5 mai 2011
Cour de cassation
Pourvoi n° 10-20.436

Deuxième chambre civile

ECLI:FR:CCASS:2011:C200874

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société SQLI du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Alti, MM. de X..., Y..., B..., C...et D... ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :

Vu les articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, qu'invoquant des actes de débauchage de ses salariés et de pillage de son savoir-faire qu'elle imputait à la société Alti (la société), ainsi qu'à MM. Y..., de X... et Z..., la société SQLI a saisi le président du tribunal de grande instance de Nanterre d'une requête unique tendant à la désignation d'huissiers de justice en vue de la réalisation d'investigations tant au siège social de cette société qu'aux domiciles des trois autres intéressés ; que par quatre ordonnances distinctes, visant chacune l'un d'eux, la demande de la société SQLI a été accueillie ;

Attendu que pour rétracter l'ordonnance concernant M. Z... et annuler les actes d'exécution subséquents, l'arrêt retient que l'existence de quatre ordonnances distinctes fait obstacle à ce que le président du tribunal de grande instance de Nanterre retienne sa compétence territoriale pour ordonner des mesures devant être mises en oeuvre au domicile de M. Z..., sis dans le ressort du tribunal de grande instance de Bobigny ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'instance introduite par la requête unique de la société SQLI visait plusieurs personnes, dont certaines étaient domiciliées dans le ressort du tribunal de grande instance de Nanterre, susceptible de connaître de l'éventuelle instance au fond, et qu'étaient formées à leur encontre des demandes connexes tendant à conserver ou établir la preuve de faits similaires dont pourrait dépendre la solution d'un même litige, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la dernière branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ses dispositions déclarant irrecevables l'appel provoqué de la société Alti ainsi que les interventions volontaires de MM. Y..., de X..., B..., C...et D..., l'arrêt rendu le 30 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. Z... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Z..., le condamne à payer à la société SQLI la somme de 1 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société SQLI.

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rétracté l'ordonnance sur requête visant Monsieur Z... du 28 mars 2009 et d'avoir en conséquence annulé tous les actes effectués en exécution de cette ordonnance, et condamné la société SQLI à restituer les éléments collectés ;

AUX MOTIFS QUE le juge territorialement compétent pour rendre une ordonnance sur requête est le président de la juridiction saisie au fond ou à défaut, celui du tribunal du lieu où la mesure demandée doit être exécutée ; qu'en l'occurrence, d'une part, à la date de la présentation de la requête unique visant la société ALTI et Messieurs Z..., Y... et DE X..., aucune juridiction n'était saisie au fond d'un litige opposant les parties ; que d'autre part, l'ordonnance rendue le 28 mars 2009 à l'encontre de Monsieur Z... ne vise que Monsieur Z..., à l'exclusion des personnes physiques et morales concernées par d'autres ordonnances spécifiquement intervenues quelques jours plus tôt ; qu'en effet, aux termes de cette ordonnance, le président du tribunal de grande instance de Nanterre saisi à la requête de la société SQLI a désigné la SCP CHASTAZNIER ALLENI RABANY LAYEC huissiers de justice, avec pour mission de se rendre au lieu d'habitation effective de Monsieur Z..., demeurant chez sa compagne, Madame A...,... ; que ce magistrat a également le 23 mars 2009 rendu trois autres ordonnances à l'encontre de trois autres personnes, la société ALTI et Messieurs Y... et DE X... et désigné à cette fin trois autres huissiers exerçant leur activité dans des départements différents et ayant reçu mission d'instrumenter dans des lieux différents de ceux occupés par Monsieur Z... ; que l'existence de quatre ordonnances distinctes faisait obstacle à ce que le président du tribunal de grande instance de Nanterre retienne sa compétence pour ordonner des mesures devant être mises en oeuvre au domicile de Monsieur Z... situé au Raincy au seul motif que d'autres mesures, celles concernant en particulier la société ALTI et Monsieur DE X..., devaient être réalisées dans le ressort du tribunal de grande instance de Nanterre ; qu'il s'ensuit que la société SQLI n'avait pas d'autre alternative que de saisir pour chacune des personnes visées par les mesures les concernant respectivement, la juridiction matériellement et territorialement compétente soit en ce qui concerne Monsieur Z..., le président du tribunal de grande instance de Bobigny, dans le ressort duquel se trouvait le lieu d'habitation de l'intéressé ; que dans la mesure où le président du tribunal de grande instance de Nanterre était dépourvu de pouvoir pour statuer par voie d'ordonnance à l'encontre de Monsieur Z..., il convient d'infirmer l'ordonnance de référé du 26 juin 2009 et de rétracter l'ordonnance sur requête prononcée le 28 mars 2009 à l'encontre de Monsieur Z...,

1) ALORS QUE la compétence du juge s'apprécie au moment de sa saisine et n'est pas remise en cause par les évènements qui surviennent postérieurement ; que les conditions de la prorogation de compétence pour pluralité de défendeurs s'apprécient au moment de la saisine du juge et ne sont pas remises en cause par les circonstances qui surviennent postérieurement ; qu'il y a pluralité de défendeurs dès lors que le demandeur saisit le juge de demandes connexes dirigées contre plusieurs personnes physiques ou morales ; qu'en se bornant à constater que l'ordonnance litigieuse ne visait que Monsieur Z... sans rechercher si l'instance n'avait pas été introduite à l'encontre de plusieurs défendeurs, contre lesquels étaient formées des demandes connexes, de sorte que les règles de prorogation de compétence devaient s'appliquer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE la situation de pluralité de défendeurs n'est pas remise en cause par le fait que le juge, saisi par un acte unique, de demandes connexes dirigées contre plusieurs défendeurs, décide, sans remettre en cause sa compétence fondée sur la prorogation, de rendre une ordonnance par défendeur à seule fin d'en faciliter l'exécution ; qu'en écartant les règles de prorogation de compétence en se fondant sur le seul constat matériel que l'ordonnance visait uniquement Monsieur Z..., sans rechercher si au-delà de cette modalité, les conditions de la prorogation n'en continuaient pas moins à s'appliquer, s'agissant d'un litige qui avait pour objet une action concertée entre la société ALTI, Messieurs Y..., Z... et DE X..., et compte-tenu de la connexité des demandes et des mesures prononcées contre eux, la cour d'appel a violé les articles 42, 145 et 493 du code de procédure civile ;

3) ALORS QUE le juge compétent pour statuer sur la requête est celui qui serait compétent pour connaître de l'éventuelle instance au fond ; que la société SQLI a assigné le 17 juillet 2009 la société ALTI, Monsieur DE X..., Monsieur Z... et Monsieur Y... devant le tribunal de grande instance de Nanterre, juge compétent à l'encontre des quatre défendeurs sur le fondement d'une prorogation tant matérielle que territoriale ; qu'en ne recherchant pas si les règles de prorogation de compétence qui trouvaient à s'appliquer devant le juge du fond ne devaient pas trouver à s'appliquer devant le juge des requêtes, dont la compétence est la même que celle du juge du fond, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 42, 145 et 495 du code de procédure civile ;

4) ALORS QU'en refusant d'appliquer les règles de prorogation de compétence, s'agissant d'un litige qui opposait la société SQLI à plusieurs défendeurs pour lesquels la chose à juger était la même et en imposant ainsi un morcellement du contentieux entre quatre juges différents, ce dont résultaient des risques de décisions contraires et une multiplication inutile des contentieux, la cour d'appel a méconnu le principe de cohérence et de concentration du procès, en violation de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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