24 juin 2014
Cour d'appel de Paris
RG n° 13/13518

Pôle 1 - Chambre 3

Texte de la décision

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRET DU 24 JUIN 2014



(n° 395 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/13518



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 11 Juin 2013 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 13/00237





APPELANTE



SELARL [L] représentée par Me [M] [L], agissant en qualité de liquidateur de Monsieur [W] [T] et de Madame [N] [I],

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représentée par Me Bernard VATIER de l'AARPI VATIER & ASSOCIES avocat au barreau de PARIS, toque : P0082

assistée de Me Laetitia HOUDART, plaidant pour l'AARPI VATIER & ASSOCIES et substituant Me Bernard VATIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0082







INTIMES



Monsieur [W] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représenté et assisté de Me Rufino D'ALMEIDA de l'AARPI BWD - Cabinet d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1882



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/033775 du 06/08/2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)



SCP BROUARD DAUDE pris en la personne de Me [J] [B], mandataire ad hoc de la Société TILT IMMO, associée de la SCI PREG II

[Adresse 2]

[Adresse 2]



défaillante









COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 19 Mai 2014, en audience publique, devant la Cour composée de :



Madame Nicole GIRERD, Présidente de chambre

Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère

Madame Odette-Luce BOUVIER, Conseillère



qui en ont délibéré





Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET



ARRET :





- REPUTE CONTRADICTOIRE



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Madame Nicole GIRERD, président et par Mlle Véronique COUVET, greffier.










La société PREG II a été créée le 21 juin 1989 entre trois associés, M. [T], Mme [I] et la sarl Tilt Immo,



Tous trois ont été placés en liquidation judiciaire, M. [T] et Mme [I] par jugements du tribunal de commerce de Créteil du 2 octobre 1996, confirmé en ce qui concerne M. [T] par arrêt du 4 mars 1997, la société Tilt Immo par jugement du 23 juillet 1992.



Mme [I] est décédée le [Date décès 1] 1997.



Par jugements du tribunal de commerce de Créteil en date des 25 septembre 2008 et 6 novembre 2008, la selarl [L], prise en la personne de Me [M] [L], a été désigné en remplacement de Me [G], liquidateur de M. [T] et de Mme [I].



Par jugement du 18 novembre 1998 le tribunal de commerce de Créteil, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Paris du 31 janvier 2008, avait prononcé l'extension de la liquidation judiciaire de M. [T] aux SCI PREG et PREG II ;



Cet arrêt a été cassé par arrêt du 9 février 2010 ; M. [T] a été désigné par une ordonnance du 8 avril 2010 comme mandataire ad hoc de la SCI PREG puis le 12 juillet 2010 de la SCI PREG II afin de représenter ces SCI dans la procédure devant la cour d'appel de renvoi qu'il a saisie.



Par ordonnance du 23 juin 2010, le premier président a fait droit à sa demande de suspension de l'exécution provisoire du jugement du 18 novembre 1998 .



Par arrêt du 28 juin 2011 la cour d'appel de Paris a déclaré le jugement du 25 septembre 2008 ayant désigné la selarl [L] en remplacement de Me [G] en qualité de liquidateur de M. [T] et des SCI Preg et Preg II nul et de nul effet à l'égard des SCI PREG et PRG II, en renvoyant la cause pour le surplus.



Le pourvoi formé à l'encontre de cette décision a été déclaré non admis.



Arguant de ce que la SCI PREG ne dispose plus d'organe de représentation du fait de la suspension de l'exécution provisoire, la selarl [L], prise en qualité de liquidateur de M. [W] [T] et de Mme [N] [I] a assigné en référé par actes des 31 janvier 2013 et 1er février 2013,



- M. [W] [T], pris en qualité d'associé de la SCI PREG II



- et la SCP Brouard Daude , mandataire ad hoc de la société TILT IMMO, associée de la SCI PREG II, désignée à sa requête,



aux fins essentiellement de désignation d'un administrateur provisoire à la SCI PREG II qui assurera l'administration de la SCI jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur le sort de la procédure engagée par M. [T] devant la cour d'appel de Paris, et de dire que cette désignation met fin au mandat ad hoc de M.[T].



Par ordonnance en date du 11 juin 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil a :



- déclaré nulle les assignations délivrées à la requête de la selarl [L], l'assignation de M. [T] pris en sa qualité d'associé de la SCI Preg II, en ce que par l'effet de la liquidation judiciaire il se trouve dépourvu de cette qualité, celle qui a été délivrée à l'autre associé la société TILT Immo alors qu'elle est dépourvue de toute personnalité morale et de toute capacité juridique par l'effet de sa radiation du registre du commerce en conséquence de sa liquidation judiciaire



- de surcroît déclaré irrecevable l'action introduite par la selarl [L] ès qualités de mandataire liquidateur de M. [T] et de Mme [I] pour défaut de qualité à agir, du fait que le jugement la désignant a été annulé par arrêt du 28 juin 2011, qu'il ne peut réclamer la désignation d'un administrateur judiciaire pour une société en liquidation, enfin qu'il n'a pas été désigné comme liquidateur de Mme [I] et que celle-ci est décédée .



- condamné la selarl [L] aux dépens.



La selarl [L] a relevé appel de cette décision.



Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 7 avril 2014, elle poursuit l'infirmation de cette décision et sollicite la désignation d'un administrateur provisoire pour la société PREG II avec mission d'administrer cette société jusqu'à ce qu'il soit définitivement statué sur le sort de la procédure engagée par M. [T] devant la cour d'appel de Paris ensuite de l'arrêt de cassation du 23 juin 2010 , et demande à la cour de dire que cette désignation met fin au mandat ad hoc de M. [T], et de condamner la SCI PREG II aux dépens.



Elle expose que le jugement du 18 novembre 1998 qui a étendu la liquidation judiciaire de M. [T] et de Mme [I] à la SCI PREG II subsiste tant qu'il n'aura pas été définitivement statué sur le recours formé; que le mandat ad hoc confié à M. [T] le 12 juillet 2012 ne valant que pour la représentation des droits propres de la SCI dans la procédure d'appel du jugement du 18 novembre 1998, un administrateur provisoire doit être désigné pour cette SCI, dépourvue de tout organe de représentation du fait de la suspension de l'exécution provisoire, jusqu'à ce qu'il soit statué sur le mérite du recours déposé par M. [T] contre ce jugement,









Elle soutient que la mise en cause de M. [T] en qualité d'associé de la SCI PREG II est justifiée en l'absence de dissolution de la société, dont en tout état de cause la personnalité morale subsisterait tant que les droits et obligations à caractère social n'ont pas été liquidés, et à raison du droit propre des associés dans l'exercice de leur droit de vote dont M. [T] n'est pas déssaisi par sa liquidation ;



Que l'assignation de la sarl TILT Immo l'est également puisque, malgré la clôture de sa liquidation en date du 23 juillet 1992, sa dissolution n'a pas pour effet de faire disparaître sa personnalité juridique, que l'existence de parts de la SCI PREG II dans son patrimoine démontre que ses droits n'ont pas été entièrement liquidés, qu'un mandataire ad hoc lui a été désigné pour la représenter.



Elle ajoute qu'elle-même a qualité à agir en sa qualité de mandataire liquidateur de M. [T] et de Mme [I] à laquelle elle a été régulièrement désignée ;



Qu'elle a un intérêt objectif pour la bonne conduite de sa mission de liquidateur de M. [T] à solliciter un administrateur provisoire pour la SCI à fin qu'il veille aux actifs détenus par la SCI PREG II .



M. [W] [T], par dernières écritures transmises le 12 mai 2014, demande à la cour :



- de statuer sur les tierces oppositions- nullité incidente contre le jugement du 23 juillet 1992 prononcé à l'encontre de la sarl TILT IMMO, le jugement du 2 octobre 1996 qui a emporté la liquidation judiciaire de Mme [I], le jugement du 25 septembre 2008 prononcé à l'encontre de M; [T], et le jugement du 6 novembre 2008 prononcé à l'encontre de Mme [I], et de les dire nuls et de nul effet,



- de déclarer nulles et de nul effet les assignations des 1er février et 31 janvier 2013,



- de juger irrecevables les demandes de la selarl [L] ès qualité de mandataire judiciaire de M. [T] et de Mme [I] pour défaut de qualité à agir ,



- en conséquence, de confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance querellée, et de débouter la selarl [L] de ses demandes,



subsidiairement, de dire n'y avoir lieu à référé et débouter la selarl [L] de ses demandes,



en tous les cas de condamner la selarl [L] ès qualités à lui verser la somme de 25.000 € pour procédure abusive et celle de 3500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile , son avocat renonçant à l'avance au cas où il serait fait droit à ses demande s à l'indemnité mise à la charge de l'Etat.



Il fait valoir que :



- les assignations sont entachés d'irrégularité en ce qu'elles lui ont été délivrées à lui et à la société Tilt Immo en qualité d'associé alors que par application de l'article 1844-7 7° du code civil, la SCI PREG II a été dissoute dès le prononcé de sa mise en liquidation judiciaire ;



- Que la selarl [L] est dépourvue de qualité à agir :



en sa qualité de liquidateur de M. [T] pour solliciter la désignation d'un administrateur provisoire pour une société redevenue in bonis du fait de la suspension d'exécution provisoire, et représentée par son dirigeant social la selarl AJ Associés,



en qualité de liquidateur de Mme [I] puisque celle-ci est décédée et qu'il n'a pas été désigné à cette fin ;



en qualité de liquidateur de M. [T] pour introduire la présente procédure contre M. [T] pris en qualité d'associé de la SCI PREG II, cette action relevant des droits propres de l'associé dont celui-ci n'est pas dessaisi ;



- Subsidiairement, que l'action est mal fondée, que la désignation d'un administrateur provisoire est une mesure exceptionnelle, requérant une atteinte au fonctionnement normal de la société et un péril imminent la menaçant, qu'aucune de ces conditions n'est réunie ; que la SCI PREG II ne détient pas d'immeuble, qu'il n'y a aucun bien à administrer, que la société dispose en sa personne d'un représentant désigné dans l'instance en cours devant la cour d'appel de renvoi.



L'appelant a fait signifier sa déclaration d'appel et ses conclusions à la SCP Brouard Daude ès qualités de mandataire ad hoc de la société Tilt Immo, associée de la SCI PREG II le 27 septembre 2013, par acte remis à personne habilitée.



Celle-ci n'a pas constitué avocat.






SUR CE LA COUR





Sur la validité des assignations,



Considérant que du fait de la suspension d'exécution provisoire attachée à la décision qui prononçait l'extension de la liquidation judiciaire de M. [T] et de Mme [I] à la SCI PREG II, cette société est redevenue 'in bonis' ;



Considérant que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire d'une personne physique emporte dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens mais ne le dessaisit pas des droits attachés à sa personne ;



Que dès lors M. [T] n'est pas dessaisi de ses droits de vote, droits propres d'associé, malgré sa liquidation judiciaire , de même que la société Tilt Immo dont les opérations de liquidation judiciaire ont été clôturées mais dont la personnalité morale subsiste pour les besoins de sa liquidation, et à laquelle a été désignée à cette fin un administrateur ad hoc ;



Qu'ils ont été valablement assignés en leur qualité d'associés ;



Que les assignations n'encourent aucune nullité de ce chef ;



Sur la qualité et l'intérêt à agir de la selarl [L]



Considérant que la qualité à agir de la selarl [L] en qualité de liquidateur de M.[T] et de Mme [I] à l'encontre des associés de la SCI PREG II, et son intérêt à agir en désignation d'un administrateur judiciaire pour la dite SCI sont contestés par M. [T] ;



Considérant que des pièces produites, il ressort que la selarl [L] a été désignée en remplacement de Me [G] en qualité de liquidateur judiciaire de M. [T] et des SCI PREG et PREG II par jugement du 25 septembre 2008, que l'arrêt du 28 juin 2011 invoqué n'a annulé ce remplacement qu'à l'égard des SCI, que la selarl [L] a par conséquent qualité pour agir comme liquidateur de M. [T] ;



Qu'elle a également été désignée en remplacement de Me [G] en qualité de liquidateur de Mme [I] par un jugement du 6 novembre 2008, devenu définitif et postérieur au décès de celle-ci, que sa qualité à agir ne saurait donc être remise en cause ;



Considérant encore qu'en application de l'article L 641-9 du code de commerce, 'les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ';



Que la demande de désignation d'un administrateur provisoire pour une SCI dont le débiteur détient des parts concerne le patrimoine de celui-ci ;



Qu'il suit de là que le liquidateur a qualité pour agir en désignation d'un administrateur provisoire pour une SCI dont le débiteur détient des parts ;



Considérant, sur l'intérêt à agir critiqué, qu'aux termes de l'article 31 du code de procédure civile , l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé ;



Que l'intérêt à agir, qui s'apprécie au jour de l'introduction de la demande en justice, n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action ;



Considérant que la selarl [L] justifie également d'un intérêt à agir en désignation d'un administrateur provisoire pour la SCI PREG II dont elle soutient qu'elle est dépourvue d'organe de représentation, dès lors que cette situation est de nature à affecter la valeur des parts de SCI détenues dans le patrimoine du débiteur qu'elle représente ;



Que les fins de non recevoir soulevées seront par conséquent écartées ;



Sur la demande de désignation d'un administrateur provisoire



Considérant que la selarl [L] sollicite la désignation d'un administrateur provisoire pour la société PREG II au motif d'une vacance de l'administration de cette société ;



Qu'il est constant que celle-ci est redevenue 'in bonis' du fait de la suspension de l'exécution provisoire assortissant le jugement lui étendant la liquidation de M. [T] et de Mme [I], et ce jusqu'à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris saisie sur renvoi après cassation de l'arrêt qui confirmait cette extension ;



Considérant que l'extrait K bis de la société PREG II au 7 août 2013 versé aux débats par la selarl [L] mentionne que le gérant de cette société est la société d'administrateurs judiciaires [K] [Y] et [E] [D] ;



Que le liquidateur, qui a la charge de la preuve des faits qu'il invoque, ne produit aucune pièce récente qui démontre que la société soit désormais dépourvue de représentant légal ;



Que dès lors que la société PREG II dispose d'un gérant dont il n'est pas démontré devant la cour qu'il ait été mis fin à ses fonctions, la demande de désignation d'un administrateur ad hoc n'est pas fondée ;



Sur les 'tierce opposition-nullité incidente'



Considérant qu'aucun moyen n'est soulevé au soutien de ces prétentions, , qu'i y a lieu dès lors de les rejeter ;



Sur l'indemnité de procédure et les dépens



Considérant que l'équité ne commande pas dans l'espèce de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;



Que la selarl [L] , partie perdante, devra supporter la charge des dépens ;



PAR CES MOTIFS





Infirme l'ordonnance entreprise sauf en ses dispositions relatives aux dépens, qui sont confirmées,



Statuant à nouveau,



Déclare valables les assignations délivrées les 31 janvier 2013 et 1er février 2013 par la selarl [L],



Rejette les fins de non-recevoir soulevées par M. [W] [T],



Déboute la selarl [L] prise en la personne de Me [M] [L] ès qualité de liquidateur de M. [W] [T] et de Mme [N] [I] de sa demande de désignation d'administrateur provisoire pour la SCI PREG II,



Deboute M. [W]-[T] de ses 'tierce opposition - nullité incidente',



Dit n'y avoir lieu a application de l'article 700 du code de procédure civile,



Condamne la selarl [L], prise en la personne de Me [M] [L] ès qualité de liquidateur de M. [W] [T] et de Mme [N] [I] aux dépens de l'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle .





LE GREFFIERLE PRESIDENT

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