16 mars 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-15.031

Deuxième chambre civile - Formation de section

ECLI:FR:CCASS:2017:C200366

Texte de la décision

CIV. 2

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 16 mars 2017




Cassation


Mme FLISE, président



Arrêt n° 366 FS-D

Pourvoi n° U 16-15.031









R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Territoires soixante-deux, société d'économie mixte, dont le siège est [Adresse 1],

contre l'arrêt n° RG : 15/03160 rendu le 21 mars 2016 par la cour d'appel de Douai (chambre de l'expropriation), dans le litige l'opposant à M. [W] [I], domicilié [Adresse 2],

défendeur à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 8 février 2017, où étaient présents : Mme Flise, président, M. Pimoulle, conseiller rapporteur, M. Liénard, conseiller doyen, Mmes Brouard-Gallet, Kermina, Maunand, Martinel, conseillers, Mme Pic, M. de Leiris, Mme Lemoine, M. Cardini, Mme Brahic-Lambrey, conseillers référendaires, Mme Vassallo, avocat général, Mme Parchemal, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Pimoulle, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Territoires soixante-deux, de Me Le Prado, avocat de M. [I], l'avis de Mme Vassallo, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article 680 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités ne fait pas courir le délai de recours ;

Attendu que, pour déclarer la signification du jugement régulière et le second appel irrecevable, l'arrêt, ayant relevé que l'acte de notification du jugement ne mentionnait pas la cour d'appel devant laquelle l'appel pouvait être porté et visait des dispositions inapplicables au litige, retient que cette irrégularité constituait un vice de forme et que la société ne prouvait pas le grief qu'elle lui aurait causé ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt n° RG : 15/03160 rendu le 21 mars 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;

Condamne M. [I] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Territoires soixante-deux.

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'appel irrecevable ;

AUX MOTIFS QUE, sur la recevabilité du recours exercé par la SEM Territoires soixante-deux, que celle-ci a formé une première fois appel du jugement du juge de l'expropriation du Pas-de-Calais du 2 février 2015 par une déclaration reçue au greffe de la cour le 27 février 2015 et enregistrée le même jour ; QU'elle a de nouveau relevé appel du jugement déféré par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 7 août 2015, reçue au secrétariat -greffe de la chambre spéciale des expropriations le 12 août suivant et enregistrée le jour même ; que M. [W] [I] observe que la première déclaration d'appel étant caduque à défaut, pour la SEM Territoires soixante-deux, d'avoir produit ses pièces et documents dans le délai de trois mois courant à compter de la déclaration d'appel, qui lui était imparti par l'alinéa 1er de l'article R. 311-26 du code de l'expropriation pour y procéder, et le jugement lui ayant été signifié le 9 mars 2015, son second appel est irrecevable ; Mais QUE si, conformément à l'article 385 du code de procédure civile, l'instance s'éteint à titre principal par l'effet de la caducité de la citation, la constatation de l'extinction de l'instance et du dessaisissement de la juridiction ne met pas obstacle à l'introduction d'une nouvelle instance, si l'action n'est pas éteinte par ailleurs ; QU'il suit que la caducité de la première déclaration d'appel du 27 février 2015 encourue par la SEM Territoires soixante-deux qui n'a pas déposé ses pièces dans le délai de trois mois de cet acte d'appel, n'atteint que l'appel ainsi interjeté et reste sans effet sur l'ouverture de cette voie de recours, laquelle subsiste tant que la forclusion résultant de l'écoulement du délai d'un mois à compter de la notification du jugement, imparti pour faire appel par l'article R. 311-24 du code de l'expropriation, n'est pas intervenue ;

QU'à cet égard la notification des jugements et arrêts aux parties et au commissaire du Gouvernement se fait, en matière d'expropriation, par voie de signification, conformément aux dispositions des articles 675 à 682 du code de procédure civile auxquels renvoie l'article R. 311-30 du code de l'expropriation ; QUE par ailleurs selon l'article 680 du code de procédure civile qui s'applique quel que soit le mode de notification, l'acte de notification d'un jugement à une partie doit indiquer de manière très apparente le délai d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation dans le cas où l'une de ces voies de recours est ouverte, ainsi que les modalités selon lesquelles le recours peut être exercé ; QU'encore, aux termes de l'article 693 du code de procédure civile, la méconnaissance des dispositions prévues aux articles 675, 678 et 680 est sanctionnée par la nullité, l'article 694 de ce même code soumettant le régime de la nullité des notifications à celui de la nullité des actes de procédure ; QUE le défaut de mention ou l'indication erronée d'une mention constituant un vice de forme de l'acte, la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité conformément à l'alinéa 2 de l'article 114 du code de procédure civile ; QUE contrairement à ce que soutient la SEM Territoires soixante-deux, cette règle est générale et concerne tous les vices qui peuvent être qualifiés de forme, même s'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public ; QU'il suit que pour que la nullité de l'acte de signification du jugement du juge de l'expropriation du Pas-de-Calais du 2 février 2015 soit prononcée pour vice de forme, il ne suffit pas qu'il existe une irrégularité en soi, expressément prévue par l'article 680 du code de procédure civile, il faut encore que la SEM Territoires soixante-deux qui se prévaut de la nullité invoque et prouve le grief que lui cause l'irrégularité alléguée ;

QU'il est constant, en l'espèce, que le jugement du juge de l'expropriation du Pas-de-Calais du 2 février 2015 a été signifié à la SEM Territoires soixante-deux, à la requête de M. [W] [I], par un acte du 9 mars 2015 ; QUE si cet acte de signification n'indique pas le siège de la cour d'appel devant laquelle le recours devait être exercé et reproduit, non pas les dispositions de l'article R. 311-26 du code de l'expropriation, applicables aux procédures d'appel introduites postérieurement au 1er janvier 2015, date d'entrée en vigueur du nouveau code de l'expropriation, mais celles des articles R. 13-47 à R. 13-49 de l'ancien code de l'expropriation, abrogé par l'ordonnance n° 2014-1345 du 6 novembre 2014 et le décret n° 2014-l635 du 26 décembre 2014, force est de constater que la SEM Territoires soixante-deux, qui a interjeté appel devant la cour d'appel de Douai et déposé ses conclusions d'appelante dans le délai de l'article R. 311-26 précité du code de l'expropriation, ne précise ni a fortiori ne prouve le grief que lui auraient causé les irrégularités invoquées ;

QUE le moyen soulevé par la SEM Territoires soixante-deux, tiré de la nullité de l'acte de notification du 9 mars 2015 du jugement du juge de l'expropriation du Pas-de-Calais du 2 février 2015, doit en conséquence être rejeté ;

QUE le jugement de première instance devant en ces conditions être considéré comme ayant été régulièrement signifié à la date du 9 mars 2015, c'est donc tardivement que la SEM Territoires soixante-deux, après l'expiration du délai d'un mois suivant la notification de la décision imparti par l'article R. 311-24 du code de l'expropriation, a formé son appel par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 7 août 2015 reçue au greffe de la chambre de l'expropriation le 12 août suivant ; QUE par suite, comme le relève justement M. [W] [I], l'appel formé par la SEM Territoires soixante-deux doit être déclaré irrecevable ;

ALORS QUE l'acte de signification qui mentionne inexactement la voie de recours ouverte, son délai ou ses modalités, ne fait pas courir le délai du recours, sans qu'il soit nécessaire pour le destinataire de cet acte, de prouver que l'irrégularité lui a causé un grief ; que dès lors, la cour d'appel, qui avait constaté que l'acte de signification du jugement ne mentionnait pas la cour devant laquelle l'appel pouvait être porté et visait des dispositions inapplicables au litige, ne pouvait juger que l'appel était irrecevable pour avoir été relevé plus d'un mois après la date de cet acte ; qu'elle a ainsi violé l'article 680 du code de procédure civile.

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