18 septembre 2019
Cour de cassation
Pourvoi n° 17-22.863

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2019:SO01251

Titres et sommaires

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Maladie du salarié - Maladie ou accident non professionnel - Inaptitude au travail - Inaptitude consécutive à la maladie - Constat d'inaptitude du médecin du travail - Modalités - Compétence du conseil médical de l'aviation civile en matière d'inaptitude des personnels navigants titulaires d'un titre aéronautique - Portée

Les dispositions spéciales du code de l'aviation civile prévoyant la compétence du Conseil médical de l'aviation civile (CMAC) pour se prononcer sur le caractère définitif des inaptitudes des personnels navigants titulaires d'un titre aéronautique n'ont pas le même objet que les dispositions d'ordre public du code du travail, de sorte que le médecin du travail doit se prononcer sur l'inaptitude du salarié

Texte de la décision

SOC.

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 18 septembre 2019




Cassation partielle


M. CATHALA, président



Arrêt n° 1251 FS-P+B

Pourvoi n° C 17-22.863







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. J... F..., domicilié [...],

contre l'arrêt rendu le 30 mai 2017 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Air Austral, société anonyme, dont le siège est zone aéroportuaire, 97438 Sainte-Marie,

défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 2 juillet 2019, où étaient présents : M. Cathala, président, Mme Salomon, conseiller référendaire rapporteur, Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen, MM. Pion, Ricour, Mmes Van Ruymbeke, Capitaine, Gilibert, conseillers, MM. Silhol, Duval, Mme Valéry, conseillers référendaires, Mme Grivel, avocat général, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Salomon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. F..., de Me Le Prado, avocat de la société Air Austral, l'avis de Mme Grivel, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. F... a été engagé le 31 janvier 2003 par la société Air Austral en qualité d'officier pilote de ligne ; qu'il a été placé en arrêt de travail du 26 septembre au 8 octobre 2009, puis du 21 octobre 2009 au 30 juin 2010 ; que le salarié a saisi le 25 mars 2010 le conseil médical de l'aéronautique civile (CMAC) qui l'a déclaré inapte définitivement à exercer sa profession de navigant comme classe 1, inapte classe 2, par décision notifiée le 7 mai 2010 ; que l'employeur lui a proposé le 11 mai 2010 un reclassement dans un emploi au sol que le salarié a refusé ; que l'employeur a licencié le salarié par lettre du 20 mai 2010 pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen ci-après annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles L. 1132-1 dans sa rédaction applicable en la cause et L. 1132-4 du code du travail ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en nullité de son licenciement, l'arrêt retient qu'il résulte de la lettre de licenciement que la rupture du contrat de travail est motivée par l'impossibilité pour l'employeur d'employer le salarié en raison de la décision d'inaptitude définitive prise par le CMAC et de son refus de tout emploi au sol, ce qui constitue un motif licite non lié à l'état de santé ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions spéciales du code de l'aviation civile prévoyant la compétence du CMAC pour se prononcer sur le caractère définitif des inaptitudes des personnels navigants titulaires d'un titre aéronautique n'ont pas le même objet que les dispositions d'ordre public du code du travail, de sorte que le médecin du travail devait se prononcer sur l'inaptitude du salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. F... de ses demandes en nullité de son licenciement et de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de reclassement, l'arrêt rendu le 30 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;

Condamne la société Air Austral aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Air Austral à payer à M. F... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen en ayant délibéré, conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, en son audience publique du dix-huit septembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. F....

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de Monsieur F... tendant à voir juger qu'il a été victime de harcèlement et obtenir le paiement de dommages et intérêts, de l'avoir condamné en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens

AUX MOTIFS propres QU'il résulte de l'article 1154-1 du code du travail que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L 1152-1 du Code du travail ; que dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; en l'espèce, M. F... qui soutient avoir été victime de harcèlement moral et invoque les dispositions de l'article L.1152-1 du Code du travail, fait valoir que la société Air Austral a procédé à la désignation aux fonctions de commandant de bord de M. B..., M. U... et M. K..., dont le rang sur la liste de classement professionnel était postérieur au sien et laissé sans réponse un courrier daté du 30 septembre 2009 dans lequel il faisait part de ses interrogations à la suite de la désignation de M. K... et sollicitait des explications afin que lui soit précisé s'il s'agissait d'un choix de la direction ; M. F... estime que la société Air Austral n'a pas respecté l'accord d'entreprise du 6 mars 2008 instaurant la liste de classement professionnel, que les choix auxquels elle a procédé traduisent la volonté de l'évincer du poste de commandant de bord ; il produit les notes de service de la société Air Austral de la désignation au poste de commandant de bord sur Boeing 777 de : - M. B..., à compter du 1er avril 2009, - M. K... à compter du 09 octobre 2009, - M. U... à compter du 25 février 2010 ; selon liste des pilotes déclarés aptes au stage commandant de bord à l'issue de la période d'évaluation de juillet à septembre 2008 : M. F... était 32ème dans l'ordre de la LCP, M. U... 33ème, M. B... 40ème ; M. F... justifie avoir adressé une lettre en date du 30 septembre 2009 au directeur des ressources humaines de la société Air Austral, qui en accusé réception, aux termes de laquelle il indiquait notamment : « En référence à l'accord d'entreprise du 6 mars 2008, la mise en stage CDB 711 en août 2009 de M. K... ne respecte pas cet accord. Celui-ci ne s'étant jamais officiellement porté candidat et aucun autre appel d'offre n'ayant été fait depuis. De plus je note que M. K... lors de sa nomination CDB ATR (avant l'accord d'entreprise) a déjà bénéficié d'une nomination au choix, il s'agit donc du deuxième choix compagnie pour un acte de carrière se portant sur la même personne, ceci n'étant à ce jour ni dans l'esprit ni dans la lettre de cet accord. D'autre part, le paragraphe 2.1.5 de l'accord d'entreprise stipule que le Dirigeant Responsable peut refuser la nomination d'un CDB. Si tel était le cas, je vous prie de bien vouloir me signifier les motivations objectives qui auraient conduit M. I... à une telle décision à mon égard. Compte tenu des faits exposés ci-dessus, des rumeurs mais aussi des témoignages de certains de mes collègues et instructeurs concernant la volonté affichée de notre DPNT à vouloir me barrer l'accès à la fonction CDB 777, je vous prie de croire, Monsieur le Directeur que le préjudice dont je semble être la victime est de nature très dommageable pour ma carrière, mais aussi pour ma santé morale et physique. En conséquence, je compte sur vous pour me signaler le plus rapidement possible les correctifs et/ou les réponses que vous souhaiteriez faire à ce sujet afin de réparer cette injustice. Dans l'attente de vos réponses, je vous prie, Monsieur le Directeur d'accepter mes salutations les plus distinguées » ; M. F... soutient que les agissements de la société Air Austral ont entraîné une dégradation de son état de santé et produit un courrier du 17 décembre 2009 (et non un certificat médical), d'un médecin (dont l'identité n'est pas mentionnée) du centre principal d'expertise médicale du personnel navigant (CPEMPN), adressé à un confrère pour consultation de M. F... qui indique « en difficultés relationnelles extrêmes avec sa compagnie Air Austral au point d'avoir développé un état dépressif traité actuellement par Seroplex. Il n'envisage ce jour (mais l'évolution est à apprécier) de reprise des vols et je le déclare inapte temporaire » ; un volet médical renseigné le 4 janvier 2010 par Mme V... médecin généraliste, à l'attention du médecin conseil, mentionnant un état dépressif réactionnel ; un compte rendu d'examen médico psychologique établi le 5 février 2010 par M. P..., médecin en chef du CPEMPN, qui conclut « M. F... âgé de 56 ans, PNT chez Air Austral présente un épisode anxieux et dépressif réactionnel à des difficultés professionnelles dans sa compagnie aérienne. Son état actuel est incompatible avec la reprise des vols. M F... sollicite son inaptitude définitive à ses fonctions de pilote classe 1 » ; la notification de la décision prise le 07 mai 2010, par le conseil médical de l'aéronautique civile, après séance du 5 mai 2010, visant la décision d'inaptitude prononcée le 25 mars 2010 par le directeur du CPEMPN, la demande de M. F... en date du 25 mars 2010 aux fins d'examen de son dossier médical, le déclarant inapte définitivement à exercer sa profession de navigant comme classe 1 - inapte classe 2 ; un courrier du 10 mai 2010 de M. L..., chef de pôle médical, l'informant que le diagnostic retenu par le conseil médical de l'aéronautique civile, pour le déclarer inapte définitivement comme classe 1 est le suivant : état anxio dépressif chronique ; la production des certificats médicaux qui relèvent un état dépressif chronique, de M. F... ainsi que la désignation non contestée aux fonctions de commandant de bord de M. B..., M. U..., et M. K... dont le classement dans la liste de séniorité était postérieur à celui de M. F... à l'issue des épreuves d'évaluation, constituent des éléments qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ;

QUE la société Air Austral soutient en réponse que M. F... n'a nullement été écarté de l'accès à la fonction de commandant de bord, et n'a fait l'objet d'aucun harcèlement moral ; elle fait valoir que les règles internes à la société Air Austral déterminant l'accès à la fonction de commandant de bord ont été respectées, et scrupuleusement appliquées à la candidature de M. F... ; elle invoque l'accord d'entreprise du 6 mars 2008 et le manuel d'exploitation de la société (Manex) qui prévoient les conditions d'accession à la fonction de commandant de bord ; il résulte du manuel d'exploitation que le stage 1ère accession commandant de bord est soumis à une évaluation préalable, que le stagiaire déclaré apte fera partie d'un réservoir dans lequel seront puisés les prochains stagiaires CDB (commandant de bord) dans le respect des règles d'emploi de la LCP (liste de classement professionnel) ; en l'espèce, il est établi que M. F... après avoir passé avec succès la phase d'évaluation théorique et pratique a été déclaré apte le 3 septembre 2008 au stage commandant de bord et qu'il figurait au nombre des candidats admis avec mention de son rang n°32 sur la liste de classement professionnel ; l'accord d'entreprise Air Austral du 6 mars 2008, qui définit les règles relatives au classement professionnel des personnels navigants techniques (PNT) prévoit en son article 2.1.1 principe général : « Une liste de classement professionnel (LCP) est établie pour servir de base aux désignations pour les actes de carrière c'est à dire : le changement de qualification avion, le stage de commandant de bord. A la suite d'une ouverture de poste, la compagnie procède à un appel d'offre. Les désignations s'effectuent dans l'ordre de la LCP parmi les volontaires qui remplissent les critères administratifs techniques correspondant au poste, qui pourraient inclure un processus d'évaluation. » ; la société Air Austral fait valoir que l'accord a prévu : - que la mise en stage devait en principe intervenir dans l'ordre de la LCP, - une possibilité de choix ainsi qu'un droit de refus de la direction selon articles 2.1.2 et 2.1.5 ; selon l'article 2.1.2 : « La compagnie se réserve le droit de passer outre la LCP pour 1/3 des désignations. Toutefois le PNT désigné devra justifier au moins 36 mois d'ancienneté, sauf s'il n'y a aucun volontaire dans ce cas » ; selon l'article 2.1.5 alinéa 2 : « De par les règlements en vigueur, notamment de la délégation de pouvoir faite au commandant de bord par le dirigeant responsable ce dernier pourra refuser la désignation d'un PNT pour une mise en stage commandant de bord » ; la société Air Austral expose que la désignation de M. B... en date du 1er avril 2009, après un stage 1ère accession commandant de bord est intervenue au choix de la direction conformément aux dispositions de l'article 2.1.2 de l'accord du 6 mars 2008 et qu'elle s'inscrivait dans le quota du tiers prévu par l'accord ; ce motif n'est pas formellement discuté par M. F... dans le cadre des moyens de critique du jugement (page 23) ; la société Air Austral justifie que 7 PNT ont été désignés au poste de commandant de bord entre le 3 septembre 2008 date à laquelle M. F... a été déclaré apte à la mise en stage 1ère accession commandant de bord et le 7 mai 2010, date de notification de la décision d'inaptitude classe 1 de M. F... prise par le CMAC, en sorte que la désignation de M. B... 1/7 s'inscrivait bien dans le quota prévu ; concernant la désignation de M. K... en date du 10 octobre 2009, la société Air Austral fait valoir qu'elle correspondait à un acte de carrière différent de celui auquel prétendait M. F..., en ce qu'elle constituait un changement de qualification avion, M. K... étant déjà commandant de bord sur ATR 72, alors que M. F... qui était OPL devait effectuer un stage accession commandant de bord ;

QUE M. F... conteste ces motifs, faisant valoir qu'il résulte de l'accord d'entreprise que la liste de classement de professionnel est établie pour servir de base aux désignations aux actes de carrière qu'il s'agisse d'un changement avion ou stage de commandant de bord, ce qui est exact mais non opérant, M. F... qui n'a pas réalisé le stage 1ère accession commandant de bord, n'étant pas dans la même position que M. K... qui était déjà commandant de bord et n'était pas soumis au stage ; concernant la désignation de M. U... à compter du 25 février 2010, la société Air Austral fait valoir qu'elle est intervenue après un stage 1ère accession commandant de bord, sans respecter la liste LCP, mais que M. F... étant en arrêt de travail pour maladie du 21 octobre 2009 au 30 juin 2010, il n'avait pu être mis en stage commandant de bord ; M. F... discute ce motif, en faisant valoir que la société Air Austral ne peut invoquer son arrêt de travail pour maladie, qu'il ne pouvait être défavorisé concernant son placement sur la liste de séniorité sans que cette mesure ne soit considérée comme discriminatoire, mais ce moyen est inopérant dès lors que M. F... n'était pas dans la même situation que M. U... qui avait effectué le stage 1ère accession commandant de bord, à la différence de M. F... qui ne remplissait pas cette condition ;

QU'en conséquence, il apparaît qu'il est justifié par la société Air Austral qu'elle a procédé à la désignation de M. K..., M. U... et M. B... au poste de commandant de bord conformément aux dispositions de l'accord d'entreprise du 6 mars 2008 et au processus d'admission à ce poste en vigueur dans l'entreprise ; M. F... est non fondé à prétendre qu'il a été évincé du poste de commandant de bord en violation de la liste de séniorité, alors que ce critère ne constituait pas le seul critère de désignation à ce poste ;

QUE concernant les autres faits dénoncés par M. F..., le défaut de réponse à la lettre du 30 septembre 2009, n'est pas discuté ; M. F... qui prétend que plusieurs de ses correspondances seraient demeurées sans réponse (page 26), ne produit aucun élément de nature à étayer ses prétentions, la référence faite au courrier adressé par son conseil postérieurement à la rupture du contrat de travail étant à cet égard inopérante ;

QUE M. F... fait valoir également que la société Air Austral adoptait un comportement abusif sanctionné par les tribunaux et dont la presse se faisait l'écho et produit : - un jugement du tribunal correctionnel de Saint-Denis prononcé le 9 août 2011, à l'encontre de la société Air Austral, de M. I..., prévenus de harcèlement moral à l'égard de Mme Z... ; la société Air Austral, justifie que ce jugement a fait l'objet d'un appel, qu'une relaxe partielle a été prononcée par arrêt du 26 juillet 2012 et fait valoir par des motifs pertinents que les faits sont sans rapport avec la situation de M. F... ; en effet ce dernier n'est pas visé par la procédure qui vise des faits distincts ; - une assignation délivrée le 21 octobre 2011 à la demande de la société Air Austral devant le président du tribunal de grande instance de Saint-Denis en référé concernant une expertise sollicitée par le CHSCT et un rapport Secafi déposé en 2013 ; la société Air Austral fait valoir que ces éléments sont sans rapport direct avec la situation de M. F... ce qui est avéré, l'assignation et le rapport Secafi ne visant pas les faits dont M. F... estime avoir personnellement été victime ; - un compte rendu d'enquête préliminaire, adressé le 12 juin 2012 au procureur de la République près le tribunal de Saint-Denis faisant suite à une plainte déposée le 15 décembre 2011 par M. S... (pièce 26) et le jugement rendu le 23 8 octobre 2012 par le tribunal correctionnel de Saint-Denis saisi à la suite de l'enquête (pièce 27) ; la société Air Austral fait valoir que les faits sont sans rapport avec la situation de M. F... ce qui est avéré, les faits visés étant distincts ;

QUE M. F... produit également les attestations de M. E..., M. O..., M. H... commandants de bord (pièces 29, 30 et 31 ) et fait valoir qu'elles confirment « la discrimination et le règne de l'arbitraire le plus total dans l'entreprise ainsi que le fait qu'il en a été la victime directe » ; selon attestation établie le 17 mai 2013, M. E... fait état de propos rapportés par M. T... selon lesquels M. C... projetait d'éliminer M. F... du test d'aptitude de commandant de bord au simulateur ; aucune attestation de M. T... venant confirmer ces propos n'est produite ; ce témoignage en ce qu'il se borne à faire référence à des propos rapportés est non probant ;

QUE selon attestation du 15 novembre 2013, M. O... indique que M. F... a été arbitrairement écarté de la fonction de commandant de bord, alors que c'était son tour et notamment que M. U..., M. B..., qui étaient classés derrière lui ont été progressivement mis en stage sans qu'aucune raison ne soit donnée à M. F... ; les appréciations de M. O... ne sont étayées d'aucun élément justificatif ; elles sont insuffisantes à remettre en cause l'analyse contradictoire effectuée concernant les nominations précitées en considération des pièces respectives produites ;

QUE selon attestation du 15 mai 2013, M. H... indique que M. T... lui avait rapporté que M. C..., avait, avant l'évaluation à l'aptitude commandant de bord de M. F..., émis le souhait de faire son évaluation afin " de se le farcir " ; ce témoignage en ce qu'il se borne à faire référence à des propos rapportés est non probant ;

QUE l'analyse des certificats médicaux et du compte rendu d'examen médico psychologique produits par M. F... dont il résulte qu'il a présenté un état anxio dépressif chronique, ayant motivé la décision d'inaptitude classe 1 prise par le conseil médical de l'aéronautique civile, ne permet pas de caractériser un lien de causalité entre l'état de santé de M. F... et les agissements de la direction de la société Air Austral, la mention des seuls dires de M. F..., quant à un " vécu " de harcèlement, de ségrégation n'étant pas démonstratifs en eux- mêmes

QU'en considération de l'analyse des éléments produits il ressort que les faits dénoncés par M. F... pris dans leur ensemble ne sont pas constitutifs d'agissements répétés de harcèlement ayant pour objet ou effet de dégrader ses conditions de travail, de porter atteinte à ses droits et dignité ou d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel ; le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a considéré que le harcèlement moral n'était pas constitué ce qui conduit à débouter le salarié de toutes demandes indemnitaires découlant de sa demande de reconnaissance de faits de harcèlement moral ;

QUE le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté M. F... de sa demande tendant à l'octroi de la somme de 132.178 euros à titre de dommagesintérêts pour harcèlement moral ce dernier étant non constitué, de la demande en paiement de 1.302.055 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice économique résultant de d'éviction du poste de commandant de bord, le préjudice étant ni établi ni imputable à la société Air Austral, de la demande en paiement de 396.534 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de l'altération de l'état de santé moral, qui n'est pas imputable aux agissements de la société Air Austral ;

Et AUX MOTIFS éventuellement partiellement adoptés QUE sur les divers préjudices pour : manquement de l'employeur à son obligation légale de sécurité de résultat concernant la protection de la santé des salariés dans l'entreprise, manquement de l'employeur à son obligation réglementaire de prévention des risques professionnels, manquement de l'employeur à l'obligation de l'entretien annuel , manquement de l'employeur à son obligation légale de prévention des agissements constitutifs de harcèlement moral dans l'entreprise ; sur le préjudice moral et altération de la santé ; que M. J... F... déclare : - l'absence de suivi de santé au travail, au sens du code du travail ; - l'absence de l'évaluation réglementaire des risques professionnels, du plan d'actions réglementaires contre les risques professionnels, la rédaction et la mise à jour annuelle réglementaire du document unique d'évaluation des risques professionnels ; - l'absence d'entretiens annuels ; - l'absence de prévention spécifique contre le harcèlement moral dans la Compagnie Air Austral ; qu'il estime qu'il a subi un préjudice spécifique du fait de l'altération de l'état de santé morale constitutif d'une atteinte permanente à son intégrité psychologique avec gêne fonctionnelle psychologique permanente ; que M. J... F... se dit victime de harcèlement moral et réclame les sommes de 132 178 euros au titre de dommages et intérêts, 396 534 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct du fait de l'altération de sa santé ; vu les articles 1152-1,1152-2,1152-4 du code du travail ; vu les pièces versées au dossier ; qu'il est noté dans le rapport Secafi que "au regard du contexte et des situations révélées, la direction d'Air Austral a exprimé son souhait d'accompagner la démarche du CHSCT afin qu'un état des lieux soir réalisé sur les facteurs de risques psychosociaux afin d'objectiver la situation. L'objectif de cette expertise étant de faire en sorte que les collaborateurs puissent évoluer dans un contexte aussi favorable que possible, diminuer les risques psychosociaux et initier une politique de prévention interne" ; que cette expertise a eu lieu ; que le salarié dispose d'un droit d'alerte et de retrait s'il s'estime confronté à des problèmes de sécurité au travail ; vu les articles L. 4121-1, L. 4132-4 ; que le Conseil ne peut faire ressortir aucun élément qui permette d'établir avec certitude que la société Air Austral ait exercé un quelconque harcèlement moral sur la personne de M. J... F... ; qu'aucun élément à l'appui d'un possible harcèlement moral ne vient étayer la version de la partie demanderesse ; que les médecins qui ont établi les arrêts de travail, sont extérieurs de l'entreprise et "rapportent" les dires et faits du salarié ; que le Conseil ne peut statuer sur aucun élément à l'appui d'une possible dégradation de son état de santé consécutive à des problèmes professionnels ; le conseil déboute M. J... F... de ses chefs de demande d'indemnités pour harcèlement moral et préjudice distinct ;
/
sur le harcèlement moral, le refus d'accession à la fonction de commandant de bord, les préjudices économiques subis, que M. F... estime que l'inaptitude médicale définitive à exercer la fonction de navigant technique classe 1, la perte de son emploi d'officier de pilote de ligne, la perte de la valeur sur le marché du travail et de l'accès à un nouvel emploi hors navigant sont consécutifs aux agissements répétitifs psychotoxiques subis dans la compagnie AIR AUSTRAL; qu'il soutient que d'autres Personnels Navigants Techniques, moins bien classés que lui sur la liste de Classement Professionnel déterminée par l'accord du 6 mars 2008 définissant les règles relatives au classement professionnel des personnels navigants techniques, auraient été mis en Stage 1ère accession Commandant de Bord avant lui ; que la note de service de la société AIR AUSTRAL datée du 9 juin 2008 ayant pour objet la "mise en place d'une procédure d'évaluation des OPL candidats aux ouvertures de poste de Commandant de Bord, stipule" dans le souci de mettre en place dans la Compagnie un cadre de formation standardisé et juste, et compte tenu du nombre de postes de CDB tous secteurs offerts et du nombre de candidats, il a été décidé avec l'ensemble des instructeurs de définir et d'utiliser une procédure d'évaluation qui sera appliquée conformément aux règles d'emploi de la liste de séniorité récemment adoptée dans la Compagnie" ; que plusieurs étapes y en font mention : 1ère phase : examen des candidatures ; 2ème phase : évaluation théorique des candidats aux postes long-courrier ; 3ème phase :
évaluation CRM et vol ; 4ème phase : évaluation simulateur ; que l'accord d'entreprise d'AIR AUSTRAL du 6 mars 2008, ayant pour objet les "règles relatives au classement professionnel des Personnels navigants techniques" ; qu'au chapitre 2 du présent accord : "Liste de Classement Professionnel - LCP", il est stipulé au chapitre 2.1 "principes de fonctionnement" et au 2.1.1 "Principe Général" : "une liste de classement professionnel est établie pour servir de base aux désignations pour les actes de carrière, c'est à dire : - changement de qualification avion ; - stage de commandant de bord ; à la suite d'une ouverture de poste, la compagnie procède à un appel d'offre. Les désignations s'effectuent alors dans l'ordre de la LCP parmi les volontaires qui remplissent les critères administratifs et techniques correspondant au poste..." ; qu'au chapitre 2.1.2 "choix compagnie", il est stipulé : "la compagnie se réserve le droit de passer outre la LCP pour 1/3 des désignations...." ; qu'une note de service, datée du 11 mai 2008, ayant pour objet : "appel à candidature pour des postes de CDB tous secteurs OPL B777 et SFIB777", fait état "les postes seront ensuite attribués conformément aux règles d'emploi de la liste de Classement Professionnel (LCP) en cours d'adoption par la compagnie et en fonction des contraintes de calendrier liées à "l'effet domino " des changements de secteur..." ; que suite au stage effectué d'évaluation Commandant de Bord, par une décision du 3 septembre 2008, M. J... F... a été reconnu apte ; qu'il est versé au dossier des documents "PERSONNEL NAVIGANT TECHNIQUE - PNT STAGE 1èRE ACCESSION CDB", qu'il est stipulé au chapitre 2 "EVALUATION TECHNIQUE AVANT LA MISE EN STAGE 1ERE ACCESSION CDB", alinéa 6 "Aptitude" : "Le stagiaire déclaré apte fera partie d'un réservoir dans lequel seront puisés les prochains stagiaires CDB dans le respect des règles d'emploi de la LCP..." ; que le résultat de l'évaluation des OPL effectuée de juillet à septembre 2008 en vue du stage accession CDB, fait état d'une inscription de M. J... F... comme "stagiaires CDB en réserve " ; que sur un état de Postes PNT à pourvoir de mars 2008, il est noté 6 postes de CDB B 777 ; que sur la Liste de Séniorité, date de référence : 28 février 2008, M. J... F... est placé au n° 32, devant M. A... U... (n° 33) , M. M... FONTAINE (n° 34) et G... B... (n° 40) ; qu'une note de service datée du 27 mars 2009 fait état de la désignation de M. Y... B..., classé 40ème sur la LCP, au poste de Commandant de Bord sur Boeing 777 à compter du 1er avril 2009 ; qu'il est versé au dossier un récapitulatif des actes de carrière PNT 2008/2009 et qu'il est inscrit dans les remarques que : M. G... B..., LCP, a fait l'objet d'un "Choix compagnie", donc conformément aux dispositions de l'accord du 6 mars 2008 ; qu'une note d'information datée du 12 Octobre 2009, M. M... K..., CDB sur article 72, classé 34ème sur la LCP, a été nommé CDB à partir du 9 Octobre 2009, dans le cadre d'un "changement de qualification avion", donc conformément aux dispositions de l'accord du 6 mars 2008 ; qu'une note de service datée du 23 Février 2010 fait état de la nomination de M. A... U..., classé en 33ème sur la LCP, en qualité de CDB à compter du 25 février 2010 ; que M. J... F... n'était pas dans l'entreprise à cette période de nomination, car en arrêt maladie ; que M. J... F... sollicite la somme de 132 178 € (cent trente-deux mille cent soixante-dixhuit euros) au titre de dommages et intérêts ; par ailleurs, il estime qu'il aurait dû accéder au poste de commandant de bord depuis le 1er avril 2009 et que le préjudice subi (carrière et retraite) s'élève à 1 302 055 € ; vu les pièces versées au dossier ; que l'état de santé de M. J... F... était déjà fragilisé car en congés maladie depuis courant 2007, à plusieurs reprises, avant l'appel d'offres d'accession à la fonction de Commandant de Bord (2008) ; que le Conseil ne peut faire ressortir aucun élément qui permette d'établir avec certitude que la société AIR AUSTRAL ait exercé un quelconque harcèlement moral sur la personne de M. J... F... ; que le Conseil ne peut statuer sur aucun élément à l'appui d'une possible relation entre la perte de l'emploi, l'inaptitude définitive classe 1 et la perte de la valeur sur le marché du travail avec d'éventuels agissements répétitifs psychotoxiques de la société AIR AUSTRAL ; le Conseil dit que : M. J... F... n'a pas été écarté de l'accès à la fonction de commandant de bord, que les règles internes, notamment l'accord d'entreprise du 6 mars 2008, à la société AIR AUSTRAL ont été respectées dans le cadre de l'accession à la fonction de commandant de bord ; le Conseil déboute la partie demanderesse de ces chefs de demande ;

1° ALORS QUE les juges doivent examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié au soutien de la demande tendant à voir juger qu'il a été victime de harcèlement moral ; que le salarié a soutenu que l'employeur avait fait preuve de mépris en laissant sans réponse son courrier du 30 septembre 2009, qu'il n'avait pas organisé les entretiens annuels prévus légalement, ne l'avait pas fait bénéficier de suivi médical par la médecin du travail et notamment de visite d'embauche et de suivi pour surveillance médicale renforcée, et n'avait pas respecté ses obligations en matière de prévention de harcèlement et des risques psycho-sociaux ; qu'en ne se prononçant pas sur l'intégralité des éléments dont le salarié se prévalait au soutien de sa demande, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail ;

2° ALORS QUE dès lors que le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que la cour d'appel a retenu que Monsieur F... était mieux placé que Monsieur B... sur la liste professionnelle mais que la direction se réservait le droit de passer outre la liste pour 1/3 des désignations et que le choix de Monsieur B... s'inscrivait dans ce quota ; qu'en statuant comme elle l'a fait quand l'existence de ce quota ne permettait pas à elle seule d'établir que la décision de l'employeur de choisir Monsieur B... au détriment de Monsieur F... était justifiée par des motifs objectifs exclusifs de tout harcèlement, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail

3° Et ALORS QUE le salarié n'est tenu que d'apporter des éléments qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que les juges ne peuvent rejeter la demande du salarié au motif que la preuve entre son état de santé et les agissements de l'employeur n'est pas établie ; que pour rejeter la demande du salarié, la cour d'appel a énoncé que l'analyse des certificat médicaux ne permettait pas de caractériser un lien de causalité entre l'état de santé de Monsieur F... et les agissements de la direction ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur F... de sa demande tendant à voir juger son licenciement nul et de nul effet et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, obtenir le paiement de dommages et intérêts en indemnisation de l'intégralité du préjudice subi, de l'avoir condamné en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens

AUX MOTIFS propres QUE M. F..., engagé en qualité d'officier pilote de ligne par la société Air Austral, selon contrat à durée indéterminée à effet du 20 mars 2003, et placé en arrêt de travail à compter du 21 octobre 2009 pour le dernier, avec prolongations successives jusqu'au 30 juin 2010, a saisi le 25 mars 2010 le conseil médical de l'aéronautique civile, qui l'a déclaré inapte définitivement à exercer sa profession de navigant comme classe 1, inapte classe 2 par décision notifiée le 7 mai 2010 qui n'est pas discutée ; M. F..., a été licencié par lettre du 20 mai 2010, dans les termes suivants qui fixent les limites du litige : « Lors de notre entretien préalable du 18 mai, nous avons évoqué votre situation d'inaptitude médicale définitive en classe 1 interdisant votre emploi en tant que PNT, puis votre refus du 11 mai à notre proposition de reclassement en tant que personnel au sol et vous avez confirmé votre position en nous précisant refuser tout type d'emploi de reclassement. Dès lors devant l'impossibilité de vous employer nous sommes amenés à envisager votre licenciement » ; le premier moyen invoqué par M. F... sur le fondement de l'article L. 1152-3 du code du travail, est rejeté en ce que la présente décision le déboute de sa demande fondée sur le harcèlement moral ;

QU'il invoque également la violation de l'article L.1132-1 du code du travail et de la discrimination en ce que le licenciement serait fondé sur l'état de santé, et illicite en l'absence d'intervention du médecin du travail il est relevé : - que M. F... était en arrêt de travail pour maladie dont le caractère professionnel n'est pas allégué ; il n'a pas manifesté auprès de son employeur son intention de reprendre le travail après avoir été déclaré inapte définitivement à exercer sa profession de navigant comme classe 1, inapte classe 2 par décision du conseil médical de l'aéronautique civile notifiée le 7 mai 2010, ainsi que le fait valoir la société Air Austral sans être contredite, ce dont il résulte que le contrat de travail était suspendu et que la saisine du médecin du travail n'avait pas lieu d'être envisagée par l'employeur ;

QU'il résulte de la lettre de licenciement que la rupture du contrat de travail est motivée par l'impossibilité pour la société Air Austral d'employer M. F..., en raison de la décision d'inaptitude définitive à l'exercice de sa profession de navigant, prise par le CMAC et de son refus de tout emploi au sol, qui constitue un motif licite non lié à l'état de santé ;

QUE M. F..., discute pour la première fois en appel, son refus de la proposition de reclassement sur un poste de technicien au sol, ainsi que de tout autre poste au sol, faisant valoir qu'il a recopié une lettre modèle de l'adjointe du directeur des ressources humaines, qui pouvait être facilement obtenue de lui compte tenu de sa situation psychologique et de l'exaspération nerveuse dans laquelle il se trouvait, que la proposition de reclassement n'était pas sincère et véritable en l'absence de précision du lieu d'affectation et que l'employeur a failli à son obligation de reclassement en ne lui proposant pas un poste d'instructeur SFI ; M. F... ne produisant aucun élément de nature à établir qu'une violence morale ou contrainte a été exercée sur lui, lors de la rédaction de la lettre de refus, ou qu'il souffrait d'une altération de ses facultés mentales de nature à compromettre la manifestation de sa volonté et de son refus de tout poste au sol, qu'il a maintenu et réitéré lors de l'entretien préalable, il est non fondé à reprocher à l'employeur de pas lui avoir proposé un autre poste, la société Air Austral ayant justement pris en compte son refus exprimé sans réserves de tout emploi au sol, assorti d'une demande de rupture du contrat de travail ;

QU'il résulte de l'ensemble des éléments ainsi rappelés, que le licenciement est intervenu en période de suspension du contrat de travail, qu'aucune reprise n'étant envisagée, la saisine de la médecine du travail n'avait lieu d'être effectuée par l'employeur, et qu'il est fondé sur : - la décision de prise par le CMAC dont il résultait une incapacité d'exercice des fonctions de pilote pour M. F..., - le refus du poste au sol, réitéré et maintenu lors de l'entretien préalable, - le refus de tout autre poste, ces trois éléments caractérisant l'impossibilité de maintenir le contrat de travail, le jugement du conseil de prud'hommes est confirmé en ce qu'il a dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et débouté M. F... de ses demandes indemnitaires ; sur les autres demandes indemnitaires, M. F..., invoque divers préjudices, dont il sollicite indemnisation sur une base forfaitaire et globale, sans préciser les divers chefs permettant une appréciation par chef de demande au regard d'un préjudice propre à chaque demande ; M. F... est en conséquence débouté de ses demandes et le jugement confirmé ;

AUX MOTIFS éventuellement partiellement adoptés QUE M. J... F... estime que son licenciement est nul car : - l'employeur a failli à ses obligations de le soumettre, à l'issue de son arrêt maladie, à la visite de reprise auprès du médecin du travail telle que prévue par les dispositions du code du travail, - fait suite à des agissements de harcèlement moral ; que M. J... F... estime que la médecine du travail a été "exclue" de la procédure de licenciement pour inaptitude ; que M. J... F... se dit victime de harcèlement discriminatoire et réclame la somme de 132 178 € au titre de dommages et intérêts ; que l'Expertise Médicale du Personnel Navigant dans l'AERONAUTIQUE CIVILE mentionne au chapitre "LA VISITE D'EXPERTISE" : " Expertise : A pour finalité d'apprécier l'aptitude physique et mentale des personnels à assurer des fonctions spécifiques de sécurité, qui lui sont dévolues à bord (code de l'aviation civile)..." ; « Diffère de la visite médicale du travail ou de la prévention que ces personnels navigants doivent également passer qui a pour but de juge de l'aptitude d'un personnel à un poste de travail et de son adaptation à ce poste de travail, (code du travail) » ; qu'il a par conséquent cumul des deux compétences : Médecine Aéronautique et Médecine du Travail ; qu'il ressort de l'article D 424-2 du code de l'aviation civile qu'il appartient au Conseil médical de l'Aéronautique Civile de se prononcer sur le caractère définitif des inaptitudes du personnel navigant technique et de la perte consécutive de licence du salarié, que cette perte de licence n'a pas pour effet d'imposer aux parties la rupture du contrat de travail, qu'elle a eu pour seul effet d'interdire la reprise des fonctions de navigant ; que le compte rendu d'examen médico-psychologique daté du 5 Février 2010, rédigé par le médecin en chef M-D. R... stipule en conclusion : "M. J... F... ...présente un épisode anxieux et dépressif réactionnel à des difficultés professionnelles dans sa compagnie aérienne ; "Son état actuel est incompatible avec la reprise des vols ; "M. J... F... sollicite son inaptitude définitive à ses fonctions de pilote classe 1 " ; que par décision datée du 7 Mai 2010, le Conseil Médical de l'Aéronautique Civile décide de déclarer M. J... F... "inapte définitivement à exercer sa profession de navigant comme classe 1 et inapte classe 2 " ; que les normes médicales pour le Conseil Médical de l'Aéronautique civile, la classe 1 correspond au "Personnel navigant professionnel : pilote de ligne avion et hélicoptère, Pilote professionnel avion et hélicoptère, Mécanicien navigant, Parachutiste professionnel" ; que M. J... F... faisait fonction d'Officier Pilote de Ligne, et entrait dans le champ d'application du statut particulier du personnel navigant de l'Aéronautique Civile et de ce fait, n'était pas soumis aux dispositions du code du travail relatives à la reconnaissance, par le médecin du travail, de son inaptitude ; que le salarié estime que son employeur a violé l'obligation de reclassement suite à l'inaptitude définitive ; que M. J... F... réclame la somme de 66 089 € au titre de l'indemnité compensatrice pour non-respect de la procédure de reclassement ; que suite à cette inaptitude, la société AIR AUSTRAL, par courrier remis en mains propres le 11 mai 2010, propose au salarié un emploi au sol en qualité de Technicien pour les études opérationnelles, les Opérations, la Documentation technique, la sécurité des vols et l'exploitation des données informatiques des vols" ; que le 11 mai 2010, M. J... F... écrit à AIR AUSTRAL en ces termes "...je ne peux, pour des raisons personnelles, accepter le reclassement que vous me proposez, ni accepter un quelconque reclassement comme personnel au sol..." ; "Ce contexte impose la rupture de mon contrat de travail...." ; que par courrier remis en mains propres, le 12 mai 2010, la société convoque le salarié à un entretien préalable pour licenciement éventuel suite à un refus de reclassement ; que le 20 mai 2010, par lettre recommandée avec accusé de réception, le licenciement est prononcé suite à une inaptitude médicale classe 1 et refus de reclassement au sol ; qu'au vu de l'inaptitude médicalement constatée du salarié à exercer son métier d'Officier Pilote de Ligne, l'employeur lui a proposé au titre de l'obligation de reclassement un poste au sol ; que M. J... F..., par courrier du 11 mai 2010, rejette la proposition de reclassement qui a été faite et rejette aussi " tout reclassement comme personnel au sol", pour des raisons personnelles et déclare que "ce contexte impose la rupture de mon contrat de travail " ; que lors de l'entretien préalable du 18 mai 2010, M. J... F... confirme sa position de refus pour tout type d'emploi de reclassement ; le Conseil dit que le licenciement de M. J... F..., déclaré inapte classe 1, est valablement fondé dès lors que l'employeur a respecté les prescriptions des articles L. 1226-2 et suivants du code du travail ; vu les pièces versées aux débats ; vu les articles L, 410-2, D. 424-2 du code de l'aviation civile ; vu les articles L. 6511-2, L. 6511-4, L. 6521-1, L.6521-2, L.6521-6 du code des transports ; le Conseil déboute la partie demanderesse de ces chefs de demande ;

ET AUX MOTIFS énoncés au premier moyen

1°) ALORS QU'au soutien de la contestation du licenciement, le salarié s'est prévalu du harcèlement dont il avait été victime ; que la cour d'appel a rejeté ses demandes sur ce point, ce que le salarié a contesté dans le premier moyen de cassation ; que dès lors, la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation emportera cassation de l'arrêt en ses dispositions relatives à la rupture du contrat de travail et ce, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2° ALORS subsidiairement QU' aucun salarié ne peut être licencié en raison de son état de santé ; que la cour d'appel a retenu que la rupture du contrat de travail était motivée par l'impossibilité pour la société Air Austral d'employer M. F..., en raison de la décision d'inaptitude définitive à l'exercice de sa profession de navigant, prise par le CMAC et de son refus de tout emploi au sol, qui constitue un motif licite non lié à l'état de santé ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand la lettre de licenciement mentionne que le licenciement est prononcé en raison de l'inaptitude médicale du salarié, ce dont il résultait que le motif est son état de santé, ce qui entraînait la nullité du licenciement, peu important d'autres motifs figurant également dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L1232-6, L1132-1 et L1132-4 du code du travail ;

3° Et ALORS QUE le juge doit observer le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que pour rejeter les demandes, la cour d'appel a retenu que l'employeur n'avait pas d'obligation de saisir la médecine du travail aux motifs que le licenciement était intervenu en période de suspension du contrat de travail ; qu'en statuant comme il l'a fait, quand la société Air Austral n'avait pas soutenu ce moyen qu'elle a soulevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4° ALORS QU'en application des articles L1132-1 et L1132-4 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail et le licenciement prononcé en méconnaissance de ces dispositions est nul de plein droit ; que le licenciement est toutefois possible s'il est motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées de l'intéressé, et si ces perturbations entraînent la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand le licenciement n'était pas motivé par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement aurait été perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées de l'intéressé, ni par la nécessité pour l'employeur de procéder à son remplacement définitif mais par une inaptitude médicale du salarié qui n'avait pas été constatée par le médecin du travail, la cour d'appel a violé les articles L1232-6, L1132-1 et L1132-4 du code du travail

5° ALORS, en outre , QU'en application des articles L1132-1 et L1132-4 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le médecin du travail lequel est seul compétent pour se prononcer sur l'inaptitude du salarié à son poste de travail ; que la cour d'appel, adoptant le cas échéant les motifs des premiers juges, a retenu que les dispositions du code du travail relatives à la reconnaissance de son inaptitude par le médecin du travail n'était pas applicables au salarié ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand le salarié devait bénéficier des dispositions du code du travail applicables en matière de prévention et de protection de la santé et prévoyant l'intervention du médecin du travail notamment pour se prononcer sur l'inaptitude du salarié à son poste de travail et les recherches de reclassement, la cour d'appel a violé les articles L6521-6 du code des transports, ensemble les articles L1132-1, L1132-4, L4111-1, L4121-1, L4621-1, R4624-31 du code du travail ;

6° Et ALORS QUE le salarié déclaré inapte ne peut être licencié que lorsque l'employeur a recherché en vain toutes possibilités de reclassement ; que pour rejeter la demande du salarié, la cour d'appel a retenu qu'il avait refusé d'être affecté au sol et qu'il ne produisait aucun élément de nature à établir qu'une violence morale ou contrainte a été exercée sur lui, lors de la rédaction de la lettre de refus, ou qu'il souffrait d'une altération de ses facultés mentales de nature à compromettre la manifestation de sa volonté et de son refus de tout poste au sol ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand elle avait constaté l'état dépressif chronique du salarié altérant l'expression de son consentement, la cour d'appel a violé l'article L1226-2 du code du travail ;

7° ALORS enfin QU'il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié ; il doit, quelle que soit la position prise par le salarié, rechercher toutes possibilités de reclassement le cas échéant par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail au sein de l'entreprise ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand l'employeur n'avait pas apporté le preuve de l'impossibilité de procéder au reclassement du salarié en mettant en oeuvre le cas échéant des mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L1226-2 du code du travail.

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