14 décembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-21.411

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO01404

Texte de la décision

SOC.

OR



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 décembre 2022




Cassation partielle


Mme MONGE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 1404 F-D

Pourvoi n° H 21-21.411




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 DÉCEMBRE 2022

M. [T] [G], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 21-21.411 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2021 par la cour d'appel de Versailles (19e chambre), dans le litige l'opposant à la Société technique et commercial automobile, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Flores, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [G], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la Société technique et commercial automobile, après débats en l'audience publique du 16 novembre 2022 où étaient présents Mme Monge, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Flores, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 juin 2021), M. [G] a été engagé, le 1er janvier 2007, en qualité de directeur par la Société technique et commercial automobile.

2. Le salarié a été placé en arrêt de travail du 1er janvier 2011 jusqu'à la fin du mois de janvier 2012. Il a repris le travail dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique jusqu'en août 2012. Il a fait valoir ses droits à la retraite par lettre du 19 janvier 2013.

3. Le 11 mai 2015, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture et de l'exécution de son contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes au titre des heures complémentaires, des congés payés et de l'indemnité pour travail dissimulé, alors « que les juges ont l'obligation d'examiner tous les documents régulièrement versés débats par le salarié afin de présenter, à l'appui de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies ; qu'en s'abstenant d'examiner le décompte des heures de travail du salarié détaillant ses heures d'arrivée et de départ, le nombre d'heures de travail journalier et hebdomadaire, les réunions tenues, le relevé de mise en service et d'extinction de l'alarme où apparaît le nom de M. [G], le tableau récapitulatif des horaires individuels des salariés de l'entreprise où M. [G] figurait à temps complet, l'attestation de M. [Y] témoignant d'un travail à temps complet, et les échanges de courriel illustrant la charge de travail de M. [G] dont il résultait que ce dernier présentait, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code civil, ensemble l'article L. 3171-4 du code du travail. »





Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

6. Pour rejeter les demandes au titre des heures complémentaires et du travail dissimulé, l'arrêt retient que la production par le salarié d'un décompte qui fait ressortir des chiffres différents et qui ne contient pas de calcul des heures revendiquées par semaine civile mais par mois, ne permet pas d'étayer la demande par des éléments suffisamment précis et cohérents quant aux horaires prétendument réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

7. En statuant ainsi, sans examiner, même sommairement, le relevé de pointage, le décompte journalier des heures de travail, le tableau récapitulatif des horaires individuels des salariés de l'entreprise et l'attestation d'un autre salarié, que le salarié produisait au soutien de sa demande au titre des heures travaillées et non rémunérées, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

8. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour violation de l'obligation de sécurité résultant du non-respect du mi-temps thérapeutique, des durées maximales de travail et du repos journalier et hebdomadaire, alors « que le salarié placé en mi-temps thérapeutique subit nécessairement un préjudice du fait de la méconnaissance répétée de son mi-temps thérapeutique ainsi que de la durée maximale du travail et de la durée des repos journaliers et hebdomadaires ; qu'en reprochant au salarié placé en mi-temps thérapeutique de ne pas avoir rapporté la preuve de son préjudice, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-18, L. 3121-20, L. 3121-22 et L. 3132-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3121-35, alinéa 1, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, interprété à la lumière de l'article 6 b) de la directive n° 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 :

9. Il résulte de ce texte que le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation.

10. Pour débouter le salarié de sa demande en dommages-intérêts pour violation de l'obligation de sécurité résultant du non-respect du mi-temps thérapeutique, des durées maximales de travail et du repos journalier et hebdomadaire l'arrêt retient que le salarié ne justifie en tout état de cause d'aucun préjudice à ce titre, se bornant à invoquer un préjudice nécessaire.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [G] de ses demandes au titre des heures complémentaires, des congés payés et de l'indemnité pour travail dissimulé et à titre de dommages-intérêts pour violation de l'obligation de sécurité résultant du non-respect du mi-temps thérapeutique, des durées maximales de travail et du repos journalier et hebdomadaire, et en ce qu'il statue sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens, l'arrêt rendu le 9 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la Société technique et commercial automobile aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Société technique et commercial automobile et la condamne à payer à M. [G] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [G]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

M. [G] fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de l'AVOIR débouté de ses demandes au titre des heures complémentaires accomplies, des congés payés afférents, et de l'indemnité pour travail dissimulé.

ALORS QUE les juges ont l'obligation d'examiner tous les documents régulièrement versés débats par le salarié afin de présenter, à l'appui de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies ; qu'en s'abstenant d'examiner le décompte des heures de travail du salarié détaillant ses heures d'arrivée et de départ, le nombre d'heures de travail journalier et hebdomadaire, les réunions tenues, le relevé de mise en service et d'extinction de l'alarme où apparaît le nom de M. [G], le tableau récapitulatif des horaires individuels des salariés de l'entreprise où M. [G] figurait à temps complet, l'attestation de M. [Y] témoignant d'un travail à temps complet, et les échanges de courriel illustrant la charge de travail de M. [G] dont il résultait que ce dernier présentait, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code civil, ensemble l'article L. 3171-4 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

M. [G] fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de l'AVOIR débouté de sa demande de dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité résultant du non-respect du mi-temps thérapeutique, des durées maximales de travail et du repos journaliers et hebdomadaires.

1° ALORS QUE la cassation à intervenir au titre du premier moyen entraînera par voie de conséquence celle du présent moyen dirigé contre le chef du dispositif attaqué par le présent moyen en application de l'article 624 du code de procédure civile.

2° ALORS QUE le salarié placé en mi-temps thérapeutique subit nécessairement un préjudice du fait de la méconnaissance répétée de son mi-temps thérapeutique ainsi que de la durée maximale du travail et de la durée des repos journaliers et hebdomadaires ; qu'en reprochant au salarié placé en mi-temps thérapeutique de ne pas avoir rapporté la preuve de son préjudice, la cour d'appel a violé les articles L. 3121-18, L. 3121-20, L. 3121-22 et L. 3132-2 du code du travail.

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