9 mars 2022
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-19.744

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2022:SO00279

Texte de la décision

SOC.

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 mars 2022




Rejet


Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 279 F-D

Pourvoi n° Z 20-19.744




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 MARS 2022

Mme [E] [G], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 20-19.744 contre l'arrêt rendu le 1er juillet 2020 par la cour d'appel de Versailles (19e chambre), dans le litige l'opposant à la société Mango France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Seguy, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de Mme [G], de la SCP Spinosi, avocat de la société Mango France, après débats en l'audience publique du 18 janvier 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 1er juillet 2020), Mme [G] a été engagée le 30 septembre 2013 en qualité de vendeuse par la société Mango France.

2. Le 29 mars 2016, l'employeur lui a notifié une mise à pied à titre conservatoire et une convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Il l'a licenciée pour faute grave le 11 mai 2016.

3. La salariée a contesté cette mesure devant la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première et troisième branches, ci-après annexé


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une faute grave et de la débouter de l'ensemble de ses demandes indemnitaires, alors :

« 2°/ que seule la faute grave, qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, peut justifier une mise à pied conservatoire ; que dès lors, si le juge constate qu'aucune faute grave ne peut être reprochée au salarié avant sa mise à pied conservatoire, le licenciement pour faute grave notifié à son encontre par l'employeur est nécessairement injustifié, peu important le comportement du salarié pendant la mise à pied conservatoire ; qu'en retenant, pour juger que le licenciement de Mme [G] était fondé sur une faute grave, qu'en envoyant pendant sa mise à pied conservatoire un message téléphonique à une collègue le 31 mars 2016, la salariée avait commis un manquement à l'obligation contractuelle de loyauté vis-à-vis de l'employeur, après avoir pourtant constaté que les prétendus vols reprochés à Mme [G] dans la lettre de licenciement et ayant justifié sa mise à pied conservatoire, ne pouvaient aucunement lui être imputés, ce dont il résultait qu'aucune faute grave ne pouvait être reprochée à la salariée antérieurement à sa mise à pied conservatoire et qu'en conséquence, son licenciement pour faute grave était nécessairement injustifié, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

4°/ que l'envoi par un salarié, au cours de sa mise à pied conservatoire, d'un SMS à une collègue pour solliciter l'aide de cette dernière pour préserver son emploi en écartant les soupçons infondés de vols formulés par son employeur à son encontre ne peut suffire à caractériser une faute grave rendant impossible la poursuite du contrat de travail ; qu'en jugeant au contraire en l'espèce, que constituait une faute grave rendant à elle seule impossible la poursuite du contrat de travail l'envoi par Mme [G], pendant sa mise à pied conservatoire notifiée par son employeur lui reprochant de prétendus vols, d'un SMS à une collègue pour solliciter son aide afin d'écarter lesdits soupçons injustifiés de vols et ainsi préserver son emploi, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail. »

Réponse de la Cour

6. Ayant relevé, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, qu'au cours de sa mise à pied conservatoire, la salariée avait tenté, par l'emploi d'un stratagème consistant à impliquer une collègue, de dissimuler frauduleusement un vol commis au préjudice de son employeur alors qu'elle était toujours tenue, à son égard, d'une obligation de loyauté et que de tels faits mettaient en cause sa probité, peu important qu'aucune faute antérieure à sa mise à pied conservatoire ne puisse lui être reprochée, la cour d'appel a pu décider que cette faute, ainsi caractérisée, rendait à elle seule impossible la poursuite du contrat de travail et constituait une faute grave.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [G] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mars deux mille vingt-deux.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour Mme [G]


Mme [G] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que le licenciement de Mme [E] [G] est fondé sur une faute grave et de l'avoir déboutée de l'ensemble de ses demandes indemnitaires ;

ALORS QUE 1°), le juge est tenu de ne pas modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en estimant que l'envoi du message téléphonique du 31 mars 2016 par Mme [G] à une collègue suffisait à lui seul à justifier son licenciement pour faute grave, quand il ressortait des conclusions des parties qu'en tout état de cause, l'envoi de ce seul message ne pouvait justifier son licenciement pour faute grave (cf. les conclusions de la société Mango France, pp. 6 à 14, et les conclusions de Mme [G], pp. 11 et 12), la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile et l'interdiction faite au juge de modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ;

ALORS QUE 2°), seule la faute grave, qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, peut justifier une mise à pied conservatoire ; que dès lors, si le juge constate qu'aucune faute grave ne peut être reprochée au salarié avant sa mise à pied conservatoire, le licenciement pour faute grave notifié à son encontre par l'employeur est nécessairement injustifié, peu important le comportement du salarié pendant la mise à pied conservatoire ; qu'en retenant, pour juger que le licenciement de Mme [G] était fondé sur une faute grave, qu'en envoyant pendant sa mise à pied conservatoire un message téléphonique à une collègue le 31 mars 2016, la salariée avait commis un manquement à l'obligation contractuelle de loyauté vis-à-vis de l'employeur, après avoir pourtant constaté que les prétendus vols reprochés à Mme [G] dans la lettre de licenciement et ayant justifié sa mise à pied conservatoire, ne pouvaient aucunement lui être imputés, ce dont il résultait qu'aucune faute grave ne pouvait être reprochée à la salariée antérieurement à sa mise à pied conservatoire et qu'en conséquence, son licenciement pour faute grave était nécessairement injustifié, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail,

ALORS QUE 3°), le juge est tenu de ne pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ; qu'en l'espèce, Mme [G] a envoyé à une collègue le 31 mars 2016 le SMS suivant : « coucou [F] tu pourrais me rendre service pour éviter tout soupçon de vol sur moi, car avec ça je suis ficher moi après. Ce que je vais faire c'est que je vais acheter une paire de pompe les mm et si tu pourra les mettre en réserve mais genre pas en évidence quoi ?! Et après tu feras genre tu les a retrouver … Pck cette histoire me rend ouf je te jure ! » ; qu'en affirmant que « Mme [G] a ainsi tenté de dissimuler frauduleusement à son employeur le vol d'une paire de chaussure au sein de l'entreprise » (arrêt, p. 4, §3), cependant qu'il ressort des termes clairs et précis du message litigieux que Mme [G] a simplement tenté d'écarter les soupçons injustifiés qui pesaient sur elle et ainsi préserver son emploi, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du SMS du 31 mars 2016 et violé le principe selon lequel le juge est tenu de ne pas dénaturer les documents de la cause,

ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE 4°), l'envoi par un salarié, au cours de sa mise à pied conservatoire, d'un SMS à une collègue pour solliciter l'aide de cette dernière pour préserver son emploi en écartant les soupçons infondés de vols formulés par son employeur à son encontre ne peut suffire à caractériser une faute grave rendant impossible la poursuite du contrat de travail ; qu'en jugeant au contraire en l'espèce, que constituait une faute grave rendant à elle seule impossible la poursuite du contrat de travail l'envoi par Mme [G], pendant sa mise à pied conservatoire notifiée par son employeur lui reprochant de prétendus vols, d'un SMS à une collègue pour solliciter son aide afin d'écarter lesdits soupçons injustifiés de vols et ainsi préserver son emploi, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail.

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