22 mai 1991
Cour de cassation
Pourvoi n° 89-18.604

Première chambre civile

Publié au Bulletin

Titres et sommaires

ASSURANCE DOMMAGES - police - clauses types de l'assurance obligatoire du maître d'ouvrage - sinistre - obligations de l'assureur - délai - non - respect - effet - garantie - franchise - impossibilité - exception - risque assuré anormalement grave

La sanction du non-respect des deux délais prévus à l'annexe II de l'article A 243-1 du Code des assurances est d'autoriser l'assuré à engager les dépenses correspondant à l'exécution des mesures conservatoires nécessaires à la non-aggravation des dommages, puis à celles de la réparation intégrale dans la limite de l'estimation portée au rapport d'expertise ; le silence gardé par l'assureur pendant le premier délai de 60 jours emporte obtention de la garantie ; à l'expiration du second délai de 105 jours, l'assuré est autorisé à réclamer le paiement des sommes nécessaires à la réparation intégrale des dommages selon sa propre évaluation si le rapport de l'expert ne lui a pas été communiqué dans le délai.

Texte de la décision

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Sur le premier moyen :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 mai 1989), que des désordres sont apparus dans un ensemble immobilier à usage d'habitation, construit par la société civile immobilière Aurélia, qui avait souscrit auprès de la compagnie d'assurance General accident, fire and life, en exécution de l'article L. 242-1 du Code des assurances, une police d'assurance des dommages à l'ouvrage ayant pris effet le 1er mai 1983 ; qu'après déclaration du sinistre à l'assureur, la procédure prévue, aux fins de la garantie, par la police, conformément à l'annexe II de l'article A 243-1 du Code précité, a été mise en oeuvre, mais n'a pas abouti dans les délais impartis ; que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble " résidence Aurélia " a assigné l'assureur en référé, pour obtenir le paiement d'une indemnité provisionnelle de 50 000 francs, coût des travaux de réfection ;


Attendu que, la compagnie d'assurance fait grief à la cour d'appel, statuant en référé, d'avoir accueilli cette demande, alors que, selon le moyen, si, dans le délai de 105 jours, l'assuré n'a pas reçu de l'assureur une proposition d'indemnisation et n'a pu avoir connaissance du rapport de l'expert, il est autorisé à engager les dépenses en cause dans les 15 jours de la transmission à l'assureur de l'estimation qu'il aura pu en faire lui-même et dans la limite de cette estimation, mais non pas à obtenir de l'assureur le paiement de la somme correspondante ; qu'en la condamnant néanmoins à payer cette somme, la cour d'appel a violé tant le texte figurant au B-3°-h de l'annexe II à l'article A 243-1 du Code des assurances que l'article 809 du nouveau Code de procédure civile ;


Mais attendu qu'après avoir énoncé que l'économie du régime établi par la loi du 4 janvier 1978 tendait à permettre le préfinancement rapide des travaux de reprise des désordres par l'assureur en contrepartie de l'obligation d'assurance mise à la charge du maître de l'ouvrage, les juges du second degré ont constaté que les deux délais de 60 et 105 jours n'avaient pas été, en l'espèce, respectés par l'assureur et ont relevé que la sanction en était, dans un premier temps, d'autoriser l'assuré à engager les dépenses correspondant à l'exécution des mesures conservatoires nécessaires à la non-aggravation des dommages et, dans un deuxième temps, de l'autoriser à engager les dépenses de réparation intégrale dans la limite de l'estimation portée au rapport d'expertise ; qu'ils ont, ensuite, retenu à juste titre que le silence gardé par l'assureur pendant le délai emportait obtention de la garantie et qu'à l'expiration du délai de 105 jours, l'assuré était autorisé à réclamer le paiement des sommes nécessaires à la réparation intégrale des dommages, selon sa propre évaluation à défaut d'être tenu par celle de l'expert dont le rapport ne lui avait pas été communiqué dans le délai ; qu'ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;


Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;


Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :


Attendu qu'il est enfin fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir statué comme il a fait, en refusant d'appliquer la franchise de 3 500 francs prévue au contrat d'assurance, alors que, selon le moyen, d'une part, l'inopposabilité de la franchise aux bénéficiaires des indemnités ne concerne que les contrats d'assurance de responsabilité, à l'exclusion des contrats d'assurance de dommages, en sorte qu'a été violé l'annexe I à l'article A 241-1 (A 243-1) du Code des assurances ; et alors que, d'autre part, pour l'application des contrats d'assurance de dommages, les propriétaires successifs de l'ouvrage ont la qualité d'assuré et non pas celle de tiers lésé, de telle sorte que la cour d'appel a ainsi violé les articles L. 121-10 et L. 242-1 du Code des assurances ;


Mais attendu que, s'il est exact que l'inopposabilité de la franchise au tiers lésé bénéficiaire de l'indemnité ne concerne que l'assurance obligatoire de responsabilité régie par l'annexe I à l'article A 241-1 (A 243-1) du Code des assurances, la clause type de l'assurance obligatoire de dommages, telle qu'elle résulte de l'annexe II au texte précité, dispose que la garantie couvre le coût de l'ensemble des travaux et n'autorise aucune franchise, sauf l'hypothèse particulière, prévue aux articles L. 243-4 et R. 243-11 du Code des assurances, où l'assuré présente un risque anormalement grave ; qu'il s'ensuit que la clause de franchise stipulée en l'espèce devait être réputée non écrite ; que, par ce motif fondé sur un moyen qui se trouvait dans le débat, l'arrêt attaqué se trouve justifié ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;


PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi

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