8 juillet 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 19-13.767

Chambre sociale - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2020:SO00646

Titres et sommaires

CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Salaire - Non-paiement aux grévistes - Réglementation propre aux services publics - Retenue de traitement opérée par l'employeur - Calcul - Modalités - Texte applicable - Détermination - Cas - Etablissement privé chargé d'un service public de transport terrestre de voyageurs - Non-paiement aux grévistes

Si l'article L. 2512-5 du code du travail, complété par l'article 2 de la loi n° 82-889 du 19 octobre 1982 relative aux retenues pour absence de service fait par les personnels de l'Etat, des collectivités locales et des services publics, s'applique de manière générale aux retenues effectuées sur les rémunérations des personnels des établissements privés chargés d'un service public, il en va autrement lorsqu'un texte spécifique prévoit un autre mode de calcul de ces retenues pour un service public particulier, en conformité avec la décision du Conseil constitutionnel n° 87-230 du 28 juillet 1987. S'agissant des transports terrestres de voyageurs, l'article L. 1324-11 du code des transports, issu de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, prévoit que « la rémunération d'un salarié participant à une grève, incluant le salaire et ses compléments directs et indirects à l'exclusion des suppléments pour charges de famille, est réduite en fonction de la durée non travaillée en raison de la participation à cette grève ». Il en résulte que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a dit que l'employeur était fondé à appliquer une retenue sur salaire proportionnelle aux heures non travaillées en raison de la grève en application de l'article L. 1324-11 du code des transports

CONFLIT COLLECTIF DU TRAVAIL - Grève - Grève des services publics - Exercice du droit de grève - Réglementation propre aux services publics - Domaine d'application - Transports terrestres réguliers de voyageurs à vocation non touristique - Salaire - Non-paiement aux grévistes - Retenue de traitement opérée par l'employeur - Calcul - Modalités - Détermination - Portée

Texte de la décision

SOC.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 juillet 2020




Rejet


M. CATHALA, président



Arrêt n° 646 FS-P+B

Pourvoi n° H 19-13.767




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 JUILLET 2020

1°/ M. N... P..., domicilié [...],

2°/ le syndicat SNTU CFDT, dont le siège est [...],

ont formé le pourvoi n° H 19-13.767 contre le jugement rendu le 16 janvier 2019 par le conseil de prud'hommes de Lorient (section commerce (départage section)), dans le litige les opposant à la société Keolis Rennes, société anonyme, dont le siège est [...], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. P... et du syndicat SNTU CFDT, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Keolis Rennes, et l'avis de Mme Berriat, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 juin 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Ott, Sommé, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Lorient, 16 janvier 2019), un préavis de grève a été déposé par deux organisations syndicales au sein de la société Keolis Rennes le 29 mai 2015, prévoyant des débrayages de 7 heures 30 à 8 heures 29 et de 17 heures à 17 heures 59 à compter du 4 juin 2015. La grève s'est achevée le 5 juin 2015, et la société Keolis a opéré une retenue sur le salaire de M. P..., conducteur de bus au sein de la société, et représentant syndical du syndicat SNUD CGT, équivalente à quatre fois cinquante-neuf minutes pour deux jours.

2. Contestant le montant des retenues, et la modification de ses horaires de prise de service, le salarié a saisi la juridiction prud'homale. Le syndicat SNTU CFDT est intervenu à l'instance.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. Le salarié fait grief au jugement de le débouter de ses demandes de rappel de salaire et congés payés afférents et de dommages-intérêts au titre de l'atteinte au droit de grève, alors « qu'il résulte de la combinaison des articles L. 2512-1 et L. 2512-5 du code du travail renvoyant à l'article 2 de la loi du 19 octobre 1982 relative aux retenues pour absence de service fait par les personnels de l'Etat, des collectivités locales et des services publics et de l'article L. 1324-1 du code des transports renvoyant aux articles L. 2512-1 et s. du code du travail que pour le personnel des établissements privés chargés de la gestion d'un service public, la cessation concertée du travail donne lieu, pour chaque journée, lorsqu'elle n'excède pas une heure, à une retenue égale à cent soixantième du traitement mensuel, lorsqu'elle dépasse une heure, sans excéder une demi-journée, à une retenue égale à un cinquantième du traitement et lorsqu'elle dépasse une demi-journée sans excéder une journée, à une retenue égale à un trentième ; que le conseil de prud'hommes a jugé que la société était fondée à procéder à une retenue sur salaire proportionnelle à la durée non travaillée pendant la suspension du contrat de travail résultant de l'exercice du droit de grève, en application de l'article L. 1324-11 du code des transports ; qu'en statuant ainsi, il a violé les articles L. 2512-1 et L. 2512-5 du code du travail, l'article 2 de la loi du 19 octobre 1982 relative aux retenues pour absence de service fait par les personnels de l'Etat, des collectivités locales et des services publics et les articles L. 1324-1 et L. 1324-11 du code des transports par fausse application. »

Réponse de la Cour

4. Si l'article L. 2512-5 du code du travail, complété par l'article 2 de la loi n° 82-889 du 19 octobre 1982 relative aux retenues pour absence de service fait par les personnels de l'Etat, des collectivités locales et des services publics, s'applique de manière générale aux retenues effectuées sur les rémunérations des personnels des établissements privés chargés d'un service public, il en va autrement lorsqu'un texte spécifique prévoit un autre mode de calcul de ces retenues pour un service public particulier, en conformité avec la décision du Conseil constitutionnel n° 87-230 du 28 juillet 1987.

5. S'agissant des transports terrestres réguliers de voyageurs, l'article L. 1324-11 du code des transports, issu de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, prévoit que « la rémunération d'un salarié participant à une grève, incluant le salaire et ses compléments directs et indirects à l'exclusion des suppléments pour charges de famille, est réduite en fonction de la durée non travaillée en raison de la participation à cette grève. »

6. Il en résulte que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a dit que l'employeur était fondé à appliquer une retenue sur salaire proportionnelle aux heures non travaillées en raison de la grève en application de l'article L. 1324-11 du code des transports.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

8. Le salarié fait grief au jugement de le débouter de ses demandes de rappel de salaire et congés payés afférents et de dommages-intérêts au titre de l'atteinte au droit de grève, alors que « selon l'article 5 de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, applicable au litige, dans les entreprises de transports l'employeur et les organisations syndicales représentatives concluent un accord collectif de prévisibilité du service applicable en cas de perturbation prévisible du trafic ou de grève, fixant les conditions dans lesquelles l'organisation du travail est révisée et les personnels disponibles réaffectés afin de permettre la mise en oeuvre du plan de transports adapté et qu'à défaut d'accord applicable au 1er janvier 2008, un plan de prévisibilité est défini par l'employeur ; qu'en cas de grève, les personnels disponibles sont les personnels de l'entreprise non-grévistes ; que l'accord du 3 décembre 2007 « relatif au développement du dialogue social, à la prévention des conflits et à la continuité du service public » dispose en son article 18-1, alinéa 3, intitulé modalités de révision de l'organisation du travail, que l'accord d'entreprise ou, à défaut, le chef d'entreprise fixe les conditions dans lesquelles, en cas de perturbation prévisible, l'organisation du travail est révisée et les personnels disponibles qui peuvent être réaffectés sur des lignes ou services pour lesquels ils ont été formés afin de permettre la mise en oeuvre du plan de transport adapté sont les personnels permanents non-grévistes de l'entreprise ou de l'établissement ; que le conseil de prud'hommes a relevé que la direction de la société avait décalé l'heure de début de la prise de poste du salarié exposant après 8 heures 30 les jeudi 4 et vendredi 5 juin, soit après la fin des débrayages, de sorte que celui-ci n'a pas pu participer effectivement à la grève prévue de 7h30 à 8h29 ; qu'il en résultait que l'employeur avait eu recours aux grévistes pour réorganiser le service ; qu'en jugeant pourtant que cette modification de l'heure de prise de poste s'inscrivait dans le cadre de la possibilité de réorganisation du travail en cas de grève consacrée par la loi et déclinée dans l'article 18-1 de l'accord de branche du 3 décembre 2007, le conseil de prud'hommes a violé l'article L. 1222-7 du code des transports, l'article 18-1, alinéa 3, de l'accord du 3 décembre 2007 relatif au développement du dialogue social, à la prévention des conflits et à la continuité du service public, ensemble l'article L. 1324-11 du code des transports. »

Réponse de la Cour

9. Il résulte de l'article L. 1222-7 du code des transports que dans les entreprises de transports l'employeur et les organisations syndicales représentatives concluent un accord collectif de prévisibilité du service applicable en cas de perturbation prévisible du trafic ou de grève, fixant les conditions dans lesquelles l'organisation du travail est révisée et les personnels disponibles réaffectés afin de permettre la mise en oeuvre du plan de transports adapté et qu'à défaut d'accord applicable, un plan de prévisibilité est défini par l'employeur ; qu'en cas de grève, les personnels disponibles sont les personnels non grévistes de l'entreprise.

10. Un accord a été signé le 3 décembre 2007 au sein de la branche transport urbain de voyageurs mettant en oeuvre cette disposition à l'article 18-1, alinéa 3.

11. Le conseil de prud'hommes a constaté qu'à la suite de la déclaration du salarié informant son employeur de sa volonté de participer au mouvement de grève, l'employeur a modifié l'horaire de prise de service du salarié, le décalant pour le 5 juin 2015 de 7 heures 18 à 8 heures 30, que cette modification n'avait pas pour finalité de réaffecter le salarié en le considérant comme personnel disponible non gréviste, mais de permettre à l'employeur de respecter son obligation de sécurité en s'assurant que le véhicule conduit par le salarié ne soit pas arrêté sur la voie publique durant la période de débrayage et qu'il s'agissait d'un simple décalage de l'heure de départ du bus conduit par le salarié mais non d'un changement de ses horaires de travail, le salarié ayant sur les journées de grève, effectué une durée de travail inférieure à celle initialement prévue équivalente à quatre périodes de 59 minutes et ayant terminé son service à l'horaire prévu initialement.

12. Le conseil de prud'hommes en a exactement déduit que, s'agissant d'une révision de l'organisation du travail rendue nécessaire par des raisons de sécurité et n'ayant pas eu d'incidence sur l'exercice du droit de grève, la mesure était conforme aux prescriptions de l'article L. 1222-7 du code du travail.

13. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

14. Le syndicat fait grief au jugement de le débouter de sa demande, alors que « l'atteinte à l'exercice du droit de grève cause un préjudice à l'intérêt collectif que le syndicat représente et dont il est bien-fondé à demander réparation ; que la cassation sur le premier et/ou le deuxième moyen entraînera la censure par voie de conséquence du chef du jugement ayant débouté le syndicat de sa demande, en application des articles L. 1221-1, L. 2131-1 et L. 2132-3 du code du travail, de l'article L. 1222-7 du code des transports, l'article 18-1, alinéa 3, de l'accord du 3 décembre 2007 relatif au développement du dialogue social, à la prévention des conflits et à la continuité du service public et l'article L. 1324-11 du code des transports, ensemble les articles 624 et 625 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

15. Le rejet des premier et deuxième moyens rend sans portée le troisième moyen tiré d'une cassation par voie de conséquence.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. P... et le syndicat SNTU CFDT aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. P... et le syndicat SNTU CFDT

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes de rappel de salaire et congés payés afférents et de dommages et intérêts au titre de l'atteinte au droit de grève.

AUX MOTIFS QUE l'article L2512-5 du Code du travail, sous le chapitre II « dispositions particulières dans les services publics » dispose qu'en ce qui concerne les personnels mentionnés à l'article L2512-1, non soumis aux dispositions de l'article 1er de la loi n° 82889 du 19 octobre 1982, l'absence de service fait par suite de cessation concertée du travail entraîne pour chaque journée une retenue du traitement ou du salaire et de ses compléments autres que les suppléments pour charges de famille ; que les retenues sont opérées en fonction des durées d'absence définies à l'article 2 de la loi précitées ; que l'article 2 de la loi du 19 octobre 1982 relative aux retenues pour absence de service fait par les personnels de l'Etat, des collectivités locales et des services publiques, édicte la règle suivante : L'absence de service fait, résultant d'une cessation concertée du travail, donne lieu, pour chaque journée : - Lorsqu'elle n'excède pas une heure, à une retenue égale à cent soixantième du traitement mensuel (
) ; que par décision du 28 juillet 1987, le Conseil constitutionnel a décidé que malgré l'abrogation de la loi, les références faites aux articles 1 et 2 de la loi 19 octobre 1982 produisent toujours leurs effets ; qu'il en ressort que ces dispositions instituant un prélèvement forfaitaire en cas de grève, constituent le droit commun s'appliquant aux établissements publics ou privés lorsqu'ils sont chargés de la gestion d'un service public ; que la loi n°2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public clans les transports terrestres réguliers de voyageurs dont le champ d'application défini dans son article 1 s'étend aux services publics de transport terrestre régulier de personnes à vocation non touristique prévoit dans son article 10 une retenue proportionnelle à la durée non travaillée en raison de la participation à la grève ; que les dispositions issues de cette loi codifiées aux articles L.1324-1 et suivants du code du transports constituent donc un régime dérogatoire au droit commun de l'exercice du droit de grève dans les services publics évoqué ci-dessus applicable aux seuls services publics de transport terrestre réguliers de personnes à vocation non touristique ; que Monsieur N... P... et le syndicat national des transport SNTU CFDT soutiennent que la formule « sans préjudice des dispositions du chapitre II du titre Intérêts du livre V de la deuxième partie du code du travail » figurant à l'article L.1324-1 du code des transports a pour effet d'écarter l'application de l'article L1324-11 au profit des articles L.2512-1 à L.25I2-5 du code du travail ; que cependant cette formule ne figurait ni dans l'article 1er de la loi 2007-1224 du 21 août 2007 définissant son champ d'application ni dans les dispositions suivantes de cette loi et a été ajouté à l'occasion de la création du code des transports, par ordonnance n°2010-1307 du 28 octobre 2010 pour sa partie législative, ratifiée par la loi 2012-375 du 19 mars 2012, ayant pour objet précis d'ordonner et de structurer des législations diverses à droit constant, comme le prévoit précisément l'article 92 de la loi du 2009-526 du 16 mai 2009 autorisant le gouvernement à procéder par ordonnance en application de l'article 38 de la constitution ; or, qu'une telle interprétation, de cette formule, de portée générale, aurait pour conséquence de rendre sans objet une partie importante des dispositions des articles L.1324-1 et suivants du code des transports n'apparaissant pas conforme à la volonté du législateur en 2007, mais également lors du vote de la loi d'habilitation en 2009 ; que l'article L1324-11 du code des transports doit donc s'appliquer au cas d'espèce ; qu'il en résulte que la SA KEOLlS RENNES est fondée à procéder à une retenue sur salaire proportionnelle à la durée non travaillée pendant la suspension du contrat de travail résultant de l'exercice du droit de grève.

ALORS QU'il résulte de la combinaison des articles L.2512-1 et L.2512-5 du code du travail renvoyant à l'article 2 de la loi du 19 octobre 1982 relative aux retenues pour absence de service fait par les personnels de l'Etat, des collectivités locales et des services publics et de l'article L.1324-1 du code des transports renvoyant aux articles L.2512-1 et s. du code du travail que pour le personnel des établissements privés chargés de la gestion d'un service public, la cessation concertée du travail donne lieu, pour chaque journée, lorsqu'elle n'excède pas une heure, à une retenue égale à cent soixantième du traitement mensuel, lorsqu'elle dépasse une heure, sans excéder une demi-journée, à une retenue égale à un cinquantième du traitement et lorsqu'elle dépasse une demi-journée sans excéder une journée, à une retenue égale à un trentième ; que le conseil de prud'hommes a jugé que la société était fondée à procéder à une retenue sur salaire proportionnelle à la durée non travaillée pendant la suspension du contrat de travail résultant de l'exercice du droit de grève, en application de l'article L.1324-11 du code des transports ; qu'en statuant ainsi, il a violé les articles L.2512-1 et L.2512-5 du code du travail, l'article 2 de la loi du 19 octobre 1982 relative aux retenues pour absence de service fait par les personnels de l'Etat, des collectivités locales et des services publics et les articles L.1324-1 et L.1324-11 du code des transports par fausse application.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes de rappel de salaire et congés payés afférents et de dommages et intérêts au titre de l'atteinte au droit de grève.

AUX MOTIFS QUE Monsieur N... P... a informé son employeur de sa volonté de participer au mouvement de grève initié par- les sections syndicales CGT/UGIC-CGT et le SNIIP-CPDT pour les journées du 4 et du 5 juin 2015 ; que la bandelette de service Imprimée le matin du 4 juin. 2015 prévoyait que Monsieur P... commencerait à 8h30 le 4 juin 2015, soit après le 1er débrayage de la journée, et à 7h18 le 5 juin 2015 et que celle imprimée le matin du 5 juin 2015, portait modification de l'heure de prise de poste de Monsieur P... à 8h30 pour le 5 juin 2015 ; que Monsieur N... P... et le syndicat national des transport SNTU CFDT soutiennent que cette réorganisation a eu pour effet de porter atteinte au droit de grève de celui-ci l'empêchant de débrayer à deux reprises et que la SA KEOLIS RENNES n'est donc pas fondé à lui déduire l'équivalent de 4 périodes de débrayage de 59 minutes ; que cependant cette modification de l'heure de prise de poste s'inscrit dans le cadre de la possibilité de réorganisation du travail en cas de grève consacrée par la loi et déclinée dans l'article 18-1 de l'accord de branche du 3 décembre 2007 prévoyant que l'accord d'entreprise ou, à défaut, le chef d'entreprise fixe les conditions dans lesquelles, en cas de perturbation prévisible, l'organisation du travail est révisée et les personnels disponibles peuvent être réaffectés sur des lignes ou services pour lesquels ils ont été formés afin de permettre la mise en oeuvre du plan de transport adapté ; qu'or, la fixation d'une prise de service le 5 juin à 8h30 au lieu de 7hl 8 a eu pour objectif d'éviter la présence de Monsieur N... P... au dépôt à 7h18 compte tenu de sa volonté de participer au mouvement de grève ; que ce décalage de l'heure de prise de poste n'a pas eu pour effet d'entraîner un décalage identique de l'heure de fin de service, Monsieur N... P... ayant terminé celui-ci à 19h42 comme prévu initialement ; que par ailleurs un retour au dépôt a été organisé dans l'après-midi afin de permettre à Monsieur N... P... d'exercer son droit de grève ; que Monsieur N... P... a donc, sur ces journées, effectué une durée de travail inférieure à celle initialement prévue équivalente à quatre périodes de 59 minutes ; que contrairement à ce qu'allègue Monsieur N... P... et le syndicat national des transport SNTU CFDT, le service a nécessairement été perturbé d' une part, par la nécessité de pré voir un remplacement sur la période de 7h18 à 8h30 par un personnel disponible ou par l'absence de service sur cette période, et d'autre part, par la suspension de sa tournée d'après-midi pour permettre un retour au dépôt durant ta période de débrayage ; qu'il ne peut être fait grief à la SA KEOLIS RENNES de n'avoir pas permis à Monsieur N... P... de prendre son service à 7hl8 au regard de l'obligation de sécurité pesant sur l'employeur justifiant que le véhicule ne soit pas arrêté sur la voie publique durant la période de débrayage ; qu'il en résulte que les modalités organisationnelles mises en place par la SA KEOLIS RENNES ne constitue pas une riposte illicite à l'exercice du droit de grève de Monsieur N... P... et que celle-ci est fondée à procéder à la retenue de 4 périodes de 59 minutes compte tenu des périodes effectivement non travaillées par ce dernier.

ALORS QUE selon l'article 5 de la loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, applicable au litige, dans les entreprises de transports l'employeur et les organisations syndicales représentatives concluent un accord collectif de prévisibilité du service applicable en cas de perturbation prévisible du trafic ou de grève, fixant les conditions dans lesquelles l'organisation du travail est révisée et les personnels disponibles réaffectés afin de permettre la mise en oeuvre du plan de transports adapté et qu'à défaut d'accord applicable au 1er janvier 2008, un plan de prévisibilité est défini par l'employeur ; qu'en cas de grève, les personnels disponibles sont les personnels de l'entreprise non-grévistes ; que l'accord du 3 décembre 2007 « relatif au développement du dialogue social, à la prévention des conflits et à la continuité du service public » dispose en son article 18-1 alinéa 3 intitulé modalités de révision de l'organisation du travail, que l'accord d'entreprise ou, à défaut, le chef d'entreprise fixe les conditions dans lesquelles, en cas de perturbation prévisible, l'organisation du travail est révisée et les personnels disponibles qui peuvent être réaffectés sur des lignes ou services pour lesquels ils ont été formés afin de permettre la mise en oeuvre du plan de transport adapté sont les personnels permanents non-grévistes de l'entreprise ou de l'établissement ; que le conseil de prud'hommes a relevé que la direction de la société avait décalé l'heure de début de la prise de poste du salarié exposant après 8h30 les jeudi 4 et vendredi 5 juin, soit après la fin des débrayages, de sorte que celui-ci n'a pas pu participer effectivement à la grève prévue de 7h30 à 8h29 ; qu'il en résultait que l'employeur avait eu recours aux grévistes pour réorganiser le service ; qu'en jugeant pourtant que cette modification de l'heure de prise de poste s'inscrivait dans le cadre de la possibilité de réorganisation du travail en cas de grève consacrée par la loi et déclinée dans l'article 18-1 de l'accord de branche du 3 décembre 2007, le conseil de prud'hommes a violé l'article L.1222-7 du code des transports, l'article 18-1 alinéa 3 de l'accord du 3 décembre 2007 relatif au développement du dialogue social, à la prévention des conflits et à la continuité du service public, ensemble l'article L.1324-11 du code des transports.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté le syndicat de sa demande.

AUX MOTIFS énoncés aux premier et deuxième moyens.

ALORS QUE l'atteinte à l'exercice du droit de grève cause un préjudice à l'intérêt collectif que le syndicat représente et dont il est bien-fondé à demander réparation ; que la cassation sur le premier et/ou le deuxième moyen entraînera la censure par voie de conséquence du chef du jugement ayant débouté le syndicat de sa demande, en application des articles L.1221-1, L.2131-1 et L.2132-3 du code du travail, de l'article L.1222-7 du code des transports, l'article 18-1 alinéa 3 de l'accord du 3 décembre 2007 relatif au développement du dialogue social, à la prévention des conflits et à la continuité du service public et l'article L.1324-11 du code des transports, ensemble les articles 624 et 625 du code de procédure civile.

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