3 juin 2010
Cour de cassation
Pourvoi n° 09-13.579

Deuxième chambre civile

ECLI:FR:CCASS:2010:C201083

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :





Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Douai, 20 février 2009), que M. X... a travaillé d'août 1973 à février 2004 en qualité d'électromécanicien dans le secteur de la construction et de la réparation navale puis en qualité d'agent technico-commercial sur le même site au sein de diverses sociétés dont les sociétés France Dunkerque Rosendael de septembre 1988 à mars 1990 et France Dunkerque Rosendael machines tournantes d'avril 1990 à avril 1994 ; qu'ayant été reconnu par la CPAMTS de Dunkerque (la caisse) atteint d'une maladie professionnelle imputable à l'amiante, il a formé contre ses employeurs successifs une demande de reconnaissance d'une faute inexcusable qu'une juridiction de la sécurité sociale a accueillie ;


Sur le premier moyen, tel que reproduit en annexe :


Attendu que les sociétés France Dunkerque Rosendael machines tournantes et France Dunkerque Rosendael (les sociétés) font grief à l'arrêt de dire que la maladie professionnelle était due à leur faute inexcusable et des les déclarer solidairement tenues au paiement de diverses sommes ;


Mais attendu, d'une part, que la sécurité juridique, corollaire du droit à un procès équitable prévu par l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence immuable dont l'évolution relève de l'office du juge ; d'autre part, qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment, en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ;


Et attendu que l'arrêt retient que l'amiante était un matériau habituel dans l'atelier de réparation de moteurs électriques et a été retrouvé sous forme de poussières ou de fibres en divers points ;


Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, qui a ainsi caractérisé le fait que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, a pu, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la deuxième branche du moyen, en déduire, sans modifier les termes du litige ni encourir aucun des autres griefs du moyen, que les sociétés avaient commis une faute inexcusable ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


Sur le second moyen, tel que reproduit en annexe :


Attendu que les sociétés font grief à l'arrêt de leur déclarer opposable la décision par laquelle la caisse primaire d'assurance maladie de Dunkerque a reconnu le caractère professionnel de la maladie de M. X... ;


Mais attendu que l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas applicable à la procédure d'instruction mise en oeuvre à la suite d'une déclaration d'accident du travail ou de maladie professionnelle qui n'a pas de caractère juridictionnel ;


Et attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'il résulte de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable à l'espèce que l'obligation d'information qui incombe à la caisse ne concerne que la victime, ses ayants droits et la personne physique ou morale qui a la qualité d'employeur actuel ou de dernier employeur de la victime ;


Que de ces énonciations, la cour d'appel a exactement déduit que la décision de prise en charge de la maladie de la victime était opposable aux précédents employeurs de celle-ci ;


D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;


PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi ;


Condamne les sociétés France Dunkerque Rosendael machines tournantes et France Dunkerque Rosendael aux dépens ;


Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des sociétés France Dunkerque Rosendael machines tournantes et France Dunkerque Rosendael ; les condamne, in solidum, à payer à M. X... la somme de 2 500 euros et à la CPAMTS de Dunkerque la somme de 2 500 euros ;


Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour les sociétés France Dunkerque Rosendael machines tournantes et France Dunkerque Rosendael


PREMIER MOYEN DE CASSATION


Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la maladie professionnelle dont monsieur Pierre X... est atteint était due à une faute inexcusable des sociétés FDR et FDRMT et, en conséquence, d'AVOIR dit que la réparation des préjudices de monsieur X... serait avancée par la CPAMTS de Dunkerque, qui pourra exercer son recours contre les employeurs auteurs de faute inexcusable, solidairement tenus à son égard, fixé au maximum la majoration de la rente servie à monsieur X... et dit que cette majoration suivrait l'évolution du taux d'incapacité en cas d'aggravation de l'état de santé de monsieur X... dans la limite des plafonds prévus par l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale et, avant dire droit, sur la réparation des préjudices personnels de monsieur X..., d'AVOIR ordonné une expertise médicale de monsieur X..., confiée au Professeur Y..., avec la mission décrite au dispositif du jugement frappé d'appel, et d'AVOIR condamné les sociétés FDR et FDRMT solidairement à lui payer la somme de 2.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;


AUX MOTIFS PROPRES QUE s'agissant de la faute inexcusable commise par les SA FDR et FDRMT, il sera simplement précisé que même si, contrairement à ce qu'indiquent les premiers juges, elles n'étaient pas utilisatrices « massives » de l'amiante, il n'en demeure pas moins que l'amiante était un matériau habituel dans l'atelier de réparation de moteurs électriques situé à 1, rue des Oyats à Rosendaël exploité par elles, si bien qu'il en a encore été retrouvé lors du diagnostic amiante réalisé par la société COQUELLE en 2001, notamment sous forme de poussières sur des poutres métalliques, sous forme de dalles de sol et colle de fixation dans diverses pièces, et sous forme de fibres sur des panneaux de rallonge dans un bâtiment. De même, de l'amiante a encore été retrouvé à l'occasion d'une expertise judiciaire réalisée par M. Michel Z... dans le cadre d'une instance opposant la société FDRS à la société FDR devant le tribunal de commerce de Dunkerque, l'expert, dans le rapport daté du juin 2006, ayant préconisé, pour certaines présences d'amiante constatées, des mesures conservatoires de retrait ou de confinement, notamment pour l'amiante retrouvée sous forme de tresse friable sur un conduit de ventilation ; que par ailleurs, le fait que monsieur Pierre X... a été employé en qualité de technico-commercial à partir de 1990, alors qu'il était électromécanicien jusque là n'empêche nullement qu'il a continué à être exposé au risque d'inhalation de poussières d'amiante, dès lors qu'il allègue, sans être contredit sur ce point par les appelantes, qu'il continuait à réaliser des travaux en atelier, au moins ponctuellement, et surtout, que son bureau était à proximité de cet atelier et que les gaines de chauffage et de ventilation propulsaient dans son bureau de l'air non filtré provenant de l'atelier ; que dès lors, la faute inexcusable est reconnue, les premiers juges ayant à bon droit fixé à son montant maximum le montant de la rente revenant à monsieur Pierre X... et dit que celle-ci suivrait, le cas échéant, l'évolution de son taux d'incapacité ;


ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la responsabilité de ces sociétés est recherchée en leur qualité d'employeurs de monsieur X... de 1988 à 1994 et non en tant qu'ayant droit d'un précédent employeur ; qu'il convient donc de vérifier dans les conditions de travail du demandeur s'il a été exposé au risque de 1988 à 1994 ; que monsieur Pierre X... précise qu'il a occupé les fonctions d'électromécanicien jusqu'à la création de la société FDRMT en avril 1990, devenant alors agent technicocommercial et alternant une activité itinérante pour la recherche de clientèle et sédentaire pour le suivi en atelier et la réalisation des travaux en cours ; que le fait qu'il soit devenu agent technico-commercial qu'à compter de 1990 est confirmé par le certificat de travail établi le 3 mai 2004 ; (…) ; qu'il résulte du témoignage de monsieur Patrick A... que monsieur X... a été constamment exposé à l'amiante pendant cette période par manipulation de plaques, cordons, toiles d'amiante dans la réparation des moteurs électriques à l'atelier ; que ce témoin précise qu'il y a eu manipulation d'amiante jusqu'en 1998, date de retrait de ce produit à l'initiative des membres salariés du CHSCT avec la participation du médecin du travail, ce qui résulte également des bordereaux de suivi de déchets industriels et factures produits ; que FDR figure d'ailleurs sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs dans la réparation et la construction navales pour la période de 1980 à 1998 ; que s'agissant de la conscience objective du danger apprécié in abstracto, le rappel des données objectives établi pour la NORMED vaut pour les sociétés FDR et FDRMT (…) ; qu'il résulte des témoignages produits que monsieur X... travaillait sans protection particulière ; que les factures d'achat de matériel de protection produites par les FDR et FDRMT ne contredisent pas ces témoignages comme n'établissant ni que le matériel de protection acheté était adapté ni surtout que l'employeur veillait à son utilisation par son salarié ; qu'en conséquence pour ne pas avoir pris les mesures nécessaires alors qu'elles auraient dû avoir conscience du danger les sociétés FDR et FDRMT ont commis une faute inexcusable ;


ET QUE la conscience du danger s'apprécie in abstracto ; qu'il est aujourd'hui constant que les dangers de la poussière d'amiante sont connus depuis le début du vingtième siècle et que son caractère cancérigène a été mis en évidence au milieu des années cinquante ; qu'en effet dès 1906, ces dangers ont été mis en évidence dans le rapport ARIBAULT, établi par un inspecteur du travail à la suite de décès consécutifs à l'inhalation des poussières d'amiante dans la filature ; que dans un article publié en 1930 dans la revue « La médecine du travail », le docteur B... souligne qu' « il est avéré actuellement que les ouvriers de l'industrie de l'amiante sont frappés par une maladie professionnelle ; l'asbestose pulmonaire » et émet des recommandations destinées aux professionnels de l'amiante ; que le rapport LYNCH de 1935 et l'étude DOLL de 1955 établissent une relation entre l'asbestose et l'accroissement du risque du cancer du poumon ; qu'un rapport de la société de médecine et d'Hygiène du Travail établi en 1954 classait l'amiante parmi les dérivés minéraux à l'origine des cancers professionnels. Enfin un rapport du BIT de 1974 sur l'amiante précisait les risques pour la santé et leur prévention ; que si l'on ne peut établir avec certitude la diffusion de ces rapports en dehors du milieu scientifique et des industriels de l'amiante, les risques liés à l'inhalation des poussières d'amiante ont été officiellement reconnus par l'inscription progressive sur la liste des maladies professionnelles des diverses affections en résultant à partir de 1945 ; qu'ainsi l'ordonnance n° 45-1724 du 3 août 1945 reconnaît comme maladie professionnelle la fibrose pulmonaire consécutive à l'inhalation de poussières renfermant de la silice libre ou de l'amiante et le décret n° 46-2959 du 31 décembre 1946 créé le tableau n° 25 des maladies professionnelles relatif au maladies consécutives à l'inhalation des poussières silicieuses ou amiantifères ; que les décrets n° 50-1082 du 31 août 1950 et n° 51-1215 du 3 octobre 1951 désigne l'asbestose comme étant l'une des maladies engendrées par les poussières d'amiante et le décret n°76-34 du 5 janvier 1976 inclut le mésothéliome et le cancer broncho-pulmonaire dans le tableau 30 comme complication de l'asbestose ; que depuis 1950, ces textes précisent que la liste des travaux susceptibles de provoquer les maladies reprises au tableau 30 est seulement indicative et non limitative ; que l'inscription de l'amiante à un tableau de maladie professionnelle si elle n'implique pas que l'utilisation ou la manipulation de ce produit soient à elles seules constitutives d'une faute inexcusable, révélait en soi la nature dangereuse de cette substance, même pour un employeur utilisateur ne fabriquant pas de produit en amiante et imposait la mise en oeuvre de mesures de protection ; que par ailleurs une réglementation spécifique à l'amiante est entrée en vigueur avec le décret n°77-949 du 17 août 1977 dont l'article 1er prévoit des dispositions applicables « aux parties des locaux et chantiers où le personnel est exposé à l'inhalation des poussières d'amiante à l'état libre dans l'atmosphère, notamment dans les travaux de transport, de manipulation, de traitement, de transformation, d'application, d'élimination de l'amiante et de tout produit ou objet susceptible d'être à l'origine d'émission de fibres d'amiante » (…) ; qu'il convient de rappeler qu'antérieurement au décret n°77-949 du 17 août 1977 relatif aux mesures particulières d'hygiène applicables dans les établissements dans lesquels le personnel est exposé à l'amiante, il existait des textes de portée générale (décret du 10 juillet 1913 modifié par décret n°48-1903 du 13 décembre 1948) qui imposaient à l'employeur l'élimination directe des poussières par ventilation aspirante et, dans le cas exceptionnels où seraient reconnue impossible l'exécution de mesure de protection collective contre les poussières, la mise à disposition des travailleurs de masques et dispositifs de protection appropriés ; (…) que la circonstance que la carence de l'état a été reconnue par les juridictions administratives n'exonère pas l'employeur de sa responsabilité ;


1. - ALORS QUE pour statuer sur l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, les juges doivent préalablement caractériser l'exposition habituelle du salarié au risque prévu au tableau chez cet employeur ; qu'en l'espèce, pour considérer cette exposition au risque au sein des sociétés FDR et FDRMT comme établie, la Cour d'appel s'est fondée sur un diagnostic amiante réalisé par la société COQUELLE en 2001 ainsi que sur un rapport d'expertise judiciaire établi en 2006 ayant relevé dans les locaux la présence de poussières d'amiante ; qu'en se déterminant au regard de ces éléments alors qu'en 1994 la société FDRS avait repris le fonds de commerce, y compris l'atelier de réparation, et en assumait donc seule la responsabilité depuis cette date, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 461-2 du Code de la sécurité sociale et du tableau n°30 des maladies professionnelles ;


2. – ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les société FDR et FDRMT indiquaient dans leurs conclusions qu'entre 1988 et 1994, monsieur X... n'avait exercé, pour leur compte, que des fonctions purement commerciales ; qu'en affirmant que les exposantes ne contredisaient pas le salarié qui « allègu ait » qu'il continuait à réaliser ponctuellement des travaux en atelier, quand les exposantes affirmaient expressément le contraire, la Cour a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;


3. - ALORS QUE l'employeur se rend coupable d'une faute inexcusable lorsqu'il « avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver » ; que la preuve de la conscience du danger est un préalable à l'établissement de la faute inexcusable ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a retenu la faute inexcusable qu'auraient commises les sociétés FDR et FDRMT sans, à aucun moment, indiquer en quoi elles auraient dû avoir conscience du danger auquel elles exposaient leurs salariés, ce d'autant qu'elle a expressément écarté les motifs sur lesquels les premiers juges s'étaient fondés pour retenir la conscience du danger qu'auraient dû avoir les sociétés exposantes ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 452-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble de l'article L. 4121-1 du Code du travail (anciennement L. 230-2) et de l'article 1147 du Code civil ;


4. – ALORS en tout état de cause QUE l'employeur ne peut avoir conscience du danger auquel est exposé son salarié consécutif à l'inhalation de poussières d'amiante s'il n'est pas spécialisé dans la production d'amiante et si les travaux effectués par le salarié ne figuraient pas, à l'époque de l'exposition au risque, dans un tableau de maladie professionnelle comme susceptible de provoquer une maladie liée à l'amiante ; que ce n'est que par décret n°96-445 du 22 mai 1996 qu'a été créé le tableau n°30 des maladies professionnelles concernant notamment les épaississements pleuraux et qu'ont été introduits dans la liste des travaux susceptibles de provoquer cette maladie les travaux d'équipement, d'entretien ou de maintenance, d'usinage ou de découpe sur des matériels ou dans des locaux revêtus ou contenant des matériaux à base d'amiante ; qu'auparavant seul le travail direct sur l'amiante (extraction, cardage…) faisait l'objet d'une réglementation ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté que les sociétés FDR et FDRMT étaient des sociétés de réparation navale qui n'utilisaient pas d'amiante comme matière première et ne participaient pas au processus de fabrication ou de transformation de l'amiante ; qu'en retenant néanmoins la faute inexcusable des exposantes pour la période de 1988 à 1994 en visant le tableau n°25 des maladies professionnelles, issu d'une ordonnance de 1945, et le tableau n°30 des maladies professionnelles, issu des décrets de 1950, 1951 et 1976, lorsque ces tableaux étaient inapplicables en l'espèce comme ne concernant pas l'amiante ou comme visant uniquement les travaux directs sur l'amiante et qu'à l'époque de l'emploi du salarié, les travaux qu'il effectuait ne faisaient l'objet d'aucune disposition spécifique, la Cour d'appel a violé l'article L 452-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 4121-1 du Code du travail (anciennement L. 230-2), l'article 1147 du Code civil et le tableau n° 30 des maladies professionnelles ;


5. - ALORS QUE la conscience par l'employeur du danger auquel est exposé son salarié doit s'apprécier objectivement en fonction de la seule réglementation applicable à l'époque de l'exposition au risque et non en fonction des parutions spécifiques médicales ou techniques existant auparavant sur ce point ; qu'en considérant que les exposantes, simples entreprises utilisatrices de l'amiante, ne pouvaient ignorer dès 1988 les dangers liés à l'amiante au prétexte que ces dangers avaient déjà été révélés par diverses études et rapports spécialisés réalisés à compter de 1906, la Cour d'appel a violé l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 4121-1 du Code du travail (anciennement L. 230-2) et l'article 1147 du Code civil.


6. - ALORS QUE ne constitue pas une faute inexcusable l'utilisation par l'employeur ou l'entreprise utilisatrice d'un matériau autorisé par la loi ; que l'Etat n'a interdit « la fabrication, la transformation, la vente, l'importation, la mise sur le marché national et la cession à quelque titre que ce soit de toutes variétés de fibres d'amiante » que par l'édiction du décret n° 96-1133 du 24 décembre 1996, ce dont il résulte que l'employeur ne peut avoir commis une faute en utilisant de l'amiante avant cette date ; qu'en énonçant par motifs adoptés que la circonstance que la carence de l'Etat ait été reconnue par les juridictions administratives n'exonérait pas l'employeur de sa responsabilité, la Cour d'appel a violé l'article L.452-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 4121-1 et suivants du Code du travail (anciennement L. 230-2) et l'article 1147 du Code civil ;


7. – ALORS QU'il n'y a pas de faute inexcusable lorsque l'employeur a pris les mesures nécessaires pour préserver le salarié du danger auquel il était exposé ; qu'il en est ainsi lorsque l'employeur a pris des consignes de sécurité, imposé l'application de ces consignes et s'est engagé activement dans une politique de sécurité au travail pour préserver la santé de ses salariés ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats par les exposantes qu'elles ont non seulement prescrit le port de masque, gants, lunettes et cagoules et régulièrement rappelé l'obligation du port du masque, mais également conclu une convention tripartite avec la CRAM et TECHNIFRANCE tendant à la mise en place d'un plan d'action en matière de sécurité et obtenu la certification ISO 9002 garantissant le respect de la sécurité et de la santé du personnel ; qu'étaient également versés aux débats le « Plan annuel sécurité 2000 » et le « Manuel Qualité – Sécurité » attestant du souci permanent de l'employeur de la sécurité de ses salariés et du respect de ses consignes ; qu'en reprochant à l'employeur de ne pas démontrer que le matériel de protection acheté était adapté et utilisé par les salariés, sans prendre en considération ces éléments de preuve versés aux débats de nature à établir le contraire, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble de l'article L. 230-2 du Code du travail et de l'article 1147 du Code civil ;


8. - ALORS, enfin, QU'en application des dispositions de l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales selon lesquelles toute personne a droit à un procès équitable, il est interdit au juge d'appliquer rétroactivement un revirement de jurisprudence ; qu'en l'espèce, les exposantes soulignaient que les arrêts rendus par la Cour de cassation du 28 février 2002 instituant une obligation de sécurité de résultat à l'égard de l'employeur et donnant une nouvelle définition de la faute inexcusable, n'avaient pas à s'appliquer rétroactivement à la période d'emploi du salarié, entre 1988 et 1994 ; qu'en faisant rétroactivement application de cette jurisprudence inaugurée en février 2002 aux faits survenus entre 1988 et 1994, la Cour d'appel a violé l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, ensemble les articles L. 4121-1 du Code du travail (anciennement L. 230-2) ainsi que l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;






SECOND MOYEN DE CASSATION


Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré opposable aux exposantes la décision par laquelle la CPAMTS de Dunkerque a reconnu le caractère professionnel de la maladie de monsieur Pierre X... ;


AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte de l'article R.441-11 du code de la sécurité sociale que l'obligation d'information qui incombe à la caisse ne concerne que la victime, ses ayants droit et la personne physique ou morale qui a la qualité d'employeur actuel ou de dernier employeur de la victime ; que les sociétés FDRMT et FDR, anciens employeurs de monsieur Pierre X..., qui ne soutiennent pas que la procédure n'a pas été régulièrement menée à l'égard de la société FDRS, dernier employeur du demandeur, ne sont pas fondées à se prévaloir du caractère non contradictoire à leur égard de la procédure de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie ;


1. ALORS QUE le principe de contradiction résultant tant de l'article 6,§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que du principe général du droit du respect des droits de la défense s'impose aux caisses primaires d'assurance maladie, lesquelles sont investies d'une mission de service public et de prérogatives de puissance publique notamment dans les décisions qu'elles imposent unilatéralement aux employeurs ; qu'il résulte de ce principe que les décisions par lesquelles ces dernières reconnaissent le caractère professionnel de la maladie d'un salarié ne sauraient être opposées à d'anciens employeurs qui n'auraient pas été consultés dans le cadre de la procédure d'information instituée par l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale ; qu'en décidant néanmoins, pour écarter l'inopposabilité invoquée par les exposantes, qu'une telle procédure n'obligeait qu'à consulter l'actuel ou le dernier employeur, la Cour d'appel a violé l'article 6,§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le principe général du droit du respect des droits de la défense, et l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale.


2. ET ALORS QU'à tout le moins, dès lors que le caractère professionnel de la maladie est contesté par l'ancien employeur dans le cadre d'une action en reconnaissance d'une faute inexcusable, la décision ne saurait lui être opposée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.