11 juillet 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-40.016

Première chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2019:C100777

Texte de la décision

CIV. 1

COUR DE CASSATION

CH.B




______________________

QUESTION PRIORITAIRE
de
CONSTITUTIONNALITÉ
______________________





Audience publique du 11 juillet 2019




NON-LIEU A RENVOI


Mme BATUT, président



Arrêt n° 777 F-D

Affaire n° P 19-40.016







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu le jugement rendu le 16 mai 2019 par le tribunal de grande instance de Paris (1/2/1 nationalité A), transmettant à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité, reçue à la Cour de cassation le 21 mai 2019, dans l'instance mettant en cause :

D'une part,

- M. L... G..., domicilié [...] (Algérie),




D'autre part,

- le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, domicilié en son parquet, [...],

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 9 juillet 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Marilly, avocat général référendaire, Mme Randouin, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Attendu que M. L... G..., né le [...] à Ain Legradj (Algérie), a sollicité la délivrance d'un certificat de nationalité française, sur le fondement de l'article 18 du code civil, comme fils de M. W... G..., français pour avoir souscrit le 4 décembre 1965 une déclaration recognitive de nationalité française ; qu'un refus lui ayant été opposé, il a engagé une action déclaratoire de nationalité ; que le tribunal a transmis la question prioritaire de constitutionnalité, ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article 2 de l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 relative à certaines dispositions concernant la nationalité française, prises en application de la loi n° 62-421 du 13 avril 1962, combinées aux dispositions des articles 152 et 153,1° du code de la nationalité française auxquelles elles renvoient - dont il résulte que les mineurs âgés de 18 à 21 ans originaires d'Algérie relevant du statut civil de droit local devaient souscrire une déclaration de reconnaissance de la nationalité française en leur nom propre pour conserver la nationalité française après l'indépendance de l'Algérie - méconnaissent-elles le principe d'égalité devant la loi, tel qu'il est garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, tel qu'issu des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 » ;

Attendu que les dispositions légales contestées, qui sont applicables au litige, n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Attendu que, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, la question n'est pas nouvelle ;

Et attendu qu'elle ne présente pas un caractère sérieux ; que, d'abord, si l'article 2 de l'ordonnance n° 62-825 du 21 juillet 1962 soumet, s'agissant de la reconnaissance de la nationalité française, les personnes de statut civil de droit local originaires d'Algérie ainsi que leurs enfants, aux dispositions du titre VII du code de la nationalité française, ce texte s'est borné à étendre pour l'Algérie le régime applicable, en vertu des articles 13 et 152 du code de la nationalité, dans leur rédaction issue de la loi du 28 juillet 1960, aux originaires des territoires qui, ayant le statut de territoire d'outre-mer de la République française à la date du 31 décembre 1946, ont accédé à l'indépendance ; que, s'il en résulte que la conservation de la nationalité française est subordonnée pour les individus âgés de plus de 18 ans, à une déclaration personnelle, ceux-ci étant exclus de l'effet collectif attaché, jusqu'à la loi du 9 janvier 1973 modifiant l'article 84 du code de la nationalité, pour les mineurs de 21 ans, à la déclaration souscrite par leur ascendant, cette différence de traitement est d'application uniforme dans tous les territoires ayant accédé à l'indépendance ; qu'ensuite, elle est en rapport avec l'objectif poursuivi, résultant de dispositions intelligibles, de permettre aux intéressés de plus de 18 ans, au regard de leur niveau de maturité et de discernement, de conserver la nationalité française, sans subir la décision de leur ascendant ; qu'enfin, le législateur, en permettant aux originaires d'Algérie, de statut de droit local, de souscrire jusqu'au 21 mars 1967, une déclaration recognitive de nationalité française, a entendu tempérer pour les individus qui, âgés de 18 ans au 1er janvier 1963, ont accédé à la majorité civile le 1er janvier 1966, les conséquences découlant pour eux de l'absence d'effet collectif attaché à la déclaration faite par leur ascendant ;

D'où il suit qu'en l'absence d'atteinte aux droits et principes garantis par les articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;




Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.