30 septembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-26.795

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:SO00751

Texte de la décision

SOC.

CM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 30 septembre 2020




Cassation partielle


M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 751 F-D

Pourvoi n° X 18-26.795




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 SEPTEMBRE 2020

M. L... N..., domicilié [...] a formé le pourvoi n° X 18-26.795 contre l'arrêt rendu le 30 octobre 2018 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à l'AGS CGEA de Nancy, dont le siège est [...] ,

2°/ à M. E... K..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Spiegel France,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Monge, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. N..., de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. K..., ès qualités, après débats en l'audience publique du 24 juin 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Monge, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 30 octobre 2018) et les pièces de la procédure, M. N... a été engagé en qualité de vendeur-préparateur de commandes-livreur, statut agent de maîtrise, par la société Hubert Spiegel devenue la société R2S, suivant contrat du 4 janvier 2010. Ce contrat s'est poursuivi, à compter du 22 août 2011, avec la société Spiegel France (la société).

2. Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société, convertie, le 9 avril 2013, en liquidation judiciaire, M. K... étant désigné en qualité de liquidateur.

3. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir la fixation au passif de la procédure collective de sa créance au titre d'un rappel de salaire et de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes tendant à faire fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société sa créance au titre d'un rappel de salaire, outre congés payés afférents, alors « que lorsque le juge déclare illicite ou invalide la convention de forfait hebdomadaire en heures, toutes ses dispositions sont privées d'effet, de sorte que le salarié concerné est considéré n'avoir été rémunéré que sur la base de la durée légale de 35 heures et non sur celle fixée contractuellement ; qu'il est donc fondé à obtenir le paiement des heures supplémentaires effectuées au-delà de 35 heures hebdomadaires sans avoir à produire un décompte précis des heures revendiquées puisque l'employeur considère qu'elles sont comprises dans le forfait appliqué et visé dans le contrat de travail et les bulletins de salaire ; qu'en jugeant que la convention individuelle de forfait était illicite et en déboutant le salarié de sa demande tendant à voir fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Spiegel France des créances à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies au-delà de 35 heures et de congés payés afférents, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail et l'article 5.7.4 de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, étendue par arrêté du 26 juillet 2002. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail et l'article L. 3121-22, alinéa 1er, du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

5. Selon le premier de ces textes, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

6. Aux termes du second, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires ; les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

7. Pour débouter le salarié de ses demandes tendant à faire fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société certaines sommes à titre de rappel de salaire, outre congés payés afférents, la cour d'appel a retenu que la convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ayant été déclarée invalide, le salarié avait droit au paiement de ses heures de travail effectif selon le droit commun, c'est-à-dire sur la base de la durée légale du travail de 35 heures par mois, toute heure de travail accomplie au-delà étant une heure supplémentaire, qu'il appartenait, cependant, à ce dernier d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant les siens. Elle a précisé, qu'à cet égard, le salarié produisait l'attestation d'un autre employé de l'entreprise, qui stigmatisait la durée de travail à laquelle il aurait été astreint qui aurait largement dépassé la durée de 48 heures par semaine. Elle a considéré que ce témoignage ne faisait pas état d'éléments précis sur la durée effective de travail du salarié. Elle a ajouté que celui-ci se prévalait également d'un décompte mensuel établi pour la période de janvier 2010 à mars 2013 qui faisait systématiquement ressortir une même durée de travail de 224,34 heures par mois, alors qu'il était constant qu'il avait une activité dont la durée variait constamment, et que dans ses conclusions soutenues à l'audience, l'intéressé avait fait état d'une semaine type de travail qui se déroulait toujours selon les mêmes horaires, ce qui ne correspondait pas à la réalité de son travail effectif. Elle a conclu que le salarié ayant procédé à un décompte forfaitaire des heures de travail dont il réclamait le paiement, il n'étayait pas sa demande en paiement d'heures supplémentaires.

8. Cependant, d'une part, en présence d'une convention de forfait de salaire irrégulière, le décompte et le paiement des heures supplémentaires doit s'effectuer selon le droit commun, au regard de la durée légale hebdomadaire de 35 heures ou de la durée considérée comme équivalente.

9. D'autre part, lorsqu'il a été rémunéré sur la base du nombre d'heures stipulé dans la convention de forfait en heures reconnue irrégulière, si le salarié ne peut prétendre entre la 35e et la dernière heure de ce forfait, au paiement du salaire de base une deuxième fois, il peut prétendre aux majorations afférentes aux heures supplémentaires, effectuées au-delà de la durée légale, dont le juge doit vérifier l'existence et le nombre.

10. En statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait déclaré illicite la clause du contrat de travail du salarié instaurant un forfait en heures sur la base de 48 heures par semaine, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que l'employeur contestait l'accomplissement par le salarié des 48 heures ainsi convenues en sorte que de ce seul chef l'intéressé pouvait prétendre aux majorations pour heures supplémentaires, a violé les textes susvisés.

Sur le premier moyen, pris en sa sixième branche

Enoncé du moyen

11. Le salarié fait le même grief à l'arrêt, alors « que dans ses conclusions d'appel délaissées, le salarié faisait valoir que le mandataire judiciaire en charge de la procédure de redressement judiciaire, Maître C..., avait évoqué dans le rapport qu'il avait établi que les 48 heures de travail "devaient constituer une rémunération forfaitaire et non un horaire de travail puisque les livreurs étaient régulièrement amenés à travailler prés de 50 heures par semaine " ; qu'en jugeant que le salarié devait être débouté de sa demande tendant à voir fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Spiegel France des créances à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents, sans avoir répondu à ce chef pertinent des conclusions de l'exposant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :
12. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

13. Pour rejeter la demande du salarié en fixation au passif de la procédure collective de l'employeur de sa créance au titre d'heures supplémentaires, la cour d'appel a retenu que le salarié n'étayait pas sa demande.

14. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du salarié qui soutenait que le mandataire judiciaire, en charge de la procédure de redressement judiciaire, avait évoqué dans le rapport qu'il avait établi à l'issue d'une réunion de travail en présence des salariés et du conseil de la société, le fait que les livreurs étaient régulièrement amenés à travailler près de 50 heures par semaine, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.

Et sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, et le troisième moyen, réunis

Enoncé du moyen

15. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir fixer sa créance au passif de la société Spiegel France à diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour dépassement de la durée légale du travail et manquement à l'obligation de sécurité ainsi qu'à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, alors « que la cassation à intervenir sur l'une des branches du premier moyen de cassation devra entraîner, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef de dispositif de l'arrêt ayant rejeté la demande du salarié tendant à voir fixer sa créance au passif de la société à la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts pour dépassement de la durée légale du travail et manquement à l'obligation de sécurité et à la somme de 27 891,48 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 624 du code de procédure civile :

16. La cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs du dispositif relatifs à la fixation de la créance au titre de dommages-intérêts pour dépassement de la durée légale du travail et manquement à l'obligation de sécurité et au titre d'une indemnité pour travail dissimulé, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. N... de toutes ses demandes en fixation de créances et en paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et en ce qu'il le condamne aux dépens de première instance et d'appel, l'arrêt rendu le 30 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne M. K..., en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société Spiegel France, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. K..., ès qualités, et le condamne, ès qualités, à payer à M. N... la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. N...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. N... de ses demandes tendant à voir fixer au passif de la liquidation judicaire de la société Spiegel France les sommes de 41.077,94 euros bruts à titre de rappel de salaire et 4.107,79 euros bruts à titre de congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail de M. N... contient en son article 3 une clause dont la teneur est la suivante : « Eu égard aux responsabilités qui lui sont confiées, à la grande indépendance dont il jouit dans l'organisation de son emploi du temps, ainsi qu'à l'impossibilité de prédéterminer les horaires de travail en raison des conditions d'exercice de sa mission, Monsieur N... sera soumis à un forfait hebdomadaire de 48 heures avec attribution de 12 jours de repos répartis sur l'année dans les conditions de l'article 5.7.4. de la convention collective applicable» ; que l'article L. 3121-38 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que : « la durée du travail de tout salarié peut être fixée par une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou sur le mois » ; qu'une telle convention peut être conclue avec n'importe quel salarié et non seulement avec un cadre ; qu'il n'est pas obligatoire qu'elle soit instaurée par un accord collectif ; que l'article 5.7.4 de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, étendue par arrêté du 26 juillet 2002, énonce que les agents de maîtrise peuvent bénéficier d'une convention individuelle de forfait en heures mais uniquement sur une base mensuelle et non hebdomadaire ; que le contrat de travail ne contient aucune disposition sur le respect de la durée maximale relative de travail sur 12 semaines prévue aussi bien par l'article L.3121-36, dans sa rédaction applicable à la cause, que par la convention collective (respectivement 44 heures et 42 heures) ; qu'au contraire, les dispositions de l'article 5.7.4 de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, dans leur rédaction applicable à la cause dispose que des forfaits en heure sur le mois peuvent être conclus avec les agents de maîtrise « dans le respect du contingent annuel d'heures supplémentaires » fixé à 180 heures par an, ce qui est plus protecteur des salariés puisque le nombre d'heures à accomplir dans ce cadre est inférieur à celui résultant du forfait sur la semaine prévu par le contrat de travail ; qu'en conséquence, la convention de forfait en heures sur la semaine insérée dans le contrat de travail de M. N... doit être considérée comme illicite ; que le salarié sollicite la fixation d'une créance de 41.077,94 euros brut à titre d'heures supplémentaires qui auraient été accomplies de janvier 2010 à mars 2013, outre les congés payés afférents ;

que la convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ayant été déclarée invalide, le salarié a droit au paiement de ses heures de travail effectif selon le droit commun, c'est-à-dire sur la base de la durée légale du travail de 35 heures par mois, toute heure de travail accomplies au-delà étant une heure supplémentaire (
) ; que la demande en paiement des heures supplémentaires est donc recevable en sa totalité de sorte que le jugement entrepris doit être confirmé sur ce point ; que s'il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures supplémentaires n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant les siens ; qu'il y a lieu de préciser qu'il ne s'agit pas de vérifier si les seuils et plafonds prévus tant par le droit de l'Union européenne que par le droit interne ont ou non été respectés mais de déterminer le temps de travail effectif du salarié ; qu'à cet égard, le salarié produit l'attestation de M. B..., autre employé de l'entreprise, qui stigmatise la durée de travail à laquelle M. N... aurait été astreint qui aurai largement dépassé la durée de 48 heures par semaine ; que ce témoignage ne fait pas état d'éléments précis sur la durée effective de travail de M. N... ; que celui-ci se prévaut également d'un décompte mensuel établi pour la période de janvier 2010 à mars 2013 ; que néanmoins, ce décompte fait systématiquement ressortir une même durée de travail qui est de 224,34 heures par mois, alors qu'il est constant que le salarié avait une activité dont la durée variait constamment ; que dans ses conclusions soutenues à l'audience, le salarié fait état d'une semaine type de travail qui se déroulerait toujours selon les mêmes horaires ce qui ne correspond pas à la réalité de son travail effectif ; que le salarié ayant procédé à un décompte forfaitaire des heures de travail dont il réclame le paiement, il n'étaye pas sa demande en paiement d'heures supplémentaires ; qu'en conséquence que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a fixé à son profit des créances de 25.000 euros brut à titre de rappel de salaire de 2.500 euros brut au titre des congés payés afférents ; que statuant à nouveau sur ce point, le salarié doit être débouté de ce chef de demande ;

1) ALORS QUE lorsque le juge déclare illicite ou invalide la convention de forfait hebdomadaire en heures, toutes ses dispositions sont privées d'effet, de sorte que le salarié concerné est considéré n'avoir été rémunéré que sur la base de la durée légale de 35 heures et non sur celle fixée contractuellement ; qu'il est donc fondé à obtenir le paiement des heures supplémentaires effectuées au delà de 35 heures hebdomadaires sans avoir à produire un décompte précis des heures revendiquées puisque l'employeur considère qu'elles sont comprises dans le forfait appliqué et visé dans le contrat de travail et les bulletins de salaire ; qu'en jugeant que la convention individuelle de forfait était illicite et en déboutant le salarié de sa demande tendant à voir fixer au passif de la liquidation judicaire de la société Spiegel France des créances à titre de rappel de salaire pour les heures supplémentaires accomplies au-delà de 35 heures et de congés payés afférents, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail et l'article 5.7.4 de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire du 12 juillet 2001, étendue par arrêté du 26 juillet 2002 ;

2) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, s'il appartient au salarié soumis à une convention de forfait hebdomadaire en heures déclarée illicite d'étayer ses demandes par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments, doit être considéré comme suffisamment précis, le décompte des heures de travail établi forfaitairement sur la base d'un temps de travail minimum incontestable ; qu'en constatant que le salarié produisait aux débats un décompte mensuel de ses heures de travail et une attestation d'un collègue mentionnant qu'il effectuait de très nombreuses heures de travail dépassant la durée de 48 heures par semaine - ce dont il résultait que le salarié étayait sa demande par la production d'éléments suffisamment précis auxquels l'employeur pouvait répondre -, et en jugeant néanmoins que le salarié devait être débouté de sa demande tendant à voir fixer au passif de la liquidation judicaire de la société Spiegel France des créances à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents, la cour d'appel a violé l'article L.3171-4 du code du travail ;

3) ALORS, EN TOUTE HYPOTHÈSE, QUE la preuve des heures supplémentaires n'incombe à aucune des parties et que le salarié doit seulement préalablement fournir au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en reprochant au salarié de n'avoir produit qu'un simple décompte forfaitaire de ses heures de travail et en exigeant la production d'un décompte correspondant avec exactitude au temps de travail effectif, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi que celle-ci ne prévoit pas et a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

4) ALORS, EN TOUTE HYPOTHÈSE, QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, le juge ne peut, pour rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires, faire peser sur le seul salarié la charge de la preuve des heures supplémentaires en se fondant exclusivement sur l'insuffisance des preuves rapportées par le salarié ; qu'en constatant que le salarié produisait aux débats un décompte de travail mensuel établi pour la période de janvier 2010 à mars 2013 et une attestation d'un collègue mentionnant qu'il effectuait de nombreuses heures de travail excédant 48 heures par semaine, et en jugeant néanmoins que l'ensemble de ces pièces n'était pas de nature à étayer la demande en paiement d'heures supplémentaires et de congés payés afférents, quand il résultait de ses constatations que le salarié avait produit des éléments précis auxquels l'employeur pouvait répondre, la cour d'appel, qui a fait peser sur le salarié la charge de preuve, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

5) ALORS EN TOUTE HYPOTHÈSE, QUE la production d'une attestation d'un collègue de travail, M. B... (cf. production) mentionnant que le salarié effectuait « des horaires de travail allant à l'encontre de toutes les lois du travail », constitue un élément suffisamment précis pour étayer la demande en paiement d'heures supplémentaires ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a fait peser sur le salarié la charge de la preuve et a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

6) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel délaissées (cf. p. 7, production), le salarié faisait valoir que le mandataire judiciaire en charge de la procédure de redressement judiciaire, Maître C..., avait évoqué dans le rapport qu'il avait établi que les 48 heures de travail « devaient constituer une rémunération forfaitaire et non un horaire de travail puisque les livreurs étaient régulièrement amenés à travailler prés de 50 heures par semaine »; qu'en jugeant que le salarié devait être débouté de sa demande tendant à voir fixer au passif de la liquidation judicaire de la société Spiegel France des créances à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents, sans avoir répondu à ce chef pertinent des conclusions de l'exposant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de M. N... tendant à voir fixer sa créance au passif de la société Spiegel France à la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour dépassement de la durée légale du travail et manquement à l'obligation de sécurité ;

AUX MOTIFS QUE par application des articles L. 421-1 et L. 4121-2 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs et veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ; que le salarié soutient que l'employeur aurait manqué à son obligation de sécurité en lui imposant des horaires de travail débouchant sur un dépassement des durées maximales de travail hebdomadaires absolues et relatives telles que fixées aux articles L. 3121-35 et L. 3121-36 du code du travail, dans leur rédaction applicable au litige, ainsi que par la convention collective applicable ; qu'au vu de ce qui précède, il n'est pas établi que ces durées maximales de travail hebdomadaires n'aient pas été respectées ; qu'en l'absence de preuve que le salarié se soit trouvé dans une situation de sa santé physique et mentale, le jugement entreprise doit être infirmé en ce qu'il a fixé à son profit une créance de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts ; que, statuant à nouveau à ce sujet, le salarié doit être débouté de ce chef de demande ;

1) ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'une des branches du premier moyen de cassation devra entraîner, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef de dispositif de l'arrêt ayant rejeté la demande du salarié tendant à voir fixer sa créance au passif de la société Spiegel France à la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour dépassement de la durée légale du travail et manquement à l'obligation de sécurité ;

2) ALORS, EN TOUTE HYPOTHÈSE, QUE la preuve du respect des temps de repos et des durées maximales de travail journalières et hebdomadaires imposés par le droit de l'Union européenne ou fixés par le code du travail incombe entièrement à l'employeur ; qu'en constatant que le contrat de travail prévoyait une durée hebdomadaire forfaitaire de 48 heures de travail ce qui correspondait au maximum de la durée absolue de travail hebdomadaire autorisée par l'article L. 3121-35 du code du travail dans sa rédaction applicable en la cause et que le contrat ne contenait aucune disposition sur le respect de la durée maximale de travail sur 12 semaines prévue aussi bien par l'article L. 3121-36, dans sa rédaction applicable en la cause, que par la convention collective ( respectivement 44 heures et 42 heures), et en décidant néanmoins qu'il n'était pas établi que ces durées maximales de travail hebdomadaires n'auraient pas été respectées, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve du respect des durées maximales de travail imposé par la réglementation européenne et le code du travail et violé les articles L. 3121-35, L. 3121-3, L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail dans leurs rédactions alors applicables.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de M. N... tendant à voir fixer sa créance au passif de la société Spiegel France à la somme de 27.891,48 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE le salarié ayant été débouté de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, le jugement entrepris doit donc nécessairement être infirmé en ce qu'il a fixé à son profit une créance de 15.000 euros au tire de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ; que, statuant à nouveau sur ce point, il doit être débouté de ce chef de demande ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'une des branches du premier moyen de cassation devra entraîner, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef de dispositif de l'arrêt ayant rejeté la demande du salarié tendant à voir fixer sa créance au passif de la société Spiegel France à la somme de 27.891,48 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

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