6 juin 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-21.068

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin - Publié au Rapport

ECLI:FR:CCASS:2018:SO00924

Titres et sommaires

REPRESENTATION DES SALARIES - institution représentative du personnel - mise en place - modalités - accord collectif - nullité - effets - effet rétroactif (non) - cas - portée

La nullité d'un accord collectif relatif à la mise en place d'institutions représentatives du personnel n'a pas d'effet rétroactif. Ayant relevé qu'un accord conclu en mai 2011 entre deux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) pour modifier leurs périmètres respectifs n'avait été déclaré invalide que par un arrêt de la Cour de cassation du 22 février 2017 et qu'il avait, bien qu'illicite, reçu exécution, un tribunal d'instance en a déduit à bon droit qu'un accord entre l'employeur et le comité d'entreprise du 18 août 2015 avait procédé à une modification des périmètres des CHSCT pour mettre fin à une situation de fait illicite et que la demande d'annulation des élections organisées en exécution de cet accord, laquelle tendait ainsi au maintien des effets d'une illégalité à laquelle l'accord du 18 août 2015 avait remédié, devait être rejetée

Texte de la décision

SOC. / ELECT

LG



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 6 juin 2018




Rejet


M. FROUIN, président



Arrêt n° 924 FS-P+B+R

Pourvoi n° B 17-21.068





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ le syndicat CGT des salariés de Dhl International express, dont le siège est [...],

2°/ M. Franck X..., domicilié [...],

3°/ M. Stéphane Y..., domicilié [...],

contre le jugement rendu le 30 juin 2017 par le tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant :

1°/ à la société DHL International express, société par actions simplifiée, dont le siège est [...],

2°/ à M. Driss Z..., domicilié [...],

3°/ à M. Christophe A..., domicilié [...],

4°/ à M. Chakib B..., domicilié [...],

5°/ à M. Mohamed C..., domicilié [...],

6°/ au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) Paris Sud, domicilié chez DHL International express, agence de Vitry-sur-Seine, [...],

défendeurs à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 9 mai 2018, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Slove, Basset, Pécaut-Rivolier, conseillers, Mme Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat CGT des salariés de Dhl International express et de MM. X... et Y..., de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société DHL International express, l'avis de Mme Berriat, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois, 30 juin 2017), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 22 février 2017, pourvoi n° 16-10.770), que la société DHL International express fait partie d'une unité économique et sociale comprenant trois établissements distincts ; que, dans le cadre de l'établissement « DHL International Express, DHL Services et DHL Express », vingt comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) sont constitués dont le CHSCT Paris Sud TD et le CHSCT Paris Nord TD ; que, le 18 octobre 2015, le syndicat CGT des salariés de la société DHL International express et MM. X... et Y... ont saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation de la désignation des membres du CHSCT Paris Sud TD intervenue le 5 octobre 2015, au motif qu'une désignation avait déjà eu lieu le 11 février 2015 et que la nouvelle désignation avait été organisée au prétexte erroné qu'un accord d'établissement du 18 août 2015 avait modifié les périmètres des CHSCT Paris Nord TD et Paris Sud TD en réintégrant dans le périmètre du premier le site de Noisiel, nouvellement Collégien, alors qu'il avait été irrégulièrement rattaché au périmètre du second en 2011 par un accord des CHSCT concernés ; que, par jugement du 8 janvier 2016, la contestation du syndicat et des salariés a été rejetée ; que ce jugement a été cassé au visa de l'article L. 4613-4 du code du travail aux motifs "qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la modification des périmètres d'implantation des CHSCT Paris Nord TD et Paris Sud TD avait été décidée par ces CHSCT sans saisine des comités d'établissement concernés et de l'employeur, le tribunal a violé le texte susvisé" ;

Attendu que le syndicat et les salariés font grief au jugement de rejeter leur demande d'annulation de la désignation du 5 octobre 2015, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en l'absence d'accord du comité d'entreprise avec l'employeur il ne peut être procédé à la modification du périmètre d'implantation de comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; que le tribunal a constaté que l'accord conclu en mai 2011 entre les CHSCT de Paris Nord et de Paris Sud n'avait pu valablement emporter transfert du site de Collégien de la sphère de compétence du premier CHSCT à celle du second ; qu'en rejetant néanmoins la demande des exposants tendant à voir annuler les élections du CHSCT Paris Sud qui avaient eu lieu en octobre 2015, quand des élections avaient déjà été organisées en février 2015 et que l'employeur avait prétexté, pour organiser ces nouvelles élections en octobre 2015, qu'un accord du 18 août 2015 avait eu pour effet de réintégrer le site en cause dans le périmètre CHSCT Paris Nord, qu'il n'avait ainsi jamais quitté, le tribunal, qui aurait dû tirer les conséquences de ses propres constatations en en déduisant que ces dernières élections étaient sans objet puisqu'aucune modification n'était intervenue, a violé les articles L. 4613-4, R. 4613-5 et R. 4613-11 du code du travail ;

2°/ que le juge doit observer le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que pour rejeter les demandes des exposants, le tribunal a retenu qu'ils se contredisaient au détriment d'autrui, qu'ils auraient dû contester les élections de février 2015 plutôt que celles d'octobre 2015 et que leur demande tendait à obtenir du tribunal qu'il maintienne une situation illicite ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand aucune partie n'avait soutenu ces moyens qu'il a soulevés d'office, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, le tribunal a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en tout état de cause, le principe selon lequel « nul ne peut se contredire au détriment d'autrui » suppose à tout le moins qu'une partie ait modifié ses prétentions en soutenant successivement des arguments incompatibles ; que, pour rejeter les demandes des exposants, le tribunal a retenu qu'ils se contredisaient au détriment d'autrui ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand les exposants ont toujours formulé la même demande tirée de ce que le site de Collegien n'avait jamais été rattaché à Paris Sud en sorte que son prétendu nouveau rattachement à Paris Nord ne modifiait pas les périmètres et ne pouvait permettre de nouvelles élections, et n'ont pas modifié leurs prétentions en soutenant successivement des arguments incompatibles, le tribunal a violé le principe selon lequel « nul ne peut se contredire au détriment d'autrui » ;

4°/ qu'en outre, d'une part, le litige ne portait pas sur les élections de février 2015 qui n'ont pas été contestées, mais uniquement sur celles d'octobre 2015 qui n'avaient pas lieu d'être, et que, d'autre part, la demande des exposants ne tendait pas à obtenir du tribunal qu'il maintienne une situation illicite puisqu'il résultait de ses propres constatations que l'accord conclu en mai 2011 entre les CHSCT de Paris Nord et de Paris Sud ne pouvait pas valablement emporter transfert du site de Collégien de la sphère de compétence du premier CHSCT à celle du second ; que, pour rejeter les demandes des exposants, le tribunal a retenu qu'ils auraient dû contester les élections de février 2015 plutôt que celles d'octobre 2015 et que leur demande tendait à obtenir du tribunal qu'il maintienne une situation illicite ; qu'en statuant de la sorte, le tribunal a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

5°/ que l'accord du 18 août 2015 confirme que le site Noisiel/Collégien est inclus dans le périmètre d'implantation du CHSCT de Paris Nord et ne fait état, à aucun moment, d'un changement de rattachement de ce site, ce dont il résultait que l'organisation de nouvelles élections du CHSCT Paris Sud ne pouvait en aucun cas être justifiée au motif que l'agence le Collégien était désormais rattachée au CHSCT Paris Nord puisqu'en réalité, il n'y avait pas eu de modification ; que le tribunal a retenu que l'accord avait décidé que le site de collégien serait rattaché au CHSCT de Paris Nord ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand l'accord du 18 août 2015 confirme que le site Noisiel/Collégien est inclus dans le périmètre d'implantation du CHSCT de Paris Nord et ne fait état, à aucun moment, d'un changement de rattachement de ce site, ce dont il résultait que l'organisation de nouvelles élections du CHSCT Paris Sud ne pouvait en aucun cas être justifiée au motif que l'agence le Collégien était désormais rattachée au CHSCT Paris Nord puisqu'en réalité, il n'y avait pas eu de modification, le tribunal a violé l'article 1134 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, désormais article 1103 du code civil) et l'accord du 18 août 2015.

6°/ qu'enfin les membres du CHSCT sont désignés pour deux ans, la durée de ce mandat étant d'ordre public ; que le tribunal a considéré qu'une nouvelle désignation pouvait intervenir en octobre 2015, mettant fin de façon anticipée aux mandats des membres du CHSCT qui avaient été désignés en février 2015 ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand les conditions légales permettant de mettre fin de façon anticipée aux mandats des membres du CHSCT n'étaient pas réunies et que l'accord du 18 août 2015 ne pouvait déroger aux règles d'ordre public, le tribunal a violé l'article R. 4613-5 du code du travail ;

Mais attendu que la nullité d'un accord collectif relatif à la mise en place d'institutions représentatives du personnel n'a pas d'effet rétroactif ;

Et attendu qu'ayant relevé que l'accord conclu en mai 2011 entre les CHSCT de Paris Nord et de Paris Sud n'avait été déclaré invalide que par l'arrêt de la Cour de cassation du 22 février 2017 et qu'il avait, bien qu'illicite, reçu exécution, le tribunal en a déduit à bon droit que l'accord entre l'employeur et le comité d'entreprise du 18 août 2015 avait procédé à une modification des périmètres des CHSCT pour mettre fin à une situation de fait illicite et que la demande d'annulation des élections organisées en exécution de cet accord, laquelle tendait ainsi au maintien des effets d'une illégalité à laquelle l'accord du 18 août 2015 avait remédié, devait être rejetée ; que le moyen, inopérant en ses deuxième et troisième branches en ce qu'il vise des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour le syndicat CGT des salariés de Dhl International express et MM. X... et Y...

Le moyen reproche au jugement attaqué d'AVOIR rejeté la demande du syndicat CGT des salariés de Dhl International Express, de MM Franck X... et Stéphane Y... tendant à voir annuler les élections des membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail Paris Sud TD du 5 octobre 2015 ;

AUX MOTIFS QUE par décision de la Direccte du 19 février 2013, l'UES a DHL a été divisée en trois établissements distincts au sens des comités d'entreprise, « DHL aviation », « DHL Holding » et « DHL International Express, DHL Services et DHL Express », chacun de ces trois établissements étant donc pourvu d'un comité d'établissement ; que le présent litige concerne le troisième établissement, plus précisément deux des vingt CHSCT constitués dans le cadre de cet établissement, le CHSCT Paris Nord et le CHSCT Paris Sud TD, et plus précisément encore les salariés du site DHL de Noisiel dénommé aujourd'hui site de Collégien (c'est cette dernière appellation qui sera retenue dans la suite de ce jugement) ; qu'en janvier 2009, lors de la désignation des membres du CHSCT Paris Nord, le site de Collégien a été inclus dans le périmètre de ce CHSCT et l'était encore lors du renouvellement de la délégation du personnel au CHSCT en janvier 2011 ; toutefois, en mai 2011, suite à la demande d'un contrôleur du travail après la survenance d'un accident du travail, le site de Collégien a été rattaché au CHSCT de Paris Sud selon une procédure qui aurait été suggérée par ce contrôleur, à savoir un accord unanime des élus des deux CHSCT concernés soit Paris Nord et Paris Sud ; que ce changement de rattachement s'est d'abord traduit, dans les faits, par la soumission au CHSCT Paris Sud de questions intéressant le site de Collégien, ainsi par exemple de l'installation d'un système de vidéosurveillance sur ce site ayant donné lieu à une information et à une consultation du CHSCT Paris Sud en octobre 2012 ; qu'il s'est ensuite traduit par des changements en matière d'élections ainsi qu'il résulte du procès-verbal de réunion du collège désignatif des membres du CHSCT Paris Sud du 15 janvier 2013, celui-ci étant bien indiqué comme compétent pour les salariés du site de Vitry et pour ceux du site de Collégien, ces derniers pouvant dès lors être candidats non plus au CHSCT Paris Nord mais au CHSCT Paris Sud ; que des documents produits et non contestés établissent encore qu'après ce renouvellement, le CHSCT Paris Sud a continué pendant les années 2013 et 2014 à connaître de questions intéressant les salariés de Vitry et de Collégien ; que nonobstant un accord du 20 février 2015 prorogeant les mandats des membres du CHSCT de Paris Nord et mentionnant le site de Collégien dans le ressort de ce CHSCT, il résulte toujours des documents produits et non contestés (note du 28 janvier 2015 convoquant le collège désignatif et lançant un appel à candidatures ; procès-verbal du collège désignatif du février 2015) – et ainsi d'ailleurs que l'indiquent eux-mêmes les requérants à l'audience -, que lors du renouvellement des membres du CHSCT Paris Sud le 11 février 2015, le site de Collégien était toujours rattaché à ce CHSCT et que les salariés de ce site pouvaient y faire acte de candidature ; qu'il résulte encore d'une convocation des élus au CHSCT Paris Sud pour le 7 mai 2015, signée par la direction et le secrétaire du CHSCT Paris Sud que figuraient à l'ordre du jour de ce comité des questions intéressant les salariés du site de Collégien ; que c'est dans ces conditions qu'un accord conclu le 18 août 2015 entre la direction et les élus du comité d'établissement « DHL International Express, DHL Services et DHL Express » a procédé à une redéfinition des périmètres des CHSCT inclus dans cet établissement et a décidé, notamment, que le site de Collégien serait rattaché au CHSCT de Paris Nord (le CHSCT Paris Sud demeurant compétent pour les seuls salariés de Vitry) et a prévu que de nouvelles désignations des membres des CHSCT dont les périmètres d'action se trouvaient modifiés auraient lieu au plus tard le 21 octobre 2015 ; que c'est ainsi qu'a été organisée la désignation des membres du CHSCT Paris Sud le 5 octobre 2015 dont les requérants demandent l'annulation au motif que le périmètre d'action de ce comité n'aurait jamais été modifié ; sur la demande d'annulation de la désignation des membres du CHSCT Paris Sud du 5 octobre 2015, aux termes de l'article L4613-4 alinéa 1 du code du travail « Dans les établissements d'au moins cinq cents salariés, le comité d'entreprise détermine, en accord avec l'employeur, le nombre des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail devant être constitués, eu égard à la nature, la fréquence et la gravité des risques, aux dimensions et à la répartition des locaux ou groupes de locaux, au nombre des travailleurs occupés dans ces locaux ou groupes de locaux ainsi qu'aux modes d'organisation du travail. Il prend, le cas échéant, les mesures nécessaires à la coordination de l'activité des différents comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail » ; qu'en application de ce texte, et ainsi que le relève l'arrêt de la Cour de Cassation du 22 février 2017, l'accord conclu en mai 2011 entre les CHSCT de Paris Nord et de Paris Sud ne pouvait pas valablement emporter transfert du site de Collégien de la sphère de compétence du premier CHSCT à celle du second ; que cet accord entre les deux CHSCT a néanmoins été exécuté et a ainsi créé une situation de fait illicite au sein de l'établissement « DHL International Express, DHL Services et DHL Express » ; qu'en revanche, l'accord du 18 août 2015 qui a bien été conclu selon les prévisions de l'article L4613-4 précité a valablement défini les périmètres des CHSCT constitués au sein de l'établissement « DHL International Express, DHL Services et DHL Express » et a ainsi rétabli une situation conforme au droit en replaçant expressément les salariés de l'agence de Collégien dans le périmètre de compétence du CHSCT Paris Nord, périmètre qu'ils n'ont jamais quitté valablement ; qu'au motif que l'accord conclu en mai 2011 entre les CHSCT Paris Nord et Paris Sud ne pouvait valablement modifier leurs périmètres respectifs, les requérants soutiennent que l'agence de Collégien est toujours demeurée rattachée au CHSCT Paris Nord de sorte que l'accord du 18 août 2015 n'a pas modifié le périmètre de ce CHSCT non plus que celui du CHSCT Paris Sud, d'où il s'ensuit, selon eux, qu'il n'y avait pas lieu d'organiser de nouvelles élections dans ce dernier et qu'il convient donc de maintenir les désignations opérées en février 2015 et d'annuler celles qui se se sont déroulées en octobre de la même année ; qu'une telle analyse, purement abstraite, fait fi de la réalité à savoir que, dans les faits, le site de Collégien a bien été rattaché au CHSCT Paris Sud tant en ce qui concerne la désignation de ses membres en 2013 et 2015 qu'en ce qui a trait à l'exercice effectif de ses compétences, ceci par un simple accord entre les deux CHSCT concernés qui ne satisfait pas aux exigences de l'article L4613-4 du code du travail et induit une situation juridiquement illicite ; que ce caractère illicite et de pur fait du rattachement de l'agence de Collégien au CHSCT de Paris Sud qui constitue le coeur du moyen soutenu par les requérants et le fondement même de leur action aurait dû les conduire à contester la désignation des membres du CHSCT Paris Sud opérée le 11 février 2015 et non celle du 5 octobre 2015 ; qu'en demandant l'annulation de la désignation du 5 octobre 2015, les requérants tendent à obtenir du tribunal non pas le rétablissement de la légalité, mais le maintien de la situation illicite qu'ils dénoncent ; qu'en d'autres termes, les requérants demandent au tribunal de tirer des conséquences en parfaite contradiction avec le moyen qu'ils soutiennent ; que cette posture pour le moins paradoxale s'oppose au bien fondé de leur action qui s'avère contradictoire au détriment d'autrui ; que de la même façon, n'apparaîtrait pas fondé et tout aussi contradictoire au détriment d'autrui le moyen tiré de ce que l'accord du 18 août 2015 n'aurait pu mettre un terme aux mandats conférés pour deux ans en février 2015 dès lors que ce moyen tend pareillement, au détriment d'un rétablissement de la légalité, à obtenir du tribunal qu'il maintienne une situation illicite, illicéité sur laquelle les requérants fondent pourtant leur action ; qu'une demande fondée sur l'illicéité d'une situation de fait ne pouvant avoir ni pour objet ni pour finalité d'en consolider juridiquement les effets, les requérants en seront déboutés ;

1° ALORS QU'en l'absence d'accord du comité d'entreprise avec l'employeur il ne peut être procédé à la modification du périmètre d'implantation de comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; que le tribunal a constaté que l'accord conclu en mai 2011 entre les CHSCT de Paris Nord et de Paris Sud n'avait pu valablement emporter transfert du site de Collégien de la sphère de compétence du premier CHSCT à celle du second ; qu'en rejetant néanmoins la demande des exposants tendant à voir annuler les élections du CHSCT Paris Sud qui avaient eu lieu en octobre 2015, quand des élections avaient déjà été organisées en février 2015 et que l'employeur avait prétexté, pour organiser ces nouvelles élections en octobre 2015, qu'un accord du 18 août 2015 avait eu pour effet de réintégrer le site en cause dans le périmètre CHSCT Paris Nord, qu'il n'avait ainsi jamais quitté, le tribunal, qui aurait dû tirer les conséquences de ses propres constatations en en déduisant que ces dernières élections étaient sans objet puisqu'aucune modification n'était intervenue, a violé les articles L. 4613-4, R. 4613-5 et R. 4613-11 du code du travail ;

2° Et ALORS QUE le juge doit observer le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que pour rejeter les demandes des exposants, le tribunal a retenu qu'ils se contredisaient au détriment d'autrui, qu'ils auraient dû contester les élections de février 2015 plutôt que celles d'octobre 2015 et que leur demande tendait à obtenir du tribunal qu'il maintienne une situation illicite ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand aucune partie n'avait soutenu ces moyens qu'il a soulevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, le tribunal a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3° ALORS en tout état de cause QUE le principe selon lequel « nul ne peut se contredire au détriment d'autrui » suppose à tout le moins qu'une partie ait modifié ses prétentions en soutenant successivement des arguments incompatibles; que pour rejeter les demandes des exposants, le tribunal a retenu qu'ils se contredisaient au détriment d'autrui ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand les exposants ont toujours formulé la même demande tirée de ce que le site de Collegien n'avait jamais été rattaché à Paris Sud en sorte que son prétendu nouveau rattachement à Paris Nord ne modifiait pas les périmètres et ne pouvait permettre de nouvelles élections, et n'ont pas modifié leurs prétentions en soutenant successivement des arguments incompatibles, le tribunal a violé le principe selon lequel « nul ne peut se contredire au détriment d'autrui » ;

4° ALORS, en outre, QUE d'une part, le litige ne portait pas sur les élections de février 2015 qui n'ont pas été contestées, mais uniquement sur celles d'octobre 2015 qui n'avaient pas lieu d'être, et que, d'autre part, la demande des exposants ne tendait pas à obtenir du tribunal qu'il maintienne une situation illicite puisqu'il résultait de ses propres constatations que l'accord conclu en mai 2011 entre les CHSCT de Paris Nord et de Paris Sud ne pouvait pas valablement emporter transfert du site de Collégien de la sphère de compétence du premier CHSCT à celle du second ; que pour rejeter les demandes des exposants, le tribunal a retenu qu'ils auraient dû contester les élections de février 2015 plutôt que celles d'octobre 2015 et que leur demande tendait à obtenir du tribunal qu'il maintienne une situation illicite ; qu'en statuant de la sorte, le tribunal a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

5° Et ALORS QUE l'accord du 18 août 2015 confirme que le site Noisiel/Collégien est inclus dans le périmètre d'implantation du CHSCT de Paris Nord et ne fait état, à aucun moment, d'un changement de rattachement de ce site, ce dont il résultait que l'organisation de nouvelles élections du CHSCT Paris Sud ne pouvait en aucun cas être justifiée au motif que l'agence le Collégien était désormais rattachée au CHSCT Paris Nord puisqu'en réalité, il n'y avait pas eu de modification ; que le tribunal a retenu que l'accord avait décidé que le site de collégien serait rattaché au CHSCT de Paris Nord ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand l'accord du 18 août 2015 confirme que le site Noisiel/Collégien est inclus dans le périmètre d'implantation du CHSCT de Paris Nord et ne fait état, à aucun moment, d'un changement de rattachement de ce site, ce dont il résultait que l'organisation de nouvelles élections du CHSCT Paris Sud ne pouvait en aucun cas être justifiée au motif que l'agence le Collégien était désormais rattachée au CHSCT Paris Nord puisqu'en réalité, il n'y avait pas eu de modification, le tribunal a violé l'article 1134 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, désormais article 1103 du code civil) et l'accord du 18 août 2015.

6° ALORS enfin QUE les membres du CHSCT sont désignés pour deux ans, la durée de ce mandat étant d'ordre public ; que le tribunal a considéré qu'une nouvelle désignation pouvait intervenir en octobre 2015, mettant fin de façon anticipée aux mandats des membres du CHSCT qui avaient été désignés en février 2015 ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand les conditions légales permettant de mettre fin de façon anticipée aux mandats des membres du CHSCT n'étaient pas réunies et que l'accord du 18 août 2015 ne pouvait déroger aux règles d'ordre public, le tribunal a violé l'article R. 4613-5 du code du travail.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.