21 février 2013
Cour d'appel d'Aix-en-Provence
RG n° 12/02937

1re Chambre B

Texte de la décision

COUR D'APPEL D'AIX EN PROVENCE

1re Chambre B



ARRÊT AU FOND

DU 21 FEVRIER 2013

D.D-P

N° 2013/102













Rôle N° 12/02937







SCI ERAS





C/



[E] [U]

SARL DIFFUSION IMMOBILIER

[Y] [H]





















Grosse délivrée

le :

à :



SCP COHEN L ET H GUEDJ





Me David BERNARD



SCP MAYNARD SIMONI



Me Robert BUVAT





Décision déférée à la Cour :



Jugement du Tribunal de Grande Instance de DIGNE-LES-BAINS en date du 30 Mars 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 11/00146.





APPELANTE



SCI ERAS,

dont le siège social est [Adresse 10], prise en la personne de son gérant en exercice M. [C] [O].



représentée par Me Robert BUVAT, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

plaidant par Me Claude TREFFS avocat au barreau des ALPES DE HAUTE PROVENCE.



INTIMES



Madame [E] [U]

née le [Date naissance 2] 1943 à [Localité 4],

demeurant [Adresse 13]



représentée par la SCP MAYNARD SIMONI, avocats au barreau D'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me Sophie BERGEOT, avocat au barreau d'ALPES DE HAUTE PROVENCE



SARL DIFFUSION IMMOBILIER,

dont le siège social est [Adresse 3], prise en la personne de son représentant légal en exercice.

assignée en intervention forcé



représentée et plaidant par Me David BERNARD, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Rémi JEANNIN, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE .



Maître [Y] [H]

Notaire

demeurant [Adresse 1]

assigné en intervention forcé



représenté par la SCP COHEN L ET H GUEDJ, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Me KUHN de la SCP KUHN, avocats au barreau de PARIS.



COMPOSITION DE LA COUR





L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2013 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.



La Cour était composée de :



Monsieur François GROSJEAN, Président

Monsieur Hugues FOURNIER, Conseiller

Mme Danielle DEMONT-PIEROT, Conseiller



qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Mme Dominique COSTE.



Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 21 Février 2013.



ARRÊT



Contradictoire,



Prononcé par mise à disposition au greffe le 21 Février 2013,



Signé par Monsieur François GROSJEAN, Président et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.




***



EXPOSE DU LITIGE





Par acte authentique de Me [H], notaire, en date du 30 août 2005 la SCI Eras a acquis auprès de Mme [E] [U] , suite à son divorce, la propriété d'un bien immobilier sis à [Localité 8] pour le prix de 220 000 €, par l'entremise de la SARL Diffusion Immobilier.



La réalisation de travaux d'extension révélait la présence d'une canalisation d'eaux usées de la propriété voisine sur le terrain nouvellement acquis.

La SCI Eras faisait procéder au déplacement de cette conduite et réclamait la prise en charge de ces travaux facturés 3250 € par l'entreprise Zuccolo.

Mme [U] lui versait cette somme.



La SCI Eras déplorant avoir exposé des frais supplémentaires et subir par ailleurs la présence d'un débord de la lisse basse en bois sur la quelle repose l'ossature du chalet, un expert judiciaire , M. [X], était désigné afin de constater les malfaçons et d'évaluer le préjudice subi.



Après plusieurs incidents avec la SCI, l'expert déposait son rapport le 11 juin 2008.



Il concluait que la présence de la canalisation résultait d'un accord entre l'ex-époux de Mme [U] et un voisin pour que ce dernier puisse se raccorder au réseau communal, en échange de la possibilité que cette canalisation devienne commune aux deux constructions.

Aucun acte de servitude notariée n'avait été dressé.



L'expert chiffrait le coût supplémentaire induit par la présence de la canalisation.

En ce qui concerne le débord de la lisse bois, il relevait que celui-ci était apparent pour l'acquéreur et son architecte avant la vente .



Une tentative de conciliation par la chambre des notaires demeurait vaine.



Par exploit en date du 7 octobre 2009 la SCI Eras a fait assigner Mme [E] [U] aux fins d'obtenir le versement de dommages et intérêts.



Par jugement en date du 30 mars 2011 le tribunal de grande instance de Digne-les-Bains a prononcé la nullité du rapport d'expertise de M. [X], débouté les parties de leurs demandes, et laissé les dépens à la charge de la SCI Eras .



Par déclaration remise au greffe de la cour le 20 juin 2011 la SCI Eras a relevé appel de cette décision.




Par conclusions déposées le 25 juillet 2012 elle demande à la cour, au visa des articles 1626 suivants, et 1642 et suivants du Code civil :

' d'infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a annulé le rapport d'expertise ;

' de dire que le chalet qu'elle a acquis est affecté de vices cachés résultant de la présence d'une canalisation d'eaux usées enterrée, du débord de la structure chalet par rapport au soubassement, et du défaut de fixation des équerres faisant la liaison entre le soubassement et la structure de bois du chalet ;

' de dire que la responsabilité de Mme [U] est engagée au titre de la garantie des vices cachés et subsidiairement pour charges non déclarées ;

à titre subsidiaire

' de dire que sa responsabilité est également engagée pour le débord par application de l'article 1792 du Code civil ;

' de la condamner à réparer le préjudice subi par la SCI en lui versant la somme de 114'358,05€ à titre de dommages et intérêts

' de débouter Mme [U] de toutes ses demandes reconventionnelles ;

' et de la condamner à lui payer la somme de 5'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, en ce compris les frais d'expertise, avec distraction.



Par conclusions le 31 juillet 2012 Mme [E] [U] demande à la cour :

' de réformer le jugement critiqué en ce qu'il a annulé le rapport d'expertise ;

' et de condamner l'appelant à lui rembourser la somme de 3242,53 €, et à lui payer la somme de 10'000 € à titre de dommages et intérêts ;

à titre subsidiaire

' de limiter sa garantie à la somme de 2824, 47€ ;

' et de condamner la SCI Eras à lui payer la somme de 7'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec distraction



Par conclusions déposées le 29 mai 2012 la SARL Diffusion Immobilier assignée en intervention forcée le 2 février 2012 demande à la cour de la mettre hors de cause, de constater qu'aucune demande n'est dirigée contre elle, à titre subsidiaire, de réduire les montants demandés, et en tout état de cause de condamner l'appelante à lui payer la somme de 3 000€ au titre de l'article 77 du code de procédure civile.





Par conclusions déposées le 2 mai 2012 Me [Y] [H] demande à la cour de constater que l'appelant ne fait référence à aucun fait permettant de justifier d'une quelconque évolution du litige justifiant son appel en cause, de déclarer celui-ci irrecevable, de dire que la SCI Eras est mal fondée en ses demandes de l'en débouter, et de la condamner à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.



La cour renvoie aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des moyens des parties.




MOTIFS,





Attendu que , pour annuler le rapport d'expertise, le tribunal énonce en ses motifs que par 'l'incident' qui s'est déroulé lors de l'expertise, l'expert a manqué à la délicatesse et a pu laisser croire à la demanderesse que les conclusions de son rapport avaient été modifiées en raison de l' incident survenu ;







Mais attendu que ce faisant le tribunal ne caractérise aucun manquement objectif à l'impartialité qui affecterait le contenu du rapport d'expertise de M. [X] ; que ce dernier est circonstancié ; qu'il répond avec méthode aux différentes questions techniques qui lui étaient posées dans le cadre de sa mission et avec précision aux dires des parties ;



Attendu que le jugement qui a annulé le rapport d'expertise de M. [X] sera donc réformé sur ce point ;



Attendu qu'il ressort dudit rapport que l'existence d'un débord de la lisse basse en bois du mur de soubassement de 8 à 9cm ne cause aucun désordre à l'ossature, et que l'insuffisance de la fixation par le dessus de la lisse et de l'ossature au gros oeuvre est trop faible (tous les 3 mètres), et qu'elle n'est pas conforme aux normes sismiques ;



Mais attendu que les plans du permis de construire (obtenu le 18 août 2005 avant l'acquisition le 30 août 2005) ont été dressés par l' architecte de l'acquéreur ; que celui-ci a visité le bien en sa compagnie avant la vente ; que sur ces plans et clichés joints (photo n°2) les murs en pierre sont apparents ; qu'ils n'étaient pas dissimulés par des tas de bois ou par un parement en pierre;



Attendu que le futur acquéreur, ainsi assisté par un professionnel, a donc pu se convaincre des vices ou des défauts de conformité invoqués ;



Attendu qu'en ce qui concerne la canalisation d'eau usée, celle-ci est apparue lors des opérations de terrassement ; qu'elle était cependant décelable, la présence d'un regard étant suffisante à cet égard ; qu'en effet la présence d'un 'regard manifeste la présence nécessaire d'une canalisation enterrée entrante sortante ; que le regard en cause était parfaitement visible à l'aplomb de la construction, à l'endroit même où l'extension de cette dernière était envisagée;



Attendu que le futur acquéreur, assisté de son architecte, a pu, là encore, se convaincre du vice ou du défaut de conformité invoqué ;



Attendu que le jugement déféré en ce qu'il a rejeté l'action en garantie des vices cachés et des demandes subséquentes de la SCI Eras doit être approuvé ;



Attendu qu'il en va de même en ce qui concerne la demande de restitution de la somme de 3230€ présentée par Mme [U], celle-ci ne développant aucun moyen droit précis au soutien de sa demande de restitution de cette somme qu'elle a spontanément versée ;



Attendu qu'aucun abus du droit d'ester en justice n'est à déplorer ; que sa demande tendant à l'octroi de dommages intérêts sera également écartée ;



Attendu que l'appelante succombant devra supporter la charge des dépens ainsi que des des frais et honoraires de l'expertise judiciaire, et verser en équité la somme de 3000 € à Mme [U] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;



Attendu que l'appelante qui a inutilement attrait en la cause l'agent immobilier et le notaire devra verser la somme de 800 € à Me [H] et celle de 2 000€ à la SARL Diffusion Immobilier en application de ce texte ;



PAR CES MOTIFS,



La cour statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition au greffe,



Met hors de cause la SARL Diffusion Immobilier et Me [Y] [H],



Infirme le jugement déféré en ce qu'il a annulé le rapport d'expertise de M. [X],



Statuant à nouveau



Rejette la demande d'annulation de ce rapport,



Confirme le jugement déféré pour le surplus,



Y ajoutant



Condamne la SCI Eras à payer Mme [E] [U] la somme de 3000 €, celle de 800€ à Me [Y] [H] et celle de 2 000 € à la SARL Diffusion Immobilier au titre de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la SCI Eras aux dépens et au coût de l'expertise, et dit que les dépens seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.





LE GREFFIERLE PRESIDENT

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