28 juin 2017
Cour de cassation
Pourvoi n° 16-11.171

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2017:CO00955

Texte de la décision

COMM.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 28 juin 2017




Cassation


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 955 F-D

Pourvoi n° Y 16-11.171







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Jean-Michel X...,

2°/ Mme Isabelle Y..., épouse X...,

tous deux domiciliés [...],

contre l'arrêt rendu le 20 janvier 2015 par la cour d'appel de Poitiers (2e chambre civile), dans le litige les opposant à la Caisse de crédit mutuel de l'Absie, dont le siège est [...],

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 16 mai 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, les observations de Me B..., avocat de M. et Mme X..., de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la Caisse de crédit mutuel de l'Absie, l'avis de M. C..., premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 621-82, alinéa 3, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

Attendu que M. et Mme X... (les cautions) se sont rendus cautions des dettes de la société X... (la société débitrice) envers la Caisse de crédit mutuel de l'Absie (la banque) ; qu'après avoir mis la société débitrice en redressement judiciaire le 9 juillet 1999, le tribunal a arrêté un plan de redressement le 7 avril suivant, puis, par un jugement du 12 septembre 2003, en a ordonné la résolution et a prononcé la liquidation judiciaire de la société ; que la banque, qui avait déclaré sa créance à la première procédure, a assigné les cautions en paiement ;

Attendu que pour condamner les cautions, l'arrêt retient que la créance de la banque n'est pas éteinte, puisqu'elle a été régulièrement déclarée au redressement judiciaire de la société débitrice, et qu'une nouvelle déclaration n'est pas nécessaire lors de la conversion de la procédure en liquidation ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la liquidation judiciaire ouverte sur résolution du plan n'est pas une conversion de la procédure de redressement en cours, mais une nouvelle procédure collective à laquelle les créanciers soumis au plan doivent, pour les procédures ouvertes avant le 1er janvier 2006, déclarer l'intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faite des sommes perçues, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne la Caisse de crédit mutuel de l'Absie aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. X... et Mme Y..., épouse X..., la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me B..., avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...

Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit l'action de la Caisse de Crédit Mutuel de l'Absie recevable et condamné solidairement les époux X... à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de l'Absie les sommes de : 56.711,12 € au titre du solde du compte courant de la A... et 23.735,13 € au titre du solde débiteur du prêt ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « Sur la prescription : M. et Mme X... soulèvent la prescription de l'action au visa de l'article L. 110-4 du code de commerce applicable aux faits de l'espèce et de l'article 2231 du code civil résultant de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 ;qu'ils font valoir : - que la déclaration de créance faite le 17 septembre 1999 par la Caisse de Crédit Mutuel de L'ABSIE a interrompu la prescription de son action, qu'elle a fait naître un nouveau délai de prescription de 10 ans à compter de la même date et qu'en conséquence elle se devait d'agir au plus tard le 17 septembre 1999 ; que l'assignation délivrée le 13 juin 2013 serait donc tardive ; - que, s'agissant du nouveau délai d'action à compter de la clôture de la liquidation judiciaire prononcée le 25 février 2005 invoqué par l'intimée, l'absence d'une nouvelle déclaration de créance obligatoire lors du prononcé de la liquidation judiciaire a entraîné l'extinction de la créance en application de l'article L. 621-46 du code de commerce dans sa rédaction applicable à l'espèce et rend l'action irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ; que la Caisse de Crédit Mutuel de L'ABSIE soutient pour faire écarter ce moyen de prescription : - qu'un nouveau délai de prescription de 10 ans a commencé à courir à compter de la clôture de la procédure intervenue le 25 février 2005 lui permettant d'agir jusqu'au 25 février 2015 ; - que la loi du 17 juin 2008 réformant la prescription civile est sans incidence sur la présente espèce ; - qu'aucun texte n'oblige un créancier qui a déclaré sa créance au redressement judiciaire, à renouveler cette déclaration dans le cadre de la liquidation judiciaire ouverte sur conversion ; qu'il convient de prendre acte que les conclusions des parties sont concordantes sur l'application d'un délai de prescription de 10 ans de la présente action ainsi que sur l'effet interruptif de ladite prescription de la déclaration de créance du 17 septembre 1999 de la Caisse de Crédit Mutuel de L'ABSIE ; que les parties sont en revanche en désaccord sur le point de départ du nouveau délai que cette interruption fait courir ; que la Caisse de Crédit Mutuel de L'ABSIE fait valoir à juste titre que l'effet interruptif est prolongé à l'égard de la caution jusqu'à la clôture de la procédure et qu'en l'espèce, son action n'est donc pas prescrite ; qu'elle observe également exactement qu'à supposer que la nouvelle prescription quinquennale s'applique à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, soit le 18 juin 2008, son action n'était pas prescrite à la date de la délivrance de l'assignation du 13 juin 2013 ; que c'est à tort que M. et Mme X... se prévaut de l'extinction de la créance de la Caisse de Crédit Mutuel de L'ABSIE faute de l'avoir déclarée dans le cadre de la liquidation judiciaire ; qu'en effet, les textes relatifs à la déclaration de créance, à savoir les articles L. 621-43 et suivants du code de commerce antérieurs à la loi du 26 juillet 2005 applicables à l'espèce, n'imposent pas au créancier qui a déclaré sa créance dans le cadre du redressement judiciaire, l'obligation de renouveler cette déclaration après la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ; que les articles L.622-24 et suivants applicables depuis la loi de 2005 ne contiennent aucune disposition pouvant être interprétée comme ayant apporté une modification à cet égard ; qu'ainsi, dans sa jurisprudence récente, la cour de cassation a considéré que le créancier, qui a régulièrement déclaré sa créance au passif du débiteur en redressement judiciaire, n'est pas tenu de procéder à une nouvelle déclaration de créance, lorsque le redressement judiciaire est converti en liquidation judiciaire et ce, au visa des articles L. 621-43 et L. 622-5 du code de commerce dans leur rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 (arrêt du 7juillet 2009 de la chambre commerciale) ; qu'aucun motif ne justifie qu'il puisse en être autrement dans notre hypothèse où la liquidation judiciaire intervient alors qu'un plan de redressement a été arrêté et qu'un nouvel état de cessation des paiements est constaté ; qu'en conséquence, le moyen d'irrecevabilité doit être écarté ; que le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point »

ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QUE : « Sur la recevabilité de l'action : sur la prescription de l'action et l'absence d'intérêt à agir : (…) le Tribunal constate que la caisse de crédit mutuel de l'Absie a déclaré valablement sa créance au passif de la A... au représentant des créanciers le 17 septembre 1999 ; que les dispositions L621-43 et L621-46 du Code de commerce applicables à l'époque n'obligeaient pas le créancier ayant régulièrement déclaré sa créance au passif du débiteur en redressement judiciaire à procéder à une nouvelle déclaration de créance lorsque la liquidation judiciaire était prononcée à l'issue de la période d'observation ; que le Tribunal constate que le plan de redressement judiciaire a été résolu par le Tribunal de commerce de Poitiers qui a prononcé la liquidation de la société ; qu'en conséquence, le Tribunal estime que la créance de la caisse de crédit mutuel n'est pas éteinte ; que le Tribunal considère que la déclaration de créance du 17 septembre 1999 a interrompu la prescription de l'action de la caisse du crédit mutuel de l'Absie ; que la caisse de crédit mutuel étant privée de son droit d'agir à l'égard des débiteurs, l'effet interruptif se poursuit jusqu'à la clôture de la procédure collective ; qu'en conséquence le Tribunal considère que la caisse de crédit mutuel a retrouvé son droit d'agir à compter de la clôture des opérations de liquidation, à savoir le 25 février 2005 ; que le délai de 10 ans n'était donc pas écoulé lorsque la présente juridiction a été saisie et que l'action n'était pas prescrite ; que le Tribunal estime donc l'action recevable. »

ALORS QUE après résolution du plan de redressement et ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire, sous l'empire de la législation du 25 janvier 1985, les créanciers soumis au plan devaient à nouveau déclarer l'intégralité de leurs créances et sûretés, déduction faites des sommes perçues ; qu'à défaut de nouvelle déclaration il y avait lieu au prononcé de l'extinction de la créance ; qu'en l'espèce, la Caisse de Crédit Mutuel de l'Absie devait, à la suite de la résolution du plan de redressement de la A..., lors du prononcé de la liquidation judiciaire par un jugement du Tribunal de commerce de Poitiers du 12 septembre 2003, déclarer à nouveau sa créance à peine de voir constater son extinction ; qu'en considérant que la Caisse de Crédit Mutuel de l'Absie était recevable à agir tout en relevant que celle-ci avait uniquement déclaré sa créance le 17 septembre 1999 au passif du redressement judiciaire de la A..., sans l'avoir à nouveau déclarée à la nouvelle procédure à la suite de la résolution du plan de redressement, la Cour d'appel a violé l'ancien article L. 621-82 du Code de commerce, applicable à l'espèce.

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