18 mars 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-14.297

Chambre sociale - Formation plénière de chambre

ECLI:FR:CCASS:2020:SO00372

Texte de la décision

SOC.

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 18 mars 2020




Cassation partielle


M. CATHALA, président



Arrêt n° 372 FP-D

Pourvoi n° N 18-14.297




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 MARS 2020

L'association Avicenne Limay, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° N 18-14.297 contre l'arrêt rendu le 23 janvier 2018 par la cour d'appel de Versailles (6e Chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. L... U..., domicilié [...] ,

2°/ à Pôle emploi de Noisy-le-Grand, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de l'association Avicenne Limay, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. U..., et l'avis de M. Desplan, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 février 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, M. Maron, Mme Aubert-Monpeyssen, MM. Rinuy, Pion, Pietton, Mmes Cavrois, Pécaut-Rivolier, conseillers, Mme Depelley, MM. David, Silhol, Mme Chamley-Coulet, conseillers référendaires, M. Desplan, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. U... a exercé les fonctions d'imam du Centre islamique de la Fraternité à Limay, géré par l'association Avicenne Limay (l'association), de juillet 2011 à juin 2013, sans établissement d'un contrat écrit ; que, contestant la rupture de la relation contractuelle, il a saisi le 19 juin 2013 la juridiction prud'homale ; que, par jugement du 27 avril 2015, le conseil de prud'hommes s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance ; que, statuant sur contredit, la cour d'appel a, par arrêt du 24 mai 2016, retenu la compétence de la juridiction prud'homale et, évoquant le fond du litige, renvoyé l'affaire au fond ; que la cour d'appel a retenu l'existence d'un contrat de travail à temps complet par arrêt du 23 janvier 2018 ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de dire que M. U... a travaillé au sein de l'Association Avicenne Limay dans le cadre d'un contrat de travail à temps complet du 8 juillet 2011 au 1er juin 2013, le contrat ayant pris fin à l'issue du préavis le 1er juillet 2013, et de la condamner à lui payer des sommes à titre d'indemnité de préavis d'un mois, des congés payés afférents, d'indemnité légale de licenciement, de dommages-intérêts pour procédure irrégulière et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que l'autorité de la chose jugée s'étend aux motifs d'une décision se prononçant sur la compétence, lorsqu'ils en sont le soutien nécessaire ; que la cour d'appel qui a dit que M. U... était lié par un contrat de travail à temps complet à l'association Avicenne Limay alors que l'arrêt du 24 mai 2016 statuant sur la compétence de la juridiction prud'homale avait jugé que les activités cultuelles de M. U... étaient irréductibles au droit a violé les articles 1355 du code civil, 77 et 95 du code de procédure civile ;

2°/ que l'arrêt du 24 mai 2016 revêtu de l'autorité de la chose jugée a formellement exclu du périmètre du contrat de travail de M. U... ses activités cultuelles, limitant son contrat de travail à ses activités étrangères à tout engagement religieux d'enseignement et à l'organisation de conférences ; que la cour d'appel, pour dire que l'arrêt du 24 mai 2016 n'avait pas défini le périmètre du contrat de travail a méconnu le principe qui interdit de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;

Mais attendu qu'en vertu de l'article 79 du code de procédure civile, c'est seulement lorsque le juge a, en se prononçant sur la compétence, tranché dans le dispositif la question de fond dont dépend cette compétence, que sa décision a autorité de la chose jugée sur la question de fond ; que la cour d'appel s'étant bornée, dans le dispositif de son premier arrêt, à déclarer le conseil de prud'hommes compétent, le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu que pour dire que M. U... a travaillé au sein de l'association Avicenne Limay dans le cadre d'un contrat de travail à temps complet du 8 juillet 2011 au 1er juin 2013 et condamner l'association au paiement de diverses sommes, l'arrêt, retient qu'il n'y a pas lieu de distinguer les activités différentes de M. U... au sein de l'association, celles ressortant de l'exercice du culte musulman de celles ressortant de l'enseignement du Coran, de la dispense de conférences et de divers cours sur le culte musulman, de l'accueil des pratiquants et de la médiation pour les couples, qu'au vu de la difficulté à distinguer en semaine les activités strictement cultuelles (prise en charge des prières, célébrations des fêtes au sein de la mosquée de Limay) de celles d'animation du Centre islamique de la Fraternité (organisation de conférences animation de fêtes religieuses, conseil et soutien des personnes en difficulté notamment), l'activité d'enseignement du Coran au sein de l'institut [...] étant elle circonscrite aux samedis et dimanches (soit 6 h par semaine), ces trois activités étant en outre liées et exercées dans le cadre d'un lien de subordination, ce qui correspond au projet de contrat de travail à temps complet qui est produit par M. U..., que ses horaires de travail découlaient à la fois de sa nécessaire présence chaque jour de la semaine, sauf le mercredi, pour assurer les prières et l'accueil des fidèles, mais aussi les fins de semaine pour dispenser l'enseignement de l'arabe et du Coran, de sorte qu'il n'avait pas d'autonomie dans la fixation de ses horaires ;

Qu'en se déterminant ainsi, après avoir constaté que l'association n'avait pas le statut d'association cultuelle, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'un lien de subordination pour l'exercice public du culte, a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Et attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif critiqués par le deuxième moyen en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen et sur le troisième moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. U... de ses demandes de dommages-intérêts pour absence de visite médicale d'embauche et pour travail dissimulé, l'arrêt rendu le 23 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sur les points restant en litige, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. U... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille vingt.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour l'association Avicenne Limay.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. U... a travaillé au sein de l'Association Avicenne Limay dans le cadre d'un contrat de travail à temps complet du 8 juillet 2011 au 1er juin 2013, le contrat ayant pris fin à l'issue du préavis le 1er juillet 2013, condamné ladite association à lui payer les sommes de 1 155 euros net à titre d'indemnité de préavis d'un mois, outre celle de 155 euros net au titre des congés payés afférents, 616,81 euros net à titre d'indemnité légale de licenciement, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2014, 1 555 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure irrégulière, 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter dudit arrêt, 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné sous astreinte la capitalisation des intérêts, ordonné la remise des bulletins de paie et d'un certificat de travail ;

AUX MOTIFS QUE la question de l'existence d'un contrat de travail entre M. U... et l'association Avicenne Limay a déjà été tranchée par la cour dans son arrêt du 24 mai 2016, par une motivation s'appuyant sur de nombreuses pièces et concluant dans les termes suivants : « M.U... a exercé pendant près de deux ans, sous la subordination de l'association et en particulier de son président, des fonctions autres que religieuses, alors qu'il a régulièrement perçu, en parallèle, une rémunération versée par ladite association
M. U... a donc bien été lié à l'association Avicenne Limay par un contrat de travail » ; il reste à examiner le périmètre du contrat de travail (activité cultuelle et d'enseignement, ou seulement activité d'enseignement) dont il faudra déduire le temps de travail, à temps partiel ou temps complet, puis la pertinence des demandes en paiement d'indemnité et de dommages et intérêts, l'existence du contrat de travail ayant été établie par l'arrêt susvisé ; sur le périmètre du contrat de travail : l'association soulève l'irrecevabilité de l'argumentation de M. U..., lequel demande à la cour de reconnaître l'existence d'une relation de travail salariée pour son activité cultuelle au sein de l'association, alors que la cour, dans son arrêt avant-dire droit, a dit : « que M. U... s'est acquitté des fonctions religieuses d'imam, durant la période litigieuse, celles-ci consistant notamment dans le service des offices, prières et prêches ; que l'engagement spirituel, personnel, à l'origine des prestations ainsi fournies par M. U... ne saurait, il est vrai, fonder et justifier l'existence d'un contrat civil et s'avère irréductible au droit ; mais considérant qu'en marge de cet engagement et de sa traduction dans l'observance des rites et célébrations cultuelles, M. U... déployait également une activité étrangère à tout engagement religieux et indépendante de sa qualité et de ses fonctions d'imam.. » ; l'Association estime, aux termes de la motivation de cet arrêt, que la relation de travail salariée ne concerne que l'activité d'enseignement, de sorte que les conséquences de la rupture ne pourraient concerner que l'activité d'enseignement ; M. U... soutient que l'arrêt n'aurait pas tranché la question de l'existence d'un contrat de travail, alors que l'association fait valoir que la Cour de cassation étend expressément l'autorité de la chose jugée aux motifs de fond qui sont le soutien nécessaire de la décision rendue sur la compétence ; or, comme le soutient valablement l'association, la cour a certes, dans cet arrêt, tranché la question de fond, à savoir l'existence d'un contrat de travail, dont dépendait la compétence, mais toutefois n'a pas précisé dans ses motifs et son dispositif le périmètre précis de la relation salariale, de sorte que cet arrêt n'a pas l'autorité de la chose jugée sur la définition de ce périmètre ; en effet, la cour a seulement indiqué : « M. U... a exercé pendant près de deux ans sous la subordination de l'association et en particulier de son président, des fonctions autres que religieuses, alors qu'il a régulièrement perçu en parallèle une rémunération versée par l'association » ; ainsi, la cour n'a pas énuméré les fonctions autres que religieuses, ne définissant donc pas le périmètre du contrat de travail ; il revient désormais à la cour de le définir, en faisant application d'une jurisprudence constante de la Cour de cassation depuis 2005 (Soc 12 juillet 2005, 20 janvier 2010, 8 juin 2011) qui fait prévaloir le critère organique en indiquant que « l'engagement religieux d'une personne n'est susceptible d'exclure l'existence d'un contrat de travail que pour les activités qu'elle accomplit pour le compte et au bénéfice d'une congrégation ou d'une association cultuelle légalement établie » ; c'est ainsi que seules les personnes faisant partie d'une congrégation ou d'une association cultuelle et travaillant pour le compte de celles-ci peuvent échapper au droit du travail ; en l'espèce, au vu des statuts de l'association, et comme le soutient valablement M. U..., l'association Avicenne Limay a un objet mixte, à la fois cultuel, l'exercice public du culte musulman, et culturel, à savoir essentiellement la promotion de la culture arabo-musulmane, l'éducation des jeunes, la responsabilisation des parents, le dialogue avec les autres civilisations et la lutte contre l'échec scolaire par des cours de soutien ; or, une association cultuelle doit avoir pour objet exclusif l'exercice public du culte, ce qui fait échapper l'association Avicenne Limay au statut d'une association cultuelle, vu les multiples objets culturels compris dans ses statuts qui font d'elle une association culturelle régie par la loi de 1901 , à laquelle les statuts se réfèrent expressément ; en conséquence, il n'y a pas lieu de distinguer les activités différentes de M. U... au sein de l'association, celles ressortant de l'exercice du culte musulman de celles ressortant de l'enseignement du Coran, de la dispense de conférences et de divers cours sur le culte musulman, de l'accueil des pratiquants et de la médiation pour les couples ; par ailleurs, le but poursuivi par l'association, en engageant M. U..., était de lancer une école coranique comme cela ressort des échanges de courriels entre ce dernier et le président de l'association en septembre 2011 ; c'est ce qu'il a réalisé effectivement, comme cela ressort des pièces produites (proposition de programme pour l'école coranique, calendrier annuel de l'institut [...], et annonce d'inauguration) ; il animait sans le diriger le Centre Islamique de la Fraternité, où il était reconnu comme imam et enseignant, dispensant avec d'autres personnes des cours d'arabe en lien avec le Coran, selon les attestations de témoin ce centre accueillait plusieurs centaines de personnes moyennant la somme de 180 6 euros/an ; au vu de la vingtaine d'attestations de témoin qu'il produit, il apparaît que M . U... a accompli de nombreuses missions d'animateur au sein de l'association, tant au niveau cultuel que culturel, jouant aussi un rôle social important, très apprécié des adhérents et élèves par sa pédagogie, son écoute et sa grande disponibilité, travaillant 6 jours sur 7 ; le travail cultuel et l'enseignement étant liés, il réclame la reconnaissance d'un travail à temps plein ; l'association estime au contraire qu'il convient de distinguer son activité cultuelle, principale, de son activité d'enseignement accessoire, la première étant rémunérée environ 1000 à 1500 euros par mois, la seconde entre 480 et 600 euros par mois pour la dispense de cours les samedis et dimanche ; elle demande la reconnaissance d'un travail à temps partiel pour un salaire de 520 euros brut (moyenne des trois derniers salaires) ; or, non seulement au vu du critère organique sus-énoncé, mais aussi de la difficulté à distinguer en semaine les activités strictement cultuelles (prise en charge des prières, célébrations des fêtes au sein de la mosquée de Limay) de celles d'animation du Centre islamique de la Fraternité (organisation de conférences animation de fêtes religieuses, conseil et soutien des personnes en difficulté notamment), l'activité d'enseignement du Coran au sein de l'institut [...] étant elle circonscrite aux samedis et dimanches (soit 6 h par semaine), ces trois activités étant en outre liées et exercées dans le cadre d'un lien de subordination, comme développé plus bas, ce qui correspond au projet de contrat de travail à temps complet qui est produit par M. U... ; les horaires de travail de M. U... découlaient à la fois de sa nécessaire présence chaque jour de la semaine, sauf le mercredi, pour assurer les prières et l'accueil des fidèles, mais aussi les fins de semaine pour dispenser l'enseignement de l'arabe et du Coran, de sorte qu'il n'avait pas d'autonomie dans la fixation de ses horaires ; l'association admet dans ses conclusions que les horaires de travail de l'enseignement dispensé par M. U... avaient été expressément fixés par elle ; M. U... devait notamment demander l'autorisation des dirigeants de l'association pour l'organisation de conférences par des imams extérieurs, point qui a suscité un conflit, car il considérait qu'il n'avait pas à recevoir de directives en tant qu'imam, comme développé plus loin dans le cadre de la rupture ; pour ce qui concerne les activités du Centre Islamique de la Fraternité, au vu des courriels produits par M. U... retraçant ses échanges avec M. C..., président de l'association, elles ont été mises en place par l'association, laquelle donnait des directives à M. U..., lequel avait préalablement participé à l'élaboration du programme du centre et des soirées que le centre organisait ; en effet, M U... fait valoir qu'il était convenu oralement avec le président de l'association qu'il était employé en contrat à durée déterminée pour 3 mois, transformé en contrat à durée indéterminée avec un statut d'animateur moyennant un salaire de 1000 euros/mois net ; il précise qu'il a travaillé à compter du 8 juillet 2011 jusqu'au 1er juin 2013 à la satisfaction de l'association et des fidèles, sans qu'un contrat de travail ait été signé, contrairement à ce qui était prévu, comme la cour constate que cela ressort effectivement des pièces produites (copie projet de contrat de travail à durée déterminée en date du 21 septembre 2012 pour la fonction d'animateur à 35 h et moyennant un salaire de 1425,70 euros brut/mois, attestations de témoins, courriels) ; le projet de contrat a été discuté entre les parties en septembre 2012, au vu des courriels échangés entre les parties ; finalement l'embauche officielle de M. U... ne s'est jamais concrétisée, comme cela résulte de l'attestation du secrétaire de l'association, mais sans que l'association en explique la raison ; au vu de l'ensemble de ces éléments, il apparaît que M. U... percevait un salaire mensuel versé par l'association et se trouvait pour l'ensemble de ses missions dans un lien de subordination avec l'association, de sorte qu'il y a lieu de qualifier la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée à temps plein à compter du 8 juillet 2011 et jusqu'au 1er juillet 2013, soit un mois (durée du préavis) après la date de son dernier jour de travail qui est le 1er juin 2013, date non contestée par l'association ;

1) ALORS QUE l' autorité de la chose jugée s'étend aux motifs d'une décision se prononçant sur la compétence, lorsqu'ils en sont le soutien nécessaire ; que la cour d'appel qui a dit que Monsieur U... était lié par un contrat de travail à temps complet à l'association Avicenne Limay alors que l'arrêt du 24 mai 2016 statuant sur la compétence de la juridiction prud'homale avait jugé que les activités cultuelles de Monsieur U... étaient irréductibles au droit a violé les articles 1355 du code civil, 77 et 95 du code de procédure civile ;

2) ALORS QUE l'arrêt du 24 mai 2016 revêtu de l'autorité de la chose jugée a formellement exclu du périmètre du contrat de travail de Monsieur U... ses activités cultuelles, limitant son contrat de travail à ses activités étrangères à tout engagement religieux d'enseignement et à l'organisation de conférences ; que la cour d'appel, pour dire que l'arrêt du 24 mai 2016 n'avait pas défini le périmètre du contrat de travail a méconnu le principe qui interdit de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;

3) ALORS QUE l'existence d'un contrat de travail est caractérisée par l'exercice d'une activité professionnelle, la rémunération et l'existence d'un lien de subordination lui-même caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que la cour d'appel qui a dit que pour l'ensemble de ses activités cultuelles et d'enseignement Monsieur U... se trouvait dans un lien de subordination avec l'association Avicenne Limay sans caractériser en quoi ce dernier se trouvait dans un lien de subordination pour l'exercice public du culte a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1221-1 du code du travail ;

4) ALORS QUE l'exercice d'une fonction cultuelle est exclusive de l'existence d'un contrat de travail ; que dans ses écritures d'appel l'Association Avicenne Limay a fait valoir que Monsieur U..., dans une lettre de juin 2013, a réclamé la conclusion d'un contrat de travail pour ses activités de célébration du culte musulman reconnaissant par là même la distinction entre ses fonctions religieuses et d'enseignement ; que la cour d'appel qui a laissé ce moyen déterminant sans réponse a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5) ALORS QUE le fait qu'une association n'aie pas pour objet exclusif l'exercice public du culte est sans influence sur le fait que les activités cultuelles de l'imam échappent au droit du travail ; que la cour d'appel qui a jugé que le fait que l'association Avicenne Limay avait un double objet culturel et cultuel de sorte qu'il n'y avait pas lieu de distinguer entre les diverses activités de Monsieur U... celles ressortant du culte et celles ressortant de l'enseignement a ajouté aux conditions permettant à un officier du culte d'échapper au droit du travail une condition qui n'est pas prévue et a violé l'article L 1221-1 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. U... a travaillé au sein de l'Association Avicenne Limay dans le cadre d'un contrat de travail à temps complet du 8 juillet 2011 au 1er juin 2013, le contrat ayant pris fin à l'issue du préavis le 1er juillet 2013, condamné ladite association à lui payer les sommes de 1 155 euros net à titre d'indemnité de préavis d'un mois, outre celle de 155 euros net au titre des congés payés afférents, 616,81 euros net à titre d'indemnité légale de licenciement, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 2 avril 2014, 1 555 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure irrégulière, 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter dudit arrêt, 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ordonné sous astreinte la capitalisation des intérêts, ordonné la remise des bulletins de paie et d'un certificat de travail ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur U... soutient que la rupture contractuelle est intervenue soudainement, sans justification et sans respecter les statuts de l'association (absence de réunion du conseil d'administration) et les dispositions légales, le président ayant réuni seulement le bureau mais pas tous ses membres ; l'association affirme que c'est M. U... qui a démissionné de son travail à temps partiel d'enseignant, au vu de son courriel du 20 mai 2013, et qu'elle avait en tout état de cause des griefs à lui reprocher, car ce dernier avait notamment invité un conférencier en mars/avril 2013 au sein du Centre Islamique de la Fraternité sans l'autorisation des dirigeants de l'association, puis avait tenu des propos inadaptés voire agressifs envers le président de l'association lors d'une réunion non autorisée avec les fidèles ; or la démission doit être claire et expresse, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, selon les termes du courriel de M. U... qu'il a adressé au président de l'association M. C... le 20 mai 2013 : « Je t'écris ce mail pour te communiquer les résolutions suivantes : Je ne pourrais assurer les cours de Coran au sein de notre mosquée à la rentrée prochaine ; concernant l'imama, je compte sur vous pour clarifier la situation en signant un contrat avant la fin du mois en cour » ; il en résulte que M. U... ne renonce pas à l'imama mais à l'enseignement, tout en disant clairement qu'il souhaite un contrat. Ce courriel ne donc être considéré comme une démission ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la cassation à intervenir du chef du contrat de travail de M. U... pour ses activités cultuelles entrainera pas voie de conséquence celle du chef des condamnations pécuniaires fondées sur une rémunération mensuelle pour un travail à temps complet ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE les activités d'Imam de Monsieur U... n'étant pas susceptibles d'être exercées sous un lien de subordination, la démission claire et expresse exprimée le 20 mai 2013 portait nécessairement sur ses seules activités d'enseignement ; que la cour d'appel qui, tout en reconnaissant que Monsieur U... avait renoncé à l'enseignement a refusé de considérer qu'il avait démissionné, ce qui avait pour effet de le priver des indemnités et dommages et intérêts afférents à un licenciement, n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui en découlaient et a violé par fausse application les articles L 1231-1 et L 1232-1 et L 1235-1du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'Association Avicenne Limay à payer à Monsieur U... la somme de 1555 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement :

AUX MOTIFS QUE Monsieur U... sollicite aussi des dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement et notamment pour non-respect des règles relatives à l'assistance du salarié, comme c'est le cas en l'espèce, vu l'absence de convocation à entretien préalable et absence d'entretien préalable ; en conséquence, il y a lieu de lui allouer de ce chef la somme de 1555 euros à titre de dommages et intérêts, équivalente à un mois des salaire, cette indemnité étant cumulable avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse s'agissant des salariés de moins de deux ans d'ancienneté ou d'une entreprise d'au moins onze salariés ;

ALORS QUE l'allocation de dommages et intérêts pour procédure irrégulière est conditionnée à la preuve par le salarié d'un préjudice indépendant de celui que lui cause son licenciement ; que la cour d'appel qui a accordé à Monsieur U... des dommages et intérêts sans constater qu'il avait subi un préjudice du fait de l'absence d'entretien préalable a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1235-2 du code du travail.

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