4 juillet 1997
Cour d'appel de Versailles
RG n° 1997-700

Texte de la décision

I-1

Considérant que par protocole du 27 mars 1987 Mr X...
Y..., propriétaire des parts et actions des sociétés de films CORONA, GIBE et SILVER (ci-après dénommées C.G.S.), les a cédées avec faculté de substitution à Mr Cyril Z...
A..., pour une somme de 175 000 000 F à laquelle devait s'ajouter un complément de prix de 25 000 000 F payable après dépassement d'un chiffre de recettes déterminé consécutivement à l'exploitation des droits cinématographiques cédés ; que le protocole prévoyait le rachat par Mr Y..., personnellement ou par substitution, des éléments d'actifs des sociétés C.G.S. autres que les droits cédés ; que Mr Z...
A... s'est substitué comme cessionnaire la société COMPAGNIE FRANCAISE CINEMATOGRAPHIQUE (C.F.C.) ; que le 23 décembre 1987 les sociétés C.G.S. ont été absorbées par la société FINANCIERE ROBUR, cette dernière cédant par la suite ses droits d'exploitation à sa filiale la société ROBUR D.A. ; que la société FINANCIERE ROBUR a ensuite fusionné avec la société U.G.C. D.A. ; que la société ROBUR D.A. est devenue, après absorption d'une autre entreprise, la société U.G.C. D.A. INTERNATIONAL ; I-2

Considérant que les sociétés U.G.C. D.A. et U.G.C. D.A. INTERNATIONAL (ci-après, dénommées U.G.C.) étant ainsi devenues le produit des restructurations des sociétés C.G.S., Mr Y..., estimant réunies les conditions d'une perception par lui du prix de cession total, complément de 25 000 000 F compris, les a assignées en paiement d'une somme de 33 054 775 F, intérêts en sus, outre des dommages-intérêts ; que par jugement du 20 novembre 1996 le tribunal de Commerce de Nanterre a rejeté ces demandes et a condamné Mr Y... à verser à chacune des deux sociétés une somme de 50 000 F à titre de dommages-intérêts et une somme de 25 000 F pour frais hors dépens ;

II II-1

Considérant que Mr Y..., appelant, renouvelle sa demande en paiement d'une somme de 32 054 775 F, avec intérêts de droit à compter du 6 novembre 1990, date d'une mise en demeure ; qu'il déclare abandonner sa prétention à dommages-intérêts, laquelle était, dans ses premières écritures, assortie d'une demande subsidiaire d'expertise ; qu'il réclame aux sociétés "FINANCIERE ROBUR et ROBUR D.A". une somme de 200 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; II-2

Considérant que les sociétés U.G.C., intimées, concluent à la confirmation du jugement et au rejet des prétentions articulées contre elles ; que relevant appel incident elles demandent que les dommages-intérêts revenant à chacune d'elles soient portés à 250 000 F ; qu'elles sollicitent chacune une somme de 50 000 F pour frais hors dépens ; qu'à titre subsidiaire elles concluent à un sursis à statuer jusqu'à intervention de la décision d'une juridiction arbitrale apte à statuer sur des contestations issues du protocole et relatives au montant, contesté, de la créance invoquée ; III III-1

Considérant qu'au soutien de son appel Mr Y..., qui tient les sociétés U.G.C. pour "parties au protocole du 27 mars 1987", fait valoir, pour accréditer cette analyse, qu'elles ou les sociétés dont elles sont issues se sont volontairement impliquées dans l'exécution de ce protocole, par leurs diligences relatives aux livraisons de films, par l'établissement du bilan des règlements effectués et par des courriers à l'en-tête du "Groupe Z...
A..." relatifs à l'accomplissement des obligations contractuellement arrêtées ; qu'il ajoute que la société FINANCIERE ROBUR est intervenue pour qu'il soit procédé par lui aux acquisitions d'actifs prévus dans le protocole ;

qu'il impute aux sociétés une immixtion "constante, totale et sans équivoque" dans l'exécution de la convention, immixtion qui, puisqu'elle a consisté à revendiquer les droits s'y rattachant, oblige les mêmes sociétés à assumer les obligations correspondantes, dont le paiement complet du prix de cession ; qu'il analyse les relations entre les parties comme résultant d'une cession de contrat, opération par laquelle un tiers au contrat endosse la qualité de contractant aux lieu et place d'une partie initiale ; qu'il expose que les sociétés FINANCIERE ROBUR et ROBUR D.A. dont sont issues les intimées et qui entretenaient une communauté au moins apparente d'intérêts avec les cessionnaires de mars 1987, "ont manifesté sans équivoque leur volonté d'entrer dans le cercle contractuel" et que les faits "attestent avec la même netteté la cession (à elles)du protocole", acte dont les sociétés se sont prévalues devant lui et qu'elles doivent donc exécuter ; III-2

Mais considérant que la qualité des deux sociétés U.G.C. est d'être, après les restructurations mentionnées plus haut, détentrices de l'actif des sociétés C.G.S., savoir de ce qui avait été, le 27 mars 1987, cédé à Mr Z...
A... qui s'était substitué la société C.F.C. ; que cette détention a été consécutive à des opérations telles la fusion-absorption de décembre 1987 à l'occasion desquelles avait été exposée la contrepartie de l'enrichissement réalisé par les mêmes sociétés ; qu'ayant ainsi payé l'actif qui devenait ainsi le leur, il était normal que les personnes morales aujourd'hui intimées ou, avant elles, les sociétés ROBUR dont elles sont issues en exploitent les attributs, au nombre desquels figurait l'obligation de Mr Y... à livrer complètement ce qu'il avait cédé, savoir les droits cinématographiques ; que ce faisant elles ne prenaient nullement la place de la société C.F.C. dans l'exercice des droits personnels nés du protocole mais exerçaient les droits réels attachés à la propriété

des parts cédées ; que cette analyse, qui est conforme à la nature économique des conventions et opérations conclues et aux manifestations de volonté exprimées, prive de pertinence l'argumentation que croit pouvoir tirer Mr Y... des diligences et courriers qu'il cite ; que l'acquisition, par lui, des actifs des sociétés C.G.S. autres que ceux transmis le 27 mars 1987 correspondait, comme le relèvent les intimées, à son intérêt puisque ces actifs n'avaient, pour l'essentiel, guère de rapport avec l'activité cinématographique, observation étant faite que dans le protocole Mr Z...
A... s'était porté fort de l'accord sur ce point des sociétés C.G.S., ce qu'a seulement ratifié la société FINANCIERE ROBUR quand elle a signé les actes subséquents ; qu'en définitive il n'est pas possible de tenir les sociétés intimées, simples sous-acquéreurs des parts cédées par le protocole, comme tenues des obligations du même protocole ; que Mr Y..., professionnel avisé, ne pouvait se méprendre sur l'apparence de communauté d'intérêts qu'il invoque entre les sociétés intimées ou leurs devancières et les cessionnaires de mars 1987 au point de tenir les sociétés pour "parties au protocole" ; que les demandes formées par lui contre les sociétés U.G.C. doivent donc être rejetées et le jugement confirmé ; IV

Considérant que cette confirmation s'étendra, nonobstant l'appel incident, aux dispositions relatives aux dommages-intérêts alloués aux sociétés U.G.C. et qui ont équitablement compensé, comme précisé au jugement, le "préjudice à l'image de marque des dites sociétés envers leur environnement bancaire et professionnel" ; V

Et considérant que le jugement devant être purement et simplement confirmé, l'équité commande d'allouer à chacune des sociétés U.G.C.

une somme supplémentaire de 15 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que ce texte ne peut profiter à Mr Y..., partie perdante à condamner aux dépens et qui d'ailleurs vise dans sa demande des personnes non intimées. PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement entrepris,

Condamne Mr X...
Y... aux dépens d'appel, avec droit de recouvrement direct au profit de Me BINOCHE, Avoué. Le condamne en outre à verser aux sociétés U.G.C. D.A. et U.G.C. D.A. INTERNATIONAL, pour frais hors dépens, une somme supplémentaire égale, pour chacune d'elles, à 15 000 F (quinze mille francs). ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRÊT : Monsieur GILLET, Président, qui l'a prononcé, Mademoiselle B..., Greffier, qui a assisté au prononcé, LE GREFFIER

LE PRESIDENT

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