27 mai 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 20-13.204

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C300464

Titres et sommaires

CONSTRUCTION IMMOBILIERE - Maison individuelle - Contrat de construction - Nullité - Effets - Démolition de l'ouvrage - Proportionnalité entre la sanction et la gravité des désordres - Recherche nécessaire - Portée

En cas d'anéantissement du contrat, le juge, saisi d'une demande de remise en état du terrain au titre des restitutions réciproques, doit rechercher si la démolition de l'ouvrage réalisé constitue une sanction proportionnée à la gravité des désordres et des non-conformités qui l'affectent. Dans ce cas, il incombe au constructeur de rapporter la preuve des faits de nature à établir le caractère disproportionné de la sanction

CONSTRUCTION IMMOBILIERE - Maison individuelle - Contrat de construction - Nullité - Effets - Démolition de l'ouvrage - Proportionnalité entre la sanction et la gravité des désordres - Défaut - Charge de la preuve - Détermination

Texte de la décision

CIV. 3

JL



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 27 mai 2021




Cassation partielle


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 464 FS-P


Pourvois n°
R 20-13.204
E 20-14.321 JONCTION






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 MAI 2021

1°/ Mme [U] [J], épouse [B],

2°/ M. [X] [B],

tous deux domiciliés [Adresse 1],

ont formé les pourvois n° R 20-13.204, E 20-14.321 contre un arrêt rendu le 14 janvier 2020 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige les opposant respectivement :

1°/ à la société AST Groupe, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société Crédit foncier de France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.



La société Crédit foncier de France a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ;

Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme et M. [B], de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société AST groupe, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Crédit foncier de France, et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 avril 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. M Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, M. Jacques, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° R 20-13.204 et n° E 20-14.321 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 14 janvier 2020), M. et Mme [B] ont conclu avec la société AST groupe un contrat de construction d'une maison individuelle, l'opération immobilière étant financée par un emprunt souscrit auprès de la société Crédit foncier de France (le CFF).

3. M. et Mme [B] ont assigné la société AST groupe et le CFF en annulation et, subsidiairement, en résiliation des contrats de construction et de prêt et en indemnisation de leurs préjudices, avant de modifier leurs prétentions, en cours d'instance, en sollicitant, à titre principal, la constatation de l'anéantissement du contrat de construction par l'exercice de leur droit de rétractation.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, le deuxième moyen et le troisième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal, ci-après annexés


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.


Sur le troisième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. M. et Mme [B] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes indemnitaires, alors « que l'exercice par le maître de l'ouvrage de sa faculté de rétractation ne le prive pas de la possibilité d'exercer une action en responsabilité délictuelle fondée sur la faute commise par son cocontractant lors de la conclusion du contrat ; qu'en retenant, pour écarter l'action en responsabilité des époux [B], fondée sur la faute que la société AST groupe avait commise en leur faisant conclure un contrat de construction de maison individuelle qui méconnaissait plusieurs dispositions d'ordre public, que « l'anéantissement du contrat ne résulte pas d'éventuelles irrégularités dans la formation du contrat mais seulement dans la volonté des acquéreurs de rétracter leur consentement », la cour d'appel a violé les articles 1178 et 1240 du code civil. »

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel a relevé que les deux fautes invoquées par les maîtres de l'ouvrage au soutien de leur demande en réparation d'un préjudice moral et de jouissance étaient, d'une part, l'inachèvement de la maison à la date de livraison prévue par le contrat, d'autre part, les irrégularités ayant affecté la convention et les ayant privés de la possibilité d'exercer la faculté de rétractation prévue par la loi.

7. Elle a retenu à bon droit, en premier lieu, que les maîtres de l'ouvrage ne pouvaient se prévaloir des conséquences dommageables du non-respect du délai prévu par le contrat anéanti par l'exercice de leur droit de rétractation, dont ils n'avaient pas été privés, en second lieu, que l'anéantissement de celui-ci ne résultait pas du fait du constructeur mais du seul exercice de ce droit, de sorte que leurs demandes ne pouvaient être accueillies.

8. Le grief n'est donc pas fondé.

Sur le moyen unique du pourvoi incident

Enoncé du moyen

9. Le CFF fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes à l'encontre du constructeur, alors « que commet une faute engageant sa responsabilité le constructeur de maison individuelle qui, en méconnaissance des règles d'ordre public prévues par l'article L. 271-1 du code de la construction et de la construction, ne notifie pas à chacun des époux maîtres de l'ouvrage le contrat de construction, ce défaut de remise de l'acte à chacun des époux ayant pour conséquence d'empêcher le délai légal de rétractation de courir et ainsi, de proroger indéfiniment le délai de rétractation dont disposent les maîtres de l'ouvrage ; qu'en ce cas, le prêteur qui a financé la construction et qui subit l'anéantissement du contrat de prêt en conséquence de l'exercice différé de cette faculté de rétractation est fondé à engager la responsabilité du constructeur aux fins de le voir condamné à garantir la restitution des fonds prêtés et à l'indemniser du préjudice subi ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat de construction de maison individuelle conclu par les époux [B] avec la société AST groupe avait été notifié par cette dernière aux époux [B] par un courrier unique dont l'accusé de réception du 6 juin 2015 portant la signature de l'épouse mais pas celle de M. [B], ce dont elle a déduit que du fait de cette notification irrégulière, le délai de rétractation n'avait pas couru et que les époux [B] avaient valablement pu exercer leur droit de rétractation par voie de conclusions signifiées dans le cadre de l'instance engagée en 2017 devant le tribunal de grande instance de Besançon ; que pour rejeter les demandes du CCF dirigées contre la société AST groupe, la cour d'appel a retenu que l'anéantissement du contrat principal n'était pas le fait du constructeur mais celui des maîtres de l'ouvrage qui avaient choisi de se rétracter, sans qu'il soit établi que cette rétractation avait été causée par la faute du constructeur ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations, desquelles il résultait que la société AST groupe avait commis une faute en ne respectant pas les règles formelles de notification aux maîtres de l'ouvrage du contrat de construction, permettant ainsi à ces derniers d'exercer leur droit de rétractation sans être tenu par un quelconque délai, leur rétractation ayant entraîné l'anéantissement des contrats de prêt accordés par le CCF, violant ainsi l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation. »

Réponse de la Cour

10. La cour d'appel, devant laquelle le CFF n'a pas invoqué la faute de la société AST groupe tirée du non-respect des règles de notification du contrat de construction qui l'aurait exposé à l'annulation tardive du contrat de prêt, a relevé que l'anéantissement du contrat principal résultait de la rétractation du consentement des acquéreurs et non d'une faute du constructeur.

11. Elle en a déduit à bon doit que les demandes de la banque à l'encontre de celui-ci ne pouvaient être accueillies.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

13. M. et Mme [B] font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de démolition de l'ouvrage, alors « que la charge de la preuve du caractère disproportionné de la démolition, consécutive à l'annulation du contrat de construction de maison individuelle, pèse sur le constructeur ; qu'en retenant, pour écarter la demande de démolition des époux [B], qu'ils n'"établissent pas que (le défaut d'altimétrie entachant l'ouvrage) rend la maison impropre à sa destination ni qu'il présente autrement la gravité imposant la démolition de celle-ci, ne démontrant nullement l'impossibilité d'y remédier, tant sur le plan administratif (...) que sur le plan technique", cependant qu'il appartenait au constructeur de rapporter la preuve de ce que le défaut d'altimétrie de la maison était techniquement et administrativement régularisable si bien que la demande de démolition était disproportionnée à la gravité de ce désordre, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1153 du code civil, ensemble l'article 1178 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1315, devenu 1353, du code civil :

14. Aux termes de ce texte, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

15. En cas d'anéantissement du contrat, le juge, saisi d'une demande de remise en état du terrain au titre des restitutions réciproques, doit rechercher si la démolition de l'ouvrage réalisé constitue une sanction proportionnée à la gravité des désordres et des non-conformités qui l'affectent (3e Civ., 15 octobre 2015, pourvoi n°14-23.612, Bull. 2015, III, n° 97).

16. Dans ce cas, il incombe au constructeur de rapporter la preuve des faits de nature à établir le caractère disproportionné de la sanction.

17. Pour rejeter la demande en démolition, l'arrêt retient que les maîtres de l'ouvrage ne démontrent pas que le défaut d'altimétrie affectant la construction rend celle-ci impropre à sa destination ni qu'il serait impossible d'y remédier, tant sur le plan administratif par l'obtention d'un permis de construire modificatif, que sur le plan technique par l'installation d'une pompe de relevage des eaux usées.

18. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de démolition de l'ouvrage, l'arrêt rendu le 14 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la société AST groupe aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens identiques produits au pourvoi principal n° E 20-14.321 et R 20-13.204 par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [B]

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de démolition de l'ouvrage et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société AST Groupe à verser aux époux [B], au titre des restitutions, la seule somme de 8 783,32 euros ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'en cas d'anéantissement du contrat par rétraction du consentement, comme en cas d'annulation de celui-ci, la démolition de l'ouvrage ne peut être subséquemment ordonnée que si elle constitue une sanction proportionnée à la gravité des désordres et des non-conformités qui l'affectent (Cass. Civ. 3e, 15 octobre 2015, n° 14-23.612) ; qu'en l'espèce, ne peuvent justifier la démolition de l'ouvrage les prétendus inachèvement, auxquels il peut être aisément remédié par des travaux supplémentaires, ni le fait que les acquéreurs n'entendent pas le conserver, cette seule intention étant sans effet sur la nécessité de le démolir ; que le défaut d'altimétrie, consistant en ce que la maison est construite environ 13 cm plus bas que la cote indiquée au permis de construire, est démontré par l'attestation de nivellement établie le 9 juin 2017 par le géomètre expert [T] [Q], dont il importe peu qu'elle n'ait pas été établie contradictoirement dès lors qu'elle a été livrée au contradictoire dans le cadre de la procédure judiciaire, et qu'il appartenait au constructeur de la combattre, le cas échéant, en produisant un avis contraire, carence qui ne saurait être palliée par l'expertise judiciaire qu'il demande à ce titre et dont il sera débouté ; que, pour autant, les acquéreurs n'établissent pas que ce désordre rend la maison impropre à sa destination ni qu'il présente autrement la gravité imposant la démolition de celle-ci, ne démontrant nullement l'impossibilité d'y remédier, tant sur le plan administratif par l'obtention d'un permis de construire modificatif, que sur le plan technique par l'installation d'une pompe de relevage des eaux usées, ainsi que l'objecte utilement le constructeur ; que, dès lors au regard, d'une part, de la fonctionnalité suffisante que conserve l'immeuble et, d'autre part, du coût nécessairement élevé de sa démolition, celle-ci apparaît disproportionnée, ce qui justifie la confirmation de la décision déférée en ce qu'elle a rejeté la demande de ce chef ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'au vu du seul désordre susceptible d'affecter l'ouvrage dans sa structure, s'agissant d'un écart d'altimétrie de 13 cm (+/- 13 cm à dire d'expert), la démolition sollicitée apparaît totalement disproportionnée et non adaptée en terme de solution technique et d'habitabilité ; que bien que le maire de la commune ait déclaré ne pouvoir délivrer en l'état un certificat de conformité, ledit empêchement (d'ordre purement administratif) est également sans conséquence sur l'habitabilité technique et effective de l'immeuble ; que la demande de démolition sera donc rejetée ;

1°) ALORS QUE la charge de la preuve du caractère disproportionné de la démolition, consécutive à l'annulation du contrat de construction de maison individuelle, pèse sur le constructeur ; qu'en retenant, pour écarter la demande de démolition des époux [B], qu'ils n'« établissent pas que (le défaut d'altimétrie entachant l'ouvrage) rend la maison impropre à sa destination ni qu'il présente autrement la gravité imposant la démolition de celle-ci, ne démontrant nullement l'impossibilité d'y remédier, tant sur le plan administratif (...) que sur le plan technique », cependant qu'il appartenait au constructeur de rapporter la preuve de ce que le défaut d'altimétrie de la maison était techniquement et administrativement régularisable si bien que la demande de démolition était disproportionnée à la gravité de ce désordre, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1153 du code civil, ensemble l'article 1178 du même code ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le maître de l'ouvrage a droit au respect des termes du contrat qu'il a conclu et ne saurait être contraint d'accepter un ouvrage non-conforme aux stipulations de cette convention et d'en supporter le coût ; qu'en imposant aux époux [B] de conserver la maison litigieuse et d'assumer le coût nominal de sa construction bien qu'elle ait relevé que l'ouvrage n'était pas conforme aux stipulations du contrat pour être construit treize centimètres trop bas, la cour d'appel, qui a porté atteinte au contrat, a violé l'article 1103 du code civil, ensemble l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, n'est pas disproportionnée la mesure de démolition de l'ouvrage construit en application d'un contrat annulé lorsque l'ouvrage est entaché d'une non-conformité au permis de construire qui ne peut être corrigée sans procéder à sa démolition ; qu'en relevant, pour écarter la demande des époux [B] tendant à la démolition de l'ouvrage, « la fonctionnalité suffisante que conserve l'immeuble et (?) (le) coût nécessairement élevé de sa démolition » cependant qu'il résultait de ses constatations que la cote altimétrique de la maison était non-conforme aux prescriptions du permis de construire et que l'autorité administrative refusait de délivrer un certificat de conformité, un tel désordre ne pouvant dès lors être corrigé autrement que par sa démolition, ce qui suffisait à écarter le caractère disproportionné de la demande de démolition, la cour d'appel a violé l'article 1178 du code civil.


DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société AST Groupe à verser aux époux [B], au titre des restitutions, la seule somme de 8 783,32 euros ;

AUX MOTIFS QUE sur les restitutions dues aux acquéreurs, si l'anéantissement du contrat oblige notamment le constructeur à restitution, celle-ci est limitée à ce qu'il a reçu d'eux, en l'espèce des sommes d'argent, et ne peut inclure les autres sommes payées à des tiers, lesquelles peuvent éventuellement donner lieu à indemnisation, au même titre que d'autres préjudices, mais non à restitution ; que ne sont ainsi restituables aux acquéreurs que les sommes qu'ils ont versées au constructeur au titre des postes achèvement des fondations, achèvement des murs, mise hors d'eau, avenant n° 1, achèvement des cloisons et mise hors d'air, achèvement des équipements et réception, au titre desquels le constructeur reconnaît (dans sa pièce n°19) avoir encaissé un total de 87 833,29 euros, qui sera retenu par la cour dès lors que les acquéreurs ne démontrent pas lui avoir versé d'autres sommes en exécution du contrat anéanti ; (?) ; que si le constructeur est ainsi tenu à restituer les fonds qu'il a reçu des acquéreurs pour un total de 87 833,29 euros, il fait toutefois exactement valoir son propre droit à restitution au titre des matériaux, de la main d'oeuvre et de la maîtrise d'oeuvre qu'il a fournis en exécution du contrat anéanti, en soutenant justement que l'anéantissement du contrat doit aboutir aux restitutions réciproques et non à la restitution des seules sommes dépensées par les acquéreurs, qui leur permettrait indûment de conserver la maison sans finalement en avoir payé le prix ; que ce droit à restitution du constructeur ne peut être remis en cause, comme le demandent les acquéreurs, ni en raison de la saisie de sommes intervenues à son profit, qui se résoudra par un compte entre les parties au vu du présent arrêt, ni en raison de prétendus manquements du constructeur aux règles d'ordre public régissant la formation du contrat, qui lui interdiraient de se prévaloir de sa propre turpitude, dès lors que l'anéantissement du contrat ne résulte pas de tels manquements, mais seulement de la rétractation du consentement des acquéreurs ; que les prestations fournies par le constructeur ne peuvent lui être restituées en nature, dès lors qu'elles constituent désormais l'immeuble dont les acquéreurs conservent le bénéfice, mais seulement par équivalent financier, constitué du prix de ces prestations, s'entendant non pas du prix facturé mais du prix coûtant supporté par le constructeur ; que l'estimation de ce prix coûtant n'appelle pas d'expertise judiciaire, dès lors que la méthode d'évaluation qu'il invoque, consistant à évaluer le prix coûtant en retranchant, du prix facturé pour les prestations correspondantes, une marge de 7 à 10 % conforme aux marges habituellement pratiquées en la matière, apparaît réaliste, et au surplus n'a pas été critiquée ; que toutefois, le constructeur ne démontrant pas avec plus de précision le taux de marge appliqué en l'espèce, la cour retiendra le moins favorable à sa demande de restitution, qui est celui de 10 % ; que la société sera en conséquence déboutée de sa demande d'expertise judiciaire du coût des travaux, ainsi que de sa demande de provision qui en était l'accessoire, et qui à ce titre était au demeurant recevable bien que nouvelle en appel ; que le calcul sera toutefois appliqué aux seules prestations réalisées, dont le montant facturé se limite nécessairement aux sommes encaissées par le constructeur dès lors que celui-ci ne forme aucune demande en paiement d'un solde de prix, et qui s'élève, comme précédemment retenu, à 87 833,29 euros ; qu'il s'en déduit, après retranchement d'une marge de 10 %, que le coût des travaux, main d'oeuvre et maîtrise d'oeuvre restituable au constructeur doit être évalué à (87 833,29 - 8 783,32) 79 049,97 euros ; qu'en conséquence, après compensation des restitutions réciproques, la société reste redevable envers les époux [B] de la somme de (87 833,29 - 79 049,97) 8 783,32 euros, avec les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 juin 2017 ;

1°) ALORS QUE l'exercice de la rétractation qu'une disposition d'ordre public confère au maître de l'ouvrage lui donne la faculté de se libérer de toutes les obligations que le contrat ou son exécution peuvent engendrer ; qu'en faisant peser sur M. et Mme [B] le coût des constructions bien qu'elle ait relevé que ceux-ci étaient bien fondés à exercer leur droit de rétractation, ce dont il résultait qu'ils devaient être affranchis de toute obligation née du contrat et de son exécution, la cour d'appel a violé l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation ;

2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le maître de l'ouvrage ne saurait être contraint d'accepter de supporter le coût d'un ouvrage non-conforme aux stipulations du contrat et aux règles d'urbanisme impératives ; qu'en contraignant les époux [B] à assumer le coût nominal de la construction litigieuse bien qu'elle ait relevé que l'ouvrage n'était pas conforme aux stipulations du contrat pour être construit treize centimètres trop bas de sorte qu'il n'était pas conforme au permis de construire et qu'une telle irrégularité ne pouvait être corrigée, la cour d'appel, qui a porté atteinte au contrat, a violé l'article 1103 du code civil, ensemble l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les époux [B] de leurs demandes indemnitaires ;

AUX MOTIFS QUE sur l'indemnisation des acquéreurs par le constructeur, les époux [B] ayant anéanti le contrat en rétractant leur consentement, ils ne peuvent prétendre à réparation de leur préjudice par le constructeur selon les règles de la responsabilité contractuelle, mais seulement selon celles de la responsabilité délictuelle, énoncées à l'article 1382 devenu 1240 du code civil, qui exigent la démonstration d'un préjudice, d'une faute et d'un lien de causalité entre celle-ci et le préjudice ; que les deux fautes reprochées par les époux [B] à la société au titre de leur préjudice moral et de jouissance tiennent à ce que celle-ci : - n'aurait pas achevé la maison au mois de mai 2017 comme prévu au contrat de construction, - et les aurait trompés en soumettant à leur signature un contrat de construction de maison individuelle affecté de nombreuses irrégularités dont ils ne pouvaient avoir connaissance et en les privant de la possibilité d'exercer la faculté de rétractation prévue par la loi ; que la première ne peut-être retenue, ne pouvant être regardé comme fautif le manquement à une clause de fixation de la fin des travaux anéantie avec le contrat par l'effet de la rétractation ; que la seconde n'est pas mieux caractérisée, alors d'une part que les époux [B] ont exercé leur droit de rétractation et ne peuvent donc se plaindre d'en avoir été privés, et d'autre part que l'anéantissement du contrat ne résulte pas d'éventuelles irrégularités dans la formation du contrat mais seulement dans la volonté des acquéreurs de rétracter leur consentement ; qu'ainsi, n'ayant pas établi les fautes qu'ils invoquent pour obtenir réparation d'un préjudice moral et d'un préjudice de jouissance, les époux [B] seront déboutés de la demande indemnitaire correspondante, le jugement déféré étant infirmé en ce qu'il y a partiellement fait droit ; que s'agissant des sommes que les époux [B] ne pouvaient obtenir à titre de restitution, elles ne peuvent davantage leur être accordées à titre de dommages intérêts, en l'absence de faute délictuelle établie à l'encontre de la société, les époux [B] se bornant soit à invoquer des fautes contractuelles inopérantes en raison de l'anéantissement du contrat, soit à revendiquer l'indemnisation de divers postes de préjudice sans indiquer à quelles fautes délictuelles ils seraient imputables ; qu'en conséquence, la cour ne peut faire droit à la demande indemnitaire qu'ils forment pour les postes ainsi libellés dans leurs écritures : dommage ouvrage : 1 117,00 euros, CCTP - avenant viabilisation : 5 612,40 euros, CCTP - avenant viabilisation : 9 512,40 euros, prêt Igesa-ref 2502150351/4600 : frais de dossier : 1 056,00 euros, prêt Igesa-ref 2502150351/4600 : assurance 01/06/15 au 01/07/17 : 62,00 euros, prêt Igesa-ref 2506150351/4600 : frais de dossier : 480,00 euros, prêt Igesa-ref 2506150351/4600 : assurance 01/06/15 au 01/07/17 : 28,25 euros, crédit foncier : frais de dossier : 500,48 euros, crédit foncier - assurance prêt invalidité du 01/06/15 au 01/07/17 : 449,25 euros, crédit foncier - assurance prêt décès du 01/06/15 au 01/07/17 : 1 556,35 euros, crédit foncier - assurance Ace European Groupe du 01/06/15 au 01/07/17 : 54,00 euros, crédit foncier - frais remboursement anticipation au 01/07/17- intérêts : 255,85 euros, crédit foncier - frais remboursement anticipation -accessoire au 01/07/17 : 61,00 euros, crédit foncier - frais remboursement anticipation -indemnité au 01/07/17 : 1 588,03 euros, Mairie de [Localité 1] - raccordement total égout : 2 000,00 euros, Enedis - compteur et consommation du 01/12/16 a 01/06/17 : 411,01 euros, prévision résiliation Edf et consommation : 50,00 euros, gaz et eau - compteur et consommation du 01/05/16 au 01/06/17 : 771,65 euros, prévision résiliation gaz et eau et fuite d'eau du 01/06/17 : 1 000,00 euros, camion de déménagement d'urgence : 49,00 euros, clôture avec main d'oeuvre : 920,00 euros, expert-géomètre monsieur [Q] : 180,00 euros, taxe d'aménagements permis de construire 2016 : 1 760,00 euros, taxe d'archéologie préventive : 141,00 euros ; que, pour les mêmes motifs la cour ne peut faire droit à leur demande indemnitaire portant sur des frais de relogement ; que, sur la réformation des condamnations en restitution et en dommage et intérêts prononcées par le premier juge, en conséquence des précédents motifs relatifs aux restitutions et aux réparations, la cour infirmera le jugement déféré en ce qu'il a : - condamné la société à indemniser les époux [B] de toutes dépenses consécutives ou directement liées au contrat annulé, - condamné la société à rembourser aux époux [B] les montants suivants : 94 530 euros, au titre des encaissements réalisés par le constructeur, 19 721,20 euros, au titre de travaux réalisés par les époux [B], 600 euros au titre de frais de géomètre et expertise, soit un montant total de 114 851,20 euros, assorti des intérêts au taux légal à compter du 18 août 2017, - condamné la société à payer aux époux [B] la somme de 5 900 euros à titre de dommages intérêts en indemnisation de leurs frais de relogement et celle de 5 000 euros à titre de dommages intérêts en indemnisation de leur préjudice moral résultant de la privation de jouissance de leur habitation, et, statuant à nouveau : - condamnera la société à payer aux époux [B], au titre des restitutions, la somme de 8 783,32 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 juin 2017, - déboutera les époux [B] de leurs demandes indemnitaires dirigées contre la société ;

1°) ALORS QUE l'exercice par le maître de l'ouvrage de sa faculté de rétractation ne le prive pas de la possibilité d'exercer une action en responsabilité délictuelle fondée sur la faute commise par son cocontractant lors de la conclusion du contrat ; qu'en retenant, pour écarter l'action en responsabilité des époux [B], fondée sur la faute que la société AST Groupe avait commise en leur faisant conclure un contrat de construction de maison individuelle qui méconnaissait plusieurs dispositions d'ordre public, que « l'anéantissement du contrat ne résulte pas d'éventuelles irrégularités dans la formation du contrat mais seulement dans la volonté des acquéreurs de rétracter leur consentement », la cour d'appel a violé les articles 1178 et 1240 du code civil ;

2°) ALORS QUE les époux [B] soutenaient que les préjudices qu'ils invoquaient était la conséquence de la nullité du contrat, qui elle-même résultait des multiples manquements de la société AST aux règles d'ordre public régissant les contrats de construction de maison individuelle ; qu'en retenant, pour écarter l'action en responsabilité des époux [B], que ceux-ci se bornaient « à revendiquer l'indemnisation de divers postes de préjudice sans indiquer à quelles fautes délictuelles ils seraient imputables », la cour d'appel a dénaturé les conclusions des époux [B] et violé l'article 4 du code de procédure civile.

Moyen identique produit au pourvoi incident n° E 20-14.321 et R 20-13.204 par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Crédit foncier de France

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement rendu par le tribunal de grande instance de BESANÇON le 9 janvier 2018, en ce qu'il avait condamné solidairement les époux [B] à rembourser au CREDIT FONCIER DE FRANCE les sommes de 110.115 ? et de 31.796,52 ?, sous déduction des sommes d'ores et déjà versées et à l'exclusion de tous frais et intérêts, condamné la SA AST GROUPE à garantir le CREDIT FONCIER DE FRANCE de tout paiement ou condamnation à la charge des époux [B], et condamné la SA AST GROUPE à payer au CREDIT FONCIER DE FRANCE les frais et intérêts contractuels des deux prêts de 110.115 ? et de 31.796,52 ?, à savoir 500 ? au titre des frais de dossier, 2.175,52 ? au titre de l'assurance obligatoire, et les intérêts au taux de 2,85% sur le capital emprunté, à compter du 19 mai 2016 et jusqu'à règlement définitif du litige, et statuant à nouveau, d'AVOIR débouté la société CREDIT FONCIER DE FRANCE de sa demande tendant à voir condamner la société AST GROUPE à la garantir du remboursement des sommes dues par les consorts [B], et d'AVOIR débouté la société CREDIT FONCIER DE FRANCE de sa demande de condamnation de la société AST GROUPE à lui payer la somme de 46.760,03 ? correspondant à son préjudice résultant de l'annulation des contrats de prêt,

AUX MOTIFS QUE « 2. Sur les contrats de prêt. 2-1. Sur les restitutions entre prêteurs et emprunteurs : Ainsi que l'a exactement retenu le premier juge, l'anéantissement du contrat de construction de maison individuelle entraîne l'entière nullité des deux prêts afférents souscrits auprès du CFF qui, portant chacun indivisiblement sur le financement de la construction et sur celui de l'acquisition du terrain, dans une moindre part, ne peuvent être annulés partiellement. Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a constaté la nullité des deux prêts de 110 115 euros et de 31 796,52 euros consentis par le CFF aux époux [B] suivant acte authentique du 19 mai 2016. En revanche, les parties n'ayant pas mis à profit le sursis à statuer ordonné dans l'espoir de les amener à une transaction permettant aux époux [B] de conserver le financement du seul terrain, seront infirmées les dispositions par lesquelles le premier juge a : - réservé les droits et demandes du CFF et des époux [B] à ces fins, dans l'attente d'un éventuel accord ou qu'il soit statué à nouveau, - dispensé les époux [B], à compter du prononcé du présent jugement, de tout paiement ou remboursement à l'égard du CFF, dans l'attente de la mise en oeuvre et la finalisation des modalités transactionnelles ou procédurales ordonnées dans le cadre du sursis à statuer, ordonné un sursis à statuer sur les demandes des parties dans l'attente que le CFF et les époux [B] soumettent à l'approbation du tribunal un protocole d'accord transactionnel, - dit que ce protocole sera finalisé dans le délai de trois mois à compter du jour où le présent jugement sera déclaré définitif à l'égard de la société et la CGI BAT, dit que ce protocole fixera les modalités de remboursement des prêts annulés et les modalités de financement du fonds (terrain) dont les époux [B] conservent la propriété, - dit qu'à défaut d'accord transactionnel entre le CFF et les époux [B], la partie la plus diligente pourra demander la réinscription de l'affaire au rôle, procéder éventuellement par voie d'assignation complémentaire à l'égard de toute autre partie concernée et solliciter toute mesure utile à la préservation de ses intérêts,- dit que cette dernière solution procédurale impliquera nécessairement un renvoi de l'affaire devant le juge de la mise en état, - dit qu'en cas d'accord transactionnel entre le CFF et les époux [B] sur le financement du terrain et les modalités de son remboursement, ces derniers supporteront uniquement les intérêts contractuels au taux de 2,85 % sur la somme de 59 408,12 euros, à compter du 19 mai 2016. En conséquence, au regard non seulement des restitutions dues à la banque mais aussi de celles qu'elle doit effectuer, selon le décompte exact qu'elle produit et après compensation des restitutions réciproques, le jugement déféré, qui avait condamné solidairement les époux [B] à rembourser au CFF les sommes de 110 115 euros et de 31 796,52 euros, sous déduction des sommes d'ores et déjà remboursées et à l'exclusion de tout frais et intérêts, ne sera infirmé que pour tenir compte des restitutions dues par la banque et de la compensation, et la cour, statuant à nouveau, condamnera solidairement les époux [B] à payer au CFF, après compensation, les sommes de 106 422,99 euros au titre du prêt PAS n° 1151443 et de 31 309,80 euros au titre du prêt PTZ n° 1151442, arrêtées au 10 août 2017, à actualiser en fonction du bon provisionnement des échéances postérieures, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt. 2-2. Sur le maintien des sûretés prises par la banque : Si, en application de l'article 2488 du code civil, les hypothèques s'éteignent par l'extinction de l'obligation principale, sauf dans le cas étranger à la présente instance prévu à l'article 2422 du même code, l'obligation de restituer inhérente à un contrat de prêt annulé demeure tant que les parties n'ont pas été remises en l'état antérieur à la conclusion de leur convention annulée (Cass. Civ. 3ème, 5 novembre 2008, n°07-17.357), de sorte que le jugement déféré sera : - confirmé en ce qu'il a dit que dans tous les cas de figure et jusqu'à résolution définitive du litige et complet paiement par les époux [B], le CFF conserve le bénéfice de ses sûretés réelles sur le fonds des époux [B], mais - infirmé en ce qu'il a étendu cette garantie aux sommes éventuellement dues à la banque par la société au titre des prêts, les époux [B] n'ayant pas à répondre sur leur patrimoine de dettes mises à la charge d'un tiers. La banque sera en conséquence déboutée de sa demande de maintien des hypothèques à raison du recouvrement de sommes que lui devrait la société. 3. Sur les rapports entre le constructeur et la banque. 3-1. Sur la garantie de la banque par le constructeur : Est inopérant le moyen de la banque selon lequel, lorsque l'anéantissement du contrat principal intervient du fait du constructeur, celui-ci pourra être condamné, à la demande du prêteur, à garantir l'emprunteur du remboursement du prêt, sans préjudice des dommages-intérêts vis-à-vis du prêteur et de l'emprunteur dès lors qu'en l'espèce l'anéantissement du contrat n'est pas du fait du constructeur mais de celui des acquéreurs qui ont rétracté leur consentement, à la différence de ce qui se serait produit si, au lieu de se rétracter, ils avaient obtenu l'annulation du contrat ou sa résolution pour des motifs imputables au constructeur. Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société à garantir le CFF de tout paiement ou condamnation à la charge des époux [B], ainsi qu'en ce qu'il a dit que seront exclus de cette garantie les remboursements réalisés en exécution d'un éventuel accord transactionnel entre les époux [B] et le CFF, sur la seule somme de 59 408,12 euros correspondant au prix d'acquisition du terrain, et la cour déboutera le CFF de sa demande tendant à voir condamner la société à le garantir du remboursement des sommes dues par les consorts [B]. 3-2. Sur l'indemnisation de la banque par le constructeur : De même, est inopérant le moyen de la banque selon lequel le constructeur, par les fautes qu'il a commises envers les maîtres d'ouvrage et qui sont à l'origine de l'anéantissement du contrat, a engagé sa responsabilité délictuelle envers le prêteur et doit l'indemniser du préjudice que lui a causé l'anéantissement subséquent du contrat de prêt, alors que l'anéantissement du contrat résulte de la rétractation du consentement des acquéreurs et non d'une faute du constructeur, même indirectement, aucune certitude n'étant acquise sur le fait que la rétractation trouve elle-même sa véritable cause dans l'erreur d'altimétrie ou dans un autre manquement du constructeur. En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné la société à payer au CFF les frais et intérêts contractuels des deux prêts de 110 115 euros et de 31 796,52 euros, comptabilisés à compter de la mise à disposition des fonds, savoir 500 euros à titre de frais de dossier, 2 175, 52 euros à titre d'assurance obligatoire et les intérêts au taux de 2,85 %, sur le capital emprunté, à compter du 19 mai 2016 et jusqu'à règlement définitif du litige, et la cour déboutera le CFF de sa demande en condamnation de la société à lui payer la somme de 46 760,03 euros correspondant à son préjudice résultant de l'annulation des contrats de prêt » ;

ALORS QUE commet une faute engageant sa responsabilité le constructeur de maison individuelle qui, en méconnaissance des règles d'ordre public prévues par l'article L. 271-1 du code de la construction et de la construction, ne notifie pas à chacun des époux maîtres de l'ouvrage le contrat de construction, ce défaut de remise de l'acte à chacun des époux ayant pour conséquence d'empêcher le délai légal de rétractation de courir et ainsi, de proroger indéfiniment le délai de rétractation dont disposent les maîtres de l'ouvrage ; qu'en ce cas, le prêteur qui a financé la construction et qui subit l'anéantissement du contrat de prêt en conséquence de l'exercice différé de cette faculté de rétractation est fondé à engager la responsabilité du constructeur aux fins de le voir condamné à garantir la restitution des fonds prêtés et à l'indemniser du préjudice subi ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté (arrêt attaqué, p. 14) que le contrat de construction de maison individuelle conclu par les époux [B] avec la société AST GROUPE avait été notifié par cette dernière aux époux [B] par un courrier unique dont l'accusé de réception du 6 juin 2015 portant la signature de l'épouse mais pas celle de Monsieur [B], ce dont elle a déduit que du fait de cette notification irrégulière, le délai de rétractation n'avait pas couru et que les époux [B] avaient valablement pu exercer leur droit de rétractation par voie de conclusions signifiées dans le cadre de l'instance engagée en 2017 devant le tribunal de grande instance de BESANÇON ; que pour rejeter les demandes du CREDIT FONCIER DE FRANCE dirigées contre la société AST GROUPE, la cour d'appel a retenu que l'anéantissement du contrat principal n'était pas le fait du constructeur mais celui des maîtres de l'ouvrage qui avaient choisi de se rétracter, sans qu'il soit établi que cette rétractation avait été causée par la faute du constructeur ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses constatations, desquelles il résultait que la société AST GROUPE avait commis une faute en ne respectant pas les règles formelles de notification aux maîtres de l'ouvrage du contrat de construction, permettant ainsi à ces derniers d'exercer leur droit de rétractation sans être tenu par un quelconque délai, leur rétractation ayant entraîné l'anéantissement des contrats de prêt accordés par le CREDIT FONCIER DE FRANCE, violant ainsi l'article 1382 ancien (désormais 1240) du code civil, ensemble l'article L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation.

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