15 mars 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 15-24.392

Chambre sociale - Formation de section

ECLI:FR:CCASS:2017:SO00490

Texte de la décision

SOC.

CH.B



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 15 mars 2017




Cassation


M. FROUIN, président



Arrêt n° 490 FS-D

Pourvoi n° Y 15-24.392

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M. [K].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 30 mai 2016.







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Yoopi.com, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],

contre l'arrêt rendu le 31 mars 2015 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. [D] [K], domicilié chez Mme [L] [V], [Adresse 1],

défendeur à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 7 février 2017, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, M. Chollet, conseiller doyen, Mmes Goasguen, Vallée, Guyot, Aubert-Monpeyssen, Schmeitzky-Lhuillery, MM. Rinuy, Schamber, Ricour, conseillers, MM. Flores, David, Silhol, Belfanti, Mme Ala, conseillers référendaires, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la société Yoopi.com, de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat de M. [K], l'avis écrit de Mme Courcol-Bouchard, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ;

Attendu que pour déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur à payer au salarié des sommes à titre de dommages et intérêts et d'indemnités compensatrices de préavis et de congés payés, l'arrêt retient que si la société a effectivement tenté, conformément à ses obligations légales, un reclassement avec ses partenaires réunionnais, mahorais et néo-calédonien, elle ne justifie pas d'autres démarches, que l'affirmation d'une impossibilité de permutation ne résulte que d'une pétition de principe non corroborée, que ce postulat s'apparente à un aveu d'absence de recherches de reclassement, que la société ne rapportant pas la preuve qui lui incombe de l'impossibilité de permutation au sein du groupe de reclassement constitué de sociétés franchisées, elle ne justifie pas d'une recherche loyale des possibilités de reclassement du salarié ;


Qu'en se déterminant ainsi, sans préciser si les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation des sociétés franchisées au sein du groupe Ogilvy permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 mars 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;

Condamne M. [K] aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mars deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société Yoopi.com.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la Société Yoopi.com à verser à Monsieur [D] [K] les sommes de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, 9 597 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents, et 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à rembourser à Pôle Emploi, dans la limite de six mois, les allocations de privation d'emploi servies à Monsieur [K] ;

AUX MOTIFS QUE " Monsieur [K] conteste au principal le bien fondé du licenciement estimant que son employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement notamment dans les possibilités de permutabilité dans le réseau des sociétés franchisées Ogilvy ; que la Société Yoopi.com conteste cette analyse qu'elle considère extensive de l'obligation de reclassement ; qu'elle se réfère à la notion de groupe connue par le droit des sociétés et donc à connotation capitalistique ; qu'en revanche, elle ne conteste pas son appartenance à un réseau franchisé ;

QU'il convient de rappeler que le périmètre de l'obligation de reclassement s'étend au groupe, notion autonome de celle connue en droit commercial ; que c'est ainsi que la recherche des possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'à ce titre, l'activité dans le cadre d'un contrat de franchise ne suffit pas à démontrer l'absence de possibilités de permutation de personnel au sein de l'une ou l'autre des sociétés franchisées ;

QU'en l'espèce, le fait que la Société Luvi Ogilvy Mayotte entreprenne des recrutements par des offres d'emploi peut accréditer les explications de l'employeur quant à l'absence de permutation salariale entre les sociétés franchisées de la Réunion et de Mayotte ; que pour autant, l'absence de permutation n'est nullement probante de l'absence de possibilité de celle-ci ; que par ailleurs, le cas de Mayotte est sans effet sur la problématique générale des possibilités de permutation au sein des autres entreprises franchisées ;

QUE si la Société Yoopi.com a effectivement tenté, conformément à ses obligations légales, un reclassement avec son partenaire réunionnais (Luvi Ogilvy), mahorais (Luvi Ogilvy Mayotte), ainsi que celui de Nouvelle Calédonie (Trait d'Union Pacifique), étant précisé que la saisine de l'entreprise d'Afrique du Sud n'est pas justifiée par les pièces produites, elle ne justifie pas d'autres démarches ;

QUE quant à l'affirmation d'une impossibilité de permutation, il ne s'agit que d'une pétition de principe de la Société Yoopi.com, laquelle n'est corroborée par aucun élément ; que ce postulat s'apparente d'ailleurs à un aveu d'absence de recherche de possibilité de permutation au sein des autres sociétés franchisées ;

QUE la Société Yoopi.com ne rapportant la preuve qui lui incombe de l'impossibilité de permutation au sein du groupe de reclassement, constitué des sociétés franchisées, elle ne justifie pas d'une recherche loyale des possibilités de reclassement de Monsieur [K] ; que le licenciement est alors dépourvu de cause réelle et sérieuse et le jugement est consécutivement infirmé" ;

1°) ALORS QUE la recherche des possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte doit s'apprécier, à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, qu'en l'absence de tout lien juridique ou financier entre elles, l'appartenance des sociétés à un réseau de franchise n'entraîne pas, en soi, la constitution d'un tel groupe qu'il appartient, dès lors, aux juges du fond de caractériser ; qu'en retenant un manquement de la Société Yoopi.com à son obligation de reclassement au sein des "sociétés franchisées Ogilvy" la cour d'appel, qui n'a pas précisé en quoi les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation des différentes sociétés franchisées leur permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1226-2 du Code du travail ;

2°) ALORS QUE l'appartenance d'une société à un réseau de franchise n'entraîne pas en soi la constitution d'un groupe à l'intérieur duquel pourrait être présumée la permutabilité des salariés ; qu'il appartient dès lors aux juges du fond de la caractériser, et non à l'employeur de rapporter la preuve d'une impossibilité de permutation ; qu'en retenant un manquement de la Société Yoopi.com à son obligation de reclassement au motif qu'elle "… ne rapportait pas la preuve qui lui incombe de l'impossibilité de permutation au sein du groupe de reclassement, constitué des sociétés franchisées", la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil.

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