22 janvier 2015
Cour d'appel de Bordeaux
RG n° 13/03572

CHAMBRE SOCIALE SECTION B

Texte de la décision

COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 22 JANVIER 2015



(Rédacteur : Elisabeth LARSABAL, Présidente)



SÉCURITÉ SOCIALE



N° de rôle : 13/03572





















Monsieur [Y] [Z]



c/



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE

SA SOCIÉTÉ D'ASSAINISSEMENT DU BASSIN D'ARCACHON 'SABARC'













Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 mai 2013 (R.G. n°2011/1473) par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de GIRONDE,, suivant déclaration d'appel du 10 juin 2013,



APPELANT :



Monsieur [Y] [Z]

né le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 1]

de nationalité Française

Profession : Agent réseau assainissement, demeurant [Adresse 3]



représenté par Maître Philippe HONTAS de la SELARL HONTAS ET MOREAU, avocat au barreau de BORDEAUX



INTIMÉES :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 4]



SA SOCIÉTÉ D'ASSAINISSEMENT DU BASSIN D'ARCACHON 'SABARC', prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 1]



représentées par Maître PILLOIX avocat au barreau de Bordeaux loco Maître Carole BILLET , avocate au barreau d'ANNECY



COMPOSITION DE LA COUR :



En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 26 novembre 2014, en audience publique, devant Elisabeth LARSABAL et Catherine MAILHES Magistrates chargées d'instruire l'affaire, qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés,



Ces Magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :



Président : Madame Elisabeth LARSABAL Présidente

Conseiller : Madame Catherine MAILHES Conseillère

Conseiller : Madame Véronique LEBRETON, Conseillère

qui en ont délibéré.



Greffier lors des débats : Florence CHANVRIT, Adjoint Administratif Principal faisant fonction de Greffier



ARRÊT :



- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.






EXPOSE DU LITIGE



M. [Y] [Z] a été engagé par la SA SABARC (Société d'Assainissement du Bassin d'Arcachon) suivant contrat de travail à durée indéterminée du 15 juillet 2002 en qualité d'agent assainissement-épuration.

M. [Z] a été victime de problèmes de santé suite à son exposition à des vapeurs irritantes (sulfure d'hydrogène) liées au traitement des eaux et a complété le 24 avril 2008 une déclaration de maladie professionnelle accompagnée d'un certificat médical établi le 11 janvier 2008 portant mention d'un diagnostic d'asthme.

M.[Z] a été en situation de congé sans solde à sa demande pour deux durées consécutives de douze mois à compter du 1er juillet 2008.Il n'a pas eu d'arrêt de travail à la suite de sa déclaration de maladie professionnelle.

La caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde a pris en charge la maladie au titre de la législation professionnelle le 17 novembre 2008 pour une maladie professionnelle relevant du tableau 66 pour son exposition à l'H2S (sulfure d'hydrogène), après avis du Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

L'état de santé de M. [Z] a été considéré comme consolidé le 7 décembre 2008.

Une incapacité permanente partielle de 10% a été reconnue et une rente calculée sur ce taux a été versée à compter du 8 décembre 2008, d'un montant de 307 € par trimestre.



M. [Z] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Gironde le 4 juillet 2011 aux fins de faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur, la SA SABARC, à l'origine de la maladie professionnelle dont il est atteint suite à son exposition à de l'H2S.



Par jugement en date du 28 mai 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale a déclaré prescrite l'action en reconnaissance de faute inexcusable engagée par M. [Z].



M. [Z] a régulièrement interjeté appel de cette décision le 10 juin 2013.

L'audience avait été fixée au 21 novembre 2013 et a été renvoyée au 26 novembre 2014 à la demande des parties.




Par conclusions déposées au greffe le 12 novembre 2013 et développées oralement à l'audience, M. [Z] sollicite de la Cour qu'elle :




juge que le délai de prescription applicable à son action ne peut commencer à courir qu'à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie professionnelle établie et portée à sa connaissance, selon les formes exigées par la loi,

juge qu'il soutient qu'il n'a jamais été destinataire de la décision de la caisse lui notifiant effectivement la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie et que cette réalité est confirmée par le fait que la copie des courriers litigieux versés par la Caisse sont des lettres simples,

juge au surplus que contrairement aux prescriptions de l'article R.441-14 du code de la sécurité sociale en vigueur au moment des faits, il n'a jamais été destinataire de la décision de la caisse lui notifiant effectivement la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie par courrier recommandé avec accusé de réception,

juge au surplus que la caisse ne justifie pas avoir porté à sa connaissance par lettre recommandée avec accusé de réception la décision d'attribution d'une rente à son profit et ce, contrairement à l'article R.434-32 du code de la sécurité sociale en vigueur au moment des faits,

juge qu'il convient d'appliquer les articles L.431-2, L.461-1 et L.461-5 du code de la sécurité sociale dans la mesure où il n'est pas contesté qu'il n'a jamais cessé le travail en raison des effets de la maladie professionnelle objet du litige,

juge que son action est parfaitement recevable et qu'aucune prescription ne peut être acquise,

juge qu'il est recevable et bien fondé à faire reconnaître l'existence d'une faute inexcusable commise par la SA SABARC à son égard et ce, au vu des circonstances exposées,

déclare l'arrêt opposable à la SA SABARC et à la CPAM,

juge qu'il est fondé à solliciter la majoration maximale de la rente allouée prévue à l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale,

condamne la CPAM à lui verser la somme de 50.000 € à titre d'indemnité provisionnelle en acompte à valoir sur les préjudices subis,

dise que la CPAM fera l'avance de l'intégralité des préjudices des frais et sommes dont l'assuré peut demander réparation en ce compris ceux résultant de la décision du Conseil Constitutionnel du 18 juin 2010,

entende désigner tel médecin-expert qu'il plaira à la Cour avec pour mission de l'examiner,

dise que les frais d'expertise seront supportés par la CPAM,

condamne la CPAM à lui payer la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

réserve les dépens.




M. [Z] fait valoir les moyens suivants :



* Il n'a pu engager une action en reconnaissance de faute inexcusable car la décision de la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas été portée à sa connaissance. Dès lors, le délai de prescription invoqué par la caisse ne peut être invoqué.

* L'action en reconnaissance de faute inexcusable en cas de maladie professionnelle se prescrit pas deux ans à compter de la date de la cessation du travail due à la maladie professionnelle et son action ne peut être considérée comme prescrite.

* La société SA SABARC a manqué à son obligation de sécurité de résultat en raison de teneurs en H2S trop élevées au sein de l'entreprise. La société avait donc conscience du danger auquel les salariés était exposés et n'a pris aucune mesure ; la faute inexcusable devra donc être reconnue.





Par conclusions déposées au greffe le 23 octobre 2013 et développées oralement à l'audience, la SA SABARC sollicite de la Cour qu'elle :


confirme le jugement de première instance et rejette la requête de M. [Z] en ce qu'elle est prescrite,

à titre subsidiaire, déclare la maladie professionnelle de M. [Z] inopposable à la SA SABRC et par conséquent la faute inexcusable de l'employeur,

à titre infiniment subsidiaire, sursoie à statuer en l'attente de la communication par M. [Z] des justificatifs de sa situation pendant sa disponibilité à compter du 1er juillet 2008.




La SA Sabarc fait valoir le moyen selon lequel la reconnaissance de la maladie professionnelle est survenue le 17 novembre 2008 et la requête de M. [Z] en reconnaissance de faute inexcusable a été introduite le 4 juillet 2011, soit plus de deux ans après la reconnaissance de la maladie professionnelle ; sa demande est donc prescrite.



Par conclusions déposées au greffe le 2 juin 2014 et développées oralement à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde :



- soutient à titre principal que la prescription est acquise,

- s'en remet sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur

- si celle-ci est reconnue, sollicite de la Cour qu'elle :


déclare toutes les conséquences financières de la maladie professionnelle du 11 janvier 2008 de M. [Z] opposables à la société SA SABARC,

condamne la SA SABARC à rembourser à la Caisse toutes les sommes dont elle fera l'avance, y compris les frais d'expertise.




La CPAM fait valoir que la législation en vigueur à la date de reconnaissance de la maladie professionnelle prévoit l'envoi de lettres simples pour les décisions de prise en charge et les notifications de taux d'incapacité et M. [Z] a été averti de cette prise en charge, que ce soit par les courriers ou encore les versements dont il a fait l'objet et qu'il ne conteste pas, de sorte que sa demande concernant la prescription ne saura aboutir, et la décision de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie professionnelle est opposable à l'employeur.



Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées, oralement reprises.




MOTIFS



En application de l'article L431-2 du code de la sécurité sociale, l'action du salarié victime d'une maladie professionnelle en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur se prescrit par deux ans à compter de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie ou de la cessation du versement des indemnités journalières.

Il est constant que M.[Z] n'a pas bénéficié du versement d'indemnités journalières n'ayant jamais eu d'arrêt de travail.

Il a été informé de la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie , après avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles , par lettre simple du 17 novembre 2008, par une lettre simple du 22 décembre 2008, la CPAM lui a notifié la date de consolidation et par lettres des 31 décembre 2008 et 15 mars 2009 le taux d'IPP et le montant de la rente, et le versement d'une rente à compter du 8 décembre 2008 ; tous ces courriers ont été adressées [Adresse 2], à laquelle avaient été adressés auparavant des lettres recommandées avec accusé de réception relatives à l'instruction du dossier et à la saisine du CRRMP, adresse dont M.[Z] ne soutient pas qu'il ne s'agissait plus de son adresse, pas davantage qu'il n'avance avoir informé la caisse d'une nouvelle adresse, et la caisse n'avait pas l'obligation de lui notifier la décision de prise en charge, qui ne lui faisait pas grief, par lettre recommandée avec accusé de réception. En outre, il est établi que l'employeur a été concomitamment destinataire les 17 novembre et 31 décembre 2008de la copie de ces courriers et les a reçus, ce qui démontre leur envoi.

Par ailleurs, M.[Z] a perçu à compter de décembre 2008 une rente trimestrielle d'un montant initial de 210 € puis de 304,02 €, en conséquence de la reconnaissance de la maladie professionnelle et du taux d'IPP en résultant, ce qui constituait un élément complémentaire d'information faisait courir le délai de prescription, M.[Z] n'ayant pas interrogé la caisse sur un versement qu'il considérait indû.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclarée prescrite la demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur de M.[Z]. Il n'y a pas lieu dès lors de statuer sur la demande subsidiaire de la société SABARC tendant à voir dire dans cette hypothèse, inopposable la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

M.[Z] sera débouté de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile, ses prétentions étant rejetées.



PAR CES MOTIFS



LA COUR



Confirme le jugement déféré ;



Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M.[Z].



Signé par Madame Elisabeth LARSABAL, Présidente, et par Gwenaël TRIDON DE REY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.



G. TRIDON DE REY Elisabeth LARSABAL

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