4 avril 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-26.783

Troisième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2019:C300282

Texte de la décision

CIV.3

CF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 4 avril 2019




Rejet


M. CHAUVIN, président



Arrêt n° 282 F-D

Pourvoi n° P 17-26.783








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ Mme C... F... J..., domiciliée [...] , agissant en qualité de curatrice de Mme R... W..., veuve J...,

2°/ Mme R... W..., veuve J..., domiciliée [...] , placée sur le régime de la curatelle et à ce titre assistée de sa fille désignée curatrice, Mme C... F... J...,

contre l'arrêt rendu le 11 septembre 2017 par la cour d'appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à M. Z... L..., domicilié [...] ,

2°/ à M. O... N..., domicilié [...] ,

3°/ à la société Byzance, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 5 mars 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Guillaudier, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme F... J..., ès qualités et de Mme J..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. L..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. N... et de la société Byzance, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le premier et le second moyens, réunis, ci-après annexés :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 11 septembre 2017), que, par acte du 8 octobre 2008, dressé par M. N..., notaire, Mme W... veuve J... a vendu en viager à la société Byzance sa maison d'habitation, par l'intermédiaire de M. L..., agent immobilier ; que, par jugement du 5 juin 2012, Mme J... a été placée sous curatelle simple et sa fille a été désignée en qualité de curatrice ; que celles-ci ont assigné la société Byzance, M. N... et M. L... en nullité de la vente ;

Attendu que Mme J... et sa curatrice font grief à l'arrêt d'ordonner la restitution des sommes perçues de la société Byzance et de rejeter leur demande de dommages-intérêts complémentaires ;

Mais attendu qu'ayant prononcé la nullité de la vente pour insanité d'esprit de Mme J... et souverainement retenu qu'il n'était pas établi une faute caractérisée de l'acquéreur, du notaire et de l'agent immobilier, la cour d'appel, qui n'a pas modifié l'objet du litige ni violé le principe de la contradiction, la restitution des sommes versées étant une conséquence légale de la résolution du contrat, et qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a pu en déduire qu'il y avait lieu de condamner Mme J... à restituer les sommes perçues au titre du bouquet et des arrérages et que la demande de dommages et intérêts complémentaires devait être rejetée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme J... et Mme F... J..., ès qualités de curatrice, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme F... -J..., ès qualités et Mme J...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir dit que Mme R... veuve J... devrait restituer l'intégralité des sommes perçues de la société Byzance ;

AUX MOTIFS QUE « la société Byzance ne conclut pas expressément sur les conséquences d'une nullité de la vente alors que Mme R... J... demande à garder à titre de dommages intérêts le bouquet de 50.000 € et les arrérages de la rente et demande en outre la condamnation solidaire contre l'acheteur, le notaire et l'agent immobilier à 50.000 € de dommages-intérêts complémentaires ; que la nullité de la vente a pour effet, la vente étant supposée n'avoir jamais existé et ne produire aucun effet, d'entraîner la restitution par la venderesse des sommes perçues de l'acquéreur, soit la somme de 50.000 € perçue au titre du "bouquet", et les arrérages versées depuis 2008 » ;

1°/ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que le juge doit se prononcer sur tout ce qui lui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; qu'en l'espèce, la société Byzance n'avait formulé aucune demande tendant à obtenir la restitution de l'intégralité des sommes versées à Mme veuve J... ; qu'en ordonnant néanmoins cette restitution qui n'était pas demandée, la cour d'appel a statué ultra petita, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°/ ALORS QU'en toute hypothèse, le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut relever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à s'en expliquer contradictoirement ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que la nullité de la vente avait pour effet d'entraîner la restitution, par la venderesse, des sommes perçues de l'acquéreur, sans avoir préalablement rouvert les débats pour permettre aux parties de présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir débouté Mme R... veuve J... et Mme C... F... J..., en qualité de curatrice, de leur demande de condamnation solidaire au paiement de dommages-intérêts complémentaires à l'encontre de la société Byzance, de Me N... et de M. L... ;

AUX MOTIFS QUE « s'agissant de la demande de dommages intérêts complémentaires, les appelantes en seront déboutées faute d'établir une faute caractérisée des intimés, la nullité de la vente résultant de l'état psychique de Mme R... J... et ayant pour effet de lui restituer la propriété de son bien immobilier, et la cour n'étant pas informée de l'état de la procédure pénale dont les développements auraient le cas échéant pu établir la faute de ces parties » ;

1°/ ALORS QUE la victime de manoeuvres dolosives peut exercer, outre une action en annulation du contrat, une action en responsabilité contre l'auteur du dol pour obtenir réparation du dommage qu'elle a subi ; qu'en s'abstenant d'examiner l'existence du dol invoqué par les appelantes au prétexte que la nullité avait été prononcée sur le fondement de l'article 414-1 du code civil, sans rechercher si le dol invoqué était susceptible de justifier, au-delà de la nullité, la condamnation de l'acheteur, du notaire et de l'agent immobilier à des dommages et intérêts, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil, en sa version applicable à la cause ;

2°/ ALORS QUE toute décision doit être motivée ; qu'en affirmant, pour débouter les exposantes de leurs demandes de dommages-intérêts complémentaires, que celles-ci n'établissaient pas une faute caractérisée des intimés, sans s'expliquer sur aucun des griefs articulés par les appelantes à l'encontre de l'acheteur, du notaire et de l'agent immobilier (cf. conclusions p. 29 à 53), la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ ALORS QUE pour débouter les exposantes de leurs demandes de dommages-intérêts complémentaires, la cour d'appel a affirmé qu'elle n'était « pas informée de l'état de la procédure pénale dont les développements auraient le cas échéant pu établir la faute de ces parties » ; qu'en statuant ainsi, cependant que, saisie d'une action en responsabilité civile dirigée contre les intimés, la cour d'appel n'avait nullement besoin de connaître l'état de la procédure pénale diligentée par les appelantes pour apprécier l'existence des fautes civiles invoquées, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs inopérants, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.

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