16 février 2021
Cour d'appel de Paris
RG n° 19/12277

Pôle 4 - Chambre 8

Texte de la décision

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 16 FÉVRIER 2021



(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/12277 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAEVE



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/00642





APPELANTE



Association ASSOCIATION D'AIDE AUX MAITRES D'OUVRAGE INDIVIDUE LS (AAMOI)

N° SIRET : 483 320 362 00047

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Olivier FALGA de la SELARL FALGA-VENNETIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0251





INTIMÉES



SAS SOGEREP COURTAG

N° SIRET : 334 129 285 00030

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Rébecca ROYER, avocat au barreau de PARIS



SA AXA FRANCE IARD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 722 057 460 01971

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assistée par Me Virginie POURTIER subsituée par Me Pauline RABOTTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : G262, avocat plaidant



SAS MAISONS PIERRE prise en la personne de son Président domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 487 514 267 00029

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée par Me Michaël PIQUET-FRAYSSE de LEXINGTON avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : B485







PARTIE INTERVENANTE



Association AAMOI

[Adresse 2]

[Localité 7]



Représentée par Me Rébecca ROYER, avocat au barreau de PARIS





COMPOSITION DE LA COUR :



L'affaire a été débattue le 08 décembre 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :



Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre

M. Christian BYK, Conseiller

M. Julien SENEL, Conseiller



qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Julien SENEL dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.





Greffier :

- lors des débats : Mme Cynthia GESTY

- lors du délibéré : Mme Jo'lle COULMANCE



ARRÊT : contradictoire



- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.



- signé par Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre et par Mme Joëlle COULMANCE, Greffière présente lors du prononcé.




*****



EXPOSE DU LITIGE



L'Association d'Aide aux Maîtres d'Ouvrage Individuels (AAMOI) est une association à but non lucratif dont la constitution a été déclarée à la sous-préfecture d'[Localité 9] le 28 mai 2000, ayant pour objet aux termes de ses derniers statuts en date du 24 janvier 2001, notamment :

- d'assurer, du point de vue matériel et moral, la défense et la représentation des intérêts généraux de toutes les familles quelle que soit leur situation juridique et sociale ou leur nationalité, en particulier en leurs qualités de consommateurs, en tant que maître d'ouvrage, vis à vis des constructeurs de maisons individuelles avec fourniture de plan,

- de veiller, par tous moyens légitimes et légaux, y compris par voie de presse, d'édition et de formation, et d'une façon générale en utilisant tout support de l'information, quelle que soit sa nature, au maintien et au respect des règlements et lois en vigueur dans le domaine de la construction de maison individuelle.



Agréée par arrêté préfectoral du 06 janvier 2006, du Préfet de l'Essonne, ' pour exercer l'action civile dans le cadre des dispositions du livre IV (partie législative) du Code de la Consommation', pour une période de cinq ans, elle a obtenu le renouvellement de cet agrément d'abord par arrêté préfectoral du 07 décembre 2010, puis tacitement à la suite d'une demande de renouvellement déposée le 29 mai 2015; par arrêté préfectoral prononcé le 24 avril 2018 et publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Essonne du 25 avril 2018, cet agrément a été 'retiré'.



Par jugement du 02 décembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté le recours formé par l'AAMOI à l'encontre de cet arrêté préfectoral portant retrait de l'agrément précédemment accordé. L'AAMOI a interjeté appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Versailles.



La SAS Maisons Pierre est une société spécialisée dans le secteur de la construction de maison individuelle. Elle est assurée par l'intermédiaire de la société SOGEREP COURTAGE auprès de la société AXA FRANCE IARD selon contrat 'CMI Package' n°37503 67 94 61 887 à effet du 1er janvier 1997 comportant des garanties de responsabilité civile exploitation et professionnelle. Des garanties complémentaires pour les dommages résultant du risque d'effondrement avant réception et du risque de bon fonctionnement (article 1792-3 du code civil) sont par ailleurs accordées pour le métier de constructeur de maisons individuelles. Il est enfin stipulé que dans le cadre du contrat, une garantie 'Dommages Ouvrage' répondant à l'obligation d'assurance instituée par l'article L 242-1 du code des assurance doit être souscrite et que pour chaque maison, la prise d'effet de cette garantie est subordonnée au paiement, par la société Maisons Pierre, 'de la prime due par maison', l'effectivité de la garantie étant 'concrétisée par l'émission d'une attestation d'assurance 'Dommages Ouvrage' nominative'.



Un litige est né entre l'AAMOI d'une part, et les sociétés Maisons Pierre et son courtier SOGEREP COURTAGE d'autre part, au sujet du coût de l'assurance dommages-ouvrage et des commissions perçues par le courtier, litige matérialisé par :

- l'envoi le 24 novembre 2016 d'une mise en demeure adressée par l'AAMOI à la société SOGEREP COURTAGE de lui faire connaître dans un délai de 15 jours qui était le destinataire des sommes facturées au titre de 'franchise fixe' telle qu'elle ressort du document joint émis par SOGEREP COURTAGE et signé de son président, se réservant le droit à défaut de réponse de poursuivre la société SOGEREP COURTAGE et son président devant les tribunaux civils, et les juridictions répressives pour abus de confiance et pour le moins pour recel de ce délit ;

- le courrier adressé en réponse par la société SOGEREP COURTAGE à la présidente de l'AAMOI, qui a refusé d'y donner suite en arguant du fait que le courrier dont excipait l'AAMOI était adressé à son client dans le cadre de leurs relations commerciales, et sorti de son contexte.



C'est dans ces circonstances que l'AAMOI a, par actes d'huissier de justice signifiés les 30 décembre 2016, 03 janvier 2017 et 09 janvier 2017, assigné les sociétés SOGEREP COURTAGE, AXA FRANCE IARD, et Maisons Pierre, devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de les condamner, sous astreinte, à cesser d'appliquer aux consommateurs une franchise en matière d'assurance dommages-ouvrage, de publications judiciaires, sous astreintes, sur plusieurs sites internet et par voie de presse dans un magazine de défense des consommateurs, d'envoi du jugement par la société AXA FRANCE IARD aux consommateurs qui ont souscrit un contrat d'assurance dommages-ouvrage auprès de cette société, via la société Maisons Pierre, pendant les cinq dernières années, et de condamnation in solidum à verser la somme de 300 000 euros en réparation du préjudice collectif des consommateurs outre une condamnation à payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens de l'instance.



Par ordonnance rendue le 06 février 2018, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a notamment, au visa des articles 122 et 771 du code de procédure civile :

- déclaré irrecevable devant le juge de la mise en état l'ensemble des demandes formées par la SA AXA FRANCE IARD et la SAS MAISONS PIERRE aux fins de questions prejudicielles devant le tribunal administratif de Versailles sur la question de la validité du renouvellement de l'agrément administratif en qualité de défense agréée des intérêts des consommateurs dont bénéficie l'AAMOI ;

- déclaré en conséquence irrecevable les demande de sursis à statuer subséquemment formées par la SA AXA FRANCE IARD et la SAS MAISONS PIERRE ;

- rejeté l'exception d'incompétence d'attribution des juridictions de l'ordre judiciaire formée par la SAS SOGEREP COURTAGE ;

- débouté l'association AAMOI de sa demande de provisionnement de dommages-intérêts pour procédure abusive;

- condamné la SAS SOGEREP COURTAGE, la SA AXA FRANCE IARD et la SAS MAISONS PIERRE à payer chacune une indemnité de 500 euros au profit de l'association AAMOI, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de cette procédure d'incident.



Par jugement du 14 mai 2019, ledit tribunal a :

- déclaré irrecevable, faute de qualité pour agir, l'ensemble des demandes principales formées par l'association AAMOI à l'encontre de la SAS SOGEREP COURTAGE, de la SA AXA FRANCE IARD et de la SAS Maisons Pierre aux fins de cessation sous astreinte de pratiques arguées d'illicéité, de publication sous astreinte par la voie électronique et par voie de presse du jugement à intervenir, de diffusion sous astreinte du jugement à intervenir auprès des clients de la société AXA et de réparation du préjudice occasionné à l'intérêt collectif des consommateurs,

- condamné l'association AAMOI à payer au profit des sociétés SOGEREP COURTAGE, AXA FRANCE IARD et Maisons Pierre une indemnité de 2 500 euros chacune, en dédommagement de leurs frais irrépétibles prévus à l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné l'association AAMOI aux entiers dépens de l'instance.



Par déclaration du 17 juin 2019, enregistrée au greffe le 10 juillet 2019, l'AAMOI a interjeté appel du jugement du tribunal de grande instance de Paris.



Par ordonnance du 03 février 2020, le magistrat en charge de la mise en état a :

- rejeté toutes les demandes présentées en nullité de la déclaration d'appel du 17 juin 2019, N° 19/14220 effectuée au nom de l'association AAMOI,

- rejeté toutes les autres demandes présentées par les parties à la procédure tant en dommages-intérêts pour procédure abusive qu'en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- renvoyé l'affaire à la mise en état du 23 mars 2020 pour fixation,

- réservé les dépens.



Aux termes de ses dernières conclusions (n°3) transmises par voie électronique le 11 novembre 2020, l'AAMOI demande à la cour, infirmant le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, de :

- déclarer recevable son action et ses demandes,

- condamner la société Maisons Pierre à cesser de facturer à ses clients des sommes étrangères au coût de l'assurance dommages-ouvrage et à la commission du courtier,

- condamner la société SOGEREP COURTAGE à cesser de percevoir toute somme étrangère au coût de l'assurance dommages-ouvrage et à sa commission, telle que la franchise qu'elle a attesté facturer à la société Maisons Pierre au titre de cette police,

- condamner la société AXA FRANCE IARD à cesser d'émettre des polices d'assurances sans précision du montant de la cotisation d'assurance dommages-ouvrage,

- assortir ces condamnations d'une astreinte de 7 500 euros par infraction constatée,

- ordonner la publication du jugement par voie électronique, pendant deux mois :

. sur la page d'accueil du site de la société Maisons Pierre : http://www.maisons-pierre.com/ - éditeur SAS Maisons Pierre ' directeur de la publication Alexandre Sion ' Hébergeur OVH

. sur la page d'accueil du site de la société SOGEREP COURTAGE : http://www.sogerepcourtage.fr/index1.html - directeur de la publication Claude Royer ' Hebergeur Seevia Consulting,

. sur la page relative à l'assurance construction de la société AXA : https://entreprise.axa.fr/urgence-sinistre/local/malfacon-construction.html#panel1 ' éditeur GIE AXA Nanterre (RCS Nanterre 382 717 791) ' directeur de la publication [T] [W] ' Hébergeur GIE AXA Technology Services France (RCS Paris 351 151 196),

- ordonner la publication du jugement par voie de presse dans les magazines UFC QUE CHOISIR et FAIRE CONSTRUIRE SA MAISON, à charge des défenderesses (maximum 7 500 euros par insertion),

- ordonner l'envoi du 'jugement' par la société AXA FRANCE IARD aux maîtres de l'ouvrage qui ont souscrit un contrat d'assurance dommages-ouvrage auprès de cette société, via la société MAISONS PIERRE, pendant les 5 dernières années,

- assortir ces trois condamnations de communication d'une astreinte de 1 000 euros par jour de retard suivant un délai de 30 jours courant à compter de la signification du 'jugement',

- condamner les sociétés Maisons Pierre, SOGEREP COURTAGE et AXA FRANCE IARD, in solidum, à lui payer les sommes suivantes :

. 300 000 euros en réparation du préjudice collectif des maîtres de l'ouvrage consommateurs,

. 15 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

ainsi qu' à prendre en charge les dépens de première instance et d'appel,

- rejeter toute demande adverses.



Aux termes de ses dernières conclusions (n°2) transmises par voie électronique le 10 juin 2020, la société Maisons Pierre demande à la cour au visa des articles 31 et 564 du code de procédure civile, L 621-1 et suivants, R 811-7 du code de la consommation, L 240-1 du code des relations entre le public et l'administration, et L 4 du code de la justice administrative, de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré l'AAMOI irrecevable en son action pour défaut de qualité à agir sur le fondement des dispositions dérogatoires du code de la consommation réservées aux associations de consommateurs agréées ;

- et en tout état de cause :

. déclarer l'AAMOI irrecevable en son action pour défaut d'intérêt à agir relativement à la restriction géographique de ses statuts ;

. déclarer irrecevables les prétentions nouvellement formulées par l'AAMOI en cause d'appel sur le fondement du droit commun ;

- à titre subsidiaire, juger l'ensemble des demandes de l'AAMOI mal fondées et l'en débouter ;

- en tout état de cause, condamner l'AAMOI à lui verser les sommes suivantes :

. 10 000 euros en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,

. 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre, en cause d'appel les dépens dont distraction.



Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 16 décembre 2019, la société AXA FRANCE IARD demande à la cour au visa des articles 9, 31 et 564 du code de procédure civile, L 621-1 et suivants, R 811-7 du code de la consommation, L 240-1 du code des relations entre le public et l'administration, L 242-1 du code des assurances, jugeant que l'AAMOI ne dispose plus de l'agrément administratif indispensable à sa qualité à agir en justice, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en son action pour défaut de qualité à agir,

Y ajoutant, :

- juger que les prétentions formulées par l'AAMOI en cause d'appel sont nouvelles, et ses demandes irrecevables,

À titre subsidiaire,

- juger qu'AXA FRANCE n'a commis aucun agissement illicite dès lors qu'elle n'a pas perçu de franchise au titre de la garantie dommages-ouvrage souscrite par les maîtres d'ouvrage MAISONS PIERRE,

- juger qu'elle n'a commis aucun agissement illicite dès lors qu'elle remplit parfaitement ses obligations, l'attestation d'assurance dommages ouvrage n'ayant pas à mentionner le montant de la prime payée par les maîtres d'ouvrage,

En conséquence,

- débouter l'AAMOI de l'ensemble de ses demandes formulées à son égard ;

En tout état de cause,

- débouter l'AAMOI de ses demandes accessoires,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'AAMOI à lui payer 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance,

Y ajoutant,

- condamner l'AAMOI au paiement d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens d'appel.



Aux termes de ses dernières écritures (n°2) transmises par voie électronique le 03 novembre 2020, la SOGEREP COURTAGE demande à la cour au visa notamment des articles 1353 et suivants, 1792 et suivant du code civil ; L 242-2 du code des assurances ; L 411-2, R 411-1, L 421-1, L 621-1, L 811-1, R 811-2, R 811-7 du code de la consommation ; L 240-1, L 241-2 du code des relations entre le public et l'administration ; de l' arrêté du 21 juin 1988 et de l'arrêté préfectoral du 24 avril 2018 ; des articles 31, 32, 122, 125, 126, 567, 700 du code de procédure civile, et L 4 du code de la justice administrative, 'sous le bénéfice de l'exécution provisoire', de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré l'AAMOI irrecevable pour défaut de qualité à agir sur le fondement des dispositions dérogatoires du code de la consommation, et en tout état de cause, sur le fondement du droit commun ;

En conséquence,

- constater que l'AAMOI ne dispose pas de l'agrément indispensable à sa qualité à agir en justice aux jours des présentes ; que l'AAMOI ne disposait pas de l'agrément indispensable à sa qualité à agir en justice aux jours des présentes et qu'elle ne disposait pas de cet agrément au moment de l'introduction de l'instance ;

- juger que l'AAMOI n'a pas la qualité pour agir en justice à des fins de défense des intérêts des consommateurs ; que sa demande est irrecevable en ce que la qualité à agir et l'intérêt à agir de ladite association font incontestablement défaut ;

- déclarer irrecevables les nouvelles demandes de l'AAMOI présentées pour la première fois en appel sur le fondement du droit commun ;

à titre subsidiaire, débouter l'association AAMOI de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner l'association AAMOI à lui payer les sommes suivantes :

. 10 000 euros pour procédure abusive en application de l'article 32-1 du code de procédure civile ;

. 12 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.



La clôture est intervenue le 16 novembre 2020.



Il est expressément renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux conclusions ainsi visées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.




MOTIFS DE LA DÉCISION



Il convient de rappeler que les demandes de 'dire et juger' et de 'constater' ne saisissent pas la cour de prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile.



Les sociétés Maisons Pierre, AXA FRANCE IARD et SOGEREP COURTAGE sollicitent la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré l'AAMOI irrecevable en son action pour défaut de qualité à agir sur le fondement dérogatoire du code de la consommation, la société SOGEREP ajoutant que l'association est, compte tenu du retrait de son agrément, également dépourvue d'intérêt à agir.

La société Maisons Pierre soulève par ailleurs l'irrecevabilité de l'action de l'AAMOI au regard de la compétence territoriale de l'association, limitée au département de l'ESSONNE.

Les intimées soulèvent enfin l'irrecevabilité des prétentions de l'AAMOI comme nouvelles, parce que fondées pour la première fois en cause d'appel, sur le fondement du droit commun, ce qui change l'objet du litige, outre le changement de qualité de l'association.





L'AAMOI réplique en substance que son action est recevable au visa des articles L 621-1, L 621-2 et L 621-7 du code de la consommation et du principe supérieur du droit qu'est le principe de sécurité juridique, qui interdit d'appliquer rétroactivement à une association de défense des consommateurs le retrait de son agrément, sauf à la priver de l'exercice effectif de son droit d'agir en justice, principe dont les articles L 242-1 et L 243-3 du code des relations entre le public et l'administration, en admettant qu'il s'applique au litige, ne sont que l'illustration.



Elle expose que son agrément a été reconduit de manière tacite en 2015, comme en atteste la décision de retrait du Préfet, que le retrait de son agrément tacite ne doit pas s'entendre comme un retrait au sens usuel du droit administratif, le droit de la consommation étant un droit dérogatoire et qu'au demeurant, ce retrait n'est pas définitif, compte tenu de l'appel en cours à l'encontre le jugement du tribunal administratif de Versailles ayant rejeté son recours contre la décision préfectoral de retrait, s'agissant en toute hypothèse d'une décision provisoire.



Elle ajoute que son champ d'action ne saurait être limité géographiquement, quel que soit le fondement de son action.



Si elle reconnaît agir sur un fondement nouveau en cause d'appel, à savoir celui du droit commun, elle soutient que ses prétentions sont toujours les mêmes et que le retrait de son agrément est en tout état de cause inopérant dès lors qu'elle défend indifféremment les consommateurs et les maîtres d'ouvrages, qui ont la même qualité, conformément à l'objet de ses statuts.



Sur le fond, l'AAMOI soutient que son action aux fins de cessation de pratiques qu'elle estime illicites et abusives et les demandes de publication ainsi que de réparation du préjudice collectif des maîtres de l'ouvrage, par ailleurs consommateurs, qui en résultent, sont fondées, tandis que les intimées contestent le bien fondé de l'ensemble des demandes de l'AAMOI.



Sur la recevabilité à agir de l'AAMOI dans le cadre de la demande principale, fondée sur les dispositions du code de la consommation



Vu, notamment :

- les articles 31, 32 et 122 du code de procédure civile ;

- les articles L 621-1, L 621-2, L 621-7, L 811-1, L 811-2 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, à savoir compte tenu de la date de délivrance de la première de chacune des assignations introductives d'instance (30 décembre 2016, 03 et 09 janvier 2017), celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 relative à la partie législative nouvelle du code de la consommation, entrée en vigueur le 1er juillet 2016 ;

- l'article R 811-2 alinéas 2 et 4 du code de la consommation, résultant du décret n°2016-884 du 29 juin 2016 ;

- les articles L 240-1, L 241-2 et L 242-1 du code des relations entre le public et l'administration, (précision faite que, si ce code est applicable depuis le 1er janvier 2016, les dispositions relatives au retrait ne sont applicables qu'aux actes administratifs édictés depuis le 1er juin 2016), et l'article L 4 du code de la justice administrative ;



Sur ce,



L'existence du droit d'agir en justice s'apprécie à la date de la demande introductive d'instance et ne peut être remise en cause par l'effet de circonstances postérieures, sans qu'il y ait lieu de distinguer la qualité de l'intérêt à agir. Il est ainsi possible d'avoir perdu la qualité en laquelle une demande en justice a été introduite devant le juge civil tout en conservant un intérêt à la solution du litige, au sens des articles 31 et 32 du code de procédure civile, de sorte que l'appréciation de l'intérêt et par suite de la qualité à agir ne peut dépendre de circonstances postérieures.



En l'espèce, c'est par une exacte appréciation des faits et des règles applicables que les premiers juges ont estimé qu'à la date de délivrance du premier acte d'huissier constitutif de l'introduction de l'instance, l'association AAMOI était dépourvue de qualité à agir au nom de l'intérêt collectif des consommateurs alors que toutes ses demandes principales formées à l'encontre des sociétés SOGEREP, AXA et Maisons Pierre l'étaient en allégation de cette même qualité de défense des intérêts collectifs des consommateurs et que la décision administrative de retrait d'agrément du 24 avril 2018 avec effet rétroactif à compter du 8 décembre 2015 était toujours en vigueur.



En effet, comme l'a relevé le tribunal, il est incontestable que, d'une part, l'ensemble des demandes formées devant lui à titre principal par l'association AAMOI à l'encontre des sociétés SOGEREP, AXA et Maisons Pierre reposait sur les seules allégations de situations de méconnaissances de l'intérêt collectif des consommateurs à l'occasion de l'offre litigieuse de contrat tripartite, et d'autre part, qu'une association de défense des intérêts des consommateurs ne peut agir en justice au titre de l'intérêt collectif des consommateurs et en réparation des préjudices directs et indirects occasionnés à celui-ci qu'en vertu d'un agrément administratif régulièrement accordé par l'autorité publique compétente dans le strict respect du cadre prévu par la loi et le règlement, en application par ailleurs du principe suivant lequel 'nul ne plaide par procureur'.



Comme rappelé ci-dessus, l'AAMOI s'est vu attribuer un agrément par arrêté du préfet de l'Essonne du 06 janvier 2006 'pour exercer l'action civile dans le cadre des dispositions du livre IV (partie législative) du Code de la Consommation', pour une période de cinq ans, agrément renouvelé d'abord par arrêté préfectoral du 07 décembre 2010, puis tacitement au 08 décembre 2015, à la suite d'une demande de renouvellement déposée le 29 mai 2015, à laquelle la direction départementale de la protection des populations de l'Essonnes avait répondu le 08 juin 2015 dans un courrier valant récépissé et faisant courir le délai de six mois pour la notification d'un agrément ou d'un refus, en l'absence de réponse au terme de ce délai.



Il est vain pour la société SOGEREP de soulever l'illicéité de ce renouvellement tacite, auquel se réfère expressément l'arrêté de retrait préfectoral, du 24 avril 2018, dont la force exécutoire ne permet pas davantage en cause d'appel qu'en première instance, de remettre en cause la reconnaissance du principe de ce renouvellement tacite d'agrément à compter du 08 décembre 2015, visé dans le premier 'considérant' de cet arrêté.



En outre, si dans des cas bien précis, le tribunal des conflits a donné au juge judiciaire la possibilité d'apprécier la légalité d'un acte administratif, cette prérogative ne peut être exercée que lorsqu'il apparaît manifestement, au vu d'une jurisprudence établie, que la contestation peut être accueillie par le juge saisi au principal, donc lorsque l'illégalité est manifeste au vu d'une jurisprudence administrative constante, ainsi que lorsque l'application de cet acte administratif n'est pas conforme au droit de l'Union européenne, outre la possibilité accordée au juge pénal dans le cadre de l'article 111-5 du code pénal. Or, aucun des arguments développés par la société SOGEREP ne permet d'user de cette prérogative.



Il n'y a donc pas lieu d'examiner le moyen d'irrecevabilité de la demande de l'AAMOI soulevé par la SOGEREP tiré de l'absence d'agrément tacitement renouvelé, au motif de manquements relatifs à l'obligation de publication de l'agrément tacite (articles R 411-2, R 811-2 et L 811-1 du code de la consommation), d'un défaut d'avis du ministère public (article L 811-1 alinéa 1 du code de la consommation), du dépôt tardif de la demande de renouvellement de l'agrément (article 3 de l'arrêté du 21 juin 1988), des modifications statutaires effectuées postérieurement au renouvellement tacite de l'agrément (article 1 de l'arrêté du 21 juin 1988) ainsi que de l'absence des conditions de fond nécessaires au renouvellement de l'agrément (article R 411-1 du code de la consommation, en vigueur au moment du renouvellement).







Le juge judiciaire étant en revanche compétent pour apprécier l'existence d'un acte administratif, le renouvellement tacite de cet agrément est, compte tenu de ces éléments, pleinement caractérisé.



Il est ensuite établi que cet agrément, après avoir été renouvelé tacitement, a fait l'objet d'un retrait par arrêté préfectoral prononcé le 24 avril 2018 et publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Essonne du 25 avril 2018.



L'AAMOI prétend que ce retrait n'a aucun effet rétroactif parce qu'il a été prononcé en application des dispositions spécifiques relatives au retrait d'agrément des associations de consommateurs, édictées à l'article R 811-7 du code de la consommation, code qui est le seul visé dans l'arrêté préfectoral en question, au contraire du code des relations entre le public et l'administration, dont aucune disposition n'est visée dans cet arrêté, et qui prévoit expressément cette possibilité dérogatoire, dont le Préfet a manifestement entendu faire usage non seulement en visant ces dispositions dans son arrêté mais aussi en usant de ce pouvoir vingt-huit mois après le renouvellement de l'agrément, ce qui n'aurait pas été possible dans le cadre d'un retrait prévu par le code des relations entre le public et l'administration, qui dispose que le retrait doit se faire 'dans le délai de quatre mois suivant son édition'; or, ces dispositions dérogent au caractère rétroactif d'un retrait d'acte administratif, prévu dans le code des relations entre le public et l'administration, en ce qu'elles visent simplement à sanctionner des conditions de validité de l'agrément ayant disparu en cours de vie de l'association et ne confèrent pas d'effet rétroactif au retrait ainsi décidé, qui doit à défaut être requalifié, en application de l'article 12 du code de procédure civile, en 'abrogation', ou à tout le moins en 'retrait sui generis', compte tenu de son caractère équivoque et de la tardiveté de l'arrêté et plus largement des circonstances de ce retrait.

Les intimées estiment que cet arrêté portant retrait est une décision administrative tendant sans équivoque à considérer que l'acte litigieux n'a en réalité jamais existé, conformément au principe général du droit administratif codifié par l'ordonnance du 23 octobre 2015 à l'article L 240-1, 2° du code des relations entre le public et l'administration.



Il est exact qu'au terme de l'article R 811-7 du code de la consommation, l'agrément peut être retiré après avis du procureur général, lorsque l'association n'a plus le nombre d'adhérents requis pour son agrément, lorsqu'elle ne peut plus justifier de l'activité définie à l'article R 811-1 ou lorsqu'il est établi qu'elle n'est plus indépendante de toutes formes d'activités professionnelles, à l'exception des associations émanant de sociétés coopératives mentionnées à l'article L 811-2 de ce même code.



Si ces dispositions ne prévoient pas de délai pour l'exercice de ces prérogatives, dérogeant ainsi au régime du retrait du code des relations entre le public et l'administration, comme celui-ci l'envisage expressément en son article L 241-1, la cour ne peut suivre l'AAMOI lorsqu'elle en déduit que le retrait tel que prévu par le code de la consommation ne peut avoir l'effet rétroactif attaché au retrait tel que défini par le droit administratif général, dès lors, d'une part, qu'il viserait uniquement à constater que l'un des éléments nécessaires à la validité de l'acte a disparu, et que d'autre part, son analyse serait corroborée par le fait que le retrait est intervenu vingt-huit mois après la décision de renouvellement, au visa du seul code de la consommation, donc bien au-delà du délai de quatre mois prévu pour le retrait usuel, s'agissant-là de simples hypothèses, sur lesquelles la cour ne peut étayer sa motivation.



Si l'article 12 du code de procédure civile fait devoir au juge de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, la cour doit veiller à ne pas excéder les pouvoirs qu'elle tient de ce texte.



En effet, la loi des 16-24 août 1790 sur la séparation des autorités administratives et judiciaires interdit à ces dernières 'de troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs' et si le tribunal des conflits autorise le juge judiciaire depuis l'arrêt Septfonds, (16 juin 1923) à interpréter les actes administratifs à caractère réglementaire, il réserve toujours au juge administratif l'interprétation des actes non réglementaires, exception faite du pouvoir d'interprétation dont dispose la juridiction pénale lorsque de cet examen, dépend la solution du procès pénal qui lui est soumis, en application des dispositions de l'article 111-5 du code pénal.



La cour considère dés lors, comme le tribunal, que l'arrêté litigieux procède explicitement d'une décision de retrait et non d'abrogation, au sens usuel du droit administratif, en ce qu'il édicte que l'agrément 'est retiré' et non 'abrogé', la cour observant que l'objet de l'arrêté en question est également dénué de toute ambiguïté, s'agissant de porter 'retrait de l'agrément départemental de l'AAMOI', et que la requalication sollicitée par l'AAMOI s'analyse en réalité en une interprétation d'un acte administratif individuel, qui ne ressort pas de ses prérogatives.



Au demeurant, comme le soutient l'AAMOI, la cour observe qu'aucune conséquence quant aux effets juridiques du retrait litigieux ne saurait être tirée du fait que la DDPP a assorti son avis pour le renouvellement de l'agrément départemental de l'association, concernant l'indépendance de cette association de toutes formes d'activités professionnelles au sens de l'article L 811-2 du code de la consommation (ancien L 412-1), dès le 12 octobre 2015, à la suite de plusieurs plaintes de professionnels, après avoir réexaminé la situation de l'association. Le moyen développé par la société Maisons Pierre à ce sujet était ainsi inopérant.



La cour observe en outre, sans pouvoir se prononcer sur le contenu de cet arrêté, que, contrairement à ce que soutient l'AAMOI, le retrait litigieux ne vient pas uniquement sanctionner la perte 'd'une condition en cours de validité'. En effet, il est reproché à l'AAMOI plusieurs éléments, et plus particulièrement de :

- ne pas avoir justifié qu'elle réunit un nombre d'adhérents suffisants domiciliés en Essonne et à jour de cotisation,

- d'exercer son activité réelle non pas en Essonne, mais en Ille et Vilaine, au domicile de Monsieur [S] [I],

- de montrer des liens très forts avec le cabinet d'avocats Falga-Vennetier, spécialisé dans le droit de la construction de maisons individuelles et des assurances construction dans lequel Mme [O] [I], la fille de M. [I], est associé,

- ceci alors même que M. [S] [I], présenté comme président d'honneur de l'AAMOI, y exerce un rôle décisionnaire et peut être qualifié de président de fait.



Compte tenu de ces éléments, l'analyse du moyen développé par AXA au visa de l'article L 241-2 du code des relations entre le public et l'administration, concernant la possibilité pour l'administration de retirer un acte obtenu par fraude sans limitation de délai, et ainsi d'obtenir 'sa disparition juridique pour l'avenir comme pour le passé', est sans objet.



L'agrément était ainsi valide pour avoir été accordé tacitement le 8 décembre 2015, et il n'a été retiré que le 24 avril 2018, avec une date de prise d'effet qu'il convient désormais d'analyser dès lors qu'elle est contestée.



Contrairement à ce que soutient l'AAMOI, au moyen d'une lecture strictement littérale de l'arrêté, le fait que la décision administrative précise en son article 1 que l'agrément 'est retiré à compter de la notification du présent arrêté à l'intéressé' ne signifie pas que cet arrêté n'aurait d'effet qu'à compter de sa notification, aux motifs notamment que le Préfet aurait pris soin, selon elle, de préserver la sécurité juridique liée à l'objet de ses statuts, à savoir la protection des consommateurs, sans quoi le Préfet se serait contenté de laisser les dispositions de l'article R 421-1 du code de la justice administrative, relatives à l'opposabilité des décisions administratives, s'appliquer de plein droit.



En effet, non seulement ici encore la cour ne peut faire droit à une prétention reposant sur une simple hypothèse, mais comme l'a encore exactement relevé le tribunal, l'emploi de cette formule ne constitue qu'un dispositif d'opposabilité à la personne intéressée et non d'effectivité de la mesure elle-même, l'arrêté ne comportant d'ailleurs aucune motivation de préservation de sécurité juridique susceptible de qualifier cette mesure comme étant en réalité de simple abrogation pour le seul avenir et non de retrait de nature dès lors rétroactive.



Comme l'objecte à juste titre la société Maisons Pierre, la date du retrait a pour seul intérêt de faire courir le délai de recours, rappelé immédiatement après, à l'article 2 de l'arrêté tandis que les effets du retrait ne sont nullement abordés par l'arrêté, et doivent ainsi suivre les dispositions légales sur la rétroactivité.



Le premier juge a ainsi parfaitement relevé qu'en dépit de son libellé comportant notamment la mention '(') est retiré à compter de la notification du présent arrêté à l'intéressé', le retrait décidé par l'arrêté préfectoral apparaît nécessairement sur le plan légal comme étant une sanction d'application rétroactive, en l'occurrence à compter du 08 décembre 2015, correspondant à la fixation de la date de reconnaissance préalable d'effet du précédent renouvellement, de nature tacite, de son agrément administratif l'habilitant à représenter l'intérêt collectif des consommateurs.



Par jugement du 02 décembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté le recours formé par l'AAMOI aux fins d'annulation de l'arrêté du 24 avril 2018 par lequel la préfète de l'Essonne lui a retiré l'agrément départemental.



Si l'AAMOI justifie avoir interjeté appel de ce jugement (n°1804495) devant la cour administrative d'appel de Versailles, il n'est pas contesté qu'en application des dispositions de l'article R 811-14 du code de justice administrative, cet appel n'a pas d'effet suspensif, de sorte que la décision de retrait litigieuse est à ce jour toujours applicable, la cour ne pouvant sur ce point suivre l'AAMOI lorsqu'elle soutient que le juge judiciaire ne peut tenir compte des jugements du tribunal administratif ayant fait l'objet d'appels.



Le fait qu'un autre jugement (n°1800027), rendu par le tribunal administratif de Versailles le 02 décembre 2009 également, sur requête d'un autre constructeur, à l'encontre de l'agrément tacite accordé à l'AAMOI le 08 décembre 2015 a prononcé un non-lieu à statuer, jugement dont l'AAMOI a interjeté appel également devant la cour administrative d'appel de Versailles, est quant à lui inopérant sur l'issue du présent litige, dès lors qu'il est distinct de l'action engagée directement à l'encontre de l'arrêté préfectoral portant retrait de l'agrément qui avait été renouvelé tacitement.



Un troisième jugement (n°1802206) rendu par le tribunal administratif de Versailles statuant cette fois sur le recours de la société Maisons Pierre en excès de pouvoir contre l'agrément tacite délivré le 08 décembre 2015 par le Préfet, a fait l'objet d'un non lieu à statuer au motif que, postérieurement au dépôt de la requête de la société Maisons Pierre, la préfète de l'Essonne a, par arrêté du 24 avril 2018, retiré l'agrément tacitement délivré à l'AAMOI le 08 décembre 2015, la requête étant devenue sans objet. S'il n'est pas contesté que ce jugement est passé en force de chose jugée, faute d'appel, la cour ne saurait davantage en tirer quelque argument dans le cadre du présent litige, dès lors qu'il est lui aussi distinct de l'action engagée directement à l'encontre de l'arrêté préfectoral portant retrait de l'agrément qui avait été renouvelé tacitement.



C'est enfin vainement que l'AAMOI prétend en invoquant la décision du Conseil d'Etat du 19 avril 2000 (M. [P]), que, si la cour devait comme le tribunal apprécier le retrait en cause à l'aune des principes de droit commun du droit administratif, elle ne pourrait en tenir compte dès lors qu'il n'est pas définitif parce qu'elle a introduit en temps utiles un recours contentieux contre cet acte administratif, qui n'a qu'un caractère provisoire tant que le juge administratif ne s'est pas prononcé par une décision définitive.



En effet, comme le réplique la société Maisons Pierre, cet arrêt ne concerne que la disparition de l'objet ou de l'intérêt d'un recours contentieux devant le juge administratif, dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir contre un acte administratif, qui n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif ; par son retrait, la disparition de l'acte attaqué de l'ordonnancement juridique rend sans objet la requête exercée à son encontre et, par voie de conséquence, doit amener le juge administratif à prononcer un non-lieu à statuer sur cette requête.

Le Conseil d'Etat considère en effet que le retrait ayant acquis 'un caractère définitif faute d'avoir été critiqué dans le délai de recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi' et 'qu'il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution'.



Le moyen concernant le caractère provisoire du retrait doit ainsi être écarté.



Quant au moyen concernant la nullité des actes de procédure de l'AAMOI pour défaut de représentation, à laquelle celle-ci consacre un développement en page 30/76 de ses dernières conclusions, son examen est sans objet dès lors que la société Maisons Pierre ne soutient plus dans ses dernières conclusions que les actes de procédure effectués par l'association dépourvue d'agrément seraient affectés d'une nullité pour vice de fond parce qu'elle ne justifierait pas d'une habilitation et agirait pour le compte d'autrui.



Il se déduit de l'ensemble de ces éléments que le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable pour défaut de qualité à agir l'AAMOI, dès lors qu'à la date du 30 décembre 2016 correspondant à la délivrance du premier acte d'huissier de justice constitutif de l'introduction de l'instance devant le tribunal, l'association se trouvait dépourvue de toute qualité à agir au nom de l'intérêt collectif des consommateurs, du fait de l'effet rétroactif à compter du 08 décembre 2015 du retrait d'égarement du 24 avril 2018, toujours en vigueur, alors que toutes ses demandes principales étaient formées en cette même qualité de défense des intérêts collectifs des consommateurs.



L'examen du moyen soulevé par la société SOGEREP quant au défaut d'intérêt à agir est dès lors superfétatoire.



Sur la demande subsidiaire, fondée sur le droit commun et les statuts de l'association



En cause d'appel, contrairement à ce que soutient l'AAMOI, la société Maisons Pierre ne soulève plus la limitation géographique du droit d'agir de l'association, restreinte selon elle à la compétence du tribunal judiciaire d'Evry. La société Maisons Pierre soulève uniquement une fin de non recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir au-delà du département de l'Essonne, dans le cadre de la demande de l'association, soutenue à titre subsidiaire en invoquant l'application du droit commun, à travers ses statuts.



Certes, la chambre criminelle de la Cour de cassation a jugé dans un arrêt du 25 juin 2019, qu'en application de l'article L 621-1 du code de la consommation, les associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs peuvent, si elles ont été agréées à cette fin en application de l'article L 811-1, exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs, et que si l'AAMOI a été agréée par arrêté du préfet de l'Essonne, elle justifie agir pour la défense d'un intérêt collectif qui n'est pas strictement local.



Cependant, comme le réplique la société Maisons Pierre, l'AAMOI agissait là dans le cadre du droit de la consommation, expressément visé par l'arrêt de la chambre criminelle qu'elle invoque, et non sur le fondement du droit commun, par application de ses statuts, qu'elle revendique désormais, en cause d'appel, subsidiairement.



Conférer à son agrément départemental une portée nationale, dans le cadre de l'exercice des droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs, ne saurait se confondre, dans le silence des statuts de l'association sur le champ territorial de son action, avec la possibilité d'agir en dehors du département de l'Essonne, et sur tout le territoire français, ce silence ne pouvant s'interpréter comme permettant à l'association d'agir sur un territoire illimité.



Le moyen d'irrecevabilité sera ainsi accueilli.



S'agissant du moyen d'irrecevabilité soulevé par les sociétés Maisons Pierre, SOGEREP et AXA au visa notamment des articles 4 et 564 du code de procédure civile, qui est dès lors surabondant, c'est à juste titre que celles-ci soutiennent que l'AAMOI est par ailleurs irrecevable à soutenir pour la première fois en cause d'appel des prétentions fondées sur le droit commun, en application de ses statuts, dès lors que ce changement génère une modification substantielle de l'objet de la présente instance, mais aussi de la qualité d'une des parties, ce qui est incompatible avec les règles strictes régissant l'effet dévolutif de la procédure d'appel et plus largement la loyauté procédurale.



En effet, comme il l'a été rappelé ci-dessus, l'ensemble des demandes formées à titre principal par l'association AAMOI à l'encontre des sociétés Maisons Pierre, SOGEREP et AXA devant le tribunal était fondé uniquement sur des allégations de situations de méconnaissances de l'intérêt collectif des consommateurs, l'objet de l'action étant selon les dernières conclusions notifiées en première instance par l'AAMOI, le 17 décembre 2018 (page 34/55) de 'faire sanctionner les pratiques consistant à facturer aux consommateurs une franchise ou une intermédiation d'assurance illicite, dans le cadre de la souscription des assurances dommages-ouvrage'.



Ce n'est qu'en cause d'appel qu'elle a, pour la première fois, sollicité l'application du droit commun à travers ses statuts, en remplaçant le terme 'consommateurs' par 'maîtres de l'ouvrage' dans l'intégralité de ses conclusions, de sorte que son action, initialement introduite dans l'intérêt collectif des consommateurs sur le fondement du code de la consommation vise désormais, dans l'hypothèse où ses demandes fondées, toujours à titre principal, sur le code de la consommation, se heurteraient à la fin de non-recevoir soulevée par les intimées pour défaut de qualité à agir, à appliquer ses statuts, sur le fondement du droit commun, dans l'intérêt privé des maîtres d'ouvrage.



Il s'en déduit que les deux actions :

- protègent une catégorie de personnes différentes, à savoir les consommateurs pour l'une, les maîtres d'ouvrage pour l'autre, qui, si elles peuvent se recouper, ne sont pas similaires ;

- n'ont pas le même fondement légal, l'action pour protéger l'intérêt collectif des consommateurs étant encadrée par le code de la consommation alors que l'intérêt général des maîtres d'ouvrage peut éventuellement être protégé par le droit commun, au gré des statuts de toute association le prévoyant ;

- n'ont pas la même portée, dès lors que les associations de consommateurs sont investies, par l'octroi d'un agrément, d'un pouvoir général d'agir en justice alors que les autres associations sont strictement limitées dans leur action à leurs statuts ;

- n'ont pas la même finalité, dès lors que les associations de consommateurs 'uvrent dans l'intérêt général alors que les autres associations agissent notamment pour la sauvegarde ou la promotion d'intérêts privés.



Ainsi, entre la première instance et l'appel, les prétentions, fondées sur des droits distincts, n'ont pas le même objet, de sorte que les prétentions nouvelles soutenues à titre subsidiaire par l'AAMOI ne peuvent qu'être déclarées irrecevables de ce fait.



En outre, comme le fait par ailleurs observer la société Maisons Pierre, la qualité d' 'association de consommateurs', initialement revendiquée par l'AAMOI en première instance, ne saurait être confondue avec celle d'association 'uvrant dans l'intérêt spécifique d'une catégorie de la population, à savoir les maîtres d'ouvrage, catégorie désormais invoquée par l'association.



Les prétentions ainsi formulées par une partie en une qualité différente de celle en laquelle elle avait procédé en première instance, avec une finalité différente de celle soumise au premier juge, caractérisent une prétention nouvelle également prohibée par les dispositions rappelées ci-dessus, sauf à contourner les règles du droit de la consommation, et à faire perdre à la formalité de l'agrément tout effet utile, agrément dont il n'est pas contesté que la perte ne saurait au cas d'espèce constituer un fait nouveau susceptible d'écarter la demande d'irrecevabilité dès lors que le retrait est survenu avant que le tribunal ne statue, et que l'appelante n'a pas introduit de prétentions en première instance, même à titre subsidiaire, sur le fondement du droit commun et de ses statuts.



La cour ne peut en conséquence suivre l'AAMOI lorsqu'elle soutient qu'elle ne fait qu'invoquer en cause d'appel des moyens nouveaux, au soutien de prétentions qui sont toujours les mêmes (cessation de pratique illicite, indemnisation, publication), comme les dispositions de l'article 563 du code de procédure civile le lui permettent, et lorsqu'elle expose que non seulement le changement de qualité, en cours d'instance, d'une partie n'emporte pas modification de l'objet du litige et donc demandes nouvelles, mais encore qu'elle n'a jamais disposé de deux qualités distinctes dès lors qu'elle défend en réalité la même population (les consommateurs visés étant nécessairement des maîtres de l'ouvrage et vice versa), et qu'un changement de qualité serait inopérant dès lors que ne sont pas nouvelles les prétentions qui tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent, en application de l'article 565 du code de procédure civile.



La fin de non recevoir soulevée par les intimées concernant les prétentions nouvelles de l'AAMOI sera ainsi accueillie.



Compte tenu des irrecevabilités ainsi confirmées ou ajoutées par la cour, il n'y a pas lieu à examen des moyens développés au fond.



Sur les demandes reconventionnelles de dommages intérêts pour procédure abusive



Vu les articles 32-1, 559, 567 et 628 du code de procédure civile ;



L'exercice d'une action en justice constitue par principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à indemnisation qu'en cas de faute susceptible d'engager la responsabilité civile de son auteur.



Ni les circonstances du litige, ni les éléments de la procédure, ne permettent de caractériser à l'encontre de l'AAMOI une faute de nature à faire dégénérer en abus, le droit de se défendre en justice en interjetant appel d'une décision aux motifs certes particulièrement clairs, que la cour a en partie repris, dès lors que l'AAMOI ne s'est non seulement pas contentée de réitérer en appel de manière abusive des moyens soutenus en première instance, rejetés par des motifs pertinents et explicites, mais a, indépendamment de la présentation de prétentions nouvelles ayant changé l'objet du litige, sous une qualité différente, incontestablement développé par ailleurs des moyens de défense nouveaux, dans un contexte particulièrement procédurier de part et d'autre, l'opposant de longue date notamment à la société Maisons Pierre, comme en atteste la jurisprudence que chacun verse aux débats.



Il ne sera ainsi pas fait droit aux demandes de dommages-intérêts formées à ce titre par la société Maisons Pierre et la société SOGEREP.



Sur la demande d'exécution provisoire



L'arrêt n'étant pas susceptible d'une voie ordinaire de recours est exécutoire de droit ; la demande tendant au prononcé de l'exécution provisoire formulée par la société SOGEREP est ainsi sans objet et doit être rejetée.



Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile



Partie perdante, l'AAMOI sera condamnée aux entiers dépens et à payer en cause d'appel, en sus des sommes allouées à ce titre par le tribunal, aux sociétés Maisons Pierre, SOGEREP COURTAGE et AXA FRANCE IARD en application de l'article 700 du code de procédure civile, une indemnité qui sera, en équité, fixée à la somme de 2 000 euros pour la société Maisons Pierre, et de 1 500 euros chacune pour les sociétés SOGEREP COURTAGE et AXA FRANCE IARD.



L'AAMOI sera déboutée de sa demande formée de ce chef.





PAR CES MOTIFS



LA COUR, statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe,



Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;



Y ajoutant :



Déclare l'Association d'Aide aux Maîtres d'Ouvrage Individuels irrecevable en son action sur le fondement du droit commun pour défaut d'intérêt à agir relativement à la restriction géographique de ses statuts ;



Déclare l'Association d'Aide aux Maîtres d'Ouvrage Individuels irrecevable à agir en cause d'appel sur le fondement du droit commun, les prétentions formulées sur ce fondement étant nouvelles ;



Déboute la société Maisons Pierre et la société SOGEREP COURTAGE de leur demande respective d'indemnisation au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile ;



Rejette la demande de la société SOGEREP COURTAGE tendant au prononcé de l'exécution provisoire ;



Condamne l'Association d'Aide aux Maîtres d'Ouvrage Individuels aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile pour les avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre ;



Condamne l'Association d'Aide aux Maîtres d'Ouvrage Individuels à payer, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel, les sommes suivantes :

. 2 000 euros à la société Maisons Pierre ;

. 1 500 euros à la société SOGEREP COURTAGE ;

. 1 500 euros à la société AXA FRANCE IARD ;



Déboute l'Association d'Aide aux Maîtres d'Ouvrage Individuels de sa demande formée de ce chef.









LE GREFFIER LE PRESIDENT

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.