14 septembre 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 21-14.719

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00896

Texte de la décision

SOC.

OR



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 14 septembre 2022




Rejet


Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 896 F-D

Pourvoi n° G 21-14.719




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 14 SEPTEMBRE 2022

L'association Les Papillons blancs du Finistère, dont le siège est [Adresse 1], association régie par la loi du 1er juillet 1901, a formé le pourvoi n° G 21-14.719 contre l'arrêt rendu le 19 février 2021 par la cour d'appel de Rennes (8e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [R] [D], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 4],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l'association Les Papillons blancs du Finistère, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 8 juin 2022 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, Mme Nirdé-Dorail, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué et les pièces de la procédure (Rennes, 19 février 2021), M. [D] a été engagé en qualité de directeur du foyer de [3] le 1er juillet 2000 par l'association Les Papillons blancs du Finistère (l'association).

2. Le salarié a été placé en arrêt de travail le 5 décembre 2015 et a été licencié pour inaptitude le 24 février 2016, le médecin du travail l'ayant déclaré inapte à son poste le 25 janvier 2016, lors de sa visite de reprise.

3. Contestant son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié est sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à lui verser une somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que d'ordonner le remboursement des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois, alors :

« 1°/ que lorsque le salarié se prévaut de l'insuffisante motivation de la lettre de licenciement, il revient aux juges d'examiner la conformité de ladite lettre aux exigences de motivation, le cas échéant en interprétant cette dernière ; qu'en conséquence les juges ne peuvent dire la lettre de licenciement insuffisamment motivée tout en constatant qu'elle n'a pas été versée aux débats ; qu'en l'espèce, pour dire le licenciement sans cause réelle ni sérieuse et condamner l'association exposante au paiement de sommes à ce titre, la cour d'appel a retenu que si aucun des bordereaux de pièces ne visait la lettre de licenciement, laquelle ne figurait dans aucun dossier, il aurait été néanmoins constant qu'elle existait et qu'elle ne mentionnait pas l'impossibilité de reclassement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;

2°/ que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'appelé à examiner la motivation de la lettre de licenciement, il doit se procurer ladite lettre au besoin en invitant les parties à lui en faire parvenir un exemplaire ; qu'en se prononçant sur la motivation de la lettre de licenciement qu'elle constatait non-produite aux débats, sans inviter les parties à procéder à une telle production, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

3°/ que les juges ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que l'impossibilité de reclassement résultait des termes de la lettre de licenciement ; qu'en affirmant qu'il aurait été constant que la lettre de licenciement ne mentionnait pas l'impossibilité de reclassement, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ que les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce la cour d'appel a affirmé que la lettre de licenciement n'avait pas été produite aux débats et n'était mentionnée par aucun bordereau ; que, toutefois, il résultait du bordereau de pièces du salarié annexé à ses conclusions d'appel qu'avait été produite une pièce 2 intitulée ‘'courrier APBF [association Les Papillons Blancs du Finistère] du 29 février 2016'', ce qui correspondait à la date de son licenciement, pièce qui au demeurant avait déjà été produite devant les premiers juges ; que par surcroît le salarié renvoyait expressément dans ses écritures à sa pièce n° 2 lorsqu'il faisait état de la lettre de licenciement, en particulier dans ses développements relatifs à l'insuffisante motivation de cette dernière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé le bordereau de pièces du salarié annexé à ses conclusions, et ainsi méconnu le principe interdisant aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ;

5°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce le salarié renvoyait expressément dans ses écritures à sa pièce n° 2 lorsqu'il faisait état de la lettre de licenciement, et la communication de celle-ci n'était pas contestée, l'exposante renvoyant elle-même à cet égard aux productions du salarié ; qu'en s'abstenant d'inviter les parties à présenter leurs observations sur l'absence au dossier d'une pièce visée dans leurs conclusions et dont la communication était, par suite, incontestée, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

6°/ que la lettre de licenciement, qui avait été reproduite par le salarié dans ses écritures, précisait que le médecin du travail avait estimé qu'aucun des postes envisagés pour le reclassement du salarié n'était compatible avec son état de santé et que le salarié avait lui-même fait savoir à plusieurs reprises qu'il n'accepterait aucun poste au sein de l'association, ce dont il résultait qu'était visée l'impossibilité du reclassement du salarié ; qu'en considérant la lettre de licenciement insuffisamment motivée, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ensemble son article L. 1226-2 dans sa rédaction antérieure à la loi 2016-1088 du 8 août 2016. »

Réponse de la Cour

5. La cour d'appel, qui a constaté, hors toute dénaturation, que la lettre de licenciement, dont les termes, reproduits dans les conclusions du salarié, n'étaient pas contestés, ne mentionnait pas l'impossibilité de reclassement, en a exactement déduit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association Les Papillons blancs du Finistère aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'association Les Papillons blancs du Finistère et la condamne à payer à M. [D] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Capitaine, conseiller le plus ancien, en ayant délibéré en remplacement du président empêché, en l'audience publique du quatorze septembre deux mille vingt-deux, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile.









MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour l'association Les papillons blancs du Finistère

L'ASSOCIATION LES PAPILLONS BLANCS DU FINISTERE fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ces chefs, d'AVOIR dit que le licenciement de M. [D] était sans cause réelle ni sérieuse et d'AVOIR condamné l'ASSOCIATION LES PAPILLONS BLANCS DU FINSITERE à lui verser la somme de 70. 000 € net à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse, ainsi que d'AVOIR ordonné le remboursement des indemnités de chômage versées à M. [D] dans la limite de trois mois ;

1. ALORS QUE lorsque le salarié se prévaut de l'insuffisante motivation de la lettre de licenciement, il revient aux juges d'examiner la conformité de ladite lettre aux exigences de motivation, le cas échéant en interprétant cette dernière ; qu'en conséquence les juges ne peuvent dire la lettre de licenciement insuffisamment motivée tout en constatant qu'elle n'a pas été versée aux débats ; qu'en l'espèce, pour dire le licenciement sans cause réelle ni sérieuse et condamner l'association exposante au paiement de sommes à ce titre, la cour d'appel a retenu que si aucun des bordereaux de pièces ne visait la lettre de licenciement, laquelle ne figurait dans aucun dossier, il aurait été néanmoins constant qu'elle existait et qu'elle ne mentionnait pas l'impossibilité de reclassement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ;

2. ALORS QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'appelé à examiner la motivation de la lettre de licenciement, il doit se procurer ladite lettre au besoin en invitant les parties à lui en faire parvenir un exemplaire ; qu'en se prononçant sur la motivation de la lettre de licenciement qu'elle constatait non-produite aux débats, sans inviter les parties à procéder à une telle production, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

3. ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que l'impossibilité de reclassement résultait des termes de la lettre de licenciement ; qu'en affirmant qu'il aurait été constant que la lettre de licenciement ne mentionnait pas l'impossibilité de reclassement, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

4. ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce la cour d'appel a affirmé que la lettre de licenciement n'avait pas été produite aux débats et n'était mentionnée par aucun bordereau ; que, toutefois, il résultait du bordereau de pièces du salarié annexé à ses conclusions d'appel qu'avait été produite une pièce 2 intitulée « courrier APBF [association Les Papillons Blancs du Finistère] du 29 février 2016 », ce qui correspondait à la date de son licenciement, pièce qui au demeurant avait déjà été produite devant les premiers juges; que par surcroît le salarié renvoyait expressément dans ses écritures à sa pièce n° 2 lorsqu'il faisait état de la lettre de licenciement, en particulier dans ses développements relatifs à l'insuffisante motivation de cette dernière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé le bordereau de pièces du salarié annexé à ses conclusions, et ainsi méconnu le principe interdisant aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ;

5. ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce le salarié renvoyait expressément dans ses écritures à sa pièce n° 2 lorsqu'il faisait état de la lettre de licenciement, et la communication de celle-ci n'était pas contestée, l'exposante renvoyant elle-même à cet égard aux productions du salarié ; qu'en s'abstenant d'inviter les parties à présenter leurs observations sur l'absence au dossier d'une pièce visée dans leurs conclusions et dont la communication était, par suite, incontestée, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

6. ALORS QUE la lettre de licenciement, qui avait été reproduite par le salarié dans ses écritures, précisait que le médecin du travail avait estimé qu'aucun des postes envisagés pour le reclassement du salarié n'était compatible avec son état de santé et que le salarié avait lui-même fait savoir à plusieurs reprises qu'il n'accepterait aucun poste au sein de l'association, ce dont il résultait qu'était visée l'impossibilité du reclassement du salarié ; qu'en considérant la lettre de licenciement insuffisamment motivée, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ensemble son article L. 1226-2 dans sa rédaction antérieure à la loi 2016-1088 du 8 août 2016.

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