl a placé cette dernière dans l'impossibilité d'exercer la profession d'avocat en application des articles 11 de la loi du 31 décembre 1971 selon lequel« Nul ne peut accéder à la profession d'avocat s'il ne remplit pas les conditions suivantes (') et 104 du décret du 27 novembre 1991 édictant que « Doit être omis du tableau l'avocat qui se trouve dans un des cas d'exclusion ou d'incompatibilité prévus par la loi ou qui ne satisfait pas aux obligations de garantie et d'assurance prévues par l'article 27 de la loi du 31 décembre 1971 »



Le Conseil de l'ordre précise que M. [W][P] [R], interrogé sur son activité professionnelle, n'explique pas son mode d'exercice et indique au conseil de l'ordre qu'il est en arrêt maladie ; qu'il continue de correspondre sur son papier à en-tête de Selarl, ce qui lui est formellement interdit ; que surtout il continue de réaliser des actes juridictionnels puisqu'il représente une partie, par une assignation du 12 janvier 2021 devant le tribunal judiciaire de Bastia (pièce 10) puis selon une assignation du 23 février 2021 devant le juge du contentieux de la protection de Menton (pièce 11); que l'avocat qui continue d'exercer ses activités d'avocat, alors qu'il est sous le coup d'une liquidation judiciaire qui lui interdit d'exercer, manque à l'honneur et à la probité, ce que rappelle un arrêt de la cour d'appel de Paris rendu le 27 janvier 2011.

Par voie de conséquence la liquidation judiciaire de la SELARL [R], seul mode d'exercice dont a fait le choix M. [W][P] [R], conduit selon l'Ordre à l'absence d'exercice de la profession d'avocat par M. [W][P] [R] .



*

Le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau d'Aix-en-Provence représentant le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Nice a été entendu en ses observations.



*

Le conseil Me [R] a été entendu en dernier.




Motifs



Attendu qu'il résulte de l'article 15 du décret du 27 novembre 1991 que « Lorsqu'un avocat s'estimant lésé par une délibération ou une décision du conseil de l'ordre entend la déférer à la cour d'appel, conformément au deuxième alinéa de l'article 19 de la loi du 31 décembre 1971, il saisit préalablement à sa réclamation le bâtonnier par lettre recommandée avec demande d'accusé dans

le délai de deux mois à compter de la date de notification ou de la publication de la délibération ou de la décision.



La décision du conseil de l'ordre sur la réclamation doit être notifiée à l'avocat intéressé par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception, dans le délai d'un mois à compter de la réception de la lettre recommandée prévue au premier alinéa.



En cas de décision de rejet de la réclamation, l'avocat peut la déférer à la cour d'appel dans les conditions prévues à l'article 16. Si, dans le délai d'un mois prévu au deuxième alinéa, aucune décision n'a été notifiée, la réclamation est considérée comme rejetée et l'avocat peut déférer dans les mêmes conditions à la cour d'appel le rejet de sa réclamation. »



Attendu que le recours formé directement devant la cour par Me [R] contre la délibération du 1er février 2021, alors qu'il n'a pas exercé la réclamation préalable devant le bâtonnier prévue par cet article 15 du décret du 27 novembre 1991, n'est pas recevable ;



Attendu qu'il y a lieu en conséquence d'accueillir la fin de non recevoir soulevée par le ministère public, le bâtonnier et le conseil de l'ordre ;

Il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.



La partie perdante est condamnée aux dépens conformément aux disposition de l'article 696 du code de procédure civile.



PAR CES MOTIFS



La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,



Déclare irrecevable le recours formé le 17 février 2021 par Me [R] contre la délibération du Conseil de l'ordre des avocats au barreau de Nice en date du 1er février 2021.



Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.



Condamne Me [R] aux dépens.



LE GREFFIER LE PRESIDENT

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