26 février 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-25.036

Chambre commerciale financière et économique - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2020:CO00149

Titres et sommaires

PRESCRIPTION CIVILE - Prescription quinquennale - Article 2224 du code civil - Point de départ - Connaissance des faits permettant l'exercice de l'action - Cas - Action en paiement du prix d'une prestation de service - Achèvement des prestations

L'article L. 441-3 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, impose au vendeur de délivrer sa facture dès la réalisation de la prestation de service et, si ce texte prévoit aussi que l'acheteur doit réclamer la facture qui mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir, l'obligation au paiement du client prend naissance au moment où la prestation commandée a été exécutée. Après avoir fait ressortir que le créancier connaissait, dès l'achèvement de ses prestations, les faits lui permettant d'exercer son action en paiement de leur prix, une cour d'appel a exactement retenu que l'action en paiement introduite par lui plus de cinq ans après cet achèvement était prescrite, peu important la date à laquelle il avait décidé d'établir sa facture

PRESCRIPTION CIVILE - Prescription quinquennale - Actions personnelles ou mobilières - Point de départ - Détermination - Portée

VENTE - Vente commerciale - Action en paiement du prix - Prescription - Délai - Point de départ - Détermination - Portée

Texte de la décision

COMM.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 26 février 2020




Rejet


Mme MOUILLARD, président



Arrêt n° 149 F-P+B

Pourvoi n° K 18-25.036




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 26 FÉVRIER 2020

La société Hydroc, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° K 18-25.036 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société 2 C aménagement, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fevre, conseiller, les observations de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de la société Hydroc, de Me Le Prado, avocat de la société 2 C aménagement, après débats en l'audience publique du 7 janvier 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Fevre, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 27 septembre 2018), la société Hydroc a réalisé trois études en mars 2008 et octobre 2009 pour le compte de la société 2C aménagement, à la suite de trois devis du 14 décembre 2007, acceptés.

2. Le 4 juin 2010, la société Hydroc a établi trois factures, restées impayées, et, le 2 février 2015, a assigné la société 2C aménagement, qui lui a opposé la prescription de son action en paiement.

Examen du moyen unique

Enoncé du moyen

3. La société Hydroc fait grief à l'arrêt de déclarer son action en paiement prescrite et ses demandes irrecevables alors :

« 1°/ que le point de départ du délai de prescription quinquennale de l'action en paiement d'une facture adressée par un professionnel pour les services qu'il fournit se situe au jour de l'établissement de la facture correspondant à leur exécution ; que dès lors, en fixant le point de départ du délai de prescription de l'action en paiement de la société Hydroc, au titre des factures établies pour les études géologiques réalisées par celle-ci, au jour de la réalisation des prestations et non au jour de l'établissement desdites factures, la cour d'appel a violé l'article L. 110-4 du code de commerce ;

2°/ que le point de départ du délai de prescription quinquennale de l'action en paiement d'une facture adressée par un professionnel pour les services qu'il fournit se situe au jour de l'établissement de la facture correspondant à leur exécution ; qu'en retenant, pour juger les demandes de la société Hydroc prescrites, que les factures litigieuses avaient été établies tardivement au regard des dispositions de l'article L. 441-3 du code de commerce exigeant l'établissement des factures par le professionnel dès la réalisation de la prestation de service, cependant que l'éventuel non-respect des dispositions de ce texte ne peut avoir pour effet de modifier le point de départ de la prescription de l'action en paiement dont dispose le professionnel pour les biens et services qu'il fournit, la cour d'appel a violé les articles L. 110-4 et L. 441-3 du code de commerce ; »

Réponse de la Cour

4. Aux termes de l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent pas cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

5. Après avoir énoncé que, selon l'article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants se prescrivent par cinq ans, l'arrêt relève que les prestations dont le paiement est demandé ont été exécutées en mars 2008 et octobre 2009. Il rappelle que l'article L. 441-3 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, impose au vendeur de délivrer sa facture dès la réalisation de la prestation de service et que, si ce texte prévoit aussi que l'acheteur doit réclamer la facture qui mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir, l'obligation au paiement du client prend naissance au moment où la prestation commandée a été exécutée.

6. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, faisant ressortir que la société Hydroc connaissait, dès l'achèvement de ses prestations, les faits lui permettant d'exercer son action en paiement de leur prix, la cour d'appel a exactement retenu que l'action en paiement introduite par cette société le 2 février 2015 était prescrite, peu important la date à laquelle elle avait décidé d'établir sa facture.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Hydroc aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Hydroc et la condamne à payer à la société 2C aménagement la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société Hydroc

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré l'action en paiement de la société Hydroc prescrite et toutes ses demandes irrecevables ;

AUX MOTIFS QUE

« attendu que l'article L 441-1 du Code de commerce impose au vendeur de délivrer sa facture dès la réalisation de la prestation de service ; que même si selon ce texte l'acheteur doit réclamer la facture qui mentionne la date à laquelle le règlement doit intervenir, l'obligation au paiement de l'acquéreur prend naissance au moment où la prestation qu'il a commandée a été exécutée par le prestataire ;
attendu que l'article L110-4 du Code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi 2008-561 du 17 juin 2008, dispose que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes ;
attendu qu'en l'espèce suite à trois devis que la société 2C AMÉNAGEMENT a acceptés le 14 décembre 2007, cette société a commandé à la société HYDROC trois études géologiques qui lui étaient nécessaires dans le cadre des opérations immobilières dénommées LA BEGUDE DE MEZENC, LES RIVES DU JABRON et encore LES RÉSIDENCES DES BLACHES ; que ces prestations ont été réalisées en mars 2008 et en octobre 2009 ;
que par exploit du 2 février 2015 la société HYDROC a assigné la société 2 C AMÉNAGEMENT en paiement des trois factures qu'elle a établies le 4 juin 2010 au titre de ses prestations dans le cadre des trois opérations ;
que c'est donc à tort que les premiers juges ont considéré que la demande n'était pas prescrite et prononcé condamnation au profit de la société HYDROC ;
qu'il convient d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de déclarer irrecevables les demandes de la société HYDROC ;

1) ALORS QUE le point de départ du délai de prescription quinquennale de l'action en paiement d'une facture adressée par un professionnel pour les services qu'il fournit se situe au jour de l'établissement de la facture correspondant à leur exécution ; que dès lors, en fixant le point de départ du délai de prescription de l'action en paiement de la société Hydroc, au titre des factures établies pour les études géologiques réalisées par celle-ci, au jour de la réalisation des prestations et non au jour de l'établissement desdites factures, la cour d'appel a violé l'article L 110-4 du code de commerce ;

2) ALORS QUE le point de départ du délai de prescription quinquennale de l'action en paiement d'une facture adressée par un professionnel pour les services qu'il fournit se situe au jour de l'établissement de la facture correspondant à leur exécution ; qu'en retenant, pour juger les demandes de la société Hydroc prescrites, que les factures litigieuses avaient été établies tardivement au regard des dispositions de l'article L 441-3 du code de commerce exigeant l'établissement des factures par le professionnel dès la réalisation de la prestation de service, cependant que l'éventuel non-respect des dispositions de ce texte ne peut avoir pour effet de modifier le point de départ de la prescription de l'action en paiement dont dispose le professionnel pour les biens et services qu'il fournit, la cour d'appel a violé les articles L 110-4 et L 441-3 du code de commerce.

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