10 mars 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-12.825

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:CO00206

Titres et sommaires

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (LOI DU 26 JUILLET 2005) - Responsabilités et sanctions - Responsabilité pour insuffisance d'actif - Recevabilité - Qualité à agir - Liquidateur - Cas - Action directe contre l'assureur garantissant la responsabilité civile du dirigeant - Condition

Le liquidateur qui agit en responsabilité pour insuffisance d'actif contre le dirigeant d'une société mise en liquidation judiciaire est recevable à exercer une action directe contre l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable dès lors que les conséquences de cette responsabilité ne sont pas exclues par le contrat d'assurance, aucune disposition légale ou réglementaire n'interdisant par ailleurs au liquidateur de joindre, dans la même instance, à sa demande de condamnation du dirigeant, celle de l'assureur, l'incompétence du tribunal saisi de la procédure de liquidation judiciaire n'ayant pas été soulevée

ASSURANCE RESPONSABILITE - Action directe de la victime - Recevabilité - Cas - Liquidateur agissant en responsabilité pour insuffisance d'actif

Texte de la décision

COMM.

FB



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 10 mars 2021




Rejet


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 206 F-P


Pourvois n°
G 19-12.825
T 19-17.066 JONCTION






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 MARS 2021

I - La société Aig Europe, société anonyme, dont le siège est [...] ), société de droit étranger, venant aux droits de la société Aig Europe limited, a formé le pourvoi n° G 19-12.825 contre un arrêt n° RG : 18/02460 rendu le 15 janvier 2019 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. Q... F..., domicilié [...] ),

2°/ à la société ML Conseils, en la personne de M. U... G..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société ACE,

3°/ à la société ML Conseils, en la personne de M. U... G..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwel industrie France,

4°/ à la société ML Conseils, en la personne de M. U... G..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwel France,

5°/ à la société ML Conseils, en la personne de M. U... G..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Wesper industrie France,

toutes quatre ayant leur siège [...] ,

6°/ au procureur général près la cour d'appel de Versailles, domicilié en son parquet général pôle Ecofi, [...] ,

défendeurs à la cassation.

II - M. Q... F... a formé le pourvoi n° T 19-17.066 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Aig Europe limited, dont le siège est [...] ),

2°/ à la société ML Conseils, en la personne de M. U... G..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société ACE,

3°/ à la société ML Conseils, en la personne de M. U... G..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell industrie France,

4°/ à la société ML Conseils, en la personne de M. U... G..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Airwell France,

5°/ à la société ML Conseils, en la personne de M. U... G..., prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Wesper industrie France,

6°/ au procureur général près la cour d'appel de Versailles,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse au pourvoi n° G 19-12.825 invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le demandeur au pourvoi n° T 19-17.066 invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. F..., de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Aig Europe, venant aux droits de la société Aig Europe limited, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société ML Conseils, prise en qualité de liquidateur judiciaire des sociétés ACE, Airwell industrie France, Airwell France et Wesper industrie France, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° G 19-12.825 et T 19-17.066 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 15 janvier 2019), la société ACE et trois de ses filiales, les sociétés Airwell France, Airwell industrie France et Wesper industrie France ont été mises en redressement puis liquidation judiciaires les 1er avril et 15 juillet 2014, la société ML Conseils étant désignée liquidateur dans chacune des procédures.

3. Le liquidateur a assigné M. F..., dirigeant des sociétés, et la société Aig Europe limited aux droits de laquelle vient la société Aig Europe (la société Aig Europ), auprès de laquelle la société ACE avait souscrit au profit de son dirigeant une assurance - responsabilité, en condamnation solidaire au paiement de l'insuffisance d'actif des sociétés sur le fondement des articles L. 651-2 du code de commerce et L. 124-3 du code des assurances.

Examen des moyens

Sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi n° G 19-12.825 et sur les trois moyens du pourvoi n° T 19-17.066 , ci-après annexés


4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le premier moyen du pourvoi n° G 19-12.825

Enoncé du moyen

5. La société Aig fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action directe exercée contre elle par le liquidateur, alors :

« 1°/ que le liquidateur, qui agit contre un dirigeant dans le cadre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif, exerce une action attitrée dont l'objet est le prononcé d'une sanction patrimoniale du dirigeant de droit ou de fait, et ne peut, dans le cadre de cette action, exercer contre l'assureur du dirigeant l'action directe, laquelle tend à poursuivre l'exécution de l'obligation de l'assureur en application du contrat d'assurance ; qu'en retenant néanmoins que la société ML Conseils était recevable à exercer, ès qualités de liquidateur de la société ACE SAS et de ses filiales, l'action directe de l'article L. 124-3 du code des assurances à l'encontre de la société Aig Europe, motif pris que cette action suppose seulement que le tiers lésé établisse l'existence du contrat d'assurance souscrit et la responsabilité de l'assuré, et qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au liquidateur d'agir dans le cadre d'une action distincte de celle exercée contre le dirigeant, la cour d'appel a violé les articles L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce, ensemble l'article L. 124-3 du code des assurances ;

2°/ que les sommes versées par le dirigeant condamné au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif entrent dans le patrimoine du débiteur ; que le liquidateur, qui agit à la fois dans l'intérêt collectif des créanciers et en tant que représentant du débiteur, pour les droits et actions concernant son patrimoine, ne peut exercer l'action directe en qualité de représentant de ce dernier, lorsqu'il est à la fois le souscripteur du contrat d'assurance de responsabilité des dirigeants et tiers lésé ; qu'en considérant que la société ML Conseils, prise en la personne de M. G..., ès qualités de liquidateur de la société ACE SAS et de ses filiales, avait agi dans le cadre de l'action directe formée par le tiers lésé, sans prendre en compte la circonstance qu'elle intervenait également dans l'intérêt patrimonial de la société ACE SAS, souscripteur du contrat d'assurance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce, ensemble l'article L. 124-3 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

6. N'ayant pas à relever d'office l'incompétence du tribunal saisi de la procédure de liquidation judiciaire pour connaître de l'action directe exercée contre l'assureur, par application des dispositions de l'article R. 662-3 du code de commerce, c'est à bon droit qu'après avoir énoncé que l'article L. 124-3 du code des assurances prévoit que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe contre l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable, et relevé que cette action suppose seulement que le tiers lésé établisse l'existence du contrat d'assurance souscrit et la responsabilité de l'assuré, l'arrêt retient que, la garantie des conséquences de la responsabilité pour insuffisance d'actif des dirigeants n'étant pas exclue par le contrat, les conditions sont réunies pour que l'action directe exercée par le liquidateur contre l'assureur soit recevable sans qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'interdise au liquidateur de joindre, dans la même instance, à sa demande de condamnation du dirigeant, celle de l'assureur.

7. Ayant exactement retenu que le liquidateur des sociétés avait agi en qualité d'organe de chacune des procédures et en représentation de l'intérêt collectif des créanciers aux fins de réparation de leur préjudice et non en représentation des sociétés et pour leur compte, la cour d'appel n'avait pas à prendre en considération la personnalité de la société ACE, souscripteur du contrat d'assurance pour examiner la recevabilité de l'action du liquidateur.

8. Le moyen, inopérant en sa seconde branche, n'est donc pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Condamne M. F... et la société Aig Europe aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. F... et condamne la société Aig Europe à payer à la société ML Conseils,
- en qualité de liquidateur de la société ACE, la somme de 2 000 euros,
- en qualité de liquidateur de la société Airwel industrie France, la somme de 2 000 euros,
- en qualité de liquidateur de la société Airwell France, la somme de 2 000 euros et
- en qualité de liquidateur de la société Wesper industrie France, la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits au pourvoi n° G 19-12.825 par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Aig Europe, venant aux droits de la société Aig Europe limited.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable l'action directe exercée par la Selarl ML Conseils, prise en la personne de Maître G..., en ses qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS à l'encontre de la société AIG Europe limited ;

AUX MOTIFS QUE sur l'action en garantie, M. F... sollicite, à supposer que la cour d'appel soit bien compétente pour traiter dans la même instance de la question de l'interprétation de la clause d'assurance dans le contrat le liant à la société AIG, la confirmation du jugement en ce qu'il considéré que la garantie de l'assureur lui était acquise à hauteur de 4 000 000 euros ; que la société AIG soutient que le jugement a omis de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée tirée de l'irrecevabilité de l'action dirigée contre elle ; qu'au soutien de celle-ci, elle explique, en premier lieu, que l'action en responsabilité pour insuffisance d' actif ne peut être dirigée que contre un dirigeant de droit ou de fait, de sorte que le liquidateur agissant dans le cadre de l'action spécifique de l'article L.651-2 du code de commerce ne peut ni appeler l'assureur en garantie ni exercer d'action directe contre lui, et que le dirigeant assigné à ce titre ne peut appeler un tiers en garantie, par suite que Me G..., ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés du groupe Airwell, est dépourvu de droit d'agir à son encontre dans le cadre de l'action spécifique de l'article L.651-2 du code de commerce ; qu'en deuxième lieu, que l'action directe de l'article L.124-3 du code des assurances ne permet pas de déroger à la liste limitative des personnes pouvant faire l'objet d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif, que les principes dégagés par la jurisprudence du Tribunal des conflits et par la Cour de cassation, fondés sur le caractère distinct de l'action en responsabilité contre l'assuré et de l'action directe du tiers victime contre l'assureur, sont transposables, de sorte que Me G..., ès qualités, est irrecevable à solliciter la condamnation in solidum de la concluante avec Monsieur F... ; qu'en troisième lieu, que lorsqu'il exerce l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif; le liquidateur judiciaire agit dans le cadre de sa fonction de représentant de la société débitrice et exerce les droits et actions du patrimoine de cette dernière, laquelle est à la fois victime du dirigeant (tiers lésé) et souscripteur du contrat d'assurance, de sorte qu'il ne peut, en tant que représentant de la société, exercer d'action directe à l'encontre de l'assureur ; en quatrième et dernier lieu que l'action du liquidateur contre l'assureur est contraire à la finalité de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, qui a un caractère "sanctionnateur" avant d'être réparateur ; que subsidiairement et sur le fond, elle expose que le jugement a fait une fausse application du contrat d'assurance et violé l'article II des conditions particulières du contrat relatif au plafond de la garantie, qui fixe un double plafond par période d'assurance - 5 000 000 euros - et pour un certain type de sinistre - en l'espèce les frais de défense et conséquences pécuniaires mis à la charge d'un dirigeant dans le cadre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif- dans la limite de 1 000 000 euros ; qu'elle en déduit qu'au sens de la police d'assurance, le litige, bien que concernant l'insuffisance d'actif de plusieurs sociétés en liquidation d'un même groupe, constitue une action unique, exercée à l'encontre d'un même dirigeant et qu'elle ne peut donc être tenue au-delà d'un montant de 1 000 000 euros ; qu'elle ajoute que le juge de première instance a violé les stipulations relatives à l'épuisement de la garantie en ne tenant pas compte des indemnités déjà versées au titre de la prise en charge des frais de défense de son assuré, et qu'elle est en droit d'opposer au tiers lésé ; que la SELARL ML Conseils, ès qualités, répond d'une part que l'action, qui n'est pas un appel en garantie mais une action directe consacrée à l'article L.124-3 du code des assurances, est recevable car elle puise sa source dans le contrat d'assurance dont la couverture s'étend aux actions en responsabilité pour insuffisance d'actif, et n'est pas fondée, à l'égard de l'assureur, sur l'article L.651-2 du code de commerce ; que d'autre part qu'elle agit dans le cadre des actions en responsabilité pour insuffisance d'actif en qualité de représentant de l'intérêt collectif des créanciers des sociétés, et non pour le compte des sociétés elles-mêmes, et doit dès lors être considérée comme un tiers aux dites sociétés ; que sur le fond, il rappelle que le contrat d'assurance prévoit un plafond de garantie de 1 000 000 euros par action en responsabilité pour insuffisance d'actif, et par période d'assurance, dans la limite d'un plafond global de 5 000 000 euros par période d'assurance et qu'il a initié quatre actions en responsabilité pour insuffisance d'actif pour chacune des sociétés, peu important à cet égard, que le dirigeant de chaque société se trouve être la même personne physique et que les quatre actions aient été jointes en une même instance ; qu'elle ajoute qu'en application de l'article L.124-3 alinéa 2 du code de commerce les sommes qui devraient, selon l'assureur, être déduites du montant de sa condamnation au titre des frais de défense sont insusceptibles de venir grever les sommes pouvant revenir au liquidateur au titre de son action directe, de sorte qu'il convient de condamner la société AIG, assureur, in solidum avec M. F..., son assuré, à la somme totale de 4 000 000 euros ; que contrairement à ce qui est vainement soutenu par la société AIG, il est clair à la lecture de l'assignation qui lui a été délivrée et des écritures de la SELARL ML Conseils, que cette dernière agit, ès qualités de liquidateur judiciaire de chacune des sociétés, représentant de l'intérêt collectif des créanciers aux fins de réparation du préjudice subi par ceux-ci et non pour le compte de celles-ci, à l'encontre de l'assureur ni sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce, ce dernier n'étant pas un dirigeant, ni dans le cadre d'un appel en garantie, cette voie étant fermée tant au dirigeant qu'au liquidateur, mais dans le cadre de l'action directe formée par le tiers lésé ; qu'ainsi l'article L.124-3 du code des assurances prévoit que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable ; que l'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré ; que cette action suppose seulement que le tiers lésé établisse l'existence du contrat d'assurance souscrit et la responsabilité de l'assuré ; que par ailleurs aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au liquidateur judiciaire d'agir dans le cadre d'une action distincte de celle exercée contre le dirigeant sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce ; que l'action directe de la SELARL ML Conseils, ès qualités, est par conséquent recevable ;

1°) ALORS QUE le liquidateur, qui agit contre un dirigeant dans le cadre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif, exerce une action attitrée dont l'objet est le prononcé d'une sanction patrimoniale du dirigeant de droit ou de fait, et ne peut, dans le cadre de cette action, exercer contre l'assureur du dirigeant l'action directe, laquelle tend à poursuivre l'exécution de l'obligation de l'assureur en application du contrat d'assurance ; qu'en retenant néanmoins que la SELARL ML Conseils était recevable à exercer, ès qualités de liquidateur de la société ACE SAS et de ses filiales, l'action directe de l'article L. 124-3 du code des assurances à l'encontre de la société AIG Europe, motif pris que cette action suppose seulement que le tiers lésé établisse l'existence du contrat d'assurance souscrit et la responsabilité de l'assuré, et qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au liquidateur d'agir dans le cadre d'une action distincte de celle exercée contre le dirigeant, la cour d'appel a violé les articles L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce, ensemble l'article L. 124-3 du code des assurances ;

2°) ALORS, QUE les sommes versées par le dirigeant condamné au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif entrent dans le patrimoine du débiteur ; que le liquidateur, qui agit à la fois dans l'intérêt collectif des créanciers et en tant que représentant du débiteur, pour les droits et actions concernant son patrimoine, ne peut exercer l'action directe en qualité de représentant de ce dernier, lorsqu'il est à la fois le souscripteur du contrat d'assurance de responsabilité des dirigeants et tiers lésé ; qu'en considérant que la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Maître G..., ès qualités de liquidateur de la société ACE SAS et de ses filiales, avait agit dans le cadre de l'action directe formée par le tiers lésé, sans prendre en compte la circonstance qu'elle intervenait également dans l'intérêt patrimonial de la société ACE SAS, souscripteur du contrat d'assurance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 651-1 et L. 651-2 du code de commerce, ensemble l'article L. 124-3 du code des assurances.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum M. F... et la société AIG Europe, dans la limite de la somme globale de 4.000.000 euros pour cette dernière, à payer à la Selarl ML Conseils, prise en la personne de Maître G..., ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS, la somme de 1.600.000 euros pour chacune des trois premières et celle de 3.200.000 euros pour la SAS Airwell France, avec intérêts à compter de la présente décision ;

AUX MOTIFS QUE sur l'insuffisance d'actif, M. F... critique le défaut de motivation du tribunal quand au montant de l'insuffisance d'actif et à l'aggravation de celui-ci pour chacune des sociétés en lien avec les fautes reprochées dont la preuve n'est pas rapportée par la SELARL ML Conseils, ès qualités ; qu'il expose que pour l'insuffisance d'actif les comptes doivent être arrêtés au jour de l'ouverture de la procédure collective, que le liquidateur judiciaire a pris en compte des créances postérieures alors que seules les créances antérieures et les créances hors dettes intragroupes sont pertinentes, que l'insuffisance d'actif a été ramenée à 38 513 914,52 euros au lieu de 94 000 000 euros, que le liquidateur judiciaire ne produit pas les comptes 2013 et 2014 permettant de déduire quoique ce soit de la gestion du dirigeant sur cette période ; que le liquidateur judiciaire, qui a sollicité une expertise devant le tribunal de commerce de Versailles dans l'affaire l'opposant aux sociétés Dubag et Elco, pour déterminer l'aggravation de l'insuffisance d'actif entre le 31 juillet 2012 et le l' avril 2014 et entre le 11 juin 2013 et le 1er avril 2014, ne prouve pas l' existence d'une aggravation du passif durant son mandat ; que la société AIG prétend également que Me G..., ès qualités, ne caractérise pas, société par société, le quantum du passif qui serait apparu sous la gestion de monsieur F... ; que la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me G..., ès qualités, fait valoir que l'insuffisance d'actif de chacune des sociétés est établi et a été calculé en ne prenant en compte que le passif antérieur à l'ouverture de la procédure collective et définitivement admis, qu'il s'élève à 19 897 420,45 euros pour la société ACE SAS, 38 995 682,94 euros pour la société Airwell France SAS, 17 435 800,30 euros pour la société Airwell Industrie France SAS, et 17 826 080,15 euros pour la société Wesper Industrie France SAS, soit un montant total de plus de 94 millions d' euros dès lors qu'il n'y a pas lieu d'exclure les dettes intra-groupe ; que l'insuffisance d'actif est égale à la différence entre le montant du passif antérieur admis définitivement et le montant de l'actif réalisé de la personne morale débitrice. Elle s'apprécie à la date à laquelle le juge statue ; que l'insuffisance d'actif d'une société qui peut être mise à la charge d'un dirigeant s'apprécie au regard de son actif et de son passif propres sans référence aux comptes consolidés du groupe et sans qu'il y ait lieu d'en exclure les dettes intra-groupe ; qu'en revanche, en l'absence de production des déclarations de créance du CGEA, il convient de déduire du passif retenu par le liquidateur judiciaire les sommes dues au titre du super privilège des salaires, qui peuvent être nées postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, en sorte qu'au vu des pièces produites (compte-rendus de fin de mission de l'administrateur judiciaire du 29 août 2016, synthèse du passif L.622-24, liste des créances déclarées L.622-24) l'insuffisance d'actif s'élève désormais pour chacune des sociétés à la somme de : *SAS ACE : 19 673 578,95 euros (26 093 540,50 - 223 841,50 - 6 196 120,05), *SAS Airwell France : 38 340 273,95 euros (43 972 148,18 - 655 408,99 - 4. 976.465,24), *SAS Airwell Industrie France : 16 284 210,31 euros (19 973 572,87 – 1.151.589,99 - 2 537 772,57), *SAS Wesper Industrie France : 16 643 110 euros (19 828 305,97 - 1.182.969,39 - 2 002 225,82) ; que sur la direction des sociétés, qu'aux termes de l'article L.651-1 du code de commerce, les dispositions relatives à la responsabilité pour insuffisance d'actif s'appliquent aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective ; qu'il est établi et non contesté que le 8 juillet 2013 Monsieur F... a été nommé dirigeant de la SAS ACE et de ses filiales et qu'il l'est resté jusqu'à l'ouverture des procédures de liquidation judiciaire ; que les procès-verbaux d'assemblée générale de démission datés du 26 août 2014, invoqués dans ses écritures, ne sont pas produits ; que sur les fautes de gestion, Monsieur F... rappelle qu'il incombe à la demanderesse de rapporter la preuve des fautes de gestion qui lui sont reprochées et ce pour chacune des sociétés ainsi que leur contribution à l'augmentation du passif et fait valoir que le tribunal de commerce a renversé la charge de la preuve en exigeant qu'il démontre la réalité des prestations facturées par les sociétés de conseil et s'est contredit en retenant au titre des fautes de gestion tout à la fois une activité non fautive et une passivité ; qu'à titre subsidiaire, il soutient que l'ajout dans l'article L.651-2 du code de commerce relatif à la négligence du dirigeant lui est applicable et conteste avoir, par son inaction, poursuivi abusivement une activité déficitaire considérant que lors de sa prise de fonction il était trop tard pour faire procéder à un audit des comptes, que l'absence de recapitalisation immédiate du groupe ne lui est pas imputable et que la preuve n'est pas rapportée qu'il n'en a pas fait la demande auprès des actionnaires, qu'il n'est pas plus prouvé que l'absence de mise en place immédiate d'une sauvegarde aurait contribué à l'aggravation du passif, que contrairement à ce qui est prétendu il a fait son possible pour mettre en oeuvre des mesures de restructuration du groupe, notamment des tentatives de cession des sociétés Wesper et Airwell deutschland Gmbh pour lesquelles il a notamment missionné la société Callista private equity Gmbh, dont la preuve n'est pas rapportée qu'elles auraient été "douteuses" et des projets de fusion des sociétés pour opérer des économies administratives ; qu'il liste ainsi diverses mesures qu'il affirme avoir initiées ; qu'il ajoute que la conclusion de contrats de prestations de service, respectant les règles de gouvernance, n'est pas plus fautive dès lors d'une part que n' ayant jamais été salarié d'aucune des sociétés du groupe Airwell, il a facturé des honoraires rémunérant ses prestations à travers la société Gramax AG dont il est actionnaire et, d'autre part, qu'il est normal de s'entourer de conseils dans la recherche de solutions ; que la société AIG prétend que les motifs du jugement se contredisent en ce que le tribunal a reproché à M. F... tout à la fois d'être resté inactif et d'avoir mandaté des sociétés de conseil et qu'il a renversé la charge de la preuve ; que reprenant les arguments de Monsieur F..., il soutient qu'aucune faute n'est démontrée à l'encontre de ce dernier qui a pris des mesures sans que l'absence de résultat de celles-ci ne puisse lui être reprochée, et que l'existence d'un lien de causalité entre les fautes alléguées et l'insuffisance d'actif n'est pas établi ; que la SELARL ML Conseils, ès qualités, réplique au contraire que chacune des fautes de gestion retenues par le tribunal est caractérisée et que l'objectif de Monsieur F... était en réalité d'appréhender, avant le dépôt de bilan, une partie de la trésorerie et les derniers actifs du groupe, au profit notamment de sa propre société de conseil, se plaçant ainsi en situation de conflit d'intérêts avérée ; qu'elle explique qu'il a poursuivi abusivement pendant neuf mois l'activité déficitaire des sociétés, dont la situation était irrémédiablement compromise, en masquant la gravité de la situation aux commissaires aux comptes et au comité d'entreprise tout en engageant des frais de conseil dont il faisait bénéficier des sociétés dans lesquelles lui-même ou ses co-actionnaires étaient intéressés ; qu'elle prétend que ce faisant Monsieur F... a commis une grave faute de gestion par omission ; qu'elle lui reproche également de ne pas avoir sollicité l'ouverture de procédures de sauvegarde à un moment où les sociétés disposaient encore d'importantes liquidités, de ne pas avoir pris des mesures de restructuration efficaces, de ne pas avoir fait auditer les comptes ce qui aurait permis de mettre à jour la situation réelle des sociétés et de ne pas avoir tenté d'obtenir des actionnaires qu'ils procèdent à l'augmentation de capital annoncée et, bien que non retenu par le tribunal de commerce, d'avoir tenté de céder des actifs en contradiction avec l'intérêt social des sociétés concernées, cette dernière faute ayant également contribué à l'insuffisance d' actif ; qu'elle considère que la brièveté de la période écoulée entre la prise de fonction de Monsieur F... le 8 juillet 2013, la désignation d'un mandataire ad hoc, et l'ouverture de la procédure collective, le 1er avril 2014 n'est pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité ; qu'elle conclut que les fautes, qui sont caractérisées pour chacune des quatre sociétés, ont contribué à l'insuffisance d'actif ; que l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 décembre 2016 applicable immédiatement aux procédures collectives et aux instances en responsabilité en cours, dispose notamment que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; qu'en cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables ; que toutefois en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée ; que chaque faute de gestion doit être appréciée au regard de chacune des sociétés et non du groupe ; que néanmoins, l'interdépendance des sociétés, qui résulte de la structure même du groupe et de l'activité de chacune des quatre sociétés, n'est pas contestée ; que sur la poursuite abusive d'une activité déficitaire, les comptes annuels de la société ACE communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 31 932 931 euros au 31 décembre 2011 avaient diminué à 11 879 158 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 12 130 248 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 9 423 126 euros et de 21 197 478 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 9 141 057 euros ; que d'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n' était plus à cette date que de 5 993 295 euros pour un résultat déficitaire de 10 173 644 euros. Ce dernier a relevé que "aucune mesure significative ne semble avoir été prise...11 semble que les principales mesures prises pour réduire la perte de trésorerie aient été une diminution des délais de règlement des clients, voire le recours accru à l'affacturage, et une augmentation des délais de règlement des fournisseurs...Les nouveaux actionnaires d'ACE depuis mi-2013 n'ont apporté aucune solution aux difficultés du groupe. Ils ont poursuivi une activité déficitaire sans prendre de mesures de restructuration." ; que les comptes annuels de la société Airwell industrie France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 15 543 861 euros au 31 décembre 2011 avaient diminué à 10 308 607 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 4 579 836 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 25 999 417 euros et de 5 217 170 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 23 685 726 euros ; que d'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus que de 19 781 155 euros pour un résultat déficitaire de 320 560 euros ; que l'administrateur judiciaire a noté que "la perte d'exploitation s'élève donc à plus de 5,4 M euros chaque année sur les deux derniers exercices, pour atteindre 16 M euros sur cinq ans. 1...1 Les dettes ne sont plus du tout proportionnelles au niveau d'activité ; elles passent de 3 à 7 fois le chiffre d'affaires moyen mensuel, le délai de règlement des fournisseurs étant plus que doublé pour atteindre 152 jours au 31/12/2013". ; que les comptes annuels de la société Airwell France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 2 690 229 euros au 31 décembre 2011 sont devenus négatifs à hauteur de 4 975 489 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 2 309 773 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 135 672 751 euros et de 7 665 718 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires en baisse de 85 154 557 euros ; que d'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus à cette date que de 47 579 216 euros pour un résultat pourtant bénéficiaire de 972 910 euros ; que l'observation relative aux dettes et au délai de règlement des fournisseurs est sensiblement la même que pour les sociétés précédentes ; que les comptes annuels de la société Wesper industrie France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 1 923 467 euros au 31 décembre 2011 sont devenus négatifs à hauteur de 532 349 euros au 31 décembre 2012, que les bénéfices qui étaient de 835 782 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 12 495 657 euros sont devenus des pertes de 2 440 575 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 12 915 523 euros ; que d'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus que de 7 036 612 euros et les pertes avaient augmenté à 3 392 724 euros. Ce dernier a relevé que "la perte d'exploitation s 'élève donc à presque 3Meuros par an sur les trois derniers exercices, pour atteindre 11 M euros sur cinq ans. [...J Déjà élevées, les dettes fin 2013 ne sont plus du tout proportionnelles au niveau d'activité; elles passent de 2-3 à 6 fois le chiffre d'affaires moyen mensuel, le délai de règlement des fournisseurs étant plus que doublé pour atteindre 176 jours au 31/12/2013" ; qu'il est également constant que par lettre recommandée avec avis de réception en date du 26 novembre 2013, le cabinet Ernst et Young, commissaire aux comptes de chacune des sociétés, a engagé une procédure d'alerte en sollicitant les explications de M. F... sur les faits qu'il avait relevé susceptibles de compromettre la continuité d'exploitation de celles- ci ; que selon courrier en date du 20 décembre 2013, il a informé le dirigeant que les réponses apportées n'étaient pas de nature à permettre la continuité de l'exploitation et a relevé : un écart important entre la position de trésorerie du groupe telle que reprise par le dirigeant dans sa présentation du 5 décembre 2013 (Financial Forecast 2014 - 7,9 millions d'euros) et celle qu'il avait lui-même observée dans le suivi hebdomadaire préparé en interne (entre 3,5 et 4 millions d'euros) ; des prévisions de revenus en progression en contradiction avec les tendances des années précédentes ; des éléments positifs liés à des opérations envisagées mais non finalisées et l'absence de prise en compte pour le groupe de l'effet négatif en trésorerie, de l'ordre de 2 millions d'euros, concernant la cession envisagée de l'usine de la société Wesper industrie. La procédure d'alerte a ainsi été poursuivie après l'assemblée générale du 23 janvier 2014 ; qu'il résulte en outre du rapport dressé le 28 mars 2014 par la société d'expertise comptable Secafi, à la demande de la Délégation unique du personnel (DUP) des sociétés du groupe Airwell, que la trésorerie disponible pour les sociétés françaises étaient de 7 800 000 euros au 18 juin 2013 et de 2 000 000 euros au 20 février 2014, outre 2 400 000 euros de créances échues, démontrant ainsi une forte dégradation ; qu'il en ressort également que la cession envisagée de la société Airwell deutschland est contraire à l'intérêt social des sociétés Ace et Airwell France ; que le bilan économique de l'administrateur judiciaire pour la société Ace rappelle également que le mandataire ad hoc a dû mettre en garde le dirigeant contre les projets de cession d'une part de la filiale Airwell deutschland à sa société mère AC Beitilegungun Gmbh, sans le moindre apport financier, et d'autre part de la société Wesper industrie France à un prix négatif de 1,6 M euros que la société ACE n'avait pas les moyens de payer et à une société récemment créée à l'Île Maurice et dont les actionnaires étaient les consultants allemands mandatés pour trouver un acquéreur ; qu'en outre, le reproche fait par le liquidateur judiciaire et repris par le tribunal selon lequel M. F... aurait dû solliciter une procédure de sauvegarde est justifié par le mandataire ad hoc qui souligne dans son rapport que cette "solution aurait pu être envisagée il y a plusieurs mois" ; qu'il se déduit de ces éléments qu'entre sa nomination et l'ouverture des procédures collectives, M. F... a poursuivi abusivement, pour chacune des sociétés, une activité déficitaire sans que cette faute ne puisse être assimilée à une simple négligence au regard des chiffres repris ci-dessus et des procès-verbaux des assemblées générales extraordinaires, tenues le 23 janvier 2014 pour chacune des sociétés qui concluent que "M. Monsieur Q... F..., [et pour ACE SAS, Monsieur C...] , en sa qualité de représentant de l'associée unique [...] se déclare parfaitement informé des difficultés rencontrées par la Société, mais estime que les mesures proposées sont de nature à envisager le redressement de la Société avec confiance". Elle a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif et diminué le gage des créanciers pour chacune des quatre sociétés, sans augmentation corrélative de l'actif ; que ni les mesures envisagées ni la désignation d'un mandataire comme en l'espèce n'exonèrent le dirigeant de ses fautes dès lors que les premières, qui n'ont pour l'essentiel pas été prises ou n'ont abouti qu'à rallonger les délais de paiement, étaient à tout le moins très "risquées" et que la seconde ne le privait pas de l'exercice de ses pouvoirs ni ne le dispensait de ses obligations alors au demeurant que celle-ci n'est intervenue que le 6 mars 2014, soit tardivement, et alors que M. F..., nommé depuis plusieurs mois, ne pouvait ignorer la baisse de chiffre d'affaires et l'augmentation des pertes communes aux quatre sociétés. Dans le rapport dressé le 28 mars 2014, le mandataire ad'hoc relève "Il ressort de ces éléments que, probablement sans être en état de cessation des paiements, le groupe connaît une situation de trésorerie particulièrement tendue puisque sa trésorerie disponible augmentée de ses créances clients (+/- 16Meuros) ne couvre qu'à hauteur de 66% ses dettes à court terme (24Meuros). L'appréciation d'un éventuel état de cessation des paiements supposerait de vérifier la part des dettes fournisseurs qui aurait dépassé le délai de règlement contractuel. Dès le début de sa mission, l'exposant a insisté auprès de ses interlocuteurs sur la fragilité des solutions qu'ils projetaient et sur les risques qu'ils faisaient courir, d'une part aux mandataires sociaux qui les mettraient en oeuvre, d'autre part aux sociétés concernées, tant cédées que cédantes". ; que la faute de gestion est donc caractérisée pour les sociétés ACE, Airwell France, Airwell industrie France, Wesper industrie France ; que sur l'utilisation de la trésorerie des sociétés Il est établi que par actes sous seing privé en date des : - 22 novembre 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service aux fins notamment de recherches "d'investisseurs potentiels" et "d'organisation de la vente structurée de filiales et/ou d'actifs " avec la société Callista management Gmbh, société de droit allemand, moyennant des tarifs journaliers de 1 200 euros à 2 400 euros selon la qualité du consultant outre des primes de succès et les frais (déplacements, hôtel 4 étoiles). Le rapport du mandataire ad'hoc précise que deux mois plus tard, cette mission débouchait sur une offre d'acquisition émanant d'une société Turnaround capital partners, constituée à l'île Maurice, par les associés du cabinet Callista management, postérieurement à la formulation de cette offre, et que ce cabinet aurait facturé, conjointement avec les avocats de la société, la somme de 328 000 euros ; - 17 juin 2013, 9 juillet 2013 et 27 novembre 2013, la société ACE a conclu deux contrats de "consulting" et un amendement avec la société Gramax AG, présidée par M. Q... F..., afin d'être assistée "dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l'entreprise", moyennant un prix de 900 euros puis de 1 450 euros par jour, frais de transport en sus, porté aux termes de l'amendement à 31 900 euros par mois, hors frais, payable d'avance pour vingt-deux jours de travail ouvrés, sans obligation de résultat quantifiable. L'amendement précise "Au delà de ces vingt-deux jours, chaque journée supplémentaire de travail sera facturée 1 450 euros. Dans l'éventualité où le consultant travaillerait moins de vingt jours par mois, aucune compensation n'est prévue sur la rémunération du mois suivant" ; - 9 juillet 2013, 12 et 25 août 2013, 11 et 27 novembre 2013, la société ACE a conclu un contrat de "consulting", suivi de quatre amendements, avec la société The Gap Consultants AG (devenue Gramax Capital AG), dirigée par M. D... C..., afin d'être assistée notamment "dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l'entreprise" et "dans le domaine de l'optimisation des chaînes d'approvisionnement, de la réduction des coûts et de l'optimisation des stocks", moyennant un prix de 900 euros et 800 € par jour, frais de transport en sus, porté aux termes des amendements à 19 800 euros et 17 600 par mois, puis à 26 400 euros pour le premier, hors frais, payable d'avance pour vingt-deux jours de travail ouvrés, sans obligation de résultat quantifiable. L'amendement précise "Au delà de ces vingt- deux jours, chaque journée de supplémentaire de travail sera facturée 900 euros. Dans l'éventualité où le consultant travaillerait moins de vingt jours par mois, aucune compensation n'est prévue sur la rémunération du mois suivant" ; - 1er juillet 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service avec la société [...] afin de 'fournir à Airwell les services de gestion et de conseil suivants : assistance dans le repositionnement et la réorganisation d 'Airwell, y compris de toutes les filiales,[..] négociations avec l'ancien actionnaire, Elco", moyennant une rémunération mensuelle de 50 000 euros, hors taxes et hors frais ; - 11 juin 2013, la société ACE a conclu un contrat de consulting avec la société [...] afin d'être assistée notamment "dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l 'entreprise" moyennant une rémunération de 900 euros par jour, hors frais ; - 1er septembre 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service avec la société LLS Management & consulting Gmbh afin d'être assistée dans la "vente des outils de contrôle financiers appropriés, tels que : Assistance dans la réorganisation et la restructuration du client et de toutes ses filiales, [...J, préparation d'un plan de restructuration, [4 recherches de fusions et acquisitions..." , moyennant une rémunération de 2 000 euros par jour, hors frais ; que le rapport Secafi relève que "la trésorerie disponible en juin 2013 était de 7,8 M euros en France et 0,6 M euros en Allemagne alors qu'en février 2014 cette trésorerie n'était plus que de 2Meuros en France avec 2,4 M euros de créances échues [...)Des honoraires significatifs de consultants au bénéfice des actionnaires ont été versés, pour 853 k euros entre juillet 2013 et janvier 2014. D 'autre part, des honoraires ont aussi été versés à des conseils pour 328 keuros sur la même période (Callista private equity, Heiss Kursawe Eversheds, Zschunke Ulrich Avocats), ainsi que près de 188 keuros de frais de déplacement et divers sur 2013" ; qu'il est établi par l'extrait du site internet Gramax capital AG que cette société a été créée en 2011 par MM. Q... F... et D... C..., que les sociétés [...] et [...] ont pour actionnaire et dirigeant M. W... I..., tous trois actionnaires directement ou à travers leur société de la société AC Beteiligungen Gmbh, laquelle détenait entièrement la SAS ACE ; que compte tenu du nombre des conventions susvisées, la production d'une facture émise par la société LLS, à hauteur de 44 000 euros pour vingt-deux jours de travail, et de quelques mails ou lettres est très insuffisante à rapporter la preuve qui incombe au dirigeant, dès lors que le liquidateur judiciaire ne peut pas rapporter une preuve négative, de l'existence de réelles prestations dont l'intérêt au demeurant pour les sociétés liquidées n'est pas avéré ; qu'il est ainsi établi que M. F... a utilisé la trésorerie des sociétés ACE et de ses filiales qu'il dirigeait pour favoriser d'autres sociétés dans lesquelles lui-même ou ses associés étaient intéressés au détriment des premières. Le nombre de conventions et les rémunérations fixées démontrent à l'évidence qu'il ne peut s'agir d'une négligence ; que le grief est donc caractérisé ; qu'il a contribué à l'insuffisance d'actif en ce qu'à l'ouverture du redressement judiciaire, les trésoreries étaient asséchées au point d'être absorbées en totalité par le paiement des salaires du mois de mars 2014 ; que sur l'absence de recapitalisation, le 13 décembre 2013, la DUP des sociétés ACE et Airwell France a saisi le Cabinet Ernst et Young, commissaire aux comptes, de ses inquiétudes face à la situation de ACE SAS et de ses trois filiales, à la chute du chiffre d'affaires, à l'absence de garantie quant aux actions engagées, à la crédibilité des données sur la situation de trésorerie et sur les pertes du groupe ; qu'à cette lettre était jointe la présentation faite par la direction de la société le décembre 2013, laquelle indique notamment que "les actionnaires vont en outre s 'engager à une injection de liquidités d'un montant maximal de 5 millions d'euros " ; que cette information a également été renouvelée dans la réponse apportée le 11 décembre 2013 à la DUP en suite de la réunion du 5 décembre 2013, en sorte que M. F... ne peut prétendre qu'il s'agit d'un engagement antérieur à sa prise de fonction ; que si la reconstitution des capitaux propres appartient aux actionnaires et non au dirigeant, il appartient en revanche à ce dernier de tirer les conséquences d'un défaut de reconstitution ; qu'en l'espèce, M. F..., dirigeant et actionnaire des sociétés via la société AC Beteiligungen Gmbh, ne démontre pas, alors que la charge de la preuve lui appartient, qu'il a convoqué des assemblées générales à cette fin ou tenté de recouvrer les investissements annoncés alors que ceux-ci étaient nécessaires à la survie des sociétés, ce faisant il a commis une faute de gestion ; que sa responsabilité est donc également engagée à ce titre, sans que cette abstention ne puisse être là encore qualifiée de négligence ; qu'elle a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif de la société Ace, holding, mais également de ses filiales qui devaient être financées grâce à cet apport ; que sur les tentatives de cessions non conformes à l'intérêt social des sociétés, les rapports du commissaire aux comptes, de l'administrateur judiciaire et du cabinet Secafi démontrent de façon concordante que les cessions d'une part de la société Wesper industrie France à la société Turnaround capital partners pour un prix négatif, d'autre part de la société Airwell Deutschland à la société AC Beteiligungen étaient contraires à l'intérêt social des sociétés liquidées ; qu'outre que ces opérations projetées, en violation pour la première des dispositions de l'article 1596 du code civil qui interdit aux mandataires d'acheter les biens qu'ils sont chargés de vendre, interrogent sur les objectifs réellement poursuivis par M. F..., il est certain qu'elles ont prolongé de plusieurs semaines voire mois la poursuite de l'activité déficitaire de la holding et de ses filiales et par conséquent contribué à l'insuffisance d'actif de celles-ci ; que le grief est donc caractérisé nonobstant l'absence de réalisation effective des cessions, étant précisé que la cour n'a pas à déterminer la part de l'insuffisance d'actif imputable à chacune des fautes de gestion ; que sur les sanctions, Monsieur F... soutient que quand bien même ces prétendues fautes de gestion seraient avérées, la sanction prononcée à son encontre est disproportionnée au regard de la situation des sociétés au jour de son entrée en fonction, des fautes constatées et de ses capacités contributives ; qu'il ajoute que du fait de la nullité du jugement, la capitalisation des intérêts à compter du 9 novembre 2016 ne peut s'appliquer, de sorte que ceux-ci ne peuvent courir qu'à compter du prononcé de la décision à intervenir ; que la société AIG fait valoir que le tribunal n'a pas respecté le principe de proportionnalité de la sanction en ce qu'il a condamné le dirigeant dans des proportions injustifiées et démesurées au regard de ses facultés contributives et que les intérêts ne pouvaient courir que du jugement et non de l'assignation ; que la SELARL ML Conseils, ès qualités, rappelle que pour calculer le quantum de la condamnation le juge dispose d'un pouvoir d'appréciation en fonction notamment de la gravité des fautes commises ; qu'elle considère que la condamnation est justifiée car le tribunal de commerce a tenu compte de la brièveté des fonctions de dirigeant de Monsieur F... pour le condamner à une somme représentant moins de 10% de l'insuffisance d'actif totale. Soutenant que les intérêts ont un caractère compensatoire, il prétend que leur point de départ doit être fixé au 9 novembre 2016 ; que le nombre de fautes retenues à l'encontre de M. F... ainsi que leur contribution à l'insuffisance d'actif justifient sa condamnation à supporter une partie de l'insuffisance d'actif de chacune des quatre sociétés, étant observé que le principe de proportionnalité ne porte pas sur la proportionnalité de la condamnation au montant du patrimoine du dirigeant mais au nombre de fautes, à leur gravité et au montant de l'insuffisance d'actif qu'elles ont contribué à créer ; que M. F... est âgé de 50 ans ; il a un enfant à charge ; qu'il produit deux avis d'imposition suisses pour 2015 et 2016, lesquels mentionnent notamment qu'il est employé par la société Gramax capital AG, dont il détient des titres, qu'il a des revenus professionnels annuels de 113 960 francs suisses, des revenus mobiliers à hauteur de 100 000 francs suisses et des biens imposables en Suisse d'une valeur dettes déduites de 481 360 francs suisses pour la première année, puis de 150 056 francs suisses et 1 franc suisse ainsi que des biens imposables en Suisse d'une valeur dettes déduites de 436 250 francs suisses pour la seconde ; qu'outre qu'il n'a pas actualisé sa situation, ces éléments sont insuffisants à déterminer la consistance complète de son patrimoine ; que compte tenu de la durée des mandats exercées par M. F..., du caractère déficitaire ancien des activités des sociétés du groupe Airwell et du fait que le groupe a connu plusieurs dirigeants entre 2007 et 2014, il convient de condamner M. F... à supporter une partie de l'insuffisance d'actif à hauteur de 1 600 000 euros pour chacune des SAS ACE, Airwell industrie France et Wesper industrie France et de 3 200 000 euros pour la SAS Airwell France ; qu'en application de l'article 1231-7 du code civil les intérêts sont dus à compter de la présente décision, le jugement ayant été annulé ;

1°) ALORS QUE le fait pour un dirigeant de n'avoir pas eu recours à une procédure de sauvegarde, qui constitue une procédure préventive facultative, ne constitue pas une faute de gestion au sens de l'article L. 651-2 du code de commerce ; qu'en retenant néanmoins que « le reproche fait par le liquidateur judiciaire et repris par le tribunal selon lequel M. F... aurait dû solliciter une procédure de sauvegarde est justifié par le mandataire ad hoc » et qu'il s'en déduit qu'entre sa nomination et l'ouverture des procédures collectives, M. F... a poursuivi abusivement, pour chacune des sociétés, une activité déficitaire sans que cette faute ne puisse être assimilée à une simple négligence, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;

2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la société AIG Europe faisait valoir qu'il ne pouvait être reproché à M. F... « de ne pas avoir engagé une procédure de sauvegarde des sociétés du groupe Airwell dès sa nomination en tant que dirigeant, alors même qu'il a sollicité la désignation d'un mandataire ad hoc qui n'a pas, lui-même, jugé utile de mettre en oeuvre une telle procédure dont il n'est d'ailleurs pas démontré en quoi elle aurait impacté le besoin en trésorerie des sociétés du groupe Airwell et qui aurait donné lieu à une période d'observation » (p. 31 des conclusions du 22 oct. 2018) ; qu'en effet, le mandataire ad hoc avait retenu, aux termes de son rapport (prod. n° 5, p.24), que « même si l'état de cessation des paiements n'était peut-être pas patent avant l'échéance des salaires de mars 2014, l'ouverture d'une sauvegarde n'était à l'évidence pas à la hauteur des enjeux » de sorte qu'il ne pouvait être reproché à M. F... de ne pas avoir engagé une procédure de sauvegarde qui se serait révélée inadéquate ; qu'en retenant que « le reproche fait par le liquidateur judiciaire et repris par le tribunal selon lequel M. F... aurait dû solliciter une procédure de sauvegarde est justifié par le mandataire ad », sans prendre en compte, comme il lui était demandé, la circonstance que ce dernier n'avait pas jugé utile de mettre en oeuvre une telle procédure qui n'était de toute façon pas à la hauteur des enjeux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

3°) ALORS, EN OUTRE, QU' en retenant, pour caractériser une faute de gestion consistant dans la poursuite abusive d'une activité déficitaire des sociétés de la société ACE SAS et de ses filiales, que la désignation du mandataire ad hoc était intervenue tardivement, le 6 mars 2014, sans prendre en compte, comme il lui était demandé par la société AIG Europe (p. 31 et 32, concl. 22 oct. 2018) la circonstance, relatée par le mandataire ad hoc dans son rapport (prod. n° 5, p. 11, 12 et 13) que, nommé pour restructurer le groupe en grande difficulté, M. F..., avant de solliciter la nomination du mandataire, avait établi un plan d'action pour réagir à la procédure d'alerte lancée par le commissaire aux comptes et convoqué une assemblée générale le 23 janvier 2014, au cours de laquelle il avait proposé un certain nombre de mesures et dispositions susceptibles d'aider au redressement (p. 22 du rapport), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

4°) ALORS, EN OUTRE, QU' en retenant, pour caractériser une faute de gestion consistant dans la poursuite abusive d'une activité déficitaire des sociétés de la société ACE SAS et de ses filiales, que les mesures envisagées par M. F... n'ont pour l'essentiel pas été prises, n'ont abouti qu'à rallonger les délais de paiements et qu'elles étaient très risquées, sans prendre en compte, comme il lui était demandé par la société AIG Europe (p. 31 et 32 de ses concl. 22 oct. 2018) et comme cela ressortait des déclarations concomitantes du mandataire ad hoc (p. 22 de son rapport), la circonstance que le dirigeant du groupe avait envisagé un certain nombre de dispositions susceptibles d'aider au redressement, ce dont il s'inférait que les mesures prises par M. F... étaient au moins pour partie justifiées, quelle que soit leur efficacité économique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

5°) ALORS QU' en se fondant, pour retenir que M. F... avait commis une faute en utilisant la trésorerie des sociétés du groupe Airwell, sur un certain nombre d'actes sous seing privés démontrant qu'il aurait ainsi favorisé d'autres sociétés dans lesquelles lui-même ou ses associés étaient intéressés au détriment des sociétés du groupe, soulignant que « le nombre de conventions et les rémunérations fixées démontrent à l'évidence qu'il ne peut s'agir d'une négligence », cependant que parmi les conventions visées (cf. actes des 17 juin, 11 juin, 1er juillet 2013 visés par l'arrêt), certaines avaient été conclues avant que M. F... ne soit nommé dirigeant des sociétés du groupe Airwell le 8 juillet 2013, ce dont il s'inférait que ces actes ne pouvaient lui être imputés à faute, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision et a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;

6°) ALORS QU' en considérant, pour retenir que M. F... avait commis une faute de gestion tenant à l'absence de recapitalisation du groupe, qu'il ne « démontrait pas avoir convoqué des assemblées générales à cette fin ou tenté de recouvrer les investissements annoncés alors que ceux-ci étaient nécessaires à la survie des sociétés » (p. 19 § 2 de l'arrêt), sans prendre en compte, comme le lui demandait la société AIG Europe (p. 31 et 32 de ses concl. du 22 oct. 2018), les mesures prises pour restructurer le groupe et qui étaient d'ailleurs relatées dans le rapport du mandataire ad hoc (p. 11, 12, 13) comme étant « susceptibles d'aider au redressement » (p. 22 § 1), à savoir le plan d'action énoncé par le dirigeant le 16 décembre 2013, en considération de la procédure d'alerte lancée par le commissaire aux comptes, ainsi que les mesures annoncées lors de l'assemblée générale convoquée le 23 décembre et tenue le 23 janvier suivant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

7°) ALORS QUE la responsabilité d'un dirigeant pour insuffisance d'actif suppose de démontrer que la faute de gestion a contribué à l'insuffisance d'actif , c'est-à-dire qu'elle est à l'origine du passif qui a provoqué la dégradation financière de la société ; qu'en retenant que les tentatives de cessions non-conformes à l'intérêt social des sociétés caractérisaient une faute de gestion au sens de l'article L. 651-2 du code de commerce, après avoir pourtant constaté l'absence de réalisation effective des cessions envisagées, ce dont il s'inférait qu'aucun grief n'était caractérisé, le seul fait de relever que les opérations de cession projetées avaient prolongé de plusieurs semaines la poursuite de l'activité déficitaire étant insuffisant à caractériser le lien de causalité entre la faute retenue et le préjudice de la société, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum M. F... et la société AIG Europe, dans la limite de la somme globale de 4.000.000 euros pour cette dernière, à payer à la Selarl ML Conseils, prise en la personne de Maître G..., ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS, la somme de 1.600.000 euros pour chacune des trois premières et celle de 3.200.000 euros pour la SAS Airwell France, avec intérêts à compter de la présente décision ;

AUX MOTIFS QUE sur l'action en garantie, M. F... sollicite, à supposer que la cour d'appel soit bien compétente pour traiter dans la même instance de la question de l'interprétation de la clause d'assurance dans le contrat le liant à la société AIG, la confirmation du jugement en ce qu'il considéré que la garantie de l'assureur lui était acquise à hauteur de 4 000 000 euros ; que la société AIG soutient que le jugement a omis de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée tirée de l'irrecevabilité de l'action dirigée contre elle ; qu'au soutien de celle-ci, elle explique, en premier lieu, que l'action en responsabilité pour insuffisance d' actif ne peut être dirigée que contre un dirigeant de droit ou de fait, de sorte que le liquidateur agissant dans le cadre de l'action spécifique de l'article L.651-2 du code de commerce ne peut ni appeler l'assureur en garantie ni exercer d'action directe contre lui, et que le dirigeant assigné à ce titre ne peut appeler un tiers en garantie, par suite que Me G..., ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés du groupe Airwell, est dépourvu de droit d'agir à son encontre dans le cadre de l'action spécifique de l'article L.651-2 du code de commerce ; qu'en deuxième lieu, que l'action directe de l'article L.124-3 du code des assurances ne permet pas de déroger à la liste limitative des personnes pouvant faire l'objet d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif, que les principes dégagés par la jurisprudence du Tribunal des conflits et par la Cour de cassation, fondés sur le caractère distinct de l'action en responsabilité contre l'assuré et de l'action directe du tiers victime contre l'assureur, sont transposables, de sorte que Me G..., ès qualités, est irrecevable à solliciter la condamnation in solidum de la concluante avec Monsieur F... ; qu'en troisième lieu, que lorsqu'il exerce l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif; le liquidateur judiciaire agit dans le cadre de sa fonction de représentant de la société débitrice et exerce les droits et actions du patrimoine de cette dernière, laquelle est à la fois victime du dirigeant (tiers lésé) et souscripteur du contrat d'assurance, de sorte qu'il ne peut, en tant que représentant de la société, exercer d'action directe à l'encontre de l'assureur ; qu'en quatrième et dernier lieu que l'action du liquidateur contre l'assureur est contraire à la finalité de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, qui a un caractère "sanctionnateur" avant d'être réparateur ; que subsidiairement et sur le fond, elle expose que le jugement a fait une fausse application du contrat d'assurance et violé l'article II des conditions particulières du contrat relatif au plafond de la garantie, qui fixe un double plafond par période d'assurance - 5 000 000 euros - et pour un certain type de sinistre - en l'espèce les frais de défense et conséquences pécuniaires mis à la charge d'un dirigeant dans le cadre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif- dans la limite de 1 000 000 euros ; qu'elle en déduit qu'au sens de la police d'assurance, le litige, bien que concernant l'insuffisance d'actif de plusieurs sociétés en liquidation d'un même groupe, constitue une action unique, exercée à l'encontre d'un même dirigeant et qu'elle ne peut donc être tenue au-delà d'un montant de 1 000 000 euros ; qu'elle ajoute que le juge de première instance a violé les stipulations relatives à l'épuisement de la garantie en ne tenant pas compte des indemnités déjà versées au titre de la prise en charge des frais de défense de son assuré, et qu'elle est en droit d'opposer au tiers lésé ; que la SELARL ML Conseils, ès qualités, répond d'une part que l'action, qui n'est pas un appel en garantie mais une action directe consacrée à l'article L.124-3 du code des assurances, est recevable car elle puise sa source dans le contrat d'assurance dont la couverture s'étend aux actions en responsabilité pour insuffisance d'actif, et n'est pas fondée, à l'égard de l'assureur, sur l'article L.651-2 du code de commerce ; que d'autre part qu'elle agit dans le cadre des actions en responsabilité pour insuffisance d'actif en qualité de représentant de l'intérêt collectif des créanciers des sociétés, et non pour le compte des sociétés elles-mêmes, et doit dès lors être considérée comme un tiers aux dites sociétés ; que sur le fond, il rappelle que le contrat d'assurance prévoit un plafond de garantie de 1 000 000 euros par action en responsabilité pour insuffisance d'actif, et par période d'assurance, dans la limite d'un plafond global de 5 000 000 euros par période d'assurance et qu'il a initié quatre actions en responsabilité pour insuffisance d'actif pour chacune des sociétés, peu important à cet égard, que le dirigeant de chaque société se trouve être la même personne physique et que les quatre actions aient été jointes en une même instance ; qu'elle ajoute qu'en application de l'article L.124-3 alinéa 2 du code de commerce les sommes qui devraient, selon l'assureur, être déduites du montant de sa condamnation au titre des frais de défense sont insusceptibles de venir grever les sommes pouvant revenir au liquidateur au titre de son action directe, de sorte qu'il convient de condamner la société AIG, assureur, in solidum avec M. F..., son assuré, à la somme totale de 4 000 000 euros ; que contrairement à ce qui est vainement soutenu par la société AIG, il est clair à la lecture de l'assignation qui lui a été délivrée et des écritures de la SELARL ML Conseils, que cette dernière agit, ès qualités de liquidateur judiciaire de chacune des sociétés, représentant de l'intérêt collectif des créanciers aux fins de réparation du préjudice subi par ceux-ci et non pour le compte de celles-ci, à l'encontre de l'assureur ni sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce, ce dernier n'étant pas un dirigeant, ni dans le cadre d'un appel en garantie, cette voie étant fermée tant au dirigeant qu'au liquidateur, mais dans le cadre de l'action directe formée par le tiers lésé ; qu'ainsi l'article L.124-3 du code des assurances prévoit que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable ; que l'assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n'a pas été désintéressé, jusqu'à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l'assuré ; que cette action suppose seulement que le tiers lésé établisse l'existence du contrat d'assurance souscrit et la responsabilité de l'assuré ; que par ailleurs aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au liquidateur judiciaire d'agir dans le cadre d'une action distincte de celle exercée contre le dirigeant sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce ; que l'action directe de la SELARL ML Conseils, ès qualités, est par conséquent recevable ; que l'existence de la police n°7.917.883 "Responsabilité des dirigeants" souscrite à effet du 29 août 2013 par la SAS ACE auprès de la société AIG pour ses dirigeants "passé, présent ou futur" mais également pour tout dirigeant "passé, présent ou futur" de chacune de ses filiales, n'est pas contestée ; qu'aux termes de l'article II des conditions particulières de celle-ci, le plafond de garantie est fixé à 5 000 000 euros par période d'assurance, "Ce plafond est sous-limité à 1 000 000 euros par période d'assurance pour les frais de défense, et/ou les conséquences pécuniaires engagés ou mis à la charge d'un dirigeant de la société souscriptrice dans le cadre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif, y compris tout ou partie des dettes de la société souscriptrice mise à la charge de l'assuré" ; que contrairement là encore à ce qui est allégué par l'assureur, le liquidateur, ès qualités, n'a pas engagé une action en responsabilité pour insuffisance d'actif mais quatre actions distinctes à l'égard de la société ACE et de trois de ses filiales, peu important à cet égard qu'elle les ait regroupées en une seule instance. En outre M. F... ayant commis des fautes de gestion pour chacune des quatre sociétés qu'il dirigeait, comme démontré ci-dessus, il y a bien quatre sinistres résultant que faits dommageables distincts ; que la société AIG est donc tenue au titre du contrat d'une obligation en paiement de 1 000 000 euros pour chacun de ces quatre sinistres ; que l'article 6.1 relatif au plafond des garanties précise d'une part que le montant des garanties s'appliquant aux frais de défense n'est pas sous-limité et fait partie intégrante du plafond des garanties fixé au II des conditions particulières et d'autre part que ce plafond s'épuise par tous règlements faits au titre du présent contrat et/ou de ses extensions selon l'ordre chronologique de leur exigibilité ; qu'en outre, l'article 8 de la police d'assurance stipule notamment que l'assureur avance avant l'issue définitive de la réclamation et dans la limite du montant des garanties disponibles, les frais de défense selon les modalités d'une convention préalable établie entre l'assureur et la société souscriptrice ou les assurés ainsi que les frais annexes ; que l'article L.113-5 du code des assurances, invoqué par la société AIG, dispose que lors de la réalisation du risque ou à l'échéance du contrat, l'assureur doit exécuter dans le délai convenu la prestation déterminée par le contrat et ne peut être tenu au-delà ; qu'il s'en déduit que c'est au moment de la réalisation du risque que l'assureur doit payer l'indemnité dont il est tenu en vertu du contrat, la décision judiciaire condamnant l'assuré à raison de sa responsabilité constituant pour l'assureur qui a garanti cette responsabilité, dans ses rapports avec la victime, la réalisation du risque, tant dans son principe que dans son étendue ; qu'il convient de relever, toutefois, que le paiement allégué d'une avance par la société AIG envers son assuré, en exécution de son obligation de garantie, ne peut être libératoire envers la SELARL ML Conseils, ès qualités, au regard du droit de créance direct dont elle est investie contre cet assureur ; que ce dernier ne peut donc pas lui opposer l'épuisement partiel de la garantie au motif qu'il aurait avancé des frais de défense, dont le paiement au surplus n'est pas établi par les seuls mails produits, en l'absence de production de la convention mentionnée à l'article 8 et de justificatifs de paiement ; que dès lors que c'est demandé, l'assureur doit être tenu in solidum avec l'assuré dans les limites de la somme garantie par le contrat ; qu'il convient, par conséquent, de condamner la société AIG dans les termes du dispositif ci- après ;

1°) ALORS QUE selon l'article 1.1 de la police n° 7.917.883, « le présent contrat a pour objet de prendre en charge en leur lieu et place ou de rembourser aux assurés le règlement des conséquences pécuniaires des sinistres résultant de toute réclamation introduite à leur encontre pendant la période d'assurance ou la période subséquente, mettant enjeu leur responsabilité civile individuelle ou solidaire et imputable à toute faute professionnelle, réelle ou alléguée, commise dans l'exercice de leurs fonctions » ; que l'article II des conditions particulières de la police précise que le plafond des garanties, fixé à 5.000.000 euros par période d'assurance, est « sous-limité à 1.000.000 euros par période d'assurance pour les frais de défense, et/ou les conséquences pécuniaires engagées ou mis à la charge d'un dirigeant de la société souscriptrice dans le cadre d'une action en responsabilité pour insuffisance d'actif, y compris tout ou partie des dettes de la société souscriptrice mise à la charge de l'assuré » ; que l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif caractérise, à l'égard de M. F..., dirigeant assuré, le droit de discuter le bien-fondé des prétentions exprimées par la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Maître G..., ès qualités, dans le cadre d'une même « réclamation » au sens de l'article 1.1 du contrat d'assurance, de sorte que les frais de défense engagés dans le cadre de cette réclamation et les condamnations pécuniaires prononcées par la même décision de justice étaient globalement garantis dans la limite de 1.000.000 euros ; qu'en considérant néanmoins, pour retenir que la société AIG Europe était tenue au titre du contrat d'une obligation en paiement de 1.000.000 euros pour chacun des quatre sinistres, que le liquidateur, ès qualités, n'a pas engagé une action en responsabilité pour insuffisance d'actif mais quatre actions distinctes à l'égard de la société ACE et de trois de ses filiales, peu important à cet égard qu'elle les ait regroupées en une seule instance, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa version applicable à la cause et devenu les articles 1103, 1104 et 1193 du même code ;

2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE si la victime est en droit d'obtenir à l'encontre du responsable une réparation intégrale de son préjudice, elle ne peut, à l'égard de l'assureur du responsable, prétendre qu'à la seule garantie déterminée par le contrat d'assurance ; que l'assureur peut en conséquence opposer au porteur de la police, ou au tiers qui en invoque le bénéfice, les exceptions opposables au souscripteur originaire ; qu'en retenant que le paiement allégué d'une avance par la société AIG Europe envers son assuré, M. F..., en exécution de son obligation de garantie, ne peut être libératoire envers la SELARL ML Conseils, ès qualités, au regard du droit de créance direct dont elle est investie contre cet assureur, qui ne peut lui opposer l'épuisement partiel de la garantie au motif qu'il aurait avancé des frais de défense à l'assuré, la cour d'appel a violé les articles L. 113-5 et L. 112-6 du code des assurances.
Moyens produits au pourvoi n° T 19-17.066 par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour M. F....


PREMIER MOYEN DE CASSATION


IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté les fins de non-recevoir soulevées par M. Q... F... ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de qualité et de droit à agir ; que l'article 123 du même code précisant que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, celles formées par M. F... et la société AIG en cause d'appel sont recevables ; que selon les articles L. 651-3 et L. 653-7 du code de commerce, dans les cas prévus aux articles L. 651-2, L. 653-3 à L. 653-6 et L. 653-8, le tribunal est saisi par le mandataire judiciaire, le liquidateur ou le ministère public ; que les assignations délivrées à M. F... et à la société AIG à comparaître devant le tribunal de commerce de Versailles, au visa des articles L. 651-2 et suivants du code de commerce, l'ont été à la requête de Maître U... G..., mandataire judiciaire, né le [...] au Mans (72), de nationalité française, domicilié [...] , en sa qualité de liquidateur des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS, désigné à ces fonctions par le tribunal de commerce de Versailles le 15 juillet 2014 ; que, contrairement à ce qui est vainement soutenu il en résulte que les actions ont été engagées par le liquidateur judiciaire de chacune des sociétés, organe de la procédure collective régulièrement désigné, et non comme représentant légal de chacune d'entre elles, en sorte que le liquidateur avait qualité et droit à agir ; que la fin de non-recevoir sera donc écartée ;

ALORS QUE lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal est saisi, entre autres, par le liquidateur judiciaire en tant qualité d'organe de la procédure et non en tant que représentant légal de la société débitrice ; qu'en jugeant le contraire pour écarter la fin de non-recevoir élevée par M. F... quand elle constatait que les assignations qui lui avaient été délivrées sur le fondement de l'article L. 651-2 du code de commerce l'avaient été à la requête de Me G..., ès qualités de liquidateur des sociétés ACE SAS, Airwell France SAS, Airwell Industrie France SAS et Wesper Industrie France SAS, la cour d'appel a violé les articles L. 651-1, L. 651-2, L. 651-3, L. 653-3 et L. 653-7 du code de commerce.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné M. F... in solidum avec la société AIG Europe, dans la limite de la somme globale de quatre millions d'euros pour cette dernière, à payer à la Selarl ML Conseils, prise en la personne de Me G..., ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS, la somme de 1,6 million d'euros pour les sociétés ACE, Airwell Industrie et Wesper Industrie et 3,2 millions euros pour la société Airwell France, avec intérêts à compter de l'arrêt ;

AUX MOTIFS, PREMIEREMENT, QUE Sur l'insuffisance d'actif, M. F... critique le défaut de motivation du tribunal quant au montant de l'insuffisance d'actif et à l'aggravation de celui-ci pour chacune des sociétés en lien avec les fautes reprochées dont la preuve n'est pas rapportée par la SELARL ML Conseils, ès qualités ; qu'il expose que pour l'insuffisance d'actif les comptes doivent être arrêtés au jour de l'ouverture de la procédure collective, que le liquidateur judiciaire a pris en compte des créances postérieures alors que seules les créances antérieures et les créances hors dettes intragroupes sont pertinentes, que l'insuffisance d'actif a été ramenée à 38 513 914,52 euros au lieu de 94 000 000 euros, que le liquidateur judiciaire ne produit pas les comptes 2013 et 2014 permettant de déduire quoique ce soit de la gestion du dirigeant sur cette période ; que le liquidateur judiciaire, qui a sollicité une expertise devant le tribunal de commerce de Versailles dans l'affaire l'opposant aux sociétés Dubag et Elco, pour déterminer l'aggravation de l'insuffisance d'actif entre le 31 juillet 2012 et le l' avril 2014 et entre le 11 juin 2013 et le 1er avril 2014, ne prouve pas l' existence d'une aggravation du passif durant son mandat ; que la société AIG prétend également que Me G..., ès qualités, ne caractérise pas, société par société, le quantum du passif qui serait apparu sous la gestion de monsieur F... ; que la SELARL ML Conseils, prise en la personne de Me G..., ès qualités, fait valoir que l'insuffisance d'actif de chacune des sociétés est établi et a été calculé en ne prenant en compte que le passif antérieur à l'ouverture de la procédure collective et définitivement admis, qu'il s'élève à 19 897 420,45 euros pour la société ACE SAS, 38 995 682,94 euros pour la société Airwell France SAS, 17 435 800,30 euros pour la société Airwell Industrie France SAS, et 17 826 080,15 euros pour la société Wesper Industrie France SAS, soit un montant total de plus de 94 millions d' euros dès lors qu'il n'y a pas lieu d'exclure les dettes intra-groupe ; que l'insuffisance d'actif est égale à la différence entre le montant du passif antérieur admis définitivement et le montant de l'actif réalisé de la personne morale débitrice ; qu'elle s'apprécie à la date à laquelle le juge statue ; que l'insuffisance d'actif d'une société qui peut être mise à la charge d'un dirigeant s'apprécie au regard de son actif et de son passif propres sans référence aux comptes consolidés du groupe et sans qu'il y ait lieu d'en exclure les dettes intra-groupe ; qu'en revanche, en l'absence de production des déclarations de créance du CGEA, il convient de déduire du passif retenu par le liquidateur judiciaire les sommes dues au titre du super privilège des salaires, qui peuvent être nées postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, en sorte qu'au vu des pièces produites (comptes-rendus de fin de mission de l'administrateur judiciaire du 29 août 2016, synthèse du passif L.622-24, liste des créances déclarées L.622-24) l'insuffisance d'actif s'élève désormais pour chacune des sociétés à la somme de : *SAS ACE : 19 673 578,95 euros (26 093 540,50 - 223 841,50 - 6 196 120,05), *SAS Airwell France : 38 340 273,95 euros (43 972 148,18 - 655 408,99 - 4.976.465,24), *SAS Airwell Industrie France : 16 284 210,31 euros (19 973 572,87 – 1.151.589,99 - 2 537 772,57), *SAS Wesper Industrie France : 16 643 110 euros (19 828 305,97 – 1 182 969,39 – 2 002 225,82) ; sur la direction des sociétés : qu'aux termes de l'article L.651-1 du code de commerce, les dispositions relatives à la responsabilité pour insuffisance d'actif s'appliquent aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective ; qu'il est établi et non contesté que le 8 juillet 2013 Monsieur F... a été nommé dirigeant de la SAS ACE et de ses filiales et qu'il l'est resté jusqu'à l'ouverture des procédures de liquidation judiciaire ; que les procès-verbaux d'assemblée générale de démission datés du 26 août 2014, invoqués dans ses écritures, ne sont pas produits ; sur les fautes de gestion : que l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 décembre 2016 applicable immédiatement aux procédures collectives et aux instances en responsabilité en cours, dispose notamment que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; qu'en cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables ; que toutefois en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée ; que chaque faute de gestion doit être appréciée au regard de chacune des sociétés et non du groupe ; que néanmoins, l'interdépendance des sociétés, qui résulte de la structure même du groupe et de l'activité de chacune des quatre sociétés, n'est pas contestée ; que sur la poursuite abusive d'une activité déficitaire, les comptes annuels de la société ACE communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 31 932 931 euros au 31 décembre 2011 avaient diminué à 11 879 158 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 12 130 248 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 9 423 126 euros et de 21 197 478 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 9 141 057 euros ; que d'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus à cette date que de 5 993 295 euros pour un résultat déficitaire de 10 173 644 euros ; que ce dernier a relevé que "aucune mesure significative ne semble avoir été prise... il semble que les principales mesures prises pour réduire la perte de trésorerie aient été une diminution des délais de règlement des clients, voire le recours accru à l'affacturage, et une augmentation des délais de règlement des fournisseurs...Les nouveaux actionnaires d'ACE depuis mi-2013 n'ont apporté aucune solution aux difficultés du groupe. Ils ont poursuivi une activité déficitaire sans prendre de mesures de restructuration" ; que les comptes annuels de la société Airwell industrie France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 15 543 861 euros au 31 décembre 2011 avaient diminué à 10 308 607 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 4 579 836 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 25 999 417 euros et de 5 217 170 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 23 685 726 euros ; que d'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus que de 19 781 155 euros pour un résultat déficitaire de 320 560 euros ; que l'administrateur judiciaire a noté que "la perte d'exploitation s'élève donc à plus de 5,4 M euros chaque année sur les deux derniers exercices, pour atteindre 16 M euros sur cinq ans. [...] Les dettes ne sont plus du tout proportionnelles au niveau d'activité ; elles passent de 3 à 7 fois le chiffre d'affaires moyen mensuel, le délai de règlement des fournisseurs étant plus que doublé pour atteindre 152 jours au 31/12/2013" ; que les comptes annuels de la société Airwell France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 2 690 229 euros au 31 décembre 2011 sont devenus négatifs à hauteur de 4 975 489 euros au 31 décembre 2012, que les pertes étaient de 2 309 773 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 135 672 751 euros et de 7 665 718 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires en baisse de 85 154 557 euros ; que d'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus à cette date que de 47 579 216 euros pour un résultat pourtant bénéficiaire de 972 910 euros ; que l'observation relative aux dettes et au délai de règlement des fournisseurs est sensiblement la même que pour les sociétés précédentes ; que les comptes annuels de la société Wesper industrie France communiqués pour l'exercice clos au 31 décembre 2012 montrent que les capitaux propres qui étaient de 1 923 467 euros au 31 décembre 2011 sont devenus négatifs à hauteur de 532 349 euros au 31 décembre 2012, que les bénéfices qui étaient de 835 782 euros au 31 décembre 2011 pour un chiffre d'affaires net de 12 495 657 euros sont devenus des pertes de 2 440 575 euros au 31 décembre 2012 pour un chiffre d'affaires de 12 915 523 euros ; que d'après les soldes intermédiaires de gestion au 31 décembre 2013, joints au bilan économique dressé par l'administrateur judiciaire le 25 avril 2014, le chiffre d'affaires n'était plus que de 7 036 612 euros et les pertes avaient augmenté à 3 392 724 euros ; que ce dernier a relevé que "la perte d'exploitation s'élève donc à presque 3 M euros par an sur les trois derniers exercices, pour atteindre 11 M euros sur cinq ans. [...] Déjà élevées, les dettes fin 2013 ne sont plus du tout proportionnelles au niveau d'activité ; elles passent de 2-3 à 6 fois le chiffre d'affaires moyen mensuel, le délai de règlement des fournisseurs étant plus que doublé pour atteindre 176 jours au 31/12/2013" ; qu'il est également constant que par lettre recommandée avec avis de réception en date du 26 novembre 2013, le cabinet Ernst et Young, commissaire aux comptes de chacune des sociétés, a engagé une procédure d'alerte en sollicitant les explications de M. F... sur les faits qu'il avait relevé susceptibles de compromettre la continuité d'exploitation de celles-ci ; que selon courrier en date du 20 décembre 2013, il a informé le dirigeant que les réponses apportées n'étaient pas de nature à permettre la continuité de l'exploitation et a relevé : un écart important entre la position de trésorerie du groupe telle que reprise par le dirigeant dans sa présentation du 5 décembre 2013 (Financial Forecast 2014 - 7,9 millions d'euros) et celle qu'il avait lui-même observée dans le suivi hebdomadaire préparé en interne (entre 3,5 et 4 millions d'euros) ; des prévisions de revenus en progression en contradiction avec les tendances des années précédentes ; des éléments positifs liés à des opérations envisagées mais non finalisées et l'absence de prise en compte pour le groupe de l'effet négatif en trésorerie, de l'ordre de 2 millions d'euros, concernant la cession envisagée de l'usine de la société Wesper industrie ; que la procédure d'alerte a ainsi été poursuivie après l'assemblée générale du 23 janvier 2014 ; qu'il résulte en outre du rapport dressé le 28 mars 2014 par la société d'expertise comptable Secafi, à la demande de la Délégation unique du personnel (DUP) des sociétés du groupe Airwell, que la trésorerie disponible pour les sociétés françaises était de 7 800 000 euros au 18 juin 2013 et de 2 000 000 euros au 20 février 2014, outre 2 400 000 euros de créances échues, démontrant ainsi une forte dégradation ; qu'il en ressort également que la cession envisagée de la société Airwell Deutschland est contraire à l'intérêt social des sociétés Ace et Airwell France ; que le bilan économique de l'administrateur judiciaire pour la société Ace rappelle également que le mandataire ad hoc a dû mettre en garde le dirigeant contre les projets de cession d'une part de la filiale Airwell Deutschland à sa société mère AC Beitilegungun Gmbh, sans le moindre apport financier, et d'autre part de la société Wesper industrie France à un prix négatif de 1,6 M euros que la société ACE n'avait pas les moyens de payer et à une société récemment créée à l'Île Maurice et dont les actionnaires étaient les consultants allemands mandatés pour trouver un acquéreur ; qu'en outre, le reproche fait par le liquidateur judiciaire et repris par le tribunal selon lequel M. F... aurait dû solliciter une procédure de sauvegarde est justifié par le mandataire ad hoc qui souligne dans son rapport que cette "solution aurait pu être envisagée il y a plusieurs mois" ; qu'il se déduit de ces éléments qu'entre sa nomination et l'ouverture des procédures collectives, M. F... a poursuivi abusivement, pour chacune des sociétés, une activité déficitaire sans que cette faute ne puisse être assimilée à une simple négligence au regard des chiffres repris ci-dessus et des procès-verbaux des assemblées générales extraordinaires, tenues le 23 janvier 2014 pour chacune des sociétés qui concluent que "M. Monsieur Q... F..., [et pour ACE SAS, Monsieur C...] , en sa qualité de représentant de l'associée unique [...] se déclare parfaitement informé des difficultés rencontrées par la Société, mais estime que les mesures proposées sont de nature à envisager le redressement de la Société avec confiance" ; qu'elle a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif et diminué le gage des créanciers pour chacune des quatre sociétés, sans augmentation corrélative de l'actif ; que ni les mesures envisagées ni la désignation d'un mandataire comme en l'espèce n'exonèrent le dirigeant de ses fautes dès lors que les premières, qui n'ont pour l'essentiel pas été prises ou n'ont abouti qu'à rallonger les délais de paiement, étaient à tout le moins très "risquées" et que la seconde ne le privait pas de l'exercice de ses pouvoirs ni ne le dispensait de ses obligations alors au demeurant que celle-ci n'est intervenue que le 6 mars 2014, soit tardivement, et alors que M. F..., nommé depuis plusieurs mois, ne pouvait ignorer la baisse de chiffre d'affaires et l'augmentation des pertes communes aux quatre sociétés ; que dans le rapport dressé le 28 mars 2014, le mandataire ad'hoc relève « Il ressort de ces éléments que, probablement sans être en état de cessation des paiements, le groupe connaît une situation de trésorerie particulièrement tendue puisque sa trésorerie disponible augmentée de ses créances clients (+/- 16Meuros) ne couvre qu'à hauteur de 66% ses dettes à court terme (24Meuros). L'appréciation d'un éventuel état de cessation des paiements supposerait de vérifier la part des dettes fournisseurs qui aurait dépassé le délai de règlement contractuel. Dès le début de sa mission, l'exposant a insisté auprès de ses interlocuteurs sur la fragilité des solutions qu'ils projetaient et sur les risques qu'ils faisaient courir, d'une part aux mandataires sociaux qui les mettraient en oeuvre, d'autre part aux sociétés concernées, tant cédées que cédantes » ; que la faute de gestion est donc caractérisée pour les sociétés ACE, Airwell France, Airwell Industrie France, Wesper Industrie France ;

1°) ALORS QUE lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à la créer, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que M. F... faisait valoir que sa responsabilité dans l'insuffisance d'actifs des sociétés du groupe ACE ne pouvait être établie sans bilans comptables complets et sûrs pour la période de huit mois où il avait exercé les fonctions de dirigeant ; qu'il soulignait que les données comptables fournies aux débats par le liquidateur étaient insuffisantes, comme portant principalement sur la période antérieure à sa prise de fonction et faute de comporter des bilans complets pour les années 2013 et 2014 ; qu'il rappelait à cet égard que la société ML Conseil était elle-même convaincue de l'insuffisance des données comptables en sa possession pour établir la situation financière de la société ACE SAS pendant cette période puisque, dans la procédure qu'elle avait engagée contre les prédécesseurs de M. F..., elle avait sollicité une expertise pour connaître l'aggravation du passif notamment pendant la période de sa gestion ; qu'en retenant pourtant que M. F... avait abusivement poursuivi une activité déficitaire et que le passif s'était aggravé pendant les huit mois de sa présence à la direction du groupe en se tenant pour suffisamment informée sans vérifier si elle disposait d'une comptabilité objectivement établie et complète pour la période litigieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

2°) ALORS QUE lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à la créer, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que la cour d'appel a constaté l'importance des difficultés financières des sociétés du groupe ACE depuis au moins l'année 2011 et retenu que la tendance s'était poursuivie pendant les huit mois pendant lesquels M. F... avait exercé ses fonctions de dirigeant ; qu'en lui imputant à faute l'insuffisance d'actif existant sans vérifier, comme il lui était demandé, si elle n'était pas la seule conséquence des actions antérieures à l'exercice par M. F... de ses fonctions de dirigeant, la cour d'appel, qui a en réalité mis à sa charge une responsabilité en raison de sa seule qualité de dirigeant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

3°) ALORS QUE qu'en reprochant à M. F... d'avoir abusivement poursuivi l'activité déficitaire des sociétés qu'il dirigeait puisque leur situation s'était dégradée entre sa prise de fonction, le 8 juillet 2013, et le dépôt de la requête tendant à la désignation d'un mandataire ad hoc le 6 mars 2014, sans rechercher, comme il lui était demandé, s'il avait eu le temps de commettre de telles fautes de gestion auxquelles aurait été imputable l'insuffisance d'actif quand le fonctionnement des sociétés du groupe était déficitaire depuis plusieurs années et qu'il n'avait pas eu le temps de prendre des mesures de restructuration pour éviter la cessation des paiements fixée au 10 mars 2014, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

4°) ALORS QU'en imputant à faute à M. F... la seule intention de prendre des mesures risquées, puisqu'elle constatait qu'elles n'avaient pas été mises en oeuvre, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé de faute de gestion du dirigeant ayant contribué à l'insuffisance d'actif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

5°) ALORS QU'en imputant à M. F... une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif des sociétés qu'il dirigeait pour ne pas avoir sollicité de procédure de sauvegarde avant la désignation d'un mandataire ad hoc sur le fondement de l'article L. 611-3 du code de commerce le 6 mars 2014, sans expliquer, comme il lui était demandé, en quoi cette mesure aurait été plus efficace que les actions qu'il avait commencé à entreprendre parallèlement sous le contrôle de la procédure d'alerte mise en place dès le mois de novembre 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

6°) ALORS QU'en imputant à M. F... une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif des sociétés qu'il dirigeait au motif que les mesures qu'il avait envisagées étaient risquées, spécialement en ce qui concerne la cession de la filiale Airwell Deutschland au prétexte qu'elle aurait dû être réalisée sans apport financier, sans expliquer d'où elle tirait cette affirmation quand il résultait des conclusions de la société ML Conseil qu'un prix avait été prévu pour cette cession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

7°) ALORS QU'en imputant à M. F... une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif des sociétés qu'il dirigeait au motif qu'il aurait abusivement poursuivi une activité déficitaire, sans rechercher, comme il lui était demandé, s'il n'avait pas utilisé les huit mois pendant lesquels il avait occupé ses fonctions de dirigeant pour décider diverses mesures, hormis les cessions d'actif, ayant pour objet de tenter de redresser l'activité fonctionnant depuis plusieurs années de manière déficitaire, à une époque où elle n'était pas encore en cessation des paiements, ce qui excluait toute passivité ou poursuite abusive de sa part puisque le résultat de ces démarches n'avait pu être atteint en raison de la procédure collective ouverte le 1er avril 2014, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

AUX MOTIFS, DEUXIEMEMENT, QUE Sur l'utilisation de la trésorerie des sociétés : il est établi que par actes sous seing privé en date des : - 22 novembre 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service aux fins notamment de recherches "d'investisseurs potentiels" et "d'organisation de la vente structurée de filiales et/ou d'actifs" avec la société Callista management Gmbh, société de droit allemand, moyennant des tarifs journaliers de 1 200 euros à 2 400 euros selon la qualité du consultant outre des primes de succès et les frais (déplacements, hôtel 4 étoiles) ; que le rapport du mandataire ad'hoc précise que deux mois plus tard, cette mission débouchait sur une offre d'acquisition émanant d'une société Turnaround capital partners, constituée à l'île Maurice, par les associés du cabinet Callista management, postérieurement à la formulation de cette offre, et que ce cabinet aurait facturé, conjointement avec les avocats de la société, la somme de 328 000 euros ; - 17 juin 2013, 9 juillet 2013 et 27 novembre 2013, la société ACE a conclu deux contrats de "consulting" et un amendement avec la société Gramax AG, présidée par M. Q... F..., afin d'être assistée "dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l'entreprise", moyennant un prix de 900 euros puis de 1 450 euros par jour, frais de transport en sus, porté aux termes de l'amendement à 31 900 euros par mois, hors frais, payable d'avance pour vingt-deux jours de travail ouvrés, sans obligation de résultat quantifiable ; que l'amendement précise "Au-delà de ces vingt-deux jours, chaque journée supplémentaire de travail sera facturée 1 450 euros. Dans l'éventualité où le consultant travaillerait moins de vingt jours par mois, aucune compensation n'est prévue sur la rémunération du mois suivant" ; - 9 juillet 2013, 12 et 25 août 2013, 11 et 27 novembre 2013, la société ACE a conclu un contrat de "consulting", suivi de quatre amendements, avec la société The Gap Consultants AG (devenue Gramax Capital AG), dirigée par M. D... C..., afin d'être assistée notamment "dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l'entreprise" et "dans le domaine de l'optimisation des chaînes d'approvisionnement, de la réduction des coûts et de l'optimisation des stocks", moyennant un prix de 900 euros et 800 € par jour, frais de transport en sus, porté aux termes des amendements à 19 800 euros et 17 600 par mois, puis à 26 400 euros pour le premier, hors frais, payable d'avance pour vingt-deux jours de travail ouvrés, sans obligation de résultat quantifiable ; que l'amendement précise "Au-delà de ces vingt-deux jours, chaque journée de supplémentaire de travail sera facturée 900 euros. Dans l'éventualité où le consultant travaillerait moins de vingt jours par mois, aucune compensation n'est prévue sur la rémunération du mois suivant" ; - 1er juillet 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service avec la société [...] afin de "fournir à Airwell les services de gestion et de conseil suivants : assistance dans le repositionnement et la réorganisation d'Airwell, y compris de toutes les filiales,[...] négociations avec l'ancien actionnaire, Elco", moyennant une rémunération mensuelle de 50 000 euros, hors taxes et hors frais ; - 11 juin 2013, la société ACE a conclu un contrat de consulting avec la société [...] afin d'être assistée notamment "dans le domaine de l'optimisation de l'efficacité organisationnelle et afin d'identifier les mesures permettant d'augmenter la valeur de l'entreprise" moyennant une rémunération de 900 euros par jour, hors frais ; - 1er septembre 2013, la société ACE a régularisé un contrat de prestations de service avec la société LLS Management & consulting Gmbh afin d'être assistée dans la "vente des outils de contrôle financiers appropriés, tels que : Assistance dans la réorganisation et la restructuration du client et de toutes ses filiales, [...J, préparation d'un plan de restructuration, [4 recherches de fusions et acquisitions..." , moyennant une rémunération de 2 000 euros par jour, hors frais ; que le rapport Secafi relève que "la trésorerie disponible en juin 2013 était de 7,8 M euros en France et 0,6 M euros en Allemagne alors qu'en février 2014 cette trésorerie n'était plus que de 2Meuros en France avec 2,4 M euros de créances échues [...)Des honoraires significatifs de consultants au bénéfice des actionnaires ont été versés, pour 853 k euros entre juillet 2013 et janvier 2014. D'autre part, des honoraires ont aussi été versés à des conseils pour 328 K euros sur la même période (Callista private equity, Heiss Kursawe Eversheds, Zschunke Ulrich Avocats), ainsi que près de 188 K euros de frais de déplacement et divers sur 2013" ; qu'il est établi par l'extrait du site internet Gramax capital AG que cette société a été créée en 2011 par MM. Q... F... et D... C..., que les sociétés [...] et [...] ont pour actionnaire et dirigeant M. W... I..., tous trois actionnaires directement ou à travers leur société de la société AC Beteiligungen Gmbh, laquelle détenait entièrement la SAS ACE ; que compte tenu du nombre des conventions susvisées, la production d'une facture émise par la société LLS, à hauteur de 44 000 euros pour vingt-deux jours de travail, et de quelques mails ou lettres est très insuffisante à rapporter la preuve qui incombe au dirigeant, dès lors que le liquidateur judiciaire ne peut pas rapporter une preuve négative, de l'existence de réelles prestations dont l'intérêt au demeurant pour les sociétés liquidées n'est pas avéré ; qu'il est ainsi établi que M. F... a utilisé la trésorerie des sociétés ACE et de ses filiales qu'il dirigeait pour favoriser d'autres sociétés dans lesquelles lui-même ou ses associés étaient intéressés au détriment des premières. Le nombre de conventions et les rémunérations fixées démontrent à l'évidence qu'il ne peut s'agir d'une négligence ; que le grief est donc caractérisé ; qu'il a contribué à l'insuffisance d'actif en ce qu'à l'ouverture du redressement judiciaire, les trésoreries étaient asséchées au point d'être absorbées en totalité par le paiement des salaires du mois de mars 2014 ;

8°) ALORS QU'en imputant à M. F... une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif des filiales de la société ACE au prétexte qu'il aurait utilisé leur trésorerie pour favoriser d'autres sociétés dans lesquelles lui-même ou ses associés étaient intéressés, quand il résultait de ses constatations que les dépenses qu'elle visait avaient toutes été exclusivement supportées par la société ACE et non ses filiales, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations pour imputer à M. F... une faute à l'égard des filiales de la société ACE qu'il n'avait pas commise, a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;

9°) ALORS QU'en imputant à M. F... une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif des sociétés ACE et de ses filiales au prétexte inopérant qu'il aurait utilisé leur trésorerie pour régler des sociétés de conseil et ainsi favoriser d'autres sociétés dans lesquelles lui-même ou ses associés étaient intéressés au détriment des premières, sans rechercher, comme il lui était demandé, si ces dépenses étaient effectivement abusives pour avoir été inutiles et si elles n'étaient pas au contraires habituelles dans les circonstances dans lesquelles l'activité déficitaire d'une entreprise impose au dirigeant de rechercher des solutions et non excessives au regard des salaires que les prédécesseurs de M. F... ne s'étaient pas privés de réclamer de même que l'administrateur judiciaire et le cabinet de conseil qu'il s'était adjoint, ce qui rendait indifférente l'identité des prestataires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné M. F... in solidum avec la société AIG Europe, dans la limite de la somme globale de quatre millions d'euros pour cette dernière, à payer à la Selarl ML Conseils, prise en la personne de Me G..., ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés ACE SAS, Airwell industrie France SAS et Wesper industrie France SAS, la somme de 1,6 million d'euros pour les sociétés ACE, Airwell Industrie et Wesper Industrie et 3,2 millions euros pour la société Airwell France, avec intérêts à compter de l'arrêt ;

AUX MOTIFS QUE le nombre de fautes retenues à l'encontre de M. F... ainsi que leur contribution à l'insuffisance d'actif justifient sa condamnation à supporter une partie de l'insuffisance d'actif de chacune des quatre sociétés, étant observé que le principe de proportionnalité ne porte pas sur la proportionnalité de la condamnation au montant du patrimoine du dirigeant mais au nombre de fautes, à leur gravité et au montant de l'insuffisance d'actif qu'elles ont contribué à crée ; que M. F... est âgé de 50 ans ; qu'il a un enfant à charge ; qu'il produit deux avis d'imposition suisses pour 2015 et 2016, lesquels mentionnent notamment qu'il est employé par la société Gramax capital AG, dont il détient des titres, qu'il a des revenus professionnels annuels de 113 960 francs suisses, des revenus mobiliers à hauteur de 100 000 francs suisses et des biens imposables en Suisse d'une valeur dettes déduites de 481 360 francs suisses pour la première année, puis de 150 056 francs suisses et 1 franc suisse ainsi que des biens imposables en Suisse d'une valeur dettes déduites de 436 250 francs suisses pour la seconde ; qu'outre qu'il n'a pas actualisé sa situation, ces éléments sont insuffisants à déterminer la consistance complète de son patrimoine ; que, compte tenu de la durée des mandats exercées par M. F..., du caractère déficitaire ancien des activités des sociétés du groupe Airwell et du fait que le groupe a connu plusieurs dirigeants entre 2007 et 2014, il convient de condamner M. F... à supporter une partie de l'insuffisance d'actif à hauteur de 1 600 000 euros pour chacune des SAS ACE, Airwell Industrie France et Wesper Industrie France et de 3 200 000 euros pour la SAS Airwell France ;

ALORS QUE le juge doit motiver sa décision ; que la cour d'appel a relevé que M. F... établissait ses revenus annuels et professionnels ainsi que la valeur de ses biens imposables en Suisse mais affirmé que la consistance de son patrimoine serait incomplètement établie, retenant ainsi que M. F... disposerait d'autres biens sans viser le moindre élément de preuve pour étayer cette affirmation ; qu'en motivant sa décision par simple affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile et 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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