21 janvier 2021
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-24.799

Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2021:C300084

Titres et sommaires

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - Indemnité - Fixation - Voies de recours - Appel - Mémoire et documents de l'appelant - Dépôt - Délai - Computation - Jour de l'échéance - Jour férié ou chômé - Effet

L'article 642 du code de procédure civile est applicable devant les juridictions de l'expropriation en vertu de l'article R. 211-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Il en résulte, que, si le délai de trois mois, dont dispose l'appelant pour déposer ou adresser au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire, expire un jour férié, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant

DELAIS - Computation - Acte à accomplir avant l'expiration d'un délai - Article 642 du code de procédure civile - Application

DELAIS - Computation - Jour de l'échéance - Jour férié ou chômé - Article 642 du code de procédure civile - Domaine d'application

Texte de la décision

CIV. 3

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 21 janvier 2021




Cassation


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 84 FS-P+L

Pourvoi n° Y 19-24.799




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 JANVIER 2021

1°/ M. B... S... K...,

2°/ Mme O... J..., épouse S... K...,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° Y 19-24.799 contre l'arrêt rendu le 23 septembre 2019 par la cour d'appel de Douai (chambre de l'expropriation), dans le litige les opposant :

1°/ à la société publique locale [...], dont le siège est [...] ,

2°/ au directeur départemental des finances publiques du Nord, domicilié [...] , faisant fonction de commissaire du gouvernement par délégation du directeur des services fiscaux du Nord,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Maunand, conseiller doyen, les observations et les plaidoiries de Me Balat, avocat de M. et Mme S... K..., de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société publique locale [...], et l'avis de Mme Vassallo, premier avocat général, auquel les parties, invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, après débats en l'audience publique du 1er décembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Maunand, conseiller doyen rapporteur, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Jacques, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Djikpa, conseillers référendaires, Mme Vassallo, premier avocat général, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. L'arrêt attaqué (Douai, 23 septembre 2019) déclare caduque la déclaration d'appel formée par M. et Mme S... K... contre un jugement ayant fixé les indemnités leur revenant à la suite de l'expropriation, au profit de la société publique locale [...], d'un bien leur appartenant.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. M. et Mme S... K... font grief à l'arrêt de déclarer caduque leur déclaration d'appel, alors « qu'aux termes de l'article 642 du code de procédure civile tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures. Le délai qui expirerait un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour suivant ; qu'aux termes par ailleurs de l'article L. 3133-1, 6°, du code du travail, le lundi de Pentecôte est un jour férié ; qu'ayant constaté le délai de trois mois dont M. et Mme S... K... disposaient pour adresser au greffe de la cour d'appel leurs conclusions et leurs pièces avait commencé à courir le 20 février 2018, date à laquelle leur déclaration d'appel électronique avait été réceptionnée au greffe de la cour d'appel, ce dont il résultait que, puisque le 20 mai 2018 était un dimanche et le 21 mai 2018 le lundi de Pentecôte, le délai de trois mois prévu par l'article R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique n'expirait que le 22 mai 2018, premier jour ouvrable suivant, la cour d'appel a violé les textes susvisés en considérant que le dépôt par M. et Mme K... de leurs conclusions et de leurs pièces le 22 mai 2018 était intervenu tardivement, au-delà du délai de trois mois requis. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 642 du code de procédure civile, L. 3133-1 du code du travail et R. 311-26, alinéa 1er, du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique :

3. Selon le premier de ces textes, qui s'applique devant les juridictions de l'expropriation en vertu de l'article R. 211-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures. Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

4. Aux termes du deuxième, le lundi de Pentecôte est un jour férié.

5. Selon le troisième, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

6. Il résulte de ces textes que le délai qui expire un samedi ou un dimanche est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant, soit jusqu'au mardi lorsque le lundi est un jour férié.

7. Pour déclarer caduque la déclaration d'appel, l'arrêt retient que M. et Mme S... K... ont formé appel du jugement par déclaration électronique adressée et réceptionnée au greffe de la cour d'appel le 20 février 2018 et que les conclusions et pièces ont été remises au greffe de la cour d'appel le mardi 22 mai 2018, soit au-delà du délai de trois mois requis.

8. En statuant ainsi, alors que le délai de trois mois expirait le dimanche 20 mai 2018 et devait être prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant, soit jusqu'au mardi 22 mai 2018, le lundi de Pentecôte étant un jour férié, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne la société publique locale [...] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société publique locale [...] et la condamne à payer à M. et Mme S... K... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé en son audience publique du vingt et un janvier deux mille vingt et un par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. et Mme S... K....

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré caduque la déclaration d'appel formée par M. et Mme S... K... le 20 février 2018 à l'encontre du jugement du juge de l'expropriation pour le département du Nord en date du 19 janvier 2018 ;

AUX MOTIFS QU' en application de l'article R. 311-26 du code de l'expropriation, à peine de caducité de la déclaration, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse à la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel ; qu'en l'espèce, l'avocat des consorts K... a formé appel du jugement du juge de l'expropriation de Lille en date du 19 janvier 2018 par déclaration électronique adressée et réceptionnée au greffe de la cour d'appel le 20 février 2018 ; que dès lors que les conclusions et pièces n'ont été remises au greffe de la cour que le mardi 22 mai 2018, soit au-delà du délai de trois mois requis, la caducité de la déclaration d'appel est encourue et ne peut qu'être constatée ; qu'en application de l'article 550 du code de procédure civile, l'appel incident formé par madame le commissaire du gouvernement le 1er août 2018 et l'appel incident formé par la SPL [...] le 20 août 2018 ne peuvent qu'être déclarés irrecevables, la caducité de l'appel principal entraînant l'extinction de l'instance d'appel ;

ALORS QU' aux termes de l'article 642 du code de procédure civile « tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures. Le délai qui expirerait un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour suivant » ; qu'aux termes par ailleurs de l'article L. 3133-1, 6°, du code du travail, le « lundi de Pentecôte » est un jour férié ; qu'ayant constaté le délai de trois mois dont M. et Mme S... K... disposaient pour adresser au greffe de la cour d'appel leurs conclusions et leurs pièces avait commencé à courir le 20 février 2018, date à laquelle leur déclaration d'appel électronique avait été réceptionnée au greffe de la cour d'appel, ce dont il résultait que, puisque le 20 mai 2018 était un dimanche et le 21 mai 2018 le lundi de Pentecôte, le délai de trois mois prévu par l'article R. 311-26 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique n'expirait que le 22 mai 2018, premier jour ouvrable suivant, la cour d'appel a violé les textes susvisés en considérant que le dépôt par M. et Mme K... de leurs conclusions et de leurs pièces le 22 mai 2018 était intervenu tardivement, « au-delà du délai de trois mois requis ».

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