28 septembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-12.292

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:CO00539

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 septembre 2022




Rejet


Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 539 F-D

Pourvoi n° V 21-12.292




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 28 SEPTEMBRE 2022

La société Seafoodia, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 21-12.292 contre l'arrêt rendu le 22 octobre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-1), dans le litige l'opposant à la société Candis, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Comte, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société Seafoodia, de la SCP Richard, avocat de la société Candis, après débats en l'audience publique du 21 juin 2022 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Comte, conseiller référendaire rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 octobre 2020), le 1er juillet 2013, la société Seafoodexport, devenue la société Seafoodia, qui a pour activité le négoce et la vente en gros de produits frais et congelés de la mer, et la société Candis ont signé un contrat d'agent commercial à durée déterminée, avec la possibilité pour les parties de résilier le contrat avant son terme. L'article 9 intitulé « fin du contrat » stipule que « La partie qui entendrait mettre fin au contrat devra en informer son co-contractant par lettre recommandée avec accusé de réception en respectant un préavis de six mois. Conformément à la loi du 25 juin 1991 et au caractère d'intérêt commun du présent mandat, la résiliation du contrat par le mandant, si elle n'est pas justifiée par une faute grave de l'agent ou un cas de force majeure, ouvrira droit au profit de ce dernier ou de ses héritiers à une indemnité compensatrice du préjudice subi, calculée en fonction de la plus élevée des sommes correspondant à la moyenne annuelle des commissions hors taxe perçues par l'agent au cours des deux dernières années précédant la rupture. »

2. Par lettre du 6 octobre 2015, la société Seafoodia a notifié à la société Candis la résiliation du contrat, avec effet au 6 avril 2016, en s'engageant à lui verser l'indemnité compensatrice.

3. Contestant les conditions de la rupture et estimant que la société Seafoodia restait lui devoir des commissions ainsi que celles restant à percevoir jusqu'au terme du contrat initialement prévu, la société Candis l'a assignée en paiement des sommes correspondantes.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La société Seafoodia fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Candis les commissions au taux contractuel de 3 % sur toutes factures émises par elle à l'attention des sociétés Auchan, Cora, Carrefour, Grand Frais, Intermarché ou de l'un quelconque de leurs adhérents pour la période du 6 avril 2016 au 30 juin 2018 avec intérêts de droit du jour de l'émission de chaque facture, de la condamner en application de l'article L. 134-12 du code de commerce à payer à la société Candis une indemnité de cessation de contrat égale à deux années de commissions brutes, soit 3 % des factures émises par la société Seafoodia en 2016 et 2017 à l'attention des sociétés Auchan, Cora, Carrefour, Grand Frais, Intermarché ou de l'un quelconque de leurs adhérents sous déduction des sommes susvisées et versées en exécution du jugement du 29 novembre 2017, alors « qu'aucune règle d'ordre public ne fait obstacle à ce qu'un contrat d'agent commercial à durée déterminée comporte une faculté de résiliation en cours d'exécution du contrat à disposition de chacune des parties ; qu'en l'espèce, pour faire droit aux demandes de la société Candis tendant au paiement de commissions sur les ventes faites postérieurement à la résiliation du contrat d'agent commercial par le mandant, soit du 6 avril 2016 au 30 juin 2018, et une indemnité de fin de contrat incluant dans son assiette de calcul les commissions sur les ventes réalisées du 6 avril 2016 au 30 juin 2018, la cour d'appel a relevé qu'il résulte des articles L. 134-12 et L. 134-16 du code de commerce, qui sont des dispositions d'ordre public économique, que l'agent commercial ne peut être privé, par une clause ou une convention, de son indemnité de fin de contrat, que l'article L. 134-12 du code de commerce énonce que, en ce cas, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi et l'article L. 134-16 du même code répute non écrite toute clause ou convention dérogeant à cette règle au détriment de l'agent ; que la cour d'appel a ajouté que l'article 3.2 du contrat d'agent commercial litigieux, prévoyant une faculté de résiliation en cours de contrat pour chacune des parties, tend à annihiler les conséquences juridiques attachées au caractère de contrat à durée déterminée résultant de son article 3.1, d'une part, en amoindrissant le montant de l'indemnité de rupture et, d'autre part, en privant l'agent commercial des commissions dues jusqu'à la date conventionnellement prévue ; que la cour d'appel en a déduit qu'il convenait de donner au contrat signé entre les parties sa juste qualification de contrat à durée déterminée et de réputer non écrite la clause 3.2 du contrat ; qu'en réputant ainsi non écrite la clause stipulant une faculté de résiliation en cours de contrat et en refusant ainsi de tenir compte des conséquences de l'exercice de cette faculté par la société Seafoodia, quand une telle clause, librement convenue entre les parties, qui ne privait pas la société Candis d'une indemnité de rupture, ne portait atteinte à aucune règle d'ordre public et était donc valable, la cour d'appel a violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil, ensemble les articles L. 134-12 et L. 134-16 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 134-12 du code de commerce, le contrat à durée déterminée peut être révoqué par le consentement mutuel des parties, suivant les clauses ou conditions spécifiées au contrat d'agent commercial, et le caractère anticipé de la cessation d'un tel contrat, à durée déterminée, donne droit à réparation du préjudice résultant de la perte de commissions jusqu'à la date de fin de contrat originellement prévue.

6. Si c'est à tort que la cour d'appel a d'abord retenu le caractère non écrit de la clause prévoyant la possibilité de résilier le contrat avant son terme, en revanche, elle a estimé à bon droit que les indemnités devaient être calculées au regard du terme initial du contrat, dès lors qu'à défaut, il y aurait un détournement des règles d'ordre public protectrices de l'agent commercial.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Seafoodia aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Seafoodia et la condamne à payer à la société Candis la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit septembre deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour la société Seafoodia.

La société Seafoodia fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Seafoodia à payer à la société Candis les commissions au taux contractuel de 3% sur toutes factures émises par Seafoodia à l'attention des sociétés Auchan, Cora, Carrefour, Grand Frais, Intermarché ou de l'un quelconque de leurs adhérents pour la période du 6 avril 2016 au 30 juin 2018 avec intérêts de droit du jour de l'émission de chaque facture, condamné la société Seafoodia en application de l'article L 134-12 du code de commerce, à payer à la société Candis une indemnité de cessation de contrat égale à deux années de commissions brutes, soit 3% des factures émises par Seafoodia en 2016 et 2017 à l'attention des sociétés Auchan, Cora, Carrefour, Grand Frais, Intermarché ou de l'un quelconque de leurs adhérents sous déduction des sommes susvisées et versées en exécution du jugement du 29 novembre 2017 ;

ALORS QU'aucune règle d'ordre public ne fait obstacle à ce qu'un contrat d'agent commercial à durée déterminée comporte une faculté de résiliation en cours d'exécution du contrat à disposition de chacune des parties ; qu'en l'espèce, pour faire droit aux demandes de la société Candis tendant au paiement de commissions sur les ventes faites postérieurement à la résiliation du contrat d'agent commercial par le mandant, soit du 6 avril 2016 au 30 juin 2018, et une indemnité de fin de contrat incluant dans son assiette de calcul les commissions sur les ventes réalisées du 6 avril 2016 au 30 juin 2018, la cour d'appel a relevé qu'il résulte des articles L. 134-12 et L. 134-16 du code de commerce, qui sont des dispositions d'ordre public économique, que l'agent commercial ne peut être privé, par une clause ou une convention, de son indemnité de fin de contrat, que l'article L. 134-12 du code de commerce énonce que, en ce cas, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi et l'article L. 134-16 du même code répute non écrite toute clause ou convention dérogeant à cette règle au détriment de l'agent ; que la cour d'appel a ajouté que l'article 3.2 du contrat d'agent commercial litigieux, prévoyant une faculté de résiliation en cours de contrat pour chacune des parties, tend à annihiler les conséquences juridiques attachées au caractère de contrat à durée déterminée résultant de son article 3.1, d'une part, en amoindrissant le montant de l'indemnité de rupture et, d'autre part, en privant l'agent commercial des commissions dues jusqu'à la date conventionnellement prévue ; que la cour d'appel en a déduit qu'il convenait de donner au contrat signé entre les parties sa juste qualification de contrat à durée déterminée et de réputer non écrite la clause 3.2 du contrat ; qu'en réputant ainsi non écrite la clause stipulant une faculté de résiliation en cours de contrat et en refusant ainsi de tenir compte des conséquences de l'exercice de cette faculté par la société Seafoodia, quand une telle clause, librement convenue entre les parties, qui ne privait pas la société Candis d'une indemnité de rupture, ne portait atteinte à aucune règle d'ordre public et était donc valable, la cour d'appel a violé l'article 1134 devenu 1103 du code civil, ensemble les articles L. 134-12 et L. 134-16 du code de commerce.

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