1 juillet 2005
Cour d'appel de Nancy
RG n° 04/01515

Texte de la décision

ARRET No1535/05 DU 01 JUILLET 2005 R.G : 04/01515 Tribunal paritaire des baux ruraux de BAR LE DUC 5103000001 18 mars 2004

LA COUR D'APPEL DE NANCY, troisième chambre civile a rendu l'arrêt suivant : APPELANTS : Monsieur Jacques X... né le 16 Février 1949 à NEUFCHATEAU (88) demeurant Ferme de Marthée - 22 rue de l'Etang Coutin 52290 HUMBECOURT comparant en personne, assisté de Me LARZILLIERE, avocat au barreau de la Meuse Madame Gabrielle Y... veuve X... née le 05 Juin 1909 à HOUDELAINCOURT (55) demeurant Ferme de Marthée - 22 rue de l'Etang Coutin 52290 HUMBECOURT comparante en personne, assistée de Me LARZILLIERE, avocat au barreau de la Meuse INTIMES : Monsieur Z...
A... né le 25 Mai 1941 à TROYES (10) demeurant 2 RN Orléans à Nancy 55130 HOUDELAINCOURT comparant en personne, régulièrement assisté de Melle B..., juriste à la FDSEA de la Meuse Monsieur C...
A... né le 18 Octobre 1945 à TROYES (10) demeurant 3 rue de l'Eglise 55130 HOUDELAINCOURT comparant en personne, régulièrement assisté de Melle B..., juriste à la FDSEA de la Meuse COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré, Président de Chambre : Monsieur MEYER, Conseillers : Madame D..., Madame E..., Greffier présent aux débats : Madame F..., DEBATS : A l'audience publique du 13 Mai 2005 ; L'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu le 01 Juillet 2005; A l'audience du 01 Juillet 2005, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l'arrêt dont la teneur suit : Copie exécutoire le Copie le

FAITS ET PROCEDURE :

Suivant acte de vente en date des 31 janvier et 1er février 1996 et baux notariés de longue durée en date des 20 octobre 1983, 4 mars 1984, 9 février 1988 et 9 janvier 1990,Messieurs C... et Z...
A... ont loué, en qualité de co-preneurs, diverses parcelles sises sur les communes de HOUDELAINCOURT (88) et BAUDIGNECOURT (55) d'une superficie totale de 144 ha 76 a 60 ca appartenant pour partie à

Monsieur Jacques X... et sa mère Madame Gabrielle X....

Par actes d'huissier de justice en date du 27 février 2002, Monsieur et Madame X... ont fait délivrer congé en raison de l'âge des preneurs à Messieurs Z... et C...
A... pour les 31 août 2003 et 31 août 2004 sur lesdites parcelles.

Par lettre recommandée avec avis de réception, Messieurs A... ont alors saisi le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BAR LE DUC afin de voir autoriser la cession des droits locatifs de Monsieur C...
A... au profit de son épouse née Marie-Thérèse G...


Invoquant les dispositions de l'article L.411-35 du Code Rural, les consorts X... se sont opposés à cette demande.

Par jugement du 18 mars 2004, le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BAR LE DUC a : - autorisé la cession des droits locatifs de Monsieur C...
A... sur les parcelles louées au profit de son épouse Marie-Thérèse G..., - débouté les parties de leur demande d'indemnité fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, - et condamné solidairement Monsieur et Madame X... aux dépens.

Jacques X... et Gabrielle X... ont interjeté appel de cette décision.

Ils demandent à la Cour de débouter Messieurs Z... et C...
A... de leur demande tendant à la cession des droits locatifs de Monsieur C...
A... au profit de son épouse et de les condamner aux dépens de toute la procédure.

Par écritures de leur mandataire, Messieurs Z... et C...
A... ont conclu à la confirmation du jugement entrepris.

SUR CE :

Vu le jugement entrepris rendu le 18 mars 2004 par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BAR LE DUC ;

Vu les conclusions des appelants déposées le 12 mai 2005 ;

Vu les conclusions des intimés en date du 12 mai 2005 ;

Attendu que pour s'opposer aux prétentions de Messieurs Z... et C...
A..., les consorts X... font valoir : - que la demande serait irrecevable par application de l'article L.411-35 du Code Rural qui ne prévoit la cession de bail qu'à titre exceptionnel et ne saurait s'appliquer à la cession de droit indivis, - qu'en outre, la procédure serait inutile dès lors que les droits locatifs s'achèveront le 30 août 2005, date à laquelle la période triennale s'achève, étant précisé que les congés délivrés aux preneurs n'ont pas été contestés dans le délai de 4 mois.

Au fond, ils soutiennent : - que la décision du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BAR LE DUC aboutirait dans les faits au transfert de l'intégralité de la jouissance des parcelles à un seul preneur, ce qui ne peut être imposé au bailleur qui disposait jusqu'alors de la garantie offerte par deux co-preneurs, l'engagement de caution solidaire offert par Monsieur Z...
A... étant nul et illusoire, - qu'enfin, Madame Marie-Thérèse G... épouse A... ne justifie pas de la conformité de la situation au regard de la réglementation des structures, de sa participation effective à l'exploitation et d'une expérience professionnelle suffisante ou de diplômes. Sur la recevabilité de la demande de cession des droits locatifs :

Attendu que l'article L.411-35 du Code Rural dispose que la cession de bail peut être autorisée par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux lorsqu'elle est consentie au profit du conjoint du preneur participant à l'exploitation ou aux descendants du preneur ayant atteint l'âge de la majorité ou ayant été émancipé ;

Attendu que les baux consentis à Messieurs Z... et C...
A... sont des baux consentis à des co-preneurs indivis ;

Attendu qu'il s'ensuit que le bail consenti doit être considéré comme indivisible et que chacun des fermiers peut prétendre exploiter la

totalité des terres, objet du bail ;

Attendu, par ailleurs que la demande de Messieurs Z... et C...
A... ne s'analyse pas en une cession au bail mais en une cession de droits locatifs au profit de l'épouse de Monsieur C...
A..., sous réserve qu'elle participe aux travaux de l'exploitation ;

Attendu, contrairement aux allégations des consorts X... qu'il est généralement admis que les dispositions de l'article L.411-35 du Code Rural s'appliquent à toute cession de bail, qu'elle soit totale ou partielle comme en l'espèce lorsqu'il s'agit de la cession de droits locatifs ;

Qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris qui a déclaré recevable la demande en cession de droits locatifs présentée par Messieurs A... ; Sur l'intérêt de la procédure :

Attendu que l'absence de contestations de congés délivrés le 27 février 2002 à Messieurs Z... et C...
A... ne prive pas ces derniers de leurs droits de cession, dès lors que la demande de cession est présentée avant l'expiration de la location ;

Attendu en l'espèce, qu'en cas de cession des droits locatifs de C...
A... à son profit, Madame Marie-Thérèse G... épouse A..., bénéficiaire de la cession, deviendra titulaire du bail, qu'ainsi le motif du congé délivré en raison de l'âge des preneurs n'aura plus lieu d'être ;

Qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris qui a constaté l'intérêt de la procédure engagée ; Sur les conditions exigées par l'article L.411-35 u Code Rural :

Attendu qu'à défaut d'accord du bailleur, la juridiction saisie d'une demande de cession doit s'assurer que celle-ci ne nuit pas aux intérêts légitimes des bailleurs et rechercher à cet effet si les qualités du cessionnaire répondent aux exigences légales et si le bailleur conserve les mêmes garanties d'exploitation ;

Attendu, en l'espèce, que Madame A... née Marie-Thérèse G... justifie de sa condition de conjoint de Monsieur C...
A... du fait de son mariage célébré le 6 avril 1991 ;

Attendu que Madame A... justifie également de ce que depuis le 1er juin 1996, elle est membre du GAEC de L'ORNAIN constitué avec son époux C...
A... et son beau-frère Z...
A... ;

Attendu qu'en application de l'article L.323-7 alinéa 2 du Code Rural , tous les membres d'un GAEC ont l'obligation de participer effectivement aux travaux en commun ;

Attendu que Madame A... a, par ailleurs, produit 5 attestations de témoins établissant qu'elle travaille effectivement sur l'exploitation, s'occupant de la préparation du sol, du stockage du grain, de sa livraison à la coopérative et de la comptabilité de l'exploitation ;

Attendu que les deux attestations contradictoires rédigées par Monsieur H... et Monsieur I... qui indiquent n'avoir jamais vu Madame A... effectuer de façons culturales (labour, préparation des sols, semis, et entretien des cultures) sur les terres exploitées par le GAEC de l'ORNAIN ne sauraient en soi retirer toute valeur probante aux 5 attestations produites par Messieurs A..., qui décrivent précisément la nature des travaux réalisés par Madame A..., dès lors qu'il est établi que Monsieur I... réside depuis peu et de manière intermittente à HOUDELAINCOURT, qu'en outre Monsieur H... lui-même agriculteur, a un intérêt à ce que la procédure sollicitée par Messieurs A... n'aboutisse pas ;

Attendu que Madame A... justifie de ce qu'en sa qualité de gérante associée du GAEC de L'ORNAIN, elle dispose du matériel nécessaire pour l'exploitation des surfaces ;

Attendu que Madame A... justifie également de ce qu'en l'absence d'augmentation des surfaces , l'opération de cession de baux entre

époux dans le cadre d'un GAEC n'est pas soumise à autorisation d'exploiter ;

Attendu toutefois que si Madame A... possède les qualités techniques pour exploiter et les instruments de travail nécessaires, force est de constater qu'en cas de cession des droits locatifs de Monsieur C...
A... à son profit, les consorts X..., qui disposaient en leur qualité de bailleur, des garanties offertes par deux co-preneurs, se retrouveront en présence d'un seul preneur ;

Attendu toutefois qu'il est généralement admis que le principe selon lequel, lorsqu'un bail a été consenti à des co-preneurs, le départ de l'un d'eux ne permet pas à l'autre d'exiger le renouvellement à son profit, peut être infléchi lorsque le preneur qui poursuit seul l'exploitation, offre au bailleur des garanties équivalentes à celles résultant du bail initial ;

Attendu en l'espèce que Monsieur Z...
A... a signé le 13 novembre 2002 un engagement à rester lors de son départ à la retraite, caution solidaire de la bonne exécution des obligations souscrites dans les baux et à rester caution solidaire de celui qui restera ;

Attendu, contrairement aux allégations des consorts X... que cet engagement solidaire n'est soumis à aucun formalisme spécifique ;

Attend qu'en vertu de cet engagement solidaire, les consorts X... voient leurs garanties initiales maintenues, étant précisé qu'il n'est pas contesté que Messieurs A..., via le GAEC de L'ORNAIN, ont toujours réglé leur fermage et entretenu correctement les parcelles louées ;

Qu'il y a lieu dès lors, au vu de l'ensemble de ces éléments, de confirmer le jugement entrepris qui a fait droit à la demande de cession des droits locatifs de Monsieur C...
A... au profit de son épouse née Marie-Thérèse G... ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement ;

Déclare recevable l'appel formé par Monsieur Jacques X... et Madame Gabrielle X... contre le jugement rendu le 18 mars 2004 par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de BAR LE DUC ;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

Condamne Monsieur Jacques X... et Madame Gabrielle X... aux dépens d'appel ;

L'arrêt a été prononcé à l'audience du premier juillet deux mille cinq par Monsieur MEYER, Président de la troisième chambre civile à la Cour d'Appel de NANCY, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile, assisté de Madame F..., greffier.

Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier. Signé : M.C. F...- Signé : B. MEYER.- Minute en sept pages.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.