9 juillet 2015
Cour de cassation
Pourvoi n° 14-12.801

Chambre sociale

ECLI:FR:CCASS:2015:SO01250

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 19 décembre 2013), que M. X... a été engagé le 20 juillet 1992 en qualité de responsable technique par la société Cidrerie d'Anneville ; que cette société a été acquise par le groupe la Cidrerie du calvados la fermière (CCLF), lui-même racheté en 2004 par le groupe coopérative agricole Agrial ; qu'occupant, à la suite de différentes promotions, les fonctions de directeur de l'usine d'Anneville sur Scie, le salarié a été licencié pour motif économique par lettre du 27 juin 2011 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer au salarié des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que les juges du fond sont tenus par les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, aux termes de leurs conclusions « soutenues à l'audience » et auxquelles renvoyait la cour d'appel « pour exposé exhaustif », l'employeur et le salarié s'accordaient sur la nécessité d'apprécier le motif économique au niveau du secteur d'activité cidricole qui était une partie de la branche « boissons » du groupe Agrial ; qu'en appréciation cependant le motif économique au niveau de « la branche boissons » ou autrement dit « du groupe CCLF, branche boissons du groupe Agrial » dans son ensemble, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que la cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient ; que l'employeur, comme le salarié, faisaient valoir qu'il fallait isoler le secteur cidricole correspondant à une partie seulement des entreprises du groupe CCLF lui-même inclus dans le groupe Agrial ; qu'en affirmant cependant péremptoirement qu'il convenait d'apprécier le motif économique de licenciement au niveau de « la branche boissons » ou « du groupe CCLF (branche boissons du groupe Agrial) » pris dans son ensemble, sans à aucun moment dire pourquoi elle refusait d'examiner le motif économique au niveau du secteur cidricole, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

3°/ que la cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient ; qu'en écartant en l'espèce l'existence d'un motif économique justifiant le licenciement du salarié, après avoir longuement examiné des données relatives à l'entreprise, au prétexte qu'il n'était pas établi que la réorganisation envisagée « était nécessaire pour la sauvegarde de la compétitivité de la SARL Cidrerie d'Anneville » quand elle avait elle-même constaté que le motif économique devait s'apprécier au niveau du secteur d'activité dont faisait partie l'entreprise au sein du groupe Agrial, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

4°/ qu'une réorganisation est justifiée par un impératif de sauvegarde de la compétitivité dès lors qu'est établie la nécessité pour l'entreprise de parer des difficultés prévisibles en adaptant ses structures à l'évolution de son marché dans les meilleures conditions ; que la cour d'appel a elle-même constaté qu'il résultait du communiqué de presse du groupe Agrial du 28 juin 2011 que si « la branche boissons est celle qui avait les meilleures performances par rapport aux autres branches agro-alimentaires », « elle est confrontée à une baisse structurelle du marché du cidre et qu'un plan d'actions visant à requalifier l'image du cidre a été décidé » ; qu'il s'en évinçait qu'en 2011, à l'époque du licenciement, une menace pesait sur la compétitivité non seulement du secteur d'activité cidricole, mais encore de la branche boissons toute entière qui devait s'adapter à l'évolution structurelle du marché du cidre ; qu'en écartant cependant l'existence d'un motif économique au prétexte inopérant que compte tenu du rachat d'une autre entreprise en 2009, le groupe Agrial était le principal acteur du cidre en France, sans dire en quoi la baisse structurelle du marché qu'elle relevait ne caractérisait pas l'existence de difficultés prévisibles que l'entreprise pouvait parer en mettant en oeuvre la réorganisation ayant conduit au licenciement du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du code du travail ;

5°/ que la preuve est libre en matière prud'homale ; qu'en déniant toute valeur au « compte de résultat de C. d'Anneville » dès lors qu'il ne comportait aucun visa d'un expert-comptable, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;

6°/ qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; qu'en reprochant en l'espèce à l'employeur de ne pas établir que la réorganisation impliquant en juin 2011 la suppression du poste du salarié était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du groupe CCLF (branche boissons du groupe Agrial) faute de produire des éléments chiffrés pour les années 2010 et 2011, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve du motif économique de licenciement sur l'employeur et violé les articles L. 1235-1 du code du travail et 1315 du code civil ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui était soumis, la cour d'appel a retenu, sans méconnaître les termes du litige ni les règles de preuve applicables en matière prud'homale, que les allégations de l'employeur selon lesquelles l'activité de la société pour l'année 2009 aurait baissé de près de 2 millions d'euros et que la situation serait restée négative pour 2010, étaient démenties par le rapport du cabinet d'expertise comptable désigné par le comité d'entreprise dont l'employeur se prévalait par ailleurs, mettant en évidence les bons résultats du site d'Anneville en 2009, avec des perspectives favorables pour 2010, que la société Cidrerie d'Anneville ne justifiait pas de ses résultats comptables pour 2010 et le début de l'année 2011, alors même que le licenciement du salarié est intervenu en juin 2011, que les résultats concernant la branche " boissons " qui constituait le secteur d'activité au niveau duquel devait s'apprécier la réalité du motif économique du licenciement démontraient pour cette période une reprise de l'activité cidricole du Val de Vire et des résultats en hausse ; qu'elle a pu en déduire que la menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité auquel elle appartient n'était pas établie ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme au titre de rappel de la prime de treizième mois, alors, selon le moyen :

1°/ que les juges du fond ne peuvent pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur contestait le calcul du salarié en faisant valoir que la somme due au titre du 13ème mois était de 2256, 08 euros pour la période allant jusqu'au jour du licenciement, le 8 juillet 2011, somme qui a été payée en juillet 2011, et qu'au titre du préavis de trois mois était due la somme de 1084, 66 euros payée en décembre 2011 ; qu'en affirmant cependant que l'employeur aurait soutenu que seule la somme de 2256, 08 euros aurait été due au titre du 13ème mois pour l'année 2011 et ne contestait pas la méthode de calcul utilisée par le salarié pour parvenir à une somme de 3 520, 29 euros au titre du 13e mois, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en affirmant qu'un solde d'un montant de 1264, 21 euros serait resté dû au titre du 13ème mois 2011, sans dire en quoi il n'y avait pas lieu de tenir compte du paiement de 1084, 66 euros dont se prévalait l'employeur et dont il établissait la réalité en versant aux débats le bulletin de salaire de décembre 2011 comportant une ligne de ce montant intitulée « 1065 Rappel 13ème mois sur préavis », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que le moyen, qui tend à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation des éléments de fait par lesquelles la cour d'appel, par une décision motivée exclusive de dénaturation, a retenu que le montant restant du au salarié au titre de la prime de treizième mois pour l'année 2011 s'élevait à la somme de 1264, 21 euros, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Cidrerie d'Anneville aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Cidrerie d'Anneville.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que le licenciement de monsieur X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse et en conséquence, condamné la SARL CIDRERIE D'ANNEVILLE aux dépens et à payer à monsieur X... la somme de 70. 000 ¿ à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la SARL CIDRERIE D'ANNEVILLE à adresser à monsieur X... une attestation Pôle Emploi rectifiée ;

AUX MOTIFS QUE « Attendu qu'en application des dispositions des articles 1233-2 et 1233-3 du code du travail, le licenciement pour motif économique doit être justifié par une cause réelle et sérieuse résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. Qu'il appartient au juge d'apprécier la réalité et le caractère sérieux du motif économique invoqué et notamment, comme en l'espèce, d'apprécier le bien-fondé de la réorganisation au regard de la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient, même s'il ne peut se substituer à l'employeur quant aux choix effectués dans la mise en oeuvre de la réorganisation. Attendu que le salarié conteste la réalité du motif économique au motif que les difficultés économiques de la SARL LA CIDRERIE ne sont pas justifiées au moment du licenciement de même celles du groupe auquel elle appartient et que par suite aucune menace sur la compétitivité du secteur d'activité cidricole du groupe n'est établie ; qu'il conteste également le respect par l'employeur de son obligation de reclassement ; Que la SARL LA CIDRERIE considère que la réorganisation était nécessaire pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe, et qu'au demeurant le juge n'a pas à apprécier la décision de l'entreprise de supprimer la ligne d'embouteillage ; que par ailleurs, elle a respecté son obligation de reclassement précisant que le personnel de la société LA CIDRERIE n'était pas permutable avec les autres sociétés du groupe mais elle a néanmoins interrogé les sociétés appartenant au groupe AGRIAL. Attendu qu'aux termes de la lettre de licenciement, annexée à l'arrêt, l'employeur exposait qu'afin d'assurer la sauvegarde de la compétitivité des moyens de production de la filière cidricole, il a dû réorganiser le site d'ANNEVILLE SUR SCIE dont les résultats d'exploitation négatifs imposaient un rapide redressement, en fermant la ligne d'embouteillage, ce qui a entraîné la suppression des postes de la chaîne d'embouteillage ainsi que des postes induits par cette activité et qui lui sont liées, en raison de son taux d'occupation insuffisant avec une absence de perspective de développement ne permettant pas « de maintenir en l'état un outil d'embouteillage qui depuis plusieurs années est insuffisamment saturé (de l'ordre de 28 %) » alors que la faible utilisation de l'outil limitait sa capacité d'investissement et générait, à terme, des risques à la fois sur la sécurité des personnes et la qualité des produits. Qu'il faisait également valoir que : « Dans la mesure où cette situation sur Anneville était de nature à modifier indirectement votre poste de travail (baisse significative des effectifs à manager, disparition à terme du C. E. que vous présidez...), et que vous ne souhaitiez pas poursuivre votre activité au risque d'une obsolescence professionnelle, il a été envisagé de vous proposer un nouveau poste transverse sur l'ensemble du groupe cidricole dont l'exercice pouvait se faire à partir d'Anneville-sur-Scie en qualité de " Responsable Projets Industriels ". Par lettre en date du 11 mars 2011 vous avez exprimé votre refus à cette proposition. Par ailleurs notre réflexion au regard du nouveau périmètre qui s'installe à Anneville-sur-Scie nous amène à devoir faire le constat de la remise en cause indirectement de votre poste tel que vous l'exerciez jusqu'à présent. En conséquence de quoi, votre poste est supprimé. » Attendu que le motif économique, qui doit être contemporain au licenciement, doit s'apprécier au seul regard du secteur d'activité auquel appartient la SARL CIDRERIE D'ANNEVILLE, soit en l'espèce, la branche Boissons. Or attendu que le rapport du cabinet d'expertise comptable désigné par le comité d'entreprise de la CIDRERIE D'ANNEVILLE, dont se prévaut d'ailleurs l'employeur, indique que pour 2009 :- la progression du prix moyen de vente a permis de compenser la baisse des volumes dans la grande distribution (page 36),- la cidrerie d'ANNEVILLE a réalisé l'un des meilleurs chiffres d'affaires du groupe à hauteur de 7. 180 K ¿ (page 12),- parmi les résultats des cidrerie du groupe, le site d'ANNEVILLE réalise également un bon niveau, contrairement aux sites de SAVOIE, DUJARDIN, et PONT L'EVEQUE qui sont déjà à ce niveau en déficit,- la cidrerie d'ANNEVILLE dégage également un très bon niveau de cash par rapport aux autres cidreries, à hauteur de 595 K ¿, hors remboursements d'assurance (page 13),- s'agissant de son résultat net, la cidrerie d'ANNEVILLE voit ses résultats s'améliorer compte tenu de remboursement d'assurance même si elle doit également faire face aux amortissements d'une nouvelle machine et a des litiges avec le personnel, son résultat étant, dans ces conditions, proche de l'équilibre alors que les autres sites constatent des pertes,- la valeur ajoutée et la rentabilité d'exploitation progressent, la valeur ajoutée étant passée de 24 % de l'activité en 2008 à 37 % en 2009 (page 15),- la capacité d'autofinancement est demeurée positive au cours des trois dernières et s'établit pour 2009 à 595 K ¿ pour 102 K ¿ en 2008,- le résultat net de l'exercice correspond à un bénéfice de 71 K ¿ contre des déficits précédemment,- si la trésorerie se réduit de 770 K ¿, soit une situation négative de 61 K ¿, cette situation résulte du besoin en fonds de roulement et non d'une activité déficitaire,- la situation d'exploitation hors mise en place du PSE montre un niveau d'activité budgété rarement atteint, soit 9, 5 M ¿ (page 18). Que ce rapport pointe également que :- si le chiffre d'affaires de la cidrerie a fluctué de manière importante au cours des derniers exercices, l'année 2010 devrait être d'un bon niveau, même sans changement d'organisation et fermeture de l'embouteillage et que dans l'optique d'un exercice 2010 sans restructuration, le chiffre d'affaires devrait correspond à 9, 52 M ¿, soit en progression de 33 % par rapport à l'exercice 2009, avec une marge brute plus favorable à la fois en valeur et en taux pour 2008 (pages 14 et 69),- ce n'est qu'après comptabilisation des éléments exceptionnels correspondant exclusivement au coût du PSE, soit 0, 24 M ¿, que le résultat de l'exercice 2010 correspondrait à un déficit de 0, 09 M ¿ (page 70). Que bien plus, le rapport conclut que l'arrêt de l'activité embouteillage réduira le chiffre d'affaires de 6, 17 M ¿, et que si le résultat d'exploitation sera plus favorable avec la mise en place du PSE, le résultat avant IS sera négatif compte tenu du coût du plan de sauvegarde de l'emploi (page 71). Que ce rapport comptable, qui n'est nullement contesté par l'employeur, met donc en évidence les bons résultats du site d'ANNEVILLE en 2009, avec de bonnes perspectives également pour 2010. Que les allégations, non justifiées, de l'employeur devant la cour selon lesquelles l'activité pour l'année 2009 aurait baissé de près de 2 millions d'euros, situation qui serait restée négative pour 2010, se trouvent donc démenties par ce rapport. Que la seule note présentée par l'employeur au comité d'entreprise dans le cadre du PSE, qui mentionne un taux d'occupation de la ligne d'embouteillage du site d'ANNEVILLE de 28 % en 2009, ce qui rendrait la situation à court terme ingérable alors que les investissements nécessaires pour maintenir les équipements dans un état satisfaisant au regard des exigences de sécurité et de qualité ne pourraient être assurés, ne peut utilement combattre le rapport comptable précédemment analysé. Que par ailleurs, la SARL CIDRERIE D'ANNEVILLE ne justifie aucunement de ses résultats comptables pour 2010 et le début de l'année 2011, alors même que le licenciement de monsieur X... est intervenu en juin 2011 ; qu'en effet le tableau intitulé « Compte de résultat de C. d'ANNEVILLE » qui mentionne au 30 juin 2011 6 un résultat net négatif ne comporte aucun visa d'un expert-comptable et n'a donc aucune valeur probante ; Que la carence de l'employeur à justifier de ses résultats pour 2010 et le début 2011 a d'ailleurs conduit le Directeur Adjoint du Travail, par décision du 20 juin 2011, à refuser d'autoriser le licenciement de trois salariés protégés, après avoir constaté qu'a l'appui de sa demande de licenciement pour motif économique, l'entreprise n'invoquait que des éléments datant du mois de mai 2010, soit le projet de réorganisation du site et la note économique présentée au comité d'entreprise datée du 17 mai 2010, le motif économique invoqué n'étant donc plus avéré. Qu'il relevait également « que le compte de résultat présenté par la direction lors de l'enquête contradictoire à la demande de l'inspection du travail n'était en aucune manière en rapport avec les éléments pour lesquels la direction de la Cidrerie d'Anneville entendait justifier la présente demande d'autorisation de licenciement ». Qu'ainsi, aucun élément n'établit que la réorganisation envisagée conduisant à la suppression du poste de M. X... était nécessaire pour la sauvegarde de la compétitivité de la SARL CIDRERIE D'ANNEVILLE ; Que l'employeur ne produit par ailleurs non plus aucun élément établissant que cette réorganisation était nécessaire pour sauvegarder la compétitivité du Groupe CCLF (branche Boissons du Groupe AGRIAL) puisqu'il se contente de se référer au rapport de l'expert-comptable, lequel comme il l'a été mentionné plus haut a effectué une analyse sur la situation de certaines autres sociétés du secteur cidrerie en 2009 mais ne contient aucun élément sur ces sociétés pour 2010 et 2011. Qu'au surplus, il est produit aux débats par le salarié des documents émis par le groupe AGRIAL, l'un le 3 mai 2010, relevant de bons résultats financiers en 2009 et pour la branche boissons que « l'année a été marquée par la reprise de l'activité cidricole du Val de Vire », et l'autre le 28 juin 2011 relevant des activités et résultats en hausse pour le groupe Agrial en 2010 et que la branche boissons est celle qui avait les meilleures performances par rapport aux autres branches agro-alimentaires même si elle est confrontée à une baisse structurelle du marché du cidre et qu'un plan d'actions visant à requalifier l'image du cidre a été décidé. Que le rachat des activités cidricoles de la coopérative Elle et Vire (VAL de Vire) par AGRIAL en 2009 évoqué plus haut avait d'ailleurs conduit l'autorité de la concurrence à intervenir et cette dernière avait relevé dans sa décision du 10 octobre 2011 que le groupe AGRIAL est le principal acteur du cidre en France avec douze sites de fabrication. Que dans ces conditions l'employeur n'établit donc pas en quoi la réorganisation de la CIDRERIE D'ANNEVILLE impliquant en juin 2011 la suppression du poste de M. X... était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du Groupe CCLF (branche Boissons du Groupe AGRIAL) ; Que le motif économique n'est donc pas établi et le licenciement de M. X... se trouve, en conséquence, dépourvu de cause réelle et sérieuse. Attendu qu'en considération des circonstances du licenciement, de l'importante ancienneté de M. X... et du montant de salaire, mais en tenant compte également du fait qu'il a créé sa société dès la fin de son préavis, il convient de lui allouer une somme de 70. 000 ¿ à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;

1) ALORS QUE les juges du fond sont tenus par les termes du litige tels qu'ils sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, aux termes de leurs conclusions « soutenues à l'audience » et auxquelles renvoyait la cour d'appel « pour exposé exhaustif » (arrêt page 4), l'employeur et le salarié s'accordaient sur la nécessité d'apprécier le motif économique au niveau du secteur d'activité cidricole qui était une partie de la branche « boissons » du groupe AGRIAL (conclusions du salarié page 18, et page 20 et 21 ; conclusions de l'employeur page 13, 15 et 16) ; qu'en appréciation cependant le motif économique au niveau de « la branche boissons » ou autrement dit « du groupe CCLF, branche boissons du groupe AGIRAL » dans son ensemble, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE la cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient ; qu'en l'espèce, l'employeur, comme le salarié, faisaient valoir qu'il fallait isoler le secteur cidricole correspondant à une partie seulement des entreprises du groupe CCLF lui-même inclus dans le groupe AGRIAL ; qu'en affirmant cependant péremptoirement qu'il convenait d'apprécier le motif économique de licenciement au niveau de « la branche boissons » ou « du groupe CCLF (branche boissons du groupe AGIRAL) » pris dans son ensemble, sans à aucun moment dire pourquoi elle refusait d'examiner le motif économique au niveau du secteur cidricole, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du Code du travail ;

3) ALORS QUE la cause économique d'un licenciement s'apprécie au niveau de l'entreprise ou, si celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient ; qu'en écartant en l'espèce l'existence d'un motif économique justifiant le licenciement de monsieur X..., après avoir longuement examiné des données relatives à l'entreprise, au prétexte qu'il n'était pas établi que la réorganisation envisagée « était nécessaire pour la sauvegarde de la compétitivité de la SARL CIDRERIE D'ANNEVILLE » quand elle avait elle-même constaté que le motif économique devait s'apprécier au niveau du secteur d'activité dont faisait partie l'entreprise au sein du groupe AGRIAL, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du Code du travail ;

4) ALORS en tout état de cause QU'une réorganisation est justifiée par un impératif de sauvegarde de la compétitivité dès lors qu'est établie la nécessité pour l'entreprise de parer des difficultés prévisibles en adaptant ses structures à l'évolution de son marché dans les meilleures conditions ; qu'en l'espèce la cour d'appel a elle-même constaté qu'il résultait du communiqué de presse du groupe AGRIAL du 28 juin 2011 que si « la branche boissons est celle qui avait les meilleures performances par rapport aux autres branches agro-alimentaires », « elle est confrontée à une baisse structurelle du marché du cidre et qu'un plan d'actions visant à requalifier l'image du cidre a été décidé » ; qu'il s'en évinçait qu'en 2011, à l'époque du licenciement, une menace pesait sur la compétitivité non seulement du secteur d'activité cidricole, mais encore de la branche boissons toute entière qui devait s'adapter à l'évolution structurelle du marché du cidre ; qu'en écartant cependant l'existence d'un motif économique au prétexte inopérant que compte tenu du rachat d'une autre entreprise en 2009, le groupe AGRIAL était le principal acteur du cidre en France, sans dire en quoi la baisse structurelle du marché qu'elle relevait ne caractérisait pas l'existence de difficultés prévisibles que l'entreprise pouvait parer en mettant en oeuvre la réorganisation ayant conduit au licenciement de monsieur X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-2 et L. 1233-3 du Code du travail ;

ALORS QUE la preuve est libre en matière prud'homale ; qu'en déniant toute valeur au « compte de résultat de C. d'ANNEVILLE » dès lors qu'il ne comportait aucun visa d'un expert-comptable, la Cour d'appel a violé le principe susvisé ;

5) ALORS QU'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; qu'en reprochant en l'espèce à l'employeur de ne pas établir que la réorganisation impliquant en juin 2011 la suppression du poste de monsieur X... était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du groupe CCLF (branche boissons du groupe AGRIAL) faute de produire des éléments chiffrés pour les années 2010 et 2011, la cour d'appel a fait peser la charge de la preuve du motif économique de licenciement sur l'employeur et violé les articles L. 1235-1 du Code du travail et 1315 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement rendu le 25 février 2013 par le conseil de prud'hommes de DIEPPE en ce qu'il a condamné la CIDRERIE D'ANNEVILLE à payer à monsieur X... la somme de 1. 264, 21 ¿ au titre de rappel de la prime de 13e mois et d'AVOIR condamné la société CIDRERIE D'ANNEVILLE aux dépens et à payer une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « M. X... demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement de la somme de 1. 264, 21 ¿ à titre de rappel de sa prime de 13e mois. Qu'il fait valoir que le montant proratisé de son 13e mois s'élevait à 3. 520, 29 ¿, qu'une somme de 1. 735, 45 ¿ lui a été versée au mois de juin 2011, puis une somme de 2. 256, 08 ¿ au mois de juillet 2011 mais qu'une somme de 1. 735, 45 ¿ lui a été déduite au mois de janvier 2012. Que selon la SARL CIDRERIE D'ANNEVILLE, le montant de la prime de 13e mois pour la période considérée s'élevait à 2. 256, 08 ¿ et c'est donc à la suite d'une erreur qu'elle a versé en juillet 2011 la somme totale de 2. 256, 08 ¿, sans tenir compte de l'acompte de 1. 735, 45 ¿ déjà réglé au mois de juin 2011, qu'elle a donc récupéré en décembre 2011. Or attendu que l'employeur ne conteste ni le montant du salaire retenu par le salarié, ni la méthode de calcul utilisée pour parvenir à une somme de 3. 520, 29 ¿ au titre du 13e mois, soit : 4. 572, 60 ¿ x 281 jours (du 1er janvier au 8 octobre 2011)/ 365 jours = 3. 520, 29 ¿. Que le jugement entrepris sera donc confirmé et l'employeur débouté de sa demande de restitution » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« au protata de son temps de travail sur l'année 2011 (du 1er janvier au 8 octobre), monsieur X... Jean Bernard aurait dû percevoir au titre du 13ème mois la somme de 3520, 29 euros. Il a perçu à ce titre en juin 2011 : 1735, 45 euros (pièce 21-12 du demandeur) et en juillet 2011 : 2256, 08 euros (pièce 21-13 du demandeur). Or, sur son bulletin de salaire de janvier 2012, une somme de 1735, 45 euros est déduite (pièces 41 & 42 du demandeur). Aussi, le conseil de prud'hommes dit qu'un solde d'un montant de 1264, 21 euros (3520, 29 euros ¿ 2256, 08 euros) est bien dû au demandeur, au titre de rappel de prime de 13ème mois » ;

1) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur contestait le calcul du salarié en faisant valoir (conclusions d'appel pages 18 et 19) que la somme due au titre du 13ème mois était de 2256, 08 euros pour la période allant jusqu'au jour du licenciement, le 8 juillet 2011, somme qui a été payée le juillet 2011, et qu'au titre du préavis de trois mois était due la somme de 1084, 66 euros payée en décembre 2011 ; qu'en affirmant cependant que l'employeur aurait soutenu que seule la somme de 2256, 08 aurait été due au titre du 13ème mois pour l'année 2011 et ne contestait pas la méthode de calcul utilisée par le salarié pour parvenir à une somme de 3. 520, 29 ¿ au titre du 13e mois, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2) ALORS en outre QU'en affirmant qu'un solde d'un montant de 1264, 21 euros serait resté dû au titre du 13ème mois 2011, sans dire en quoi il n'y avait pas lieu de tenir compte du paiement de 1084, 66 euros dont se prévalait l'employeur (conclusions page 19) et dont il établissait la réalité en versant aux débats le bulletin de salaire de décembre 2011 comportant une ligne de ce montant intitulée « 1065 Rappel 13ème mois sur préavis » (production d'appel n° 3), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

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