4 novembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-23.126

Chambre sociale - Formation restreinte hors RNSM/NA

ECLI:FR:CCASS:2020:SO00965

Texte de la décision

SOC.

IK



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 4 novembre 2020




Cassation


Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 965 F-D

Pourvoi n° J 18-23.126




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 NOVEMBRE 2020

La société Leuco production, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 18-23.126 contre l'arrêt rendu le 15 mai 2018 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant à M. T... D..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Corre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Leuco production, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. D..., après débats en l'audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Corre, conseiller référendaire rapporteur, Mme Le Lay, conseiller, Mme Berriat, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 15 mai 2018), M. D... a été engagé le 1er décembre 1999 par la société Leuco production en qualité de technicien bureau étude. Il a été licencié pour une cause qualifiée par l'employeur de réelle et sérieuse le 18 juin 2014.

2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société Leuco production fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement de M. D... était sans cause réelle et sérieuse et de la condamner à lui verser des dommages-intérêts, alors « que le juge ne peut dénaturer la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement notifiée au salarié visait expressément plusieurs griefs, dont avoir abusivement consulté des sites internet ; qu'elle indiquait précisément que « Nous faisons suite à l'entretien préalable qui s'est déroulé en date du 10 juin 2014, au cours duquel vous vous êtes fait assister par Mme U... E.... Malgré les explications que vous nous avez apportées durant cet entretien ainsi que les arguments avancés dans votre lettre du 10 juin 2014, nous vous informons que nous avons décidé de vous notifier votre licenciement pour cause réelle et sérieuse et ce en raison des motifs suivants. Nous avons été amenés à constater au cours de ces derniers mois, un comportement de votre part que nous ne pouvons plus tolérer et ce compte tenu des implications que ce comportement entraîne sur le climat social au sein de notre entreprise. La dégradation de votre comportement a débuté suite à l'affichage de la synthèse des accords conclus dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire pour 2014 et qui portait notamment sur les augmentations salariales décidées. Vous avez, semble-t-il estimé que les augmentations qui avaient été accordées étaient insuffisantes, étant précisé que malgré un contexte difficile (notre chiffre d'affaires pour l'année 2013 s'est situé en recul de 9,6 % au regard de nos objectifs), une augmentation générale de 1 % a été décidée. S'il est de votre droit de ne pas être satisfait de cette augmentation, il n'est pas pour autant acceptable que vous ayez pris prétexte de cette situation pour adopter, depuis lors, un comportement qui n'a cessé de s'aggraver et qui a notamment consisté: - A dénigrer et critiquer, de manière répétée, tant la Direction que vos collègues de travail. Ainsi outre les propos tenus, vous avez encore cru devoir manifester votre mécontentement en apposant un post-it portant la mention « BRAVO » sur le tableau d'affichage réservé à la direction après qu'ait été affiché les augmentations salariales décidées. Dans le même état d'esprit, vous avez également utilisé le tableau d'affichage exclusivement destiné aux manifestations festives afin d'exprimer, une nouvelle fois, votre opinion personnelle relative aux augmentations salariales accordées et ce en réitérant à nouveau l'usage du terme « BRAVO ». Par ailleurs, afin de pouvoir alimenter votre rancoeur à l'égard de la Direction et de vos collègues, vous vous êtes encore cru autorisé, alors que votre supérieur hiérarchique était en déplacement professionnel, à déménager une partie des bureaux de votre service et ce afin, d'une part, de cacher aux autres personnes du service votre écran PC et d'autre pour vous mettre en position de surveillance de l'ensemble du service, ce qui n'est pas tolérable. Ce n'est finalement qu'après que votre supérieur hiérarchique vous ait à plusieurs reprises, mis en demeure de remettre les bureaux en place, que vous avez déféré à sa demande, tous ces déménagements ayant été faits sur les heures de travail, sans compter les nuisances sonores que cette situation a générées. Vous avez également adopté un comportement irrespectueux et grossier en affichant sur votre poste de travail des dessins d'animaux apparaissant avec une carotte dans le derrière, allusion à peine voilée sur le fait que vous estimiez que le personnel se serait « fait avoir ». Votre désapprobation à l'égard des décisions prises en matière d'augmentation salariale vous a encore décidé de « lever le pied », comme en atteste le fait que vous refusez systématiquement toute aide à vos collègues qui vous en font la demande, et ce au prétexte que vous estimez ne devoir faire que ce qui est écrit dans votre contrat de travail et rien de plus, cette situation ayant forcément généré des tensions avec vos collègues, dont la charge de travail était importante et qui se sont sentis méprisés par votre attitude. - Enfin, reflétant encore votre état esprit de totale démotivation et mépris à l'égard de la société, nous avons encore été amenés à constater que vous passez, durant vos heures de travail, une partie importante de votre temps à consulter des sites internet, sans aucun lien avec votre activité professionnelle. Il s'agit en l'espèce d'une violation flagrante de notre charte informatique qui rappelle que l'usage d'internet n'est autorisé qu'à titre professionnel. Or, en l'espèce, s'il est toléré un usage occasionnel à titre privé d'internet, tel n'est pas le cas en l'espèce, puisque nous avons déterminé qu'au cours de la semaine précédant la remise de la lettre de convocation à entretien préalable, la quasi-totalité des connexions internet émanant de votre poste de travail, l'étaient à titre privé, étant encore précisé que le nombre de connexions s'avère également très important. Dans la mesure où vous avez cru devoir persister dans votre comportement, malgré les différentes observations orales que nous vous avions faites, et que vous avez totalement ignorées, votre comportement ne cessant de se dégrader, nous nous voyons donc contraints de vous notifier votre licenciement et ce compte tenu, notamment, de la détérioration du climat social que votre attitude a engendrée. Alors que votre comportement aurait pu justifier un licenciement pour faute grave, nous avons néanmoins décidé, en raison de votre ancienneté, de vous notifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, de sorte que votre préavis, d'une durée de deux mois, débutera à compter de la première présentation du présent courrier. Nous vous précisons également que nous vous dispensons d'exécuter ce préavis. Nous vous rappelons que vous disposez, à la date de rupture de votre contrat, d'un crédit de 120 heures de formation au titre du droit individuel à la formation. L'ensemble des documents post-contractuels, tels que le certificat de travail, l'attestation Pôle emploi et le solde de tout compte seront établis à la fin de votre préavis. Nous vous rappelons enfin que vous disposez de la possibilité de bénéficier, après la rupture de votre contrat de travail des couvertures complémentaires santé et prévoyance applicables au sein de notre société, et ce pendant une durée de 9 mois pour la prévoyance et de 12 mois pour la santé. Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées » ; qu'en retenant que la lettre de licenciement indiquait seulement que « Nous avons été amenés à constater au cours de ces derniers mois, un comportement de votre part que nous ne pouvons plus tolérer et ce compte tenu des implications que ce comportement entraîne sur le climat social au sein de notre entreprise. La dégradation de votre comportement a débuté suite à l'affichage de la synthèse des accords conclus dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire pour 2014 et qui portait notamment sur les augmentations salariales décidées. Vous avez, semble-t-il estimé que les augmentations qui avaient été accordées étaient insuffisantes, étant précisé que malgré un contexte difficile (notre chiffre d'affaires pour l'année 2013 s'est situé en recul de 9,6 % au regard de nos objectifs), une augmentation générale de 1 % a été décidée. S'il est de votre droit de ne pas être satisfait de cette augmentation, il n'est pas pour autant acceptable que vous ayez pris prétexte de cette situation pour adopter, depuis lors, un comportement qui n'a cessé de s'aggraver et qui a notamment consisté: A dénigrer et critiquer, de manière répétée, tant la Direction que vos collègues de travail. Ainsi outre les propos tenus, vous avez encore cru devoir manifester votre mécontentement en apposant un post-it portant la mention « BRAVO » sur le tableau d'affichage réservé à la direction après qu'ait été affiché les augmentations salariales décidées. Dans la mesure où vous avez cru devoir persister dans votre comportement, malgré les différentes observations orales que nous vous avions faites, et que vous avez totalement ignorées, votre comportement ne cessant de se dégrader, nous nous voyons donc contraints de vous notifier votre licenciement et ce compte tenu, notamment, de la détérioration du climat social que votre attitude a engendrée. Alors que votre comportement aurait pu justifier un licenciement pour faute grave, nous avons néanmoins décidé, en raison de votre ancienneté, de vous notifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, de sorte que votre préavis, d'une durée de deux mois, débutera à compter de la première présentation du présent courrier. Nous vous précisons également que nous vous dispensons d'exécuter ce préavis » pour en déduire que la lettre de licenciement reprochait seulement au salarié d'avoir tenu des propos dénigrants et apposé un post-it sur un tableau d'affichage, la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement, et partant, a méconnu le principe susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

4. Pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt, après avoir reproduit la lettre de licenciement, à l'exception de la page 2, retient que celle-ci, qui fixe les limites du litige, reproche seulement au salarié d'avoir tenu des propos dénigrants et apposé un « post-it » sur un tableau d'affichage.

5. En statuant ainsi, alors que la lettre de licenciement reprochait en outre notamment au salarié des consultations abusives de sites internet à titre privé, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Colmar autrement composée ;

Condamne M. D... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Leuco production

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de M. D... était sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la société Leuco Production à verser au salarié la somme de 22 000 euros à titre de dommages et intérêts, d'AVOIR condamné l'employeur aux entiers dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser au salarié la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE « En l'espèce, la société Leuco Production reproche dans ses conclusions à M. D... les faits suivants :

- il aurait tenu des propos dénigrants à l'égard de la direction et de certains de ses collègues,

- il aurait porté la mention manuscrite « bravo » sur le tableau d'affichage annonçant une augmentation générale des salaires de 1%,

- il aurait pendu une carotte à une plante et affiché sur son poste de travail des images de lapin, âne et mouton avec une carotte dans les fesses,

- il aurait fait un usage abusif d'internet en consultant durant de longues durées au cours des heures de travail et à partir de son ordinateur professionnel des sites non professionnels,

- il aurait déménagé une partie de ses bureaux afin de cacher aux autres personnels son écran d'ordinateur et pour se mettre dans une position de surveillance de l'ensemble du service,

- il aurait refusé d'aider ses collègues.

La lettre de licenciement est ainsi libellée :

« Nous avons été amenés à constater au cours de ces derniers mois, un comportement de votre part que nous ne pouvons plus tolérer et ce compte tenu des implications que ce comportement entraîne sur le climat social au sein de notre entreprise.

La dégradation de votre comportement a débuté suite à l'affichage de la synthèse des accords conclus dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire pour 2014 et qui portait notamment sur les augmentations salariales décidées.

Vous avez, semble-t-il estimé que les augmentations qui avaient été accordées étaient insuffisantes, étant précisé que malgré un contexte difficile (notre chiffre d'affaires pour l'année 2013 s'est situé en recul de 9,6 % au regard de nos objectifs), une augmentation générale de 1 % a été décidée.

S'il est de votre droit de ne pas être satisfait de cette augmentation, il n'est pas pour autant acceptable que vous ayez pris prétexte de cette situation pour adopter, depuis lors, un comportement qui n'a cessé de s'aggraver et qui a notamment consisté :

A dénigrer et critiquer, de manière répétée, tant la Direction que vos collègues de travail.

Ainsi outre les propos tenus, vous avez encore cru devoir manifester votre mécontentement en apposant un post-it portant la mention « BRAVO » sur le tableau d'affichage réservé à la direction après qu'ait été affiché les augmentations salariales décidées.

Dans la mesure où vous avez cru devoir persister dans votre comportement, malgré les différentes observations orales que nous vous avions faites, et que vous avez totalement ignorées, votre comportement ne cessant de se dégrader, nous nous voyons donc contraints de vous notifier votre licenciement et ce compte tenu, notamment, de la détérioration du climat social que votre attitude a engendrée.

Alors que votre comportement aurait pu justifier un licenciement pour faute grave, nous avons néanmoins décidé, en raison de votre ancienneté, de vous notifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, de sorte que votre préavis, d'une durée de deux mois, débutera à compter de la première présentation du présent courrier.

Nous vous précisons également que nous vous dispensons d'exécuter ce préavis ».

La Cour rappelle que la lettre de licenciement fixe les limites du litige. Elle doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables.

En l'espèce, seuls deux des faits reprochés au salarié sont énoncés de manière suffisamment précise dans la lettre de licenciement : le fait d'avoir tenu des propos dénigrants à l'égard de la direction et de ses collègues et d'avoir apposé un post-it avec la mention « BRAVO » sur le tableau d'affichage indiquant les augmentations salariales décidées.

Le commentaire apposé sur le tableau d'affichage n'est pas contesté par M. D....

Ce commentaire n'a toutefois pas excédé la liberté d'expression et d'opinion du salarié.

S'agissant des propos dénigrants, les attestations produites par l'employeur ne sont pas suffisamment précises et objectives pour caractériser un manquement à ce titre.

En tout état de cause, ces faits sont insuffisants pour caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement, lequel est également disproportionné au regard de l'ancienneté du salarié et de l'absence d'antécédent disciplinaire.

Le licenciement de M. D... est donc sans cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions.

Compte tenu de son âge, de son ancienneté et en l'absence d'autres éléments relatifs à son préjudice, il sera alloué à M. D... la somme de 22 000 euros à titre des dommages-intérêts.

L'équité commande d'allouer à M. D... la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter la demande faite à ce titre par la société Leuco Production.

Cette société sera condamnée aux dépens de la procédure de première instance et d'appel » ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement notifiée au salarié visait expressément plusieurs griefs, dont avoir abusivement consulté des sites internet ; qu'elle indiquait précisément que « Nous faisons suite à l'entretien préalable qui s'est déroulé en date du 10 juin 2014, au cours duquel vous vous êtes fait assister par Mme U... E....

Malgré les explications que vous nous avez apportées durant cet entretien ainsi que les arguments avancés dans votre lettre du 10 juin 2014, nous vous informons que nous avons décidé de vous notifier votre licenciement pour cause réelle et sérieuse et ce en raison des motifs suivants.

Nous avons été amenés à constater au cours de ces derniers mois, un comportement de votre part que nous ne pouvons plus tolérer et ce compte tenu des implications que ce comportement entraîne sur le climat social au sein de notre entreprise.

La dégradation de votre comportement a débuté suite à l'affichage de la synthèse des accords conclus dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire pour 2014 et qui portait notamment sur les augmentations salariales décidées.

Vous avez, semble-t-il estimé que les augmentations qui avaient été accordées étaient insuffisantes, étant précisé que malgré un contexte difficile (notre chiffre d'affaires pour l'année 2013 s'est situé en recul de 9,6 % au regard de nos objectifs), une augmentation générale de 1 % a été décidée.

S'il est de votre droit de ne pas être satisfait de cette augmentation, il n'est pas pour autant acceptable que vous ayez pris prétexte de cette situation pour adopter, depuis lors, un comportement qui n'a cessé de s'aggraver et qui a notamment consisté :

- A dénigrer et critiquer, de manière répétée, tant la Direction que vos collègues de travail.

Ainsi outre les propos tenus, vous avez encore cru devoir manifester votre mécontentement en apposant un post-it portant la mention « BRAVO » sur le tableau d'affichage réservé à la direction après qu'ait été affiché les augmentations salariales décidées.

Dans le même état d'esprit, vous avez également utilisé le tableau d'affichage exclusivement destiné aux manifestations festives afin d'exprimer, une nouvelle fois, votre opinion personnelle relative aux augmentations salariales accordées et ce en réitérant à nouveau l'usage du terme « BRAVO ».

Par ailleurs, afin de pouvoir alimenter votre rancoeur à l'égard de la Direction et de vos collègues, vous vous êtes encore cru autorisé, alors que votre supérieur hiérarchique était en déplacement professionnel, à déménager une partie des bureaux de votre service et ce afin, d'une part, de cacher aux autres personnes du service votre écran PC et d'autre pour vous mettre en position de surveillance de l'ensemble du service, ce qui n'est pas tolérable.

Ce n'est finalement qu'après que votre supérieur hiérarchique vous ait à plusieurs reprises, mis en demeure de remettre les bureaux en place, que vous avez déféré à sa demande, tous ces déménagements ayant été faits sur les heures de travail, sans compter les nuisances sonores que cette situation a générées.

Vous avez également adopté un comportement irrespectueux et grossier en affichant sur votre poste de travail des dessins d'animaux apparaissant avec une carotte dans le derrière, allusion à peine voilée sur le fait que vous estimiez que le personnel se serait « fait avoir ».

Votre désapprobation à l'égard des décisions prises en matière d'augmentation salariale vous a encore décidé de « lever le pied », comme en atteste le fait que vous refusez systématiquement toute aide à vos collègues qui vous en font la demande, et ce au prétexte que vous estimez ne devoir faire que ce qui est écrit dans votre contrat de travail et rien de plus, cette situation ayant forcément généré des tensions avec vos collègues, dont la charge de travail était importante et qui se sont sentis méprisés par votre attitude.

- Enfin, reflétant encore votre état esprit de totale démotivation et mépris à l'égard de la société, nous avons encore été amenés à constater que vous passez, durant vos heures de travail, une partie importante de votre temps à consulter des sites internet, sans aucun lien avec votre activité professionnelle.

Il s'agit en l'espèce d'une violation flagrante de notre charte informatique qui rappelle que l'usage d'internet n'est autorisé qu'à titre professionnel.

Or, en l'espèce, s'il est toléré un usage occasionnel à titre privé d'internet, tel n'est pas le cas en l'espèce, puisque nous avons déterminé qu'au cours de la semaine précédant la remise de la lettre de convocation à entretien préalable, la quasi-totalité des connexions internet émanant de votre poste de travail, l'étaient à titre privé, étant encore précisé que le nombre de connexions s'avère également très important.

Dans la mesure où vous avez cru devoir persister dans votre comportement, malgré les différentes observations orales que nous vous avions faites, et que vous avez totalement ignorées, votre comportement ne cessant de se dégrader, nous nous voyons donc contraints de vous notifier votre licenciement et ce compte tenu, notamment, de la détérioration du climat social que votre attitude a engendrée.

Alors que votre comportement aurait pu justifier un licenciement pour faute grave, nous avons néanmoins décidé, en raison de votre ancienneté, de vous notifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, de sorte que votre préavis, d'une durée de deux mois, débutera à compter de la première présentation du présent courrier.

Nous vous précisons également que nous vous dispensons d'exécuter ce préavis.

Nous vous rappelons que vous disposez, à la date de rupture de votre contrat, d'un crédit de 120 heures de formation au titre du droit individuel à la formation.

L'ensemble des documents post-contractuels, tels que le certificat de travail, l'attestation Pôle Emploi et le solde de tout compte seront établis à la fin de votre préavis.

Nous vous rappelons enfin que vous disposez de la possibilité de bénéficier, après la rupture de votre contrat de travail des couvertures complémentaires santé et prévoyance applicables au sein de notre société, et ce pendant une durée de 9 mois pour la prévoyance et de 12 mois pour la santé. Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées » ;

qu'en retenant que la lettre de licenciement indiquait seulement que « Nous avons été amenés à constater au cours de ces derniers mois, un comportement de votre part que nous ne pouvons plus tolérer et ce compte tenu des implications que ce comportement entraîne sur le climat social au sein de notre entreprise. La dégradation de votre comportement a débuté suite à l'affichage de la synthèse des accords conclus dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire pour 2014 et qui portait notamment sur les augmentations salariales décidées.

Vous avez, semble-t-il estimé que les augmentations qui avaient été accordées étaient insuffisantes, étant précisé que malgré un contexte difficile (notre chiffre d'affaires pour l'année 2013 s'est situé en recul de 9,6 % au regard de nos objectifs), une augmentation générale de 1 % a été décidée.

S'il est de votre droit de ne pas être satisfait de cette augmentation, il n'est pas pour autant acceptable que vous ayez pris prétexte de cette situation pour adopter, depuis lors, un comportement qui n'a cessé de s'aggraver et qui a notamment consisté :

A dénigrer et critiquer, de manière répétée, tant la Direction que vos collègues de travail.

Ainsi outre les propos tenus, vous avez encore cru devoir manifester votre mécontentement en apposant un post-it portant la mention « BRAVO » sur le tableau d'affichage réservé à la direction après qu'ait été affiché les augmentations salariales décidées.

Dans la mesure où vous avez cru devoir persister dans votre comportement, malgré les différentes observations orales que nous vous avions faites, et que vous avez totalement ignorées, votre comportement ne cessant de se dégrader, nous nous voyons donc contraints de vous notifier votre licenciement et ce compte tenu, notamment, de la détérioration du climat social que votre attitude a engendrée.

Alors que votre comportement aurait pu justifier un licenciement pour faute grave, nous avons néanmoins décidé, en raison de votre ancienneté, de vous notifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse, de sorte que votre préavis, d'une durée de deux mois, débutera à compter de la première présentation du présent courrier.

Nous vous précisons également que nous vous dispensons d'exécuter ce préavis » pour en déduire que la lettre de licenciement reprochait seulement au salarié d'avoir tenu des propos dénigrants et apposé un post-it sur un tableau d'affichage, la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement, et partant, a méconnu le principe susvisé ;

2°) ALORS en tout état de cause QUE constitue un grief suffisamment précis et matériellement vérifiable, que l'employeur peut ensuite préciser, le fait de reprocher à un salarié d'avoir fait un usage abusif d'internet en consultant durant de longues heures, pendant son temps de travail et à partir de son ordinateur professionnel, des sites internet non professionnels, d'avoir pendu une carotte à un arbre et d'avoir affiché sur son poste de travail des images particulièrement grossières de lapin, d'âne et de mouton, ainsi que d'avoir déménagé une partie de ses bureaux afin de cacher aux autres membres du personnel son écran d'ordinateur et pour se mettre dans une position de surveillance de l'ensemble du service ; qu'en jugeant néanmoins que seuls deux des faits reprochés au salarié – le fait d'avoir tenu des propos dénigrants à l'égard de la direction et de ses collègues et d'avoir apposé un post-it avec la mention « Bravo » sur le tableau d'affichage – étaient énoncés de manière suffisamment précise dans la lettre de licenciement, , la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, aux termes de son attestation, M. S... indiquait que M. D... s'était à plusieurs reprises adressé à certaines personnes sur un ton particulièrement désagréable et dénigrant en indiquant notamment à l'un de ses collègues « je suis technicien, toi tu es un ouvrier », en disant d'un autre qu'il « ne fait rien. C'est un fainéant », et d'un autre encore qu'« il ne comprend rien au produit, et qu'il n'est pas à sa place dans sa fonction » ; qu'en jugeant néanmoins, que les attestations produites aux débats à l'appui du grief tiré des propos dénigrants tenus par le salarié n'étaient pas suffisamment précises et objectives, la cour d'appel a dénaturé l'attestation de M. S... et partant, a violé le principe susvisé ;

4°) ALORS QUE commet une faute justifiant son licenciement le salarié qui tient des propos dénigrants à l'encontre de ses supérieurs hiérarchiques ou de ses collègues de travail, peu important son ancienneté ainsi que l'absence de passé disciplinaire ; qu'en jugeant qu'à les supposer admis, les propos dénigrants tenus par le salarié ne justifiaient pas son licenciement, motifs pris de son ancienneté et de l'absence d'antécédent disciplinaire, la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1235-1, et L. 1235-3 du code du travail.

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