11 juillet 2000
Cour de cassation
Pourvoi n° 98-45.471

Chambre sociale

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - maladie du salarié - maladie non professionnelle - inaptitude au travail - maintien de la rémunération - obligation de l'employeur - manquement - rupture du contrat de travail - licenciement sans cause réelle et sérieuse - délai d'un mois - absence de reclassement - absence de reclassement ou de licenciement - droits du salarié - reclassement du salarié - obligations de l'employeur

Il résulte de l'article L. 122-24-4 du Code du travail que le salarié qui n'a pas été reclassé dans l'entreprise à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou qui n'a pas été licencié, peut, soit se prévaloir de la poursuite du contrat de travail et solliciter la condamnation de l'employeur au paiement des salaires, soit faire constater la rupture du contrat de travail pour manquement de l'employeur à cette obligation. La rupture doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Texte de la décision

Attendu que M. X..., engagé le 28 février 1990 en qualité de chauffeur livreur par la société Dassibat Transports du Sud-Ouest a été en arrêt de travail pour maladie du 30 mars 1994 au 16 mars 1995 ; que le médecin du Travail l'a déclaré le 14 avril 1995 inapte à son poste de travail ; que cet avis était confirmé le 18 juillet 1995 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins de faire constater la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur et obtenir la condamnation de ce dernier au paiement d'un arriéré de salaires par application de l'article L. 122-24-4 du Code du travail, des indemnités liées à la rupture du contrat de travail et des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;


Sur la première branche du moyen unique :


Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes en paiement de salaires jusqu'à la date où le conseil de prud'hommes aurait dû prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur, d'indemnité de congés payés et d'avoir rejeté la demande en délivrance de certificat de travail et attestation ASSEDIC correspondant à la date de résiliation, alors, selon le moyen, que l'employeur, qui ne procède pas au reclassement du salarié dans l'entreprise à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail et qui ne procède pas au licenciement, est tenu de verser au salarié devenu physiquement inapte, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail ; qu'en conséquence, en rejetant les demandes de paiement de salaires et d'indemnités de congés payés y afférents dus jusqu'à ce qu'intervienne la rupture du contrat de travail, la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'un licenciement ait été décidé et notifié par l'employeur au salarié déclaré physiquement inapte à tout emploi, a violé les articles L. 122-24-4 et L. 223-11 du Code du travail ;


Mais attendu que la cour d'appel a condamné l'employeur au paiement des salaires jusqu'à la date de la rupture du contrat de travail telle que fixée par les premiers juges dont elle a adopté les motifs non critiqués par le moyen ; que le salarié est sans intérêt à critiquer une décision qui ne lui fait pas grief ; que le moyen ne saurait être accueilli ;


Sur la troisième branche du moyen unique relative à l'indemnité de préavis :


Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement d'une indemnité de préavis alors, selon le moyen, que la résiliation judiciaire du contrat de travail à durée indéterminée à l'initiative du salarié et aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'en rejetant dès lors la demande du salarié en paiement de l'indemnité compensatrice de préavis, la cour d'appel a violé les articles L. 122-8, L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du Code du travail ;


Mais attendu que le salarié déclaré inapte à son emploi en conséquence d'une maladie non professionnelle ne peut prétendre au paiement d'une indemnité pour un préavis qu'il est dans l'impossibilité physique d'exécuter ; que la cour d'appel, qui a relevé que le médecin du Travail avait déclaré le salarié inapte à son emploi, n'encourt pas le grief du moyen ; que le moyen n'est pas fondé ;


Sur la quatrième branche du moyen unique :


Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt d'avoir limité l'indemnité de licenciement à la somme de 5 974,52 francs, alors, selon le moyen, que, dans ses conclusions, le salarié avait sollicité une indemnité de licenciement s'élevant à la somme de 8 736,33 francs ; qu'en se bornant sur ce point à confirmer la décision des premiers juges qui n'avaient alloué de ce chef qu'une somme de 5 974,52 francs, la cour d'appel a privé de motifs sa décision en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;


Mais attendu que la cour d'appel, qui a fixé le montant de l'indemnité de licenciement par adoption des motifs des premiers juges tenant à l'ancienneté du salarié à la date de la rupture du contrat de travail, n'encourt pas le grief du moyen ; que le moyen n'est pas fondé ;


Mais sur le moyen unique pris en sa deuxième branche :


Vu l'article L. 122-24-4 du Code du travail ;


Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et rejeter en conséquence la demande du salarié en paiement de dommages-intérêts de ce chef, la cour d'appel a retenu que l'employeur n'avait pas eu à la suite de la déclaration d'inaptitude du salarié, de possibilité de reclassement dans l'entreprise, que l'employeur avait fait de nouvelles propositions de poste au salarié qui n'avait pu les accepter compte tenu de l'inaptitude ;


Attendu, cependant, que l'impossibilité de reclassement du salarié ne dispense pas l'employeur d'appliquer les dispositions de l'article L. 122-24-4 du Code du travail, selon lesquelles l'employeur est tenu de verser au salarié, victime d'un accident ou d'une maladie non professionnels et qui n'a pas été reclassé dans l'entreprise à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou n'a pas été licencié, le salaire correspondant à l'emploi qu'il occupait avant la suspension de son contrat de travail ; qu'il en résulte que le salarié peut, soit se prévaloir de la poursuite du contrat de travail et solliciter la condamnation de l'employeur au paiement des salaires, soit faire constater la rupture du contrat de travail pour manquement de l'employeur à cette obligation, que cette rupture doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;


Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait constaté que l'employeur n'avait pas repris le paiement des salaires ni licencié le salarié, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen relative aux dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :


CASSE ET ANNULE, mais seulement en sa disposition ayant dit que la rupture du contrat de travail analysée en un licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et ayant, en conséquence, débouté le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 6 octobre 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.

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