29 mai 2013
Cour de cassation
Pourvoi n° 12-60.262

Chambre sociale

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2013:SO01004

Titres et sommaires

REPRESENTATION DES SALARIES - cadre de la représentation - unité économique et sociale - reconnaissance - désignation d'un délégué syndical - conditions - syndicat représentatif - représentativité - caractérisation - nécessité - portée - syndicat professionnel - délégué syndical - désignation - désignation dans le cadre d'une unité économique et sociale - opérations électorales - portée tribunal d'instance - compétence - compétence matérielle - action en reconnaissance d'une unité économique et sociale - effets - détermination

Il ne peut être procédé à la désignation d'un délégué syndical au sein d'une unité économique et sociale que lorsque des élections permettant de déterminer la représentativité des syndicats et l'audience des candidats ont été organisées dans ce périmètre. Doit dès lors être cassée la décision validant la désignation d'un délégué syndical au sein d'une unité économique et sociale au motif qu'un autre jugement a reconnu l'existence d'une telle unité alors que, non assorti de l'exécution provisoire, ce jugement faisait l'objet d'un appel pendant au jour de la désignation litigieuse et qu'aucune élection n'avait été organisée au sein du périmètre considéré

Texte de la décision

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 2143-3 du code du travail et 539 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il ne peut être procédé à la désignation d'un délégué syndical au sein d'une unité économique et sociale que lorsque des élections permettant de déterminer la représentativité des syndicats et l'audience des candidats ont été organisées dans ce périmètre ;

Attendu, selon le jugement attaqué, que le syndicat du commerce interdépartemental d'Ile-de-France CFDT (SCID-CFDT) a, le 21 mai 2012, désigné M. X... en qualité de délégué syndical au sein d'une unité économique et sociale composée de vingt-trois sociétés du groupe H2A ;

Attendu que pour débouter les sociétés de leur requête en annulation de cette désignation, le tribunal retient qu'un jugement rendu précédemment par le tribunal d'instance de Courbevoie a reconnu l'existence d'une telle unité économique et sociale entre ces sociétés ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le jugement du tribunal d'instance de Courbevoie, non assorti de l'exécution provisoire, faisait l'objet d'un appel pendant au jour de la désignation litigieuse et qu'aucune élection n'avait été organisée au sein du périmètre considéré, le tribunal a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 19 octobre 2012, entre les parties, par le tribunal d'instance de Paris 14e ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Paris 15e ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille treize.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour les sociétés

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'avoir débouté les sociétés Superlosserand et autres de leur demande en annulation de la désignation de M. X... par le syndicat CFDT en qualité de délégué syndical du 21 mai 2012 ;

AUX MOTIFS QUE les demanderesses ne peuvent soutenir que la désignation effectuée par le syndicat SCID CFDT est nulle du seul fait de l'appel interjeté en soutenant que les actes d'exécution effectués sur la base d'un jugement frappé d'appel sont nuls, car la désignation effectuée n'est pas un acte d'exécution ; que dès lors, soit la cour d'appel saisie du contentieux de la reconnaissance d'une unité économique et sociale confirmera le jugement du tribunal d'instance de Courbevoie, et la désignation de M. X... comme délégué syndical pour l'UES sera valable, soit elle l'infirmera, et la désignation ne s'appliquera qu'à l'égard de la société à laquelle elle a été notifiée ; que par ailleurs, les demandeurs font valoir que la désignation doit être annulée dans la mesure où M. X... était licencié au jour de sa désignation ; que cet argument sera rejeté dans la mesure où il n'est pas contesté que M. X... a été réintégré en octobre 2011 dans les effectifs de la société Superlosserand ; qu'enfin, les demandeurs soutiennent que la désignation est frauduleuse dans la mesure où elle n'a pour but que de faire échec à la procédure de licenciement engagée ; que cependant il n'est apporté aucune justification à cette affirmation, le salarié ayant été réintégré dans les effectifs de la société avant la désignation contestée, et l'existence du mandat syndical n'interdisant pas le licenciement, mais le soumettant à l'autorisation de l'inspecteur du travail, décision elle-même susceptible de recours, ce qui a d'ailleurs donné lieu à une décision du Ministre du travail du 17 avril 2012, annulant la décision de l'inspecteur du travail ;

1°) ALORS QU' est nulle la désignation d'un délégué syndical dans le cadre d'une unité économique et sociale dont la reconnaissance résulte d'un jugement de première instance frappé d'appel à la date de la désignation ; que dès lors, en refusant d'annuler la désignation de M. X... par le syndicat CFDT le 21 mai 2012 comme délégué syndical au sein d'une unité économique et sociale composée de la société Superlosserand et de vingt-deux autres sociétés, tout en constatant que cette unité économique et sociale cadre de la désignation litigieuse avait été reconnue par un jugement du 27 avril 2011 et que cette décision avait fait l'objet d'un appel toujours pendant devant la cour d'appel de Versailles à la date de la désignation, le tribunal d'instance a violé les articles L 2143-3 et L 2322-4 du code du travail, ensemble l'article 539 du code de procédure civile.

2°) ALORS QU' un délégué syndical ne peut être désigné dans une entreprise employant moins de cinquante salariés ; que dès lors, en affirmant que si le jugement reconnaissant l'existence de l'unité économique et sociale au sein de laquelle M. X... avait été désigné était infirmé, cette désignation n'en serait pas moins valable à l'égard de la société Superlosserand, sans même constater que cette dernière remplissait la condition d'effectif requise, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 2143-3 du code du travail ;

3°) ALORS QU' est frauduleuse toute désignation d'un délégué syndical qui a pour objet de détourner à des fins particulières l'institution représentative, ce qui est notamment le cas lorsque le but recherché est de faire obstacle à la procédure de licenciement concernant l'intéressé ; que dès lors, en énonçant, pour écarter la fraude invoquée par l'employeur, que l'existence d'un mandat syndical n'interdisait pas le licenciement mais le soumettait à l'autorisation de l'inspecteur du travail dont la décision était susceptible de recours, le tribunal d'instance a statué par un motif inopérant et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QUE la société Superlosserand faisait valoir dans ses conclusions que M. X..., qui avait reçu deux avertissements les 27 octobre 2010 et 7 janvier 2011, avait saisi le conseil de prud'hommes dès le 30 novembre 2010 aux fins de voir prononcer la résiliation de son contrat de travail, qu'il n'avait jamais eu d'activité syndicale avant sa première désignation comme délégué syndical du 9 mai 2011, laquelle n'avait déjà pour but que de lui conférer un statut protecteur, et que la seconde désignation du 21 mai 2012 était intervenue alors que l'inspecteur du travail avait proposé une médiation entre la société Superlosserand et M. X..., destinée à régler les conséquences de la décision par laquelle le Ministre du travail avait annulé le refus d'autorisation de licenciement de l'inspecteur du travail, tandis qu'il résultait de cette décision que le salarié ne bénéficiait d'aucun statut protecteur et avait été régulièrement licencié un an auparavant ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, le tribunal a violé l'article 455 du code de procédure civile.

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