31 janvier 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-10.483

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2018:C100142

Texte de la décision

CIV. 1

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 31 janvier 2018




Cassation partielle


Mme BATUT, président



Arrêt n° 142 F-D

Pourvoi n° W 17-10.483





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Créatis, société anonyme, dont le siège est [...]                                                            ,

contre l'arrêt rendu le 13 octobre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 9), dans le litige l'opposant à Mme Valérie X..., domiciliée [...]                              ,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 2017, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Y..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Y..., conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Créatis, l'avis de M. Z..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu les articles L. 311-9, L. 311-13 et L. 311-48 du code de la consommation, dans leur rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, ensemble l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en vue du regroupement de divers prêts, la société Créatis (la banque) a adressé à Mme X... (l'emprunteur), par lettre datée du 12 septembre 2011, une offre de crédit d'un montant de 39 600 euros ; qu'après avoir prononcé la déchéance du terme pour défaut de remboursement, la banque a assigné l'emprunteur en paiement ;

Attendu que, pour dire la banque déchue du droit aux intérêts conventionnels, l'arrêt énonce que, selon l'article L. 311-9 du code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris les informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur, mais également par la consultation du fichier prévu à l'article L. 333-4, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L. 333-5 ; qu'il ajoute que la pièce produite par la banque, qui mentionne à plusieurs reprises la date du 21 septembre 2011, alors que l'offre a été faite le 12 septembre de cette même année, ne justifie pas que la consultation du fichier ait été antérieure à l'offre de prêt ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui incombait, à quelle date le contrat avait été conclu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare la société Créatis déchue de son droit aux intérêts contractuels, l'arrêt rendu le 13 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Créatis


L'arrêt partiellement infirmatif attaqué encourt la censure ;

EN CE QU'il a décidé que la Société CREATIS était déchue de son droit à intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « l'offre de crédit litigieuse ayant été faite le 15 septembre 2011 et acceptée le 1er juillet suivant, les dispositions des articles L 311-9 et L311-48 du Code de la consommation issues de la loi n°2010-737du 10 juillet 2010, sont applicables à la présente affaire ; que selon l'article 1311-9 du même code, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris les informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur, mais également par la consultation du fichier prévu à l'article L333-4, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné à l'article L333-5 ; qu'en l'espèce, la pièce produite par la société appelante (n°3), si elle comporte les prénom et nom de la débitrice, mentionne à plusieurs reprises la date du 21 septembre 2011, de sorte que l'offre ayant été faite le 12 septembre de cette même année, à supposer que ce document soit de nature à justifier par la société prêteuse la consultation du fichier national des incidents de payement des particuliers, ne justifie pas que cette consultation est antérieure à l'offre de prêt et donc, ait satisfait aux exigences de l'article L311-9 du Code de la consommation ; qu'en application de l'article L311-48 du même code, la décision du tribunal d'instance ayant prononcé la déchéance du droit aux intérêts sera confirmée » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« aux termes de l'article L. 311-9 du Code de la consommation, avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l'article L. 333-4, dans les conditions prévues l'arrêté mentionné à l'article 333-5 ; que l'arrêté du 26 octobre 2010, en son article 13, oblige ainsi les prêteurs à conserver des preuves de la consultation du fichier, de son motif et de son résultat, sur un support durable. Les prêteurs doivent être en mesure de démontrer que les modalités de consultation du fichier et de conservation du résultat des consultations garantissent l'intégrité des informations ainsi collectées ; qu'en l'espèce, la SOCIÉTÉ CREATIS produit une pièce qu'elle affirme être un justificatif de consultation du FICP, alors que cette pièce est une simple pièce informatique et qui ne comporte pas le nom de famille ni le prénom du débiteur. Qu'elle n'est donc en possession d'aucun justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement prévu par l'article L 333-4 du Code de la consommation, et en conséquence ne rapporte pas la preuve qu'elle a vérifié la solvabilité de Madame Valérie X... à partir d'un nombre suffisant d'informations ; que la violation, caractérisée ci-dessus, des dispositions de l'article L 311-9 précité est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts, par application de l'article L311-48, alinéa 2 du Code de la consommation, depuis l'origine du contrat de crédit. ; que la déchéance totale du droit aux intérêts sera prononcée ».

ALORS QUE, premièrement, réserve faite du cas où le droit de la consommation pose une règle dérogatoire, les parties sont régies par les règles du droit civil ; qu'aux termes de l'article L.311-9 du Code de la consommation, la consultation du fichier prévu à l'article L.333-4 doit intervenir avant la conclusion du contrat de crédit ; que la conclusion du contrat de crédit suppose l'accord ferme des deux parties, de l'emprunteur, comme du prêteur ; qu'en l'espèce, pour déchoir le prêteur de son droit à intérêt, les juges du fond ont considéré que l'offre de crédit étant du 12 septembre 2011, la consultation du fichier est intervenue le 21 septembre 2011 ; qu'en s'attachant à la date de l'offre et non à la date de conclusion du contrat de prêt, les juges du fond ont commis une erreur de droit et violé les articles L.311-9, L.311-13 et L.311-48 du Code de la consommation, ensemble l'article 1134 ancien du Code civil (devenu l'article 1103) ;

ET ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, faute d'avoir à tout le moins analysé les données de l'espèce, pour déterminer à quelle date le contrat avait été conclu, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L.311-9, L.311-13 et L.311-48 du Code de la consommation, ensemble l'article 1134 ancien du Code civil (devenu l'article 1103).

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