4 septembre 2014
Cour de cassation
Pourvoi n° 13-22.971

Deuxième chambre civile

ECLI:FR:CCASS:2014:C201354

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :





Donne acte à la société Microsoft Corporation de ce qu'elle se désiste de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre des affaires sociales et de la santé ;


Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen du 5 juillet 2013 (n° RG :13/03244) :


Attendu que la société Microsoft Corporation s'est pourvue en cassation contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen du 5 juillet 2013 (n° RG :13/03244) en même temps qu'elle s'est pourvue contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen du 25 juin 2013 (n° RG :11/00620)


Mais attendu qu'aucun des moyens contenus dans le mémoire n'étant dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen du 5 juillet 2013 (n° RG :13/03244), il y a lieu de constater la déchéance partielle du pourvoi en ce qu'il est formé contre cette décision ;


Sur le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen du 25 juin 2013 (n° RG : 11/00621) :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Microsoft Corporation (la société Microsoft) a obtenu du président d'un tribunal de grande instance une ordonnance l'autorisant à faire constater par un huissier de justice, dans les locaux de la société ABC informatique, des faits constitutifs d'atteintes à ses droits de propriété intellectuelle ; que la société ABC informatique a relevé appel de l'ordonnance de la même juridiction ayant refusé de rétracter l'ordonnance initiale ; que la société Microsoft a saisi le conseiller de la mise en état d'une demande tendant à voir constater la caducité de la déclaration d'appel puis déféré à la cour d'appel l'ordonnance ayant rejeté cette demande ; que ce déféré a été déclaré irrecevable par un arrêt du 31 janvier 2012 ;


Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :


Vu l'article 914 du code de procédure civile ;


Attendu qu'il résulte des dispositions de ce texte, d'une part, que les parties ne sont plus recevables à invoquer la caducité de l'appel après le dessaisissement du conseiller de la mise en état, d'autre part, que les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur la caducité de l'appel ont autorité de chose jugée au principal ;


Attendu que pour dire la société Microsoft recevable à invoquer à nouveau le moyen tiré de la caducité de la déclaration d'appel, l'arrêt retient que, même lorsqu'elles ne sont pas susceptibles d'être déférées, les ordonnances du conseiller de la mise en état n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée ;


Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


Et sur le second moyen :


Vu les articles 17, 495, alinéa 3, et 503 du code de procédure civile ;


Attendu que, pour rétracter l'ordonnance sur requête du 2 juillet 2009, l'arrêt retient que la copie de la requête et de l'ordonnance doit être remise à la personne à laquelle elle est opposée avant l'exécution de la mesure d'instruction et que l'ordonnance ne peut être exécutée contre cette personne qu'après lui avoir été notifiée, que le président du tribunal de grande instance ne pouvait donc enjoindre à l'huissier de justice de ne pas décliner son identité et ne pas signifier immédiatement l'ordonnance l'autorisant à procéder au constat mais seulement une fois l'achat de l'ordinateur comportant la ou les reproductions illicites du ou des logiciels Microsoft concernés et la remise du matériel effectués ;


Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 495, alinéa 3, du code de procédure civile a pour seule finalité de permettre le rétablissement du principe de la contradiction en portant à la connaissance de celui qui subit la mesure ordonnée à son insu ce qui a déterminé la décision du juge, et d'apprécier l'opportunité d'un éventuel recours, de sorte que le juge des requêtes pouvait retarder la notification de la décision, et qu'elle relevait qu'à l'issue des opérations, la copie de l'ordonnance et de la requête avait été laissée et la minute présentée à la société ABC informatique, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;


Vu l'article 627 du code de procédure civile ;


PAR CES MOTIFS :


CONSTATE LA DECHEANCE partielle du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen du 5 juillet 2013 (n° RG :13/03244) ;


CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 juin 2013 entre les parties par la cour d'appel de Rouen ;


Dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de la caducité de la déclaration d'appel ;


Déclare irrecevable la demande de caducité ;


Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens pour qu'il soit statué sur les autres points restant en litige ;


Condamne la société ABC informatique aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société ABC informatique, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Microsoft Corporation ;


Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille quatorze.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Microsoft Corporation


PREMIER MOYEN DE CASSATION


Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré mal fondée la demande de caducité de l'appel formée par la Société MICROSOFT CORPORATION sur le fondement de l'article 902 du Code de procédure civile, et d'avoir déclaré recevable l'appel interjeté le 3 février 2011 par la Société ABC INFORMATIQUE ;


Aux motifs que « figure au dossier copie d'un bulletin du greffe daté du 21 mars 2011, portant les mentions relatives à la déclaration d'appel du 3 février 2011 régularisée dans la présente affaire, indiquant comme "destinataires" : la SCP Lejeune Marchand Gray Scolan, 25 , rue Beauvoisine 76000 Rouen" et précisant en bas de page : "L'intimé n'a pas constitué avoué dans le délai prescrit, merci de procéder par voie de signification conformément à l'article 902 du code de procédure civile" ; que c'est par un acte d'huissier de justice du 4 mai 2011, par conséquent plus d'un mois après l'émission du bulletin précité, qu'a été transmise à l'autorité requise à cet effet la demande de signification de la déclaration d'appel et de l'assignation accompagnée de la traduction en anglais afin de signification aux Etats-Unis à la Société de droit américain Microsoft Corporation ; que l'avoué qui avait, à la date d'émission du bulletin du 21 mars 2011, la charge de la défense des intérêts de la Société ABC Informatique soutient n'avoir jamais reçu ce document, dont il doit être considéré qu'il avait été remis, comme c'était alors régulièrement le cas, dans la "case" dont il disposait au siège de la cour ; qu'il ne peut qu'être constaté que la preuve de la disparition de l'avis de cette case avant que l'avoué ne puisse l'y trouver - élément factuel qui ne peut être exclu - est une preuve impossible, étant une nouvelle fois souligné que l'envoi des avis par voie informatique, désormais assuré, ménage à chacun tous éléments de preuve nécessaires quant à la date et l'heure de l'envoi du message, de son arrivée quasi concomitamment sur le poste informatique du destinataire et de sa lecture ; que, si les dispositions de l'article 668 du code de procédure civile ne sont pas applicables, elles ne font qu'exprimer pour les notifications par voie postale, le principe général selon lequel doit être prise en considération à l'égard de celui-ci à qui il est adressé, la date de réception du document en cause, et ce en particulier lorsque cette date conditionne un délai dont l'inobservation entraîne une sanction telle que la caducité de l'appel ; qu'il convient en conséquence, en l'absence de preuve de la réception de l'avis du 21 mars 2011 précité, de retenir que la demande de constatation de la caducité de l'appel doit être rejetée et de déclarer l'appel interjeté par la Société ABC Informatique le 3 février 2011 recevable » ;


Alors que, à peine de caducité de la déclaration d'appel, la signification de la déclaration d'appel à l'intimé qui n'a pas constitué avoué doit être effectuée par l'avoué de l'appelant dans le mois de l'avis qui lui est adressé en ce sens par le Greffe de la Cour d'appel ; que le délai d'un mois court à compter de la date apposée par le Greffe sur ledit avis ; qu'en rejetant la demande de caducité de la déclaration d'appel formée par la Société MICROSOFT CORPORATION au motif que le délai d'un mois de signification de la déclaration d'appel par l'avoué de l'appelant à l'intimé n'ayant pas constitué avoué court à compter de la réception, par l'avoué, de l'avis du Greffe de la Cour, d'une part, et que la Société MICROSOFT CORPORATION n'apporte pas la preuve de la réception, par l'avoué de la Société ABC INFORMATIQUE, de l'avis émis par le Greffe de la Cour le 21 mars 2011, d'autre part, alors que le délai d'un mois imparti à l'avoué de l'appelant pour signifier la déclaration d'appel à l'intimé court à compter de la date d'émission dudit avis par le Greffe et que la signification effectuée le 4 mai 2011 par l'avoué de la Société ABC INFORMATIQUE est intervenue plus d'un mois après l'émission du bulletin du 21 mars 2011, la Cour d'appel, qui a mis la Société MICROSOFT CORPORATION dans l'impossibilité d'invoquer utilement à son profit la sanction de la caducité de la déclaration d'appel prévue par le texte en faveur de toute partie intimée, a violé l'article 902 du Code de procédure civile, dans sa rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.


SECOND MOYEN DE CASSATION


Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rétracté l'ordonnance rendue sur requête le 2 juillet 2009 par le Président du Tribunal de grande instance de Dieppe ;


Aux motifs qu' « en matière d'ordonnance sur requête, le respect du principe de la contradiction qui fonde l'exigence posée à l'alinéa 3 de l'article 495 du Code de procédure civile, requiert que copie de la requête et de l'ordonnance soit remise à la personne à laquelle elle est opposée antérieurement à l'exécution des mesures d'instruction qu'elle ordonne et impose que l'ordonnance ne puisse être exécutée contre cette personne qu'après lui avoir été notifiée ; que la personne à qui l'ordonnance sur requête du 2 juillet 2009 était opposée était la Société ABC Informatique ; que le Président du Tribunal de grande instance de Dieppe ne pouvait accueillir la requête de la Société MICROSOFT en désignant un huissier de justice tout en lui enjoignant de "ne pas décliner son identité et ne pas signifier immédiatement l'ordonnance l'autorisant à procéder au constat mais seulement une fois l'achat de l'ordinateur comportant la ou les reproduction(s) illicite(s) du ou des logiciel(s) Microsoft concerné(s) et la remise du matériel effectués ¿" ; que l'argument selon lequel l'absence d'indication immédiate par l'huissier de justice de sa qualité est la condition sine qua non de l'efficacité de la mesure est inopérant et ne tend au demeurant qu'à démontrer que la mission confiée en ce cas à l'officier ministériel excède celle d'un constatant ; qu'il s'ensuit qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance de référé du 6 janvier 2001 en toutes ses dispositions et de rétracter l'ordonnance sur requête du 2 juillet 2009 » ;


Alors que l'ordonnance sur requête autorisant un constat par voie d'Huissier de justice, sans mettre en oeuvre aucun mécanisme coercitif ou intrusif impliquant le concours d'un technicien ou de la force publique, n'a pas à être notifiée au tiers destinataire de la mesure préalablement à la mise en oeuvre de la mesure probatoire, sa minute ayant seulement à être présentée en amont à l'Huissier de justice désigné ; qu'en jugeant que l'ordonnance du 2 juillet 2009 désignant un Huissier de justice à fin de constat en lui enjoignant "de ne pas décliner son identité et ne pas signifier immédiatement l'ordonnance l'autorisant à procéder au constat, mais seulement une fois l'achat de l'ordinateur comportant la ou les reproduction(s) illicite(s) du ou des logiciel(s) Microsoft concerné(s) et la remise du matériel effectués", doit être rétractée, quand bien même ces modalités de mise en oeuvre sont la condition sine qua non de l'efficacité de la mesure, dès lors qu'elle porte atteinte au principe de la contradiction, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile, ensemble les articles 495 et 503 du même code.

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