18 octobre 1988
Cour de cassation
Pourvoi n° 86-16.683

Chambre commerciale financière et économique

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

BANQUE - crédit documentaire - caractère - caractère irrévocable - portée - saisie - arrêt - arrêt pratiquée par le donneur d'ordre - impossibilité - saisies - mainlevée - demande - bénéficiaire d'un crédit documentaire - crédit irrévocable

Le donneur d'ordre et le bénéficiaire d'un crédit documentaire ayant convenu du caractère irrévocable de ce dernier, le donneur d'ordre ne peut, sans violer la loi des parties, se prévaloir, pour faire obstacle à l'exécution de l'engagement pris sur ses instructions par la banque, d'une créance sur le bénéficiaire, fût-elle étrangère à l'exécution du contrat de base.

Texte de la décision

Sur le premier moyen :




Vu l'article 1134 du Code civil ;


Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué, rendu en matière de référé, que pour régler à la société allemande Facon trois commandes d'autoradios qu'elle lui a passées successivement, la société Automobiles Peugeot (société Peugeot) lui a fait ouvrir par la Banque nationale de Paris (la BNP) des crédits documentaires irrévocables se rapportant à chacune de ces commandes ; qu'un certain nombre d'autoradios compris dans la deuxième livraison ont été refusés par la société Peugeot, qui les a retournés au vendeur ; que, se prévalant de la créance résultant de cette restitution, elle a obtenu à l'encontre de la société Facon une ordonnance de référé condamnant celle-ci à lui payer, à titre de provision, une somme déterminée ; qu'en vertu de cette décision elle a fait pratiquer saisie-arrêt entre les mains de la BNP sur le crédit documentaire correspondant à la troisième commande ; que la société Facon a assigné en mainlevée de la saisie-arrêt la société Peugeot et la BNP ; qu'en cause d'appel la Deutsche Bank et la Bank Für Gemeinwirtschaft (la BFG) sont intervenues volontairement à l'instance, aux mêmes fins, en soutenant qu'à la suite des cessions qui leur avaient été consenties par la société Facon, elles étaient, avant la saisie, devenues bénéficiaires du crédit documentaire par transfert sinon par cession ;


Attendu que, pour débouter la BFG de sa demande, la cour d'appel retient que, si le donneur d'ordre ne peut se prévaloir de l'exécution défectueuse du contrat de base pour pratiquer une saisie sur un crédit documentaire, en revanche rien n'interdit au donneur d'ordre, titulaire d'une créance résultant de rapports juridiques étrangers au contrat à l'occasion duquel il a été donné instruction au banquier d'ouvrir le crédit documentaire, de pratiquer, comme tout créancier du bénéficiaire, une saisie-arrêt entre les mains du banquier qui a ouvert le crédit ;


Attendu qu'en se déterminant, par de tels motifs, alors que le donneur d'ordre et le bénéficiaire ayant convenu du caractère irrévocable du crédit documentaire, la société Peugeot ne pouvait, sans violer la loi des parties, se prévaloir, pour faire obstacle à l'exécution de l'engagement pris sur ses instructions par la BNP, d'une créance sur le bénéficiaire fut elle étrangère à l'exécution du contrat de base, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième et sur le troisième moyens :


CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 mars 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens

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