4 juillet 2016
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-70.004

Autre

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2016:AV16006

Titres et sommaires

PRESCRIPTION CIVILE - prescription décennale - article l. 111 - 4 du code des procédures civiles d'exécution - domaine d'application - créances périodiques nées en application d'un titre exécutoire (non) - protection des consommateurs - conditions générales des contrats - prescription - délai biennal - créances périodiques d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la suite de la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur - prescription biennale

Le délai d'exécution d'un titre exécutoire, prévu à l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, n'est pas applicable aux créances périodiques nées en application de ce titre exécutoire

Texte de la décision

Demande d'avis n° X1670004
Séance du 4 juillet 2016
Juridiction : Tribunal d'instance de Montargis
Avis n° 16006P
COUR DE CASSATION
Vu les articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile ;
Vu la demande d'avis formulée le 11 avril 2016 par le tribunal d'instance de Montargis, reçue le 13 avril 2016, dans une instance opposant le Fonds commun de titrisation Credinvest, compartiment Credinvest 1 à Mme Louis X..., et ainsi libellée :
1°/ Le délai d'exécution d'un titre exécutoire, prévu à l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, constitue-t-il également le délai de prescription applicable aux créances périodiques nées en application de ce titre exécutoire ?
2°/ Dans la négative : la prescription des créances périodiques nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire, dont bénéficie un professionnel à l'égard d'un consommateur, est-elle soumise au délai biennal de prescription applicable au regard de la nature de la créance, prévu à l'article L. 137-2 du code de la consommation, ou au délai quinquennal de droit commun prévu à l'article 2224 du code civil ?
Vu les observations écrites déposées par la SCP Hemery et Thomas-Raquin pour le Fonds commun de titrisation Credinvest ;
Sur le rapport de M. le conseiller Vigneau et les conclusions de M. le premier avocat général Ingall-Montagnier ;
MOTIFS:
Première demande d'avis :
Il résulte de la jurisprudence récente de la Cour de cassation (1re Civ., 8 juin 2016, n°15-19.614, à paraître au bulletin) que si, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, le créancier peut poursuivre pendant dix ans l'exécution du jugement portant condamnation au paiement d'une somme payable à termes périodiques, le recouvrement des arriérés échus avant la date de sa demande et non encore exigibles à celle arrêtée par le jugement est soumis au délai de prescription applicable en raison de la nature de la créance.
Par voie de conséquence, le délai d'exécution d'un titre exécutoire, prévu à l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, n'est pas applicable aux créances périodiques nées en application de ce titre exécutoire.
Seconde demande d'avis :
L'article L. 137-2 du code de la consommation, devenu L. 218-2 du même code en vertu de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, selon lequel l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans, est énoncé de façon générale et a vocation à s'appliquer à tous les contrats de consommation. Ainsi, la première chambre civile de la Cour de cassation a jugé qu'il s'applique aux crédits immobiliers consentis par des organismes de crédit au consommateur, lesquels constituent des services financiers fournis par des professionnels (1re Civ., 28 novembre 2012, n° 11-26.508, Bull. 2012, I, n° 247).
Ce texte ne distingue pas selon le type d'action, et notamment pas entre les actions en paiement en vue d'obtenir un titre exécutoire et celles en recouvrement en vertu d'un tel titre.
Institué dans l'intérêt du consommateur, le délai de prescription de l'article L. 218-2 du code de la consommation ne peut, selon l'article L. 218-1, faire l'objet d'un accord modifiant sa durée ou ajoutant des causes de suspension ou d'interruption de celle-ci, et la fin de non-recevoir tirée de son expiration peut être relevée d'office par le juge (1re Civ., 9 juillet 2015, n° 14-19.101).
Il en résulte que ce texte institue un régime de prescription dérogatoire au droit commun, applicable à toutes les actions engagées par un professionnel tendant au paiement des sommes dues pour les biens ou les services qu'il a fournis à un consommateur.
Par application des principes selon lesquels les lois spéciales dérogent aux lois générales et il est défendu de distinguer là où la loi ne distingue pas, il y a lieu de considérer que les créances périodiques nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire, en raison de la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur, sont soumises au délai de prescription prévu à l'article L. 218-2 du code de la consommation, applicable au regard de la nature de la créance.
En conséquence,
LA COUR EST D'AVIS QUE :
1°/ le délai d'exécution d'un titre exécutoire, prévu à l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, n'est pas applicable aux créances périodiques nées en application de ce titre ;
2°/ les créances périodiques nées d'une créance en principal fixée par un titre exécutoire à la suite de la fourniture d'un bien ou d'un service par un professionnel à un consommateur sont soumises au délai de prescription prévu à l'article L. 218-2 du code de la consommation, applicable au regard de la nature de la créance.
Fait à Paris, le 4 juillet 2016, au cours de la séance où étaient présents :
M. Louvel, premier président, Mme Flise, M. Guérin, Mme Batut, M. Frouin, Mme Mouillard, M. Chauvin, présidents de chambre, Mme Kamara, doyen faisant fonction de président en remplacement de M. Jean empêché, Mme Wallon, conseiller, M. Vigneau, conseiller rapporteur assisté de Mme Legoherel, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, et Mme Marcadeux, directeur de greffe.
Le présent avis a été signé par le premier président et le directeur de greffe.

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